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23/06/2016 | BELGIQUE | N°C.13.0573.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 juin 2016, C.13.0573.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.13.0573.N

H. D.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. N. P.,

2. W. G.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 15 septembre2011 par la cour d'appel de Gand.

L'avocat general Christian Vandewal a depose des conclusions ecrites le 26janvier 2016.

Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.

L'avocat general Christian Vandewal a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presen

te un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 318 et 331quater du Code civil ;

- article...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.13.0573.N

H. D.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. N. P.,

2. W. G.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 15 septembre2011 par la cour d'appel de Gand.

L'avocat general Christian Vandewal a depose des conclusions ecrites le 26janvier 2016.

Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.

L'avocat general Christian Vandewal a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 318 et 331quater du Code civil ;

- articles 2, 820 à 827 et 1044 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque decrete le desistement d'instance que le demandeur avaitformule par une lettre de son conseil du 10 decembre 2009, apres avoirrefuse de declarer l'invalidite de ce desistement que le demandeur avaitinvoquee dans des conclusions ulterieures, aux motifs suivants :

« 3. Le desistement

La lettre du 10 decembre 2009 contient expressement le desistementd'instance du demandeur conformement à l'article 820 du Code judiciaire.

Par un tel desistement, la partie renonce à la procedure qu'elle aengagee au principal ou incidemment, sans toutefois renoncer au fond dudroit sur lequel se fonde l'action.

Il s'ensuit que toute reference faite par le demandeur à l'article 823,alinea 1er, du Code judiciaire, pour affirmer que le desistement preciteserait invalide, est sans pertinence. Le desistement formule dans lalettre du 10 decembre 2009 est au contraire regi par l'alinea 2 del'article 823 du Code judiciaire, qui dispose de maniere expresse que« le desistement d'instance est admis en toutes matieres ».

L'argument suivant lequel l'action porte sur un droit dont on ne peutdisposer (à savoir la filiation) ne deroge pas à ce qui precede.

L'indisponibilite du droit lui-meme n'implique en effet pas que ledesistement d'une instance ayant ce droit pour objet ne pourrait avoirlieu, meme si cela implique que le droit ne pourra plus etre exerce par lasuite, par exemple en raison de la prescription (qui etait dejà acquiseselon le premier juge au moment de la citation introductive d'instance).

(...)

Il convient pour la cour (d'appel) de decreter ce desistement ».

Griefs

1. L'article 331quater du Code civil dispose que les actions relatives àla filiation ne peuvent faire l'objet de renonciation. Le droit d'exercerune telle action releve en effet de l'ordre public. Le droit à lacontestation de la paternite consacre par l'article 318 du Code civilconstitue un tel droit auquel il ne peut etre renonce.

En vertu de l'article 823, alinea 1er, du Code judiciaire, le desistementd'action, vise à l'article 821 de ce code, ne peut avoir lieu que s'ilporte sur un droit auquel il est permis de renoncer, et dont la partiepeut disposer.

2. L'article 820 du Code judiciaire dispose que, par le desistementd'instance, la partie renonce à la procedure qu'elle a engagee auprincipal ou incidemment.

Aux termes de l'article 820, alinea 2, le desistement d'instancen'entraine pas renonciation au fond du droit. Pour cette raison, l'article823, alinea 1er, du Code judiciaire dispose que le desistement d'instanceest admis en toutes matieres.

3. Cette regle doit, toutefois, etre nuancee à la lumiere de l'article 2du Code judiciaire.

En vertu de cette disposition, les regles enoncees dans ce code nes'appliquent pas aux procedures regies par des dispositions legales ouprincipes de droit dont l'application n'est pas compatible avec celle desdispositions dudit code.

4. Il suit de ce qui precede que, lorsqu'un desistement d'instance a enrealite pour consequence que le droit ne peut plus etre exerce, cedesistement d'instance n'est pas permis si le droit sous-jacent est undroit auquel il ne peut etre renonce.

Il en est ainsi d'un desistement d'instance en degre d'appel, lorsquel'appel est dirige contre un jugement qui rejette une action encontestation de paternite pour cause de tardivete et qu'aucun nouvel appelne peut etre interjete, par exemple parce que le delai est expire.

En pareil cas, un desistement d'instance en degre d'appel revient en effetà un acquiescement à la decision qui laisse intacte la paternite del'epoux legal (article 1044 du Code judiciaire) et donc à unerenonciation non-admise au droit à la contestation de la paternite.

5. En l'espece, il est etabli que le premier jugement du 29 septembre 2008a declare l'action en contestation de paternite introduite par ledemandeur irrecevable pour cause de tardivete.

Il est etabli en outre que le demandeur a interjete contre ce jugement unappel recevable.

Il n'etait toutefois pas conteste que le premier jugement a ete signifiele 24 avril 2009 au demandeur en cassation, ce qui signifie qu'aucunnouvel appel recevable ne pouvait encore etre forme apres la lettre du 10decembre 2009 dans laquelle le demandeur declarait se desister del'instance en degre d'appel.

Il s'ensuit que le desistement d'instance en degre d'appel du demandeur ala meme consequence qu'une renonciation à un droit à la contestation dela paternite.

6. Eu egard aux articles 331quater du Code civil et 823, alinea 2, du Codejudiciaire, qui ne permettent pas de renoncer à un droit à lacontestation de la paternite, et à l'article 2 du Code judiciaire, envertu duquel l'article 823, alinea 1er, du Code judiciaire estinapplicable lorsque le desistement d'instance a les consequences d'unerenonciation à un droit qui ne peut faire l'objet d'une renonciation,l'arret attaque ne pouvait legalement decreter le desistement d'instance.

En decretant ce desistement, sur la base d'une application litterale etsans nuance de l'article 823, alinea 2, du Code judiciaire, l'arretattaque viole les dispositions legales indiquees au moyen.

III. La decision de la Cour

1. Aux termes de l'article 820 du Code judiciaire, par le desistementd'instance, la partie renonce à la procedure qu'elle a engagee auprincipal ou incidemment. Le desistement d'instance n'entraine pasrenonciation au fond du droit.

Aux termes de l'article 821 du Code civil, par le desistement d'action, ledemandeur renonce tant à la procedure qu'au fond du droit. Le desistementd'action entraine l'extinction du droit d'agir relativement à lapretention dont le juge avait ete saisi.

L'article 822 du Code judiciaire dispose que par le desistement d'un actede procedure, la partie renonce aux effets qui en resultent pour elle.

Aux termes de l'article 823, alinea 1er, du Code judiciaire, ledesistement d'action ne peut avoir lieu que s'il porte sur un droit auquelil est permis de renoncer, et dont la partie peut disposer.

Le desistement d'instance est, toutefois, en vertu de l'article 823,alinea 2, du meme code, admis en toutes matieres.

Aux termes de l'article 826, alinea 1er, de ce code, le desistementd'instance, lorsqu'il a ete accepte, emporte de plein droit consentementque les choses soient remises, de part et d'autre, en meme etat que s'iln'y avait pas eu d'instance.

2. Il suit de ces dispositions que le desistement d'instance n'empeche pasd'introduire l'action à nouveau ulterieurement à moins que celle-ci soiteteinte pour un autre motif.

Il s'ensuit que le desistement d'instance en degre d'appel n'implique pasnecessairement que la partie a l'intention certaine d'exprimer sonadhesion à la decision. Toutefois, lorsqu'au moment du desistementd'instance en degre d'appel, un appel ne peut plus etre interjete ànouveau en raison de l'expiration du delai, ce desistement equivaut à unacquiescement au jugement du premier juge.

3. En vertu de l'article 331quater du Code civil, qui dispose que lesactions relatives à la filiation ne peuvent faire l'objet derenonciation, il ne peut etre renonce à une action en contestation depaternite visee à l'article 318 du Code civil.

4. Il suit de ce qui precede qu'en cas d'action en contestation depaternite, le desistement d'instance en degre d'appel ne peut avoir lieulorsqu'un nouvel appel ne peut plus etre forme à ce moment en raison del'expiration du delai d'appel. Le desistement d'instance en degre d'appelequivaut, en effet, dans ce cas à un acquiescement au jugement et donc àune renonciation prohibee à l'action.

5. L'arret constate que :

- le 31 octobre 2006, la defenderesse a accouche d'un fils, Jelle ;

- par une citation du 16 novembre 2007, le demandeur a introduit uneaction en contestation de paternite ;

- par le jugement du 29 septembre 2008, le premier juge a declare l'actiondu demandeur en contestation de paternite de l'enfant Jelle inadmissibleen raison de sa tardivete ;

- le 25 mai 2009, le demandeur a forme un appel en temps utile et reguliercontre le jugement du 29 septembre 2008 ;

- par lettre du 10 decembre 2009, le conseil du demandeur a indique à lacour d'appel que le demandeur en cette cause s'etait « desiste del'instance conformement à l'article 820 du Code judiciaire » ;

- le 14 decembre 2009, le conseil de la defenderesse a, pour autant que debesoin, marque son accord au desistement d'instance du demandeur ;

- par la suite, le demandeur a affirme dans ses conclusions ne pas s'etredesiste de son appel.

Il ressort, en outre, des pieces de la procedure que les parties necontestaient pas que le jugement du premier juge avait ete signifie audemandeur le 24 avril 2009.

6. En considerant le desistement d'instance du demandeur comme valable eten decretant ce desistement, l'arret attaque ne justifie pas legalement sadecision.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Beatrijs Deconinck, president, lepresident de section Alain Smetryns, les conseillers Koen Mestdagh, BartWylleman et Koenraad Moens, et prononce en audience publique duvingt-trois juin deux mille seize par le president de section BeatrijsDeconinck, en presence de l'avocat general Christian Vandewal, avecl'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Mireille Delange ettranscrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le conseiller,

Requete

23 JUIN 2016 C.13.0573.N/1

Requete/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.13.0573.N
Date de la décision : 23/06/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-06-23;c.13.0573.n ?
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