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15/04/2016 | BELGIQUE | N°C.15.0126.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 15 avril 2016, C.15.0126.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0126.F

* VILLE DE BRUXELLES, representee par son college des bourgmestre etechevins, dont les bureaux sont etablis à Bruxelles, en l'hotel deville, Grand-Place, 1,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise,149, ou il est fait election de domicile,

* contre

M.A.N.G. SPORT, societe privee à responsabilite limitee dont le siege social est etabli à Bruxelles, rue du Marche aux herbe

s, 105,

* defenderesse en cassation.

* I. La procedure devant la Cour

VIII. Le pourvoi en...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0126.F

* VILLE DE BRUXELLES, representee par son college des bourgmestre etechevins, dont les bureaux sont etablis à Bruxelles, en l'hotel deville, Grand-Place, 1,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise,149, ou il est fait election de domicile,

* contre

M.A.N.G. SPORT, societe privee à responsabilite limitee dont le siege social est etabli à Bruxelles, rue du Marche aux herbes, 105,

* defenderesse en cassation.

* I. La procedure devant la Cour

VIII. Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le14 mai 2013 par le tribunal de police de Bruxelles, statuant endernier ressort.

IX. Le conseiller Didier Batsele a fait rapport.

X. L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

XI. II. Le moyen de cassation

XII. Dans la requete en cassation, jointe au present arret encopie certifiee conforme, la demanderesse presente unmoyen.

XIII. III. La decision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la premiere branche :

En vertu de l'article 135, S: 2, alinea 1er, de la nouvelle loicommunale, les communes ont pour mission de faire jouir leshabitants des avantages d'une bonne police, notamment de laproprete, de la salubrite, de la surete et de la tranquillitedans les rues, lieux et edifices publics.

Les lieux publics s'entendent de tous les lieux qui sontaccessibles au public, cet acces fut-il limite dans l'espace oudans le temps.

Le jugement attaque, qui considere qu'en etendant l'applicationdu reglement general de police litigieux « à certains lieuxprives accessibles au public tels les galeries et passagesetablis sur une assiette privee, la [demanderesse] a outrepasseles pouvoirs que lui confere l'article 135 de la nouvelle loicommunale », ne justifie pas legalement sa decision de refuserl'application de ce reglement.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner les deuxieme et troisieme branches,qui ne sauraient entrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaque, sauf en tant qu'il rec,oit lerecours ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge dujugement partiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le jugedu fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant le tribunal de police duBrabant wallon.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, les conseillers Didier Batsele, Mireille Delange,Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du quinze avril deux mille seize par le president desection Christian Storck, en presence de l'avocat general ThierryWerquin, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+-----------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
|-----------------+------------+----------------|
| M. Delange | D. Batsele | Chr. Storck |
+-----------------------------------------------+

* 00130694

REQUETE EN CASSATION

POUR : La VILLE DE BRUXELLES, dont les bureaux sont etablis enl'Hotel de Ville de et à 1000 Bruxelles, Grand-Place, 1,

demanderesse en cassation,

assistee et representee par Me Paul Alain Foriers, avocat à laCour de cassation soussigne, dont le cabinet est etabli à1050-Bruxelles, avenue Louise, 149 (Bte 20), ou il est faitelection de domicile.

CONTRE : La societe privee à responsabilite limitee M.A.N.G.SPORT CO, dont le siege social est etabli à 1000 Bruxelles, RueMarche aux herbes, 105, inscrite à la BCE sous le numero0867.245.524,

defenderesse en cassation.

* *

*

A Messieurs les Premier President et President, Mesdames etMessieurs les Conseillers composant la Cour de cassation deBelgique,

Messieurs,

Mesdames,

La demanderesse en cassation a l'honneur de deferer à votrecensure le jugement rendu contradictoirement entre parties, le 14mai 2013, par la troisieme chambre du tribunal de police deBruxelles (R.G. 12A43).

*

Les faits et les antecedents de la cause peuvent etre resumescomme il suit.

Le litige est relatif à un recours introduit par la SPRL M.A.N.GSPORT CO (ici la defenderesse en cassation) par requete rec,ue augreffe le 16 decembre 2011 tendant à obtenir la reformationd'une decision administrative prise le 17 novembre 2011 par lesecretaire de la Ville de Bruxelles (ici la demanderesse encassation) lui infligeant une amende de 25 EUR sur pied d'uneviolation de l'article 42 du Reglement General de Police de laVille de Bruxelles. Il lui etait reproche d'avoir entrepose, sansautorisation, sur l'espace public, des tourniquets, mannequins,tringles ou presentoirs dans le passage de la Galerie Agora.

Par un jugement du 14 mai 2013, le tribunal de police deBruxelles declare le recours recevable et fonde, en consequence,met à neant la decision prononcee le 17 novembre 2011 etcondamne la Ville de Bruxelles aux depens.

*

A l'appui du pourvoi qu'elle forme contre le jugement du 14 mai2013, la demanderesse a l'honneur d'invoquer le moyen unique decassation suivant.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Dispositions legales violees

- l'article 135, S: 2, de la nouvelle loi communale, codifiee parl'arrete royal du 24 juin 1988 et ratifiee par la loi du 26 mai1989, tel qu'il a ete insere par la loi du 27 mai 1989 ;

- les articles 1 et 42 du reglement general de police de la Villede Bruxelles ;

- les articles 149 et 159 de la Constitution ;

- le principe general du droit relatif à l'autonomie des partiesdans le proces civil, dit principe dispositif, en vertu duquelles parties ont en matiere civile le droit de determinerelles-memes les limites du litige, consacre notamment parl'article 1138, 2DEG, du Code judiciaire ;

- le principe general du droit relatif au respect des droits dela defense.

Decision et motifs critiques

Le jugement attaque declare recevable et fonde l'appel de ladefenderesse, en consequence, met à neant la decision de lademanderesse du 17 novembre 2011 par laquelle une amendeadministrative a ete infligee à la defenderesse et condamne lademanderesse aux depens.

Le jugement fonde sa decision sur les considerations suivantes(6eme feuillet) :

« 3. Application du Reglement General de Police ratione loci

Pour s'assurer, la copropriete comprenant la Galerie Agora a dudemander l'avis des services de pompiers, lequel avis anecessairement ete positif pour permettre et continuerl'exploitation.

Les services de pompiers auront vu la disposition et la presencedes presentoirs devant les echoppes et auront estime que lepassage etait suffisant pour permettre une evacuation en cas desinistre.

Il s'agit d'une propriete privee dont l'acces au public estautorise pendant une partie de la journee ; le Tribunal estimeque le Reglement General de Police de la Ville de Bruxelles n'estpas d'application.

L'article 135, S: 2, de la Nouvelle loi communale prevoit :« les communes ont pour mission de faire jouir les habitants desavantages d'une bonne police, notamment de la proprete, de lasalubrite, de la surete et de la tranquillite dans les rues,lieux et edifices publics (souligne par le tribunal). »

Cet article pose donc comme regle que la commune ne peut pasreglementer un terrain prive (...).

L'autorite communale ne peut prendre des mesures relatives à unepropriete privee que si les causes qui y ont leur siege sepropagent en dehors et sont de nature à nuire à la santepublique, à la securite publique, ... (...), ce qui n'est pas lecas en l'espece.

En etendant l'application de son reglement communal à certainslieux prives accessibles au public telles les galeries etpassages etablis sur une assiette privee (article 1 point 3 duReglement General de Police), la (demanderesse) a outrepasse lespouvoirs que lui confere l'article 135 de la nouvelle loicommunale.

L'article 1, point 3 du Reglement General de Police etantillegal, le tribunal refuse son application (article 159 de laConstitution) ».

Griefs

1. L'article 42 du reglement general de police de la Ville deBruxelles interdit, sauf autorisation de l'autorite competente,l'occupation privative de l'espace public au niveau, au-dessus ouau-dessous du sol, notamment par tout objet fixe, accroche,suspendu, depose ou abandonne, y compris en embarrassant l'espacepublic avec des materiaux, des echafaudages ou d'autres objetsquelconques.

L'article 1er du reglement general de police de la Ville deBruxelles definit la notion d' « espace public » comme etant :

1. la voirie, en ce compris les accotements et les trottoirs ;

2. les parcs, jardins publics, plaines et aires de jeux ;

3. les galeries et passages etablis sur assiette privee,accessibles au public.

Ce reglement est pris en vertu de l'article 135, S: 2, de lanouvelle loi communale qui donne aux communes la « mission defaire jouir les habitants des avantages d'une bonne police,notamment de la proprete, de la salubrite, de la surete et de latranquillite dans les rues, lieux et edifices publics » etconfie à leur vigilance « tout ce qui interesse la surete et lacommodite du passage dans les rues, quais, places et voiespubliques ».

Premiere branche

1. Par lieu public au sens de l'article 135, S: 2, de la nouvelleloi communale, il y a lieu d'entendre tout lieu ou le public alibre acces.

Les pouvoirs de police administrative des communes, resultant del'article 135, S: 2, de la nouvelle loi communale, ne dependentainsi pas de la nature publique ou privee du terrain maiss'etendent egalement aux lieux prives accessibles au public telsque les galeries et passages etablis sur une assiette privee.

2. Il s'ensuit qu'en decidant que le Reglement General de Policede la demanderesse qui s'applique à la Galerie Agora qui est une« propriete privee dont l'acces au public est autorise pendantune partie de la journee » est illegal en raison d'un exces depouvoir et ne peut etre applique, le jugement attaque

1) viole la notion legale de « lieu public » telle queconsacree par l'article 135, S:2, de la nouvelle loi communaleainsi que cette disposition, en decidant que cette notion ne visepas les lieux prives accessibles au public tels que les galerieset passages etablis sur une assiette privee,

2) viole l'article 135, S:2, de la nouvelle loi communale, enconsiderant que la demanderesse a outrepasse les pouvoirs que luiconfere cette disposition en etendant l'application de sonreglement communal à certains lieux prives accessibles au publictels que les galeries et passages etablis sur une assietteprivee,

3) viole des lors les articles 1 et 42 du reglement general depolice de la Ville de Bruxelles et l'article 159 de laConstitution, en refusant de donner effet à ces dispositions dureglement general de police de la Ville de Bruxelles alors quecelles-ci ne sont pas contraires à la loi ou à la Constitution.

Deuxieme branche

1. Si le jugement doit etre interprete comme fondant sa decisionsur un avis des services de pompiers, il n'est pas non pluslegalement justifie.

2. De la seule constatation qu'un avis des services de pompiers adu etre demande par la copropriete de la Galerie Agora pours'assurer et a necessairement ete positif pour permettre etcontinuer l'exploitation et que « les services de pompiersauront vu la disposition et la presence des presentoirs devantles echoppes et auront estime que le passage etait suffisant pourpermettre une evacuation en cas de sinistre », le jugementattaque n'a pu legalement deduire que la sanction administrativelitigieuse prise en vertu de l'article 42 du reglement general depolice de la Ville de Bruxelles et visant notamment à laproprete, à la surete et à la tranquillite dans les lieuxpublics au sens de l'article 135, S: 2, de la nouvelle loicommunale, aurait ete irreguliere (violation des articles 135, S:2, de la nouvelle loi communale, 1 et 42 du reglement general depolice de la Ville de Bruxelles et 159 de la Constitution).

3. A tout le moins, à defaut d'indiquer dans ses motifs en quoil'avis des services des pompiers entraine l'irregularite de lasanction administrative litigieuse, le jugement attaque necontient pas, dans ses motifs, les constatations permettant à laCour d'exercer le controle de legalite qui lui est confie. Lejugement n'est des lors pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution).

Troisieme branche

1. Conformement au principe general du droit relatif àl'autonomie des parties dans le proces civil, dit principedispositif, les parties ont le droit, en matiere civile, dedeterminer elles-memes les limites du litige qu'elles soumettentau juge. Ce principe est consacre notamment par l'article 1138,2DEG, du Code judiciaire.

En vertu du principe general du droit relatif au respect desdroits de la defense, le juge ne peut fonder sa decision sur unmoyen de fait releve d'office, sans le soumettre à lacontradiction des parties lorsque celles-ci n'ont pu, compte tenudu deroulement des debats et de la procedure, prevoir qu'ilserait ainsi releve.

2. Il n'apparait pas des conclusions des parties que cesdernieres aient discute d'un avis donne par les services despompiers dans le cadre de l'assurance contractee par lacopropriete de la Galerie, ni de ce que ces services auraientestime le passage « suffisant pour permettre une evacuation encas de sinistre ».

3. En soulevant ainsi d'office un element de fait qui n'etait pasaux debats, les juges d'appel ont viole le principe del'autonomie des parties dans le proces civil, dit principedispositif, en vertu duquel, en matiere civile, les parties ontle droit de fixer elles-memes les limites du litige qu'ellessoumettent au juge, qui est consacre par l'article 1138, 2DEG, duCode judiciaire.

En fondant sa decision sur ce moyen de fait non invoque par lesparties, sans le soumettre à la contradiction de celles-ci,alors qu'elles ne pouvaient prevoir au vu du deroulement de laprocedure et des debats qu'il soit releve d'office, le jugementattaque meconnait en outre les droits de la defense de lademanderesse et, partant, le principe general du droit invoquerelatif au respect des droits de la defense.

Developpements du moyen unique de cassation

1. La premiere branche du moyen soutient que les pouvoirs depolice administrative des communes, resultant de l'article 135,S: 2, de la nouvelle loi communale, ne dependent pas de la naturepublique ou privee du terrain mais s'etendent egalement aux lieuxprives accessibles au public tels que les galeries et passagesetablis sur une assiette privee.

Voy. sur la notion de lieu public au sens de l'article 135, S: 2,de la nouvelle loi communale, M.-A. Flamme, Droit administratif,Bruxelles, Bruylant, 1989, T.I, p. 209. Voy. aussi C.E. du 30avril 2010, nDEG 203.503.

2. Les deuxieme et troisieme branches du moyen sont invoqueesdans l'hypothese ou le jugement doit etre interprete commefondant sa decision sur l'avis des services de pompiers.

Sur le principe en vertu duquel le jugement qui fonde sa decisionsur un moyen de fait non invoque par les parties, sans lesoumettre à la contradiction de celles-ci, meconnait le principegeneral du droit relatif au respect des droits de la defense,voy. Cass. 3 fevrier 2011, Pas. 2011, nDEG 102 ; Cass. 20 avril2011, Pas. 2011, n 268.

PAR CES CONSIDERATIONS,

l'avocat à la Cour de cassation soussigne, pour la demanderesseen cassation, conclut, Messieurs, Mesdames, qu'il vous plaise,recevant le pourvoi, casser le jugement attaque, ordonner quemention de votre arret soit faite en marge du jugement casse,statuer comme de droit sur les depens et renvoyer la cause devantun autre tribunal de police.

Bruxelles, le 11 mars 2015

pour la demanderesse en cassation

son conseil,

Paul Alain Foriers

Pieces jointes :

1. Extrait certifie conforme de la deliberation du college desbourgmestre et echevins de la Ville de Bruxelles du 14 aout 2013decidant d'introduire un pourvoi en cassation contre le jugementattaque.

2. Extrait certifie conforme de la deliberation du conseilcommunal de la Ville de Bruxelles du 9 septembre 2013 autorisantle college à introduire un pourvoi en cassation contre lejugement attaque.

3. Copie certifiee conforme du reglement general de police de laVille de Bruxelles.

4. Copie certifiee conforme de la decision de la demanderesse du17 novembre 2011.

5. Il sera joint, en outre, à la presente requete en cassation,lors de son depot au greffe de la Cour, l'original de l'exploitconstatant sa signification à la partie defenderesse encassation.

15 AVRIL 2016 C.15.0126.F/1

Requete/9


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0126.F
Date de la décision : 15/04/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-04-15;c.15.0126.f ?
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