Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG F.14.0219.F
Fonciere de Ladrier, societe civile sous la forme de la societe anonyme,dont le siege social est etabli à Braives, Chateau Forteresse de Fallaissur Mehaigne, rue du Chateau,
demanderesse en cassation,
representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,
contre
Region de Bruxelles-Capitale, representee par son gouvernement, en lapersonne du ministre-president, dont le cabinet est etabli à Bruxelles,rue Ducale, 7-9,
defenderesse en cassation,
representee par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 13 fevrier 2014par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Martine Regout a fait rapport.
Le premier avocat general Andre Henkes a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente deux moyens.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
La taxe litigieuse est une taxe regionale et ne constitue pas un impot surles revenus soumis au Code des impots sur les revenus. En tant qu'ilinvoque la violation de l'article 6 de la loi du 24 decembre 1996 relativeà l'etablissement et au recouvrement des taxes provinciales et communaleset les articles 308, S: 3, et 351 du Code des impots sur les revenus 1992,qui sont etrangers au litige, le moyen est irrecevable.
Aux termes de l'article 10 de l'ordonnance du Conseil de la Region deBruxelles-Capitale du 23 juillet 1992 relative à la taxe regionale àcharge des occupants d'immeubles batis et des titulaires de droits reelssur certains immeubles, dans sa version applicable au litige, la regionadresse annuellement aux redevables vises à l'article 3, S: 1er, c, uneformule de declaration dont le modele est arrete par le gouvernement. Lesredevables sont tenus de renvoyer cette declaration dument completee etsignee dans les trente jours de son envoi. Les redevables qui n'ont pasrec,u de declaration au 1er octobre de chaque annee sont tenus d'enreclamer une.
En vertu de l'article 12, S: 1er, de la meme version de cette ordonnance,la taxe est perc,ue par voie de role. Les roles sont rendus executoirespar le fonctionnaire, designe à cet effet par le gouvernement, au plustard le 30 septembre de l'annee qui suit l'exercice auquel ils serattachent. Dans le cas de la taxation d'office, visee à l'article 14,les roles sont rendus executoires au plus tard le 30 septembre de latroisieme annee qui suit l'exercice auquel ils se rattachent.
Suivant l'article 14, S: 1er, lorsque le redevable n'a pas remis dans lesdelais la declaration dont question à l'article 10, les fonctionnairesvises à l'article 11, S: 1er, procedent à l'etablissement d'office de lataxe due par le redevable eu egard aux elements dont ils disposent.
Il suit du rapprochement de ces dispositions que le redevable, qui n'a pasrec,u le 1er octobre la formule de declaration annuelle, doit reclamercelle-ci à la region avant le 30 septembre de l'annee qui suit l'exerciceconsidere, afin que la region ait la possibilite de rendre executoire dansle delai ordinaire de l'article 12, S: 1er, alinea 2, le role fonde sur sadeclaration.
L'arret constate que, pour les exercices 1999, 2000 et 2001, lademanderesse n'a pas rec,u la formule de declaration, qu'elle est resteeen defaut d'en demander une à la defenderesse et que l'enrolement de lataxe selon la procedure de la taxation d'office a eu lieu le 26 septembre2002 pour l'exercice 1999 et le 3 fevrier 2003 pour les exercices 2000 et2001.
L'arret a pu deduire de ces constatations que la procedure de taxationd'office a ete suivie regulierement.
Dans la mesure ou il est recevable, le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen fait grief à l'arret de considerer que la charge de la preuve del'existence d'une copropriete et de la mesure des droits de chaquecoproprietaire sur l'immeuble litigieux incombe à la demanderesse.
Ce grief est etranger aux dispositions legales visees au moyen.
Le moyen est irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux depens.
Les depens taxes à la somme de trois cent nonante-six euros onze centimesenvers la partie demanderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Mireille Delange, Michel Lemal et Sabine Geubel, etprononce en audience publique du douze fevrier deux mille seize par lepresident de section Albert Fettweis, en presence du premier avocatgeneral Andre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
+-------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Lemal |
|-----------------+-----------+-------------|
| M. Delange | M. Regout | A. Fettweis |
+-------------------------------------------+
Requete
Requete en cassation
Pour
Fonciere de Ladrier (denommee Maison Fonciere du Ladrier par l'arretattaque), societe anonyme, dont le siege sociale est à 4260 Braives, ruedu Chateau, SN, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous lenumero 0417 976 760,
demanderesse en cassation,
assistee et representee par Me Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour decassation soussigne, dont le cabinet est etabli à 6000 Charleroi, rue del'Athenee, 9, ou il est elu domicile.
Contre
Region de Bruxelles-Capitale, representee par son gouvernement, en lapersonne de son ministre president, dont le cabinet est à 1000 Bruxelles,rue Ducale, 7-9,
defenderesse en cassation.
A Messieurs les premier president et president, Mesdames et Messieurs lesconseillers qui composent la Cour de cassation,
Messieurs,
Mesdames,
La demanderesse a l'honneur de soumettre à votre censure l'arretcontradictoirement prononce entre parties par la chambre fiscale« 6FIS » de la cour d'appel de Bruxelles, le 13 fevrier 2014 (rolegeneral 2006 AR 2041).
Les faits de la cause et les antecedents de la procedure, tels qu'ilsresultent des pieces auxquelles votre Cour peut avoir egard, se resumentcomme suit.
La demanderesse est coproprietaire d'un ensemble immobilier acquis le 6aout 1994, cadastre nDEG 1412 A, situe à 1000 Bruxelles, 53 et 55 rueGretry et 21 à 23 rue des Fripiers.
Le conseil de la defenderesse a adopte, le 23 juillet 1992 (Moniteur belgedu 11 aout 1992, p. 17330) une ordonnance instaurant une taxe à chargedes occupants d'immeubles batis situes sur le territoire de la Region deBruxelles - Capitale et des titulaires de droits reels sur des immeublesnon affectes à la residence, due sur la base de la situation existante au1er juillet 1992.
La defenderesse n'a adresse à la demanderesse aucune formule dedeclaration à cette taxe, la demanderesse ne l'ayant pas reclamee par lasuite.
Le 1er juillet 2002, la defenderesse a notifie un avis d'impositiond'office relatif à l'exercice d'imposition 2009, contre laquelle lademanderesse a forme une reclamation le 28 octobre 2002. Contrainte ayantete decernee et signifiee les 2 fevrier et 4 mai 2004, la demanderesse aforme opposition à contrainte devant le tribunal de premiere instance deBruxelles.
Le 11 juillet 2002, la defenderesse a notifie un avis d'impositiond'office relatif à la taxe de l'exercice 2000 à la demanderesse. Les 4mai et 8 juillet 2004, la defenderesse a decerne et signifie contraintecontre laquelle la demanderesse a forme opposition le 6 aout 2004.
Et, le 11 juillet 2002, encore, la defenderesse a notifie à lademanderesse un avis d'imposition d'office à propos de la taxe relativeà l'exercice d'imposition 2001. Elle a delivre et signifie contrainte les4 mai et 8 juillet 2004 contre laquelle la demanderesse a forme oppositionle 6 aout 2004.
Par jugement du 3 mai 2006, le tribunal de premiere instance de Bruxellesa dit les oppositions formees par la demanderesse entierement fondees et,en consequence, il a annule les trois taxes litigieuses regionales, pourviolation de la procedure de taxation d'office car « à defaut de prevoirle delai dans lequel l'obligation de demander un formulaire de declarationdoit etre executee lorsque le redevable ne l'a pas rec,ue au 1er octobrede l'annee en cours, il n'est pas possible d'etablir le moment auquel laviolation de cette obligation est consommee. En consequence, les taxeslitigieuses ne pouvaient etre etablies d'office à la charge de lademanderesse et devaient, des lors, etre enrolees au plus tard le 30septembre de l'annee qui suit l'exercice auquel le role se rattache ». Enconsequence, la defenderesse a ete condamnee à restituer toutes sommesindument perc,ues du chef des taxes annulees, outre les interets de retardet les frais et depens d'instance.
La defenderesse a interjete appel de cette decision.
L'arret attaque la met à neant, sauf en tant qu'elle a joint lesdemandes, les a declarees recevables et a liquide les depens et, pour lesurplus, declare les demandes originaires de la demanderesse non fondeeset la condamne aux depens des deux instances.
A l'appui du pourvoi qu'elle forme contre l'arret attaque, la demanderessecroit pouvoir proposer les moyens de cassation suivants.
Premier moyen de cassation
Dispositions legales violees
Article 6 de la loi du 24 decembre 1996 relative à l'etablissement et aurecouvrement des taxes provinciales et communales ;
articles 308, S: 3, et 351 du Code des impots sur les revenus 1992 ;
articles 10, 12, S: 1er, et 14 de l'ordonnance du Conseil de la Region deBruxelles - Capitale relative à la taxe regionale à charges desoccupants d'immeubles batis et des titulaires de droits reels sur certainsimmeubles, avant sa modification par l'ordonnance de la Region deBruxelles - Capitale du 17 mars 2011.
Decision attaquee et motifs critiques
L'arret attaque qui met à neant le jugement entrepris et dit les demandesoriginaires formees par la demanderesse tendant à l'annulation des taxeslitigieuses mises à sa charge par la defenderesse pour les exercicesd'imposition 1999 à 2001, non fondees, l'en deboute et la condamne auxdepens des deux instances, aux motifs que :
« Les taxes litigieuses des exercices d'imposition 1999 à 2001 ont eteetablies d'office, à defaut pour la (demanderesse), qui n'a pas rec,u deformulaire de declaration pour les trois exercices, d'en avoir demande un.
En l'espece, il est constant pour les trois exercices d'imposition, qu'iln'y a ni eu de formulaires de declaration envoyes par la (defenderesse) nieu de demande d'envoi d'une declaration dans le chef de la (demanderesse).
D'apres l'article 10, alinea 3 de l'ordonnance du 23 juillet 1992, leredevables de la taxe qui n'ont pas rec,u de formulaire de declarationpour le 1er octobre de chaque annee sont tenus d'en reclamer un.
L'article 14, S: 1er, de cette ordonnance prevoit que la taxe est etablied'office lorsque le redevable n'a pas remis sa declaration dans le delaiimparti ou ne s'est pas conforme aux obligations qui sont imposees parcette ordonnance.
Les roles doivent etre rendus executoires au plus tard le 30 septembre del'annee qui suit l'exercice auquel il se rattache. En cas de taxationd'office, les roles sont rendus executoires au plus tard le 30 septembrede la troisieme annee qui suit l'exercice auquel il se rattache (article12, S: 1er de l'ordonnance precitee).
A tort, le premier juge a considere que la procedure de taxation d'officeetait irreguliere, des lors qu'aucune formule de declaration n'a eteenvoyee à (la demanderesse) et qu'aucun delai ne lui serait impose parl'ordonnance pour demander l'envoi de celle-ci.
Il resulte en effet des dispositions precitees que (la demanderesse), entant que redevable de la taxe proprietaire, avait l'obligation de demanderune formule de declaration des lors qu'elle n'en avait pas rec,ue pour le1er octobre de chaque annee. Conformement à cette disposition, (lademanderesse) devait solliciter une formule de declaration pour lesexercices d'imposition litigieux.
Ainsi qu'il a dejà ete juge à plusieurs reprises par la cour de ceans,tant que l'administration n'enclenche pas la procedure de taxationd'office, le redevable a la possibilite de demander une formule dedeclaration, en tenant compte de ce qu'elle doit etre remise àl'administration dans des delais tels qu'il sera encore possible d'etablirla taxe dans le delai ordinaire, à savoir avant le 30 septembre qui suitla fin de l'exercice auquel le role se rattache conformement à l'article12, S: 1er de l'ordonnance precitee.
Si le redevable ne demande pas de formule de declaration ou remet ladeclaration qu'il a demande à un moment ou il n'est plus possibled'enroler la taxe dans le delai ordinaire, la procedure de taxationd'office se justifie.
En l'espece, (la demanderesse) n'a pas demande de formule de declarationpour les exercices d'imposition litigieux si bien qu'à bon droit, lestaxes contestees ont ete etablies selon la procedure de taxation d'officeregulierement suivie par l'administration contrairement à ce qu'a estime,à tort, le premier juge : envoi dans ce contexte de notificationsd'imposition d'office le 11 juillet 2002 (...) ; desaccord envoye parrecommande, le 15 juillet 2002 par (la demanderesse) (...) ; reponse del'administration regionale du 19 septembre 2002 (...) ; echange decorrespondance entre les parties fin septembre 2002 (...).
Pour l'exercice 1999, il y a eu enrolement de la taxe de 1999, le 26septembre 2002, envoi de l'AER le 27 septembre 2002 (...), introductiond'une reclamation le 4 novembre 2002 et rejet par decision du directeur du4 decembre 2002, envoi d'un rappel le 18 mars 2003 et d'un deuxieme rappelle 27 juin 2003 (...), signification avec commandement de payer le 4 mai2004 par exploit d'huissier d'une contrainte decernee le 2 fevrier 2004,visee et rendue executoire le meme jour (...).
Pour l'exercice 2000, il y a eu enrolement de la taxe de 2000, le 3fevrier 2003, envoi de l'AER le 3 fevrier 2003 (...), envoi d'un rappel le27 juin 2003 et d'un deuxieme rappel le 4 novembre 2003 (...),signification avec commandement de payer le 4 mai 2004 par exploitd'huissier d'une contrainte decernee le 2 fevrier 2004, visee et rendueexecutoire le meme jour (...).
Pour l'exercice 2001, il y a eu enrolement de la taxe de 2001 le 3 fevrier2003, envoi de l'AER le 3 fevrier 2003 (...), envoi d'un rappel le 1erjuillet 2003 et d'un deuxieme rappel le 5 novembre 2003 (...),signification avec commandement de payer le 8 juillet 2004 par exploitd'huissier d'une contrainte decernee le
4 mai 2004, visee et rendue executoire le meme jour (...).
Une majoration de 200% a ete appliquee pour chaque exercice d'impositionlitigieux, en application de l'article 16 de l'ordonnance, pour taxe nonpayee ou payee hors delai.
L'appel de la (defenderesse) est fonde sur ce point. La procedure detaxation d'office a ete regulierement suivie à la charge de la(demanderesse) contrairement à ce qu'elle a soutenu en cours de procedurede premiere instance, suivie à tort par le juge.
(...). »
Griefs
L'article 6 de la loi du 24 decembre 1996 relative à l'etablissement etau recouvrement des taxes provinciales et communales (qui n'a ete abrogepour la Region de Bruxelles - Capitale qu'à compter du 1er mars 2014 parl'ordonnance du 3 avril 2014) dispose que :
« Lorsque le reglement de taxation prevoit une obligation de declaration,la non-declaration dans les delais prevus par ce meme reglement ou ladeclaration incorrecte, incomplete ou imprecise de la part du redevableentraine l'enrolement d'office de la taxe.
Avant de proceder à la taxation d'office, l'autorite habilitee à arreterle role en vertu de l'article 4, notifie au redevable par lettrerecommandee à la poste, les motifs du recours à cette procedure, leselements sur lesquels la taxation est basee, ainsi que le mode dedetermination de ces elements et le montant de la taxe.
Le redevable dispose d'un delai de trente jours à compter de la dated'envoi de la notification pour faire valoir ses observations par ecrit.
(...). »
L'article 351 du Code des impots sur les revenus 1992 prescrit que« l'administration peut proceder à la taxation d'office en raison dumontant des revenus imposables qu'elle peut presumer eu egard aux elementsdont elle dispose, dans les cas ou le contribuable s'est abstenu :
* soit de remettre une declaration dans les delais prevus par lesarticles 307 à 311 ou par les dispositions prises en execution del'article 312 ;
* soit d'eliminer, dans le delai consenti à cette fin, le ou les vicesde forme dont serait entachee sa declaration ;
* soit de communiquer les livres (...) ;
* soit de fournir dans le delai les renseignements qui lui ont etedemandes en vertu de l'article 316 ;
* soit de repondre dans le delai fixe par l'article 346 lesrenseignements qui lui ont ete demandes (...) ».
Quant à l'article 10 de l'ordonnance du Conseil de la Region de Bruxelles- Capitale du 23 juillet 1992 dans sa redaction applicable à l'espece, ilporte que « la Region adresse annuellement aux redevables vises àl'article 3, S: 1er, c) une formule de declaration.
Les redevables sont tenus de renvoyer cette declaration dans les trentejours de son envoi.
Les redevables qui n'ont pas rec,u de formule de declaration au 1eroctobre de chaque annee sont tenus d'en demander une. »
Il convient de relever que l'ordonnance du 17 mars 2011 a modifie cetarticle 10, dont le S: 3 se lit dorenavant comme suit : « Les redevablesqui n'ont pas rec,u de formule de declaration au 1er octobre de l'anneepour laquelle la taxe est due, sont tenus d'en reclamer une avant le 31decembre de cette annee ».
Quant à l'article 12, il precise que :
« S: 1er La taxe est perc,ue par voie de role.
Les roles sont rendus executoires par le fonctionnaire, designe à ceteffet par le gouvernement, au plus tard le 30 septembre de l'annee quisuit l'exercice auquel il se rattache.
Dans le cas de la taxation d'office, visee à l'article 14, les roles sontrendus executoires au plus tard le 30 septembre de la troisieme annee quisuit l'exercice auquel il se rattache.
(...) »,
l'article 14 indiquant encore que :
« S: 1er Lorsque le redevable n'a pas remis dans le delai de declarationdont question à l'article 10 ou ne s'est pas conforme aux obligations quilui sont imposees par la presente ordonnance ou en execution de celle-ci,les fonctionnaires vises à l'article 11, S: 1er, procedent àl'etablissement d'office de la taxe due par le redevable eu egard auxelements dont il dispose.
S: 2 Avant de proceder à la taxation d'office, les fonctionnairesnotifient aux redevables, par lettre recommandee, les motifs de lataxation d'office et les elements sur lesquels la taxe sera basee.
S: 3 Dans le mois qui suit l'envoi de cette notification, le redevablepeut faire valoir ses observations par ecrit, la taxe ne peut etre etablieavant l'expiration de ce delai.
S: 4 Lorsque le redevable est taxe d'office, il lui incombe, en cas decontestation, de faire la preuve du caractere manifestement exagere de lataxation d'office. »
Il resulte de la combinaison de ces differents textes legaux que ce n'estque lorsque le reglement (ou l'ordonnance) de taxation prevoit 1) uneobligation de declaration, 2) dans un delai precis, qu'à defaut depareille declaration, l'autorite peut proceder à la taxation d'office.
Lorsque le reglement de taxation prevoit certaines obligations dedeclaration ou l'obligation de reclamer au pouvoir taxateur le formulairepermettant de proceder à cette declaration, mais est muet quant au delaidans lequel la declaration doit etre faite ou encore dans lequel lecontribuable est tenu de reclamer, de sa propre initiative, le formulairenecessaire, que l'autorite a omis de lui adresser, celle-ci ne peutproceder à la taxation d'office. En effet, à defaut de delai precis fixepar le reglement de taxation lui-meme, l'autorite taxatrice pourraitimposer elle-meme le delai dans lequel la declaration devrait etre rentreeou le formulaire necessaire devrait etre reclame, ce qui ne saurait etrelegalement admis des lors que le contribuable ignore dans ce cas à quelmoment precis ultime, il doit reclamer la formule necessaire afin d'evitercette taxation d'office.
Il en est d'autant plus ainsi que la defenderesse elle-meme a admis demaniere implicite mais certaine que, à l'instar de ce qu'imposent leslegislations en matiere d'impots sur les revenus et de taxationscommunales et provinciales, le reglement de taxation doit lui-meme prevoirde maniere determinee et expresse le delai endeans lequel ce contribuabledoit inviter l'autorite à lui faire parvenir le formulaire idoine(ordonnance du 17 mars 2011).
Il s'en deduit que, l'ordonnance du 23 juillet 1992 ne prevoyant pas, dansle texte applicable à l'espece, un delai determine et prefixe endeanslequel le redevable, à defaut d'avoir rec,u le formulaire de declarationà la taxe que l'autorite taxatrice doit lui adresser, devrait reclamerledit formulaire à cette autorite, mais se bornant à indiquer la date àpartir de laquelle cette obligation s'impose à lui, l'arret attaque n'apu decider legalement, sans meconnaitre toutes les dispositions visees aumoyen, apres avoir cependant admis que la defenderesse avait omisd'adresser à la demanderesse la formule de declaration aux taxeslitigieuses necessaire, que cette autorite avait neanmoins recourulegalement à la taxation d'office parce que la demanderesse n'avait pasrequis la communication de la formule de declaration à un moment quiaurait encore permis à la defenderesse de proceder à l'enrolementregulier des taxes avant le 30 septembre de l'annee suivant cellesauxquelles ces taxes s'appliquaient respectivement.
Second moyen de cassation
Dispositions legales violees
Articles 577-2 et 873 du Code civil ;
articles 393, 398 et 399 du C.I.R. 92, dans la version, s'agissant del'article 393, anterieure à sa modification par la loi-programme du 27avril 2007.
Decision attaquee et motifs critiques
L'arret attaque qui met à neant le jugement entrepris, declare non fondeeles demandes d'annulation des taxes litigieuses afferentes aux exercices1999 à 2001 formee par la demanderesse, l'en deboute et la condamne auxdepens des deux instances, aux motifs que :
« Ainsi qu'il a ete juge ci-dessus, (la demanderesse) a ete regulierementtaxee d'office, conformement au prescrit de l'article 14, S: 1er, del'ordonnance, soit sur la base des seuls renseignements qui etaient à ladisposition de (la defenderesse), etant ceux fournis par l'administrationdu Cadastre qui renseignent (la demanderesse) comme proprietaire del'immeuble en question (...).
Dans sa lettre de desaccord du 15 juillet 2002, sur les notificationsd'imposition d'office, la (demanderesse) avait invoque qu'elle etaitseulement coproprietaire de l'immeuble et la (defenderesse) lui a demande,le 19 septembre 2002, pour pouvoir en tenir compte, de lui fournir soitune attestation notariale mentionnant le pourcentage de chaqueproprietaire soit un accord ecrit des differents coproprietaires.
La (demanderesse) a laisse sans suite cette requete et meme dans sareclamation à l'encontre de la taxation de l'exercice d'imposition 1999,aucune document ne fut transmis en annexe pour justifier de cettecopropriete invoquee si bien que l'administration n'a pas pu verifierl'etat d'indivision de l'immeuble concerne ni determiner la part de chacundes eventuels coproprietaires indivis pour les exercices d'impositionlitigieux.
Ce n'est que dans le cours de la procedure judiciaire que certainsdocuments ont ete produits : d'une part, l'acte notarie de 1984 et d'autrepart, le rapport du geometre expert (...).
Ces documents, s'ils font apparaitre une indivision au moment del'acquisition en 1984 et, pour une partie de l'immeuble une autreindivision, au moment de la reclamation sur le revenu cadastral en 1993,ne permettent cependant pas d'etablir la part des indivisaires, pour lesexercices d'imposition litigieux.
La (demanderesse) admet elle-meme, en effet, que l'indivision dontquestion dans l'acte notarie de 1984 n'etait pas restee telle pour lesannees litigieuses et pour ce qui concerne le rapport du geometre expertdepose en 2000 dans une procedure devant le juge de paix, la cour constatequ'il n'etablit pas non plus l'etat de l'indivision pour les exercicesd'imposition litigieux, des lors que l'expert a ete designe pour seprononcer sur des reclamations introduites les 28 avril et 14 mai 1993 envue de fixer le revenu cadastral au 1er janvier 1991, du bien sis àBruxelles, rue Gretry, 51/55 A, à destination d'hotel (soit apparemmentune partie de l'immeuble qui est vise dans la presente procedure) et quesurabondamment, l'etat de l'indivision et la determination des parts dechacun n'y sont pas mentionnes. »
Griefs
En vertu de l'article 393 C.I.R. 92, dans sa version applicable àl'espece, « l'impot enrole au nom de plusieurs personnes ne peut etrerecouvre à charge de chacune d'elles que pour la quotite afferente à sesrevenus. Le role est executoire contre chacune d'elles dans la mesure oula cotisation peut etre recouvree à sa charge en vertu du droit commun oudes dispositions du present Code ».
Aux termes de l'article 398 « les heritiers d'un redevable decede sonttenus à concurrence de leur part hereditaire, des droits eludes par le decujus, à moins que l'insuffisance de la perception ne resulte d'erreurscommises par les agents de l'administration ».
Et, l'article 399 ajoute que « le recouvrement de l'impot etabli àcharge des associes ou membres de societes civiles et associations sanspersonnalite juridique, peut etre poursuivi directement à charge de lasociete ou association, dans la mesure ou cet impot correspondproportionnellement à la part de ces associes ou membres dans lesbenefices ou profits non distribues de ces societes ».
Si l'article 577-2 du Code civil, dont le S: 3 prevoit que « lecoproprietaire participe aux droits et charge de la propriete enproportion de sa part », et le S: 7 dit que « chacun des coproprietairescontribue aux depenses utiles de conservation et d'entretien, ainsi qu'auxfrais d'administration, impots et autres charges de la chose commune » neregit, en principe, que les rapports entre les proprietaires indivis etest etranger aux rapports entre les indivisaires et les tiers, qui restentregis par le droit commun, l'article 873 du meme Code, qui revet uneportee generale, dispose que « les heritiers sont tenus des dettes etcharges de la succession, personnellement pour leur part et portionvirile, et hypothecairement pour le tout ; sauf leur recours soit contreleurs coheritiers, soit contre les legataires universels à raison de lapart pour laquelle ils doivent y contribuer ».
Il se deduit de la combinaison de ces dispositions legales que toutcoproprietaire d'un immeuble indivis n'est tenu de la dette d'impot ausens large que pour une part virile, celle-ci devant etre portee au roleau nom de chaque proprietaire, cette regle valant pour toutes lesimpositions directes, etatiques, regionales, provinciales ou communales.
Le role doit mentionner le nom de chaque redevable, ce role etant le titrede recouvrement de la dette d'impot, cette obligation qui s'impose àl'autorite taxatrice permettant l'individualisation de la dette d'impot,un contribuable n'etant jamais recevable que des impots et taxes qui luisont personnels, et devant pouvoir, grace au role, introduire les recoursnecessaires à l'encontre des impositions qui sont mises à sa charge.
Ainsi, l'enrolement qui est fait globalement et pour la totalite del'impot au nom de l'un des indivisaires n'est pas legal, car il doit etrefait par parts viriles (ou egales) au nom de chacun d'eux.
Et, il n'appartient pas à l'indivisaire à charge duquel la totalite del'impot a ete enrole de demontrer ni le nombre des indivisaires ni la partde chacun d'eux dans l'indivision, l'autorite fiscale devant rapporter lapreuve que la personne à charge de laquelle elle a etabli l'impot et quiconteste etre le seul redevable, parce qu'elle n'est qu'un indivisaire,est seule proprietaire du bien, en sorte qu'elle est redevable de latotalite de la taxe, celle-ci fut-elle etablie d'office.
L'arret qui, tout en admettant qu'il n'est pas exclu que, comme lepretendait la demanderesse, le bien frappe des taxes litigieuses ne luiappartenait pas exclusivement, mais etait indivis, mais, neanmoins, decideque la defenderesse a regulierement enrole la totalite de ces taxes àcharge de la demanderesse parce que celle-ci ne prouvait pas la partindivise dont elle etait seule titulaire et ne fournissait pas derenseignements suffisants permettant d'identifier les autrescoindivisaires et l'importance de leurs parts respectives, viole lesdispositions visees au moyen et n'est pas legalement justifie.
PAR CES CONSIDERATIONS,
L'avocat à la Cour de cassation soussigne conclut, pour la demanderesse,qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, casser l'arret attaque, ordonnerque mention de votre arret soit faite en marge de la decision annulee,renvoyer la cause et les parties devant une autre cour d'appel et statuercomme de droit quant aux depens.
Charleroi, le 12 decembre 2014
Franc,ois T'Kint
Avocat à la Cour de cassation
12 FEVRIER 2016 F.14.0219.F/1
Requete/16