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08/01/2016 | BELGIQUE | N°C.15.0271.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 janvier 2016, C.15.0271.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0271.F

* R. B.,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee,9, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * Axa belgium, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Michele Gregoire, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles,

rue de la Regence,4, ou il est fait election de domicile.

* I. La procedure devant la Cour

XII. Le pou...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.15.0271.F

* R. B.,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee,9, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * Axa belgium, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Michele Gregoire, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Regence,4, ou il est fait election de domicile.

* I. La procedure devant la Cour

XII. Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le10 octobre 2014 par le tribunal de premiere instance de Liege,statuant en degre d'appel.

XIII. Le president de section Christian Storck a fait rapport.

XIV. L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

XV. II. Les moyens de cassation

XVI. Dans la requete en cassation, jointe au present arret encopie certifiee conforme, la demanderesse presente deuxmoyens.

XVII. III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

S'agissant des « frais d'acquisition de l'immeuble de ... », lejugement attaque n'a pu, sans se contredire et violer, partant,l'article 1138, 4DEG, du Code judiciaire, decider, d'une part,que le jugement entrepris, qui avait alloue à la demanderesse lasomme de vingt-neuf mille sept cent quarante-neuf euros enprincipal, « sera[it] confirme sur ce point », et n'accorder,d'autre part, en recapitulant les sommes qui forment le montantde la condamnation provisionnelle qu'il prononce contre ladefenderesse, « aucune indemnisation » pour ce poste.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur le second moyen :

Quant à la premiere branche :

Celui qui a, par sa faute, cause un dommage à autrui est tenu dele reparer et la victime a droit, en regle, à la reparationintegrale de son prejudice.

Le juge evalue in concreto le prejudice cause par un faitillicite.

Il peut l'evaluer en equite à la condition d'indiquer les motifspour lesquels il ne peut admettre le mode de calcul propose parla victime et de constater l'impossibilite de determinerautrement le dommage.

Dans ses conclusions d'appel, la demanderesse demandait lacapitalisation de son dommage esthetique suivant la formulequ'elle precisait.

En considerant que « c'est [...] à tort que [la demanderesse]sollicite un calcul de capitalisation de ce prejudice dans lamesure ou [celui-ci] ne se manifeste pas de maniere constante,lineaire et recurrente », le jugement attaque, qui n'indique pasles circonstances propres à la cause qui justifieraient cetteaffirmation, meconnait l'obligation d'apprecier le dommage inconcreto et viole, des lors, les articles 1382 et 1383 du Codecivil.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner la seconde branche de chacun desmoyens, qui ne saurait entrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaque en tant qu'il statue sur les fraisd'acquisition de l'immeuble de ... et sur le prejudiceesthetique ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge dujugement partiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le jugedu fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant le tribunal de premiereinstance de Namur, siegeant en degre d'appel.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, le conseiller Didier Batsele, le president de sectionAlbert Fettweis, les conseillers Mireille Delange et MichelLemal, et prononce en audience publique du huit janvier deuxmille seize par le president de section Christian Storck, enpresence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistancedu greffier Patricia De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

Requete en cassation

Pour

B. R.,

demanderesse en cassation,

assistee et representee par Me Franc,ois T'Kint, avocat à laCour de cassation soussigne, dont le cabinet est etabli à 6000Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il est elu domicile.

Contre

Axa belgium, societe anonyme dont le siege social est etabli à1170 Bruxelles, boulevard du Souverain, 25, inscrite à labanque-carrefour des entreprises sous le numero 0404 483 367,

defenderesse en cassation.

A Messieurs les premier president et president, Mesdames etMessieurs les conseillers qui composent la Cour de cassation,

Messieurs,

Mesdames,

La defenderesse a l'honneur de soumettre à votre censure lejugement prononce contradictoirement entre parties et en degred'appel, le 10 octobre 2014, par la deuxieme chambre civile dutribunal de premiere instance de Liege - division Liege (rolegeneral 14 335 A).

Les faits de la cause et les antecedents de la procedure, telsqu'ils resultent des pieces auxquelles votre Cour peut avoiregard, se resument comme suit.

La demanderesse, nee le 6 juin 1979, a ete la victime d'un tresgrave accident de la circulation routiere survenu en Italie, le 4septembre 2001, alors qu'elle occupait en tant que passagere levehicule implique, assure aupres de la defenderesse, qui, apresavoir effectue plusieurs tonneaux, a termine sa course dans unfosse, la demanderesse restant coincee sous la voiture ; elle aete atteinte, entre autres, de fractures des vertebres cervicalesC5 - C6 qui, initialement, l'ont laissee tetraplegique, outre demultiples autres blessures.

Elle a ete operee à l'hopital de Bologne et fut rapatriee le 17septembre 2009 par avion medicalise en Belgique ou elle estrestee hospitalisee au CNRF de Fraiture-en-Condroz, jusqu'au 31mars 2002.

Les parties ont comparu volontairement devant la section civiledu tribunal de police de Liege le 9 decembre 2003 ; par jugementdu 23 decembre 2003, la doctoresse B. E.-D. a ete designee enqualite d'expert ; elle a cloture ses operations le 7 fevrier2012 et a depose un volumineux rapport comportant quelquescent-vingt-quatre pages.

Se fondant sur ce rapport qui n'a pas ete conteste par ladefenderesse, la demanderesse a reclame l'indemnisation desdivers postes de son dommage considerable puisque, son cas etantconsolide des le 1er avril 2004, elle conserve une invaliditepermanente personnelle de 70% et une incapacite professionnellepermanente de 100% et, entre autres, un prejudice esthetiqueevalue à 5/7, « soit important dans la meme echelle de septtermes. Ce prejudice esthetique est justifie non seulement par lacicatrice à la face anterieure du cou mais surtout par lademarche de l'interessee due à la tetra paresie ».

Par jugement du 25 novembre 2013, le tribunal de police de Liegea condamne la defenderesse à payer à la demanderesse une sommeprovisionnelle de 661.626,88 euros, outre les interetscompensatoires et moratoires, sous deduction des provisions etdes interets produits par ces provisions.

La defenderesse a interjete appel de cette decision, lademanderesse ayant forme un appel incident à propos de diverspostes du dommage.

Le jugement attaque accueille partiellement les appels principalet incident, confirme le jugement entrepris « sous lesemendations reprises au tableau recapitulatif ci-dessus, lacondamnation provisionnelle portant sur un montant en principalde 1.079.361,70 euros, sous deduction des provisions versees,productrices elles-memes d'interets au taux legal à partir deleur paiement ».

A l'appui du pourvoi dirige contre le jugement attaque, lademanderesse croit pouvoir proposer les moyens de cassationsuivants.

Premier moyen de cassation

Dispositions legales violees

Article 149 de la Constitution,

article 1138, 4DEG, du Code judiciaire,

principes generaux du droit gouvernant l'office du juge et lerespect des droits de la defense, interdisant au juge de statuerà l'encontre d'un accord des parties relatif à une demande quilui est soumise et qui n'est pas contraire à une dispositiond'ordre public.

Decision attaquee et motifs critiques

Le jugement attaque qui, rejetant à cet egard l'appel incidentforme par la demanderesse, d'une part confirme le jugemententrepris qui avait fixe l'indemnite à laquelle la demanderessepouvait pretendre au titre des frais d'acquisition de l'immeublede ..., à la somme de 29.749,00 euros en principal, mais, parailleurs, rejette la demande relative à ce meme poste du dommagelorsqu'il decide de « confirme(r) le jugement entrepris, sousles emendations reprises au tableau recapitulatif ci-dessus, lacondamnation provisionnelle portant sur un montant en principalde 1.079.361,70 euros, sous deduction des provisions versees,productrices d'interets legaux à partir de leur paiement », letableau recapitulatif vise par ce dispositif indiquantexpressement (page 35 du jugement attaque) sous le titre « Fraiset debours », au point k (2) « Frais immobiliers : fraisd'acquisition de l'immeuble de ... : pas d'indemnisation », lejugement etant motive à cet egard de la maniere suivante (pages12 et 13) :

« L'immeuble qu'occupait (la demanderesse) à ... etant peupraticable pour elle vu son handicap, malgre les travauxeffectues, cette derniere a decide d'investir dans un nouvelimmeuble, de type bungalow.

(La demanderesse) reclamait indemnisation par la (defenderesse)de l'integralite de l'achat de cet immeuble. (La defenderesse)acceptait uniquement de prendre en charge les frais d'acquisitionde l'immeuble s'elevant à 29.729,00 euros.

Le tribunal de police a suivi la these de (la defenderesse)constatant que l'acquisition relevait d'un choix et d'unedecision de (la demanderesse), et que le bien nouvellement acquisentrerait dans son patrimoine, et qu'elle pourrait librement endisposer à l'avenir.

L'achat d'un nouvel immeuble ne constitue pas un dommage pour (lademanderesse) puisque son patrimoine ne subit aucunappauvrissement. En effet, l'argent depense pour acheterl'immeuble litigieux a ete remplace par ledit immeuble, quiconstitue un actif de son patrimoine qui pourra effectivementetre le cas echeant revendu.

A la difference d'un vehicule, il n'est pas demontre quel'immeuble subira une perte de valeur avec le temps, de sorte que(la demanderesse) ne subit aucun appauvrissement du chef del'acquisition de l'immeuble de ... La jurisprudence citee par (lademanderesse) relative aux frais d'acquisition d'un vehiculen'est des lors pas pertinente.

En achetant l'immeuble de ..., (la demanderesse) n'a pas perdu ledroit à la libre disposition de son indemnite. Elle a, en effet,fait le choix personnel d'acheter plutot que de louer, et achoisi le type de bien et son emplacement.

La decision du tribunal de police sera des lors confirmee sur cepoint. »

Griefs

Le jugement entrepris, que la decision attaquee declare confirmerà propos du poste du dommage en cause, a decide que « dans leslimites du principe dispositif, c'est un montant de 29.749,00euros qui sera mis à charge de la (defenderesse), montant àmajorer des interets compensatoires au taux legal depuis la datemoyenne du 2 octobre 2006, date de la passation de l'acte », auxmotifs que « l'immeuble dont etait proprietaire et qu'occupaitla demanderesse à l'epoque de l'accident etait devenuparticulierement inconfortable pour elle au vu de son handicap.

Celle-ci decida d'investir dans l'acquisition d'un nouvelimmeuble. Il ne saurait evidemment etre question de mettre àcharge de (la defenderesse) le cout integral de cette acquisitionqui releve d'un choix et d'une decision de la demanderesse.

Le bien nouvellement acquis entrera dans le patrimoine de lademanderesse, patrimoine dont elle disposera librement àl'avenir.

La proposition formulee par (la defenderesse) de prendre encharge les frais d'acquisition et les frais d'amenagement de cenouvel immeuble parait raisonnable et conforme à la nouvellearborescence de l'indemnisation du dommage corporel. »

Et, la defenderesse, par ses ultimes conclusions de synthesed'appel (remplac,ant et annulant celles deposees le 9 juillet2014), admettait (page 14) que « compte tenu de ces observationset conformement aux pertinents motifs du jugement a quo, leprejudice indemnisable se limite aux frais de la transactionimmobiliere (frais, droits et honoraires, droitsd'enregistrement). Ceux-ci se sont eleves à 29.749,00 eurosselon decompte etabli par le notaire P. et produit au dossier dela demanderesse (...). Cette somme est à majorer des interetscompensatoires aux taux legaux depuis le 12 octobre 2006, date dela passation des actes. »

Premiere branche

Toute decision du juge qui tranche une question litigieuseconstitue un « dispositif » au sens de l'article 1138, 4DEG, duCode judiciaire, qu'elle soit mentionnee dans le cadre de lamotivation du jugement ou de l'arret, ou encore dans ledispositif proprement dit de celui-ci ; et, toute contradictionentre deux dispositifs compris dans pareil jugement ou arretconsacre une violation de l'article 1138, 4DEG, du Codejudiciaire et rend la decision, à cet egard, illegale.

Le jugement attaque declare, dans le cadre de sa motivationrelative aux frais d'acquisition de l'immeuble de ... que ladefenderesse a accepte, devant le premier juge, de prendre encharge ces frais s'elevant à 29.749,00 euros, que le tribunal depolice a accueilli cette proposition, le dommage de lademanderesse ne consistant pas dans l'achat lui-meme del'immeuble et ne correspondant pas au prix d'acquisition decelui-ci, si bien que le jugement a quo devait etre confirme surce point.

Mais, par ailleurs, il decide, en fixant la somme de 1.079.361,70euros qu'il alloue à titre provisionnel à la demanderesse parreference expresse au tableau recapitulatif qu'il a dresse, qu'iln'y a pas lieu d'accorder une quelconque indemnisation en ce quiconcerne les frais d'acquisition de l'immeuble de ... De lasorte, il viole l'article 1138, 4DEG, du Code judiciaire.

A tout le moins, le dispositif qui decide qu'il n'y a pas lieud'allouer à la demanderesse une indemnite en raison des fraisd'acquisition de l'immeuble de ... est en contradiction avec lesmotifs qui indiquent, s'agissant du dommage reclame à propos del'achat de l'immeuble de remplacement, que c'est à juste titreque le premier juge a accorde une indemnite limitee à 29.749,00euros representant les frais d'acquisition. Pareillecontradiction equivaut à une absence de motivation reguliere etconsacre une violation de l'article 149 de la Constitution.

Seconde branche

Le juge ne peut ecarter, à moins qu'il soit contraire à unedisposition d'ordre public, l'accord que les parties luisoumettent ou la proposition qu'emet la partie defenderesse àpropos d'une demande et rejeter celle-ci, à peine de meconnaitreles regles qui gouvernent son office, qui font que le procesreste, nonobstant le role actif du juge, la chose des parties,ainsi que les droits de la defense de celles-ci.

La defenderesse concluait devant les juges d'appel à laconfirmation du jugement entrepris qui avait alloue à lademanderesse la somme de 29.749,00 euros à titre de prise encharge des frais d'acquisition de l'immeuble de ... et maintenaitexpressement sa proposition d'indemniser ce poste du dommage parl'allocation de cette somme, augmentee des interetscompensatoires depuis la date de la passation de l'acte de vente.

Decidant neanmoins qu'il n'y a pas lieu d'indemniser lademanderesse à propos des frais d'acquisition de l'immeuble enquestion, nonobstant l'accord de la defenderesse, le jugementattaque viole les regles qui gouvernent l'office du juge et lesdroits de la defense des parties.

Second moyen de cassation

Dispositions legales violees

Article 149 de la Constitution ;

articles 1382 et 1383 du Code civil.

Decision attaquee et motifs critiques

Le jugement attaque qui, rejetant la methode de capitalisation dudommage esthetique preconisee par la demanderesse, fixe ce postedu dommage ex aequo et bono à la somme de 25.000,00 euros, auxmotifs que :

« De nombreuses cicatrices ont ete relevees par le docteur B.qui a pris en charge (la demanderesse) à ..., au niveau duvisage, du cou, du bras et du pied.

L'expert releve des troubles de la demarches, des cicatrices deplaies et d'interventions situees dans des regions peu visiblesdans des conditions habituelles, à l'exception d'une cicatriceà la base anterieure du cou qui est fort visible (rapportd'expertise, page 67).

La consolidation est acquise avec un prejudice esthetique de 5/7(important).

Le montant de 25.000,00 euros majore des interets compensatoiresau taux de 5% depuis le 4 septembre 2001 jusqu'au 31 decembre2009, puis au taux legal retenu par le premier juge, constitueune juste et equitable indemnisation du prejudice esthetique.Cette indemnisation est certes superieure à celle suggeree autableau indicatif, mais elle se justifie au vu du jeune age de(la demanderesse) au moment de l'accident et de la multipliciteet de l'ampleur des consequences esthetiques de l'accident.

C'est par contre à tort que (la demanderesse) sollicite uncalcul de capitalisation de ce prejudice, dans la mesure ou ceprejudice ne se manifeste pas de maniere constante, lineaire etrecurrente. »

Griefs

Par ses « conclusions de synthese d'appel II qui annulent etremplacent les conclusions principales sauf en ce qui concerneles effets juridiques du depot et de la communication desconclusions principales », la demanderesse, apres avoir rappele,quant au prejudice esthetique, le contenu des rapports du docteurB. et de l'expert judiciaire, et avoir souligne (page 80) qu'« en plus de ces problemes releves medicalement, il s'impose depreciser que la (demanderesse) doit porter des chaussuresadaptees avec semelles orthopediques ; (...) il ne lui est pluspossible de porter des chaussures feminines et ce à n'importequelle occasion. Elle doit obligatoirement porter (...) despantalons mixtes. Il ne faut, egalement, pas perdre de vue lesproblemes lies à l'incontinence », preconisait, pour ladetermination de son prejudice esthetique, le recours à lamethode de capitalisation dans les termes suivants :

« 1. Prejudice esthetique : il sera reclame 20,00 euros par jour

Base de calcul : 20,00 euros

Tables de Schrijvers de 2012 : age 34 ans

Duree de vie mediane : 54,70 annees

Taux 1% soit une valeur actuelle de 41,975

Calcul : 20,00 x 41,975 x 365 = 306.417,50 euros »

Premiere branche

Le juge ne peut, lorsqu'il apprecie le montant destine à reparerune atteinte dommageable provoquee par un acte illicite, recourirà une evaluation en equite que s'il indique les raisons pourlesquelles le mode de calcul, par exemple la capitalisation,preconise par la victime, ne peut etre admis et si, en outre, ilconstate l'impossibilite de determiner le dommage, tel qu'il estcaracterise.

Cette impossibilite n'est pas relative et est absolue, si bienque le juge ne peut evaluer forfaitairement le prejudice que sil'evaluation avancee par la victime est tout à fait impossible.

En outre, l'evaluation du dommage se realise in concreto enfonction des donnees et des faits concrets que le juge est tenude preciser.

Il s'en deduit que l'evaluation en equite ne saurait etrelegitimee par des considerations theoriques, generales etetrangeres aux elements propres à la cause, le juge ne pouvantrejeter la capitalisation d'un dommage permanent quel qu'il soitque s'il constate et indique de maniere precise que ce calculest, en soi, radicalement impossible.

D'ou il suit que le jugement attaque qui, apres avoir admisl'importance exceptionnelle du dommage subi à cet egard par lademanderesse, rejette la methode de capitalisation du prejudiceesthetique permanent subi par ladite demanderesse, que celle-cipreconisait et qu'elle fondait sur des donnees precises quipermettaient de proceder à un calcul mathematique, par la seuleconsideration theorique que « ce prejudice ne se manifeste pasde maniere constante, lineaire et recurrente », omet d'apprecierle dommage esthetique de la demanderesse in concreto et n'indiquepas que le calcul de capitalisation serait, pour des raisonsconcretes precises et propres à l'espece, radicalementimpossible, ne justifie pas legalement sa decision de substituerau calcul mathematique preconise par la demanderesse l'evaluationen equite de ce prejudice et viole les articles 1382 et 1383 duCode civil.

Et, seconde branche

Si, neanmoins, le juge peut ecarter la capitalisation preconiseepar la victime et y substituer son appreciation en equite, c'està la condition d'indiquer et d'enumerer de maniere precise etcomplete, les elements averes, notamment et specialement ceux quisont exposes par le rapport d'expertise, qui ne se pretent pas,selon eux, à une evaluation lineaire, constante et recurrente dudommage considere. A defaut de relever de maniere precise etcomplete ces elements de fait qui permettent d'affirmer que leditprejudice ne se manifesterait pas de maniere lineaire, constanteet recurrente, le juge du fond ne permet pas à votre Courd'exercer son controle de la legalite de la decision, n'est pasregulierement motive et viole l'article 149 de la Constitution.

Et, tel est le cas du jugement attaque qui, pour rejeter lacapitalisation du prejudice esthetique proposee par lademanderesse et y substituer son appreciation en equite, se borneà affirmer que ce dommage ne serait pas lineaire, constant etrecurrent, sans cependant indiquer les elements de fait concretssur lesquels il se fonde pour assener cette affirmation,empechant votre Cour de proceder à son controle de legalite etviolant l'article 149 de la Constitution.

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de cassation soussigne conclut, pour lademanderesse, qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, casser lejugement attaque, ordonner que mention de votre arret sera faiteen marge de la decision annulee, renvoyer la cause et les partiesdevant un autre tribunal de premiere instance et statuer comme dedroit quant aux depens.

Charleroi, le 2 februari 2016

Annexe :

1. Declaration pro fisco conforme à l'arrete royal du 12 mai2015

Franc,ois T'Kint

Avocat à la Cour de cassation

Memoire document modele

8 JANVIER 2016 C.15.0271.F/1

Requete/15


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0271.F
Date de la décision : 08/01/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-01-08;c.15.0271.f ?
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