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18/12/2015 | BELGIQUE | N°C.14.0185.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 décembre 2015, C.14.0185.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.14.0185.F

COMPAGNIE BELGE D'ASSURANCES AVIATION, en abrege Aviabel, societe anonymedont le siege social est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 54,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

1. M. J.,

2. C. F. et

3. F. B., agissant en nom personnel et en qualite de representants legauxde leurs enfants mineurs Q. et A. B.,

defendeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cab...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.14.0185.F

COMPAGNIE BELGE D'ASSURANCES AVIATION, en abrege Aviabel, societe anonymedont le siege social est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 54,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

1. M. J.,

2. C. F. et

3. F. B., agissant en nom personnel et en qualite de representants legauxde leurs enfants mineurs Q. et A. B.,

defendeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

4. J. O. et

5. N. O.,

defendeurs en cassation ou, en tant que de besoin, parties appelees endeclaration d'arret commun,

representes par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 novembre2013 par la cour d'appel de Liege.

Le 1er octobre 2015, l'avocat general Jean-Franc,ois Leclercq a depose desconclusions au greffe.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport et l'avocat generalJean-Franc,ois Leclercq a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

Articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil

Decisions et motifs critiques

L'arret decide [que la demanderesse] doit indemniser les [trois premiersdefendeurs] et qu'il n'y a pas lieu d'examiner si, comme [la demanderesse]le faisait valoir dans ses conclusions, feu G. F., mari de la premieredefenderesse et pere et beau-pere des deuxieme et troisieme defendeurs,avait la qualite de copilote au moment de l'accident et, partant, n'etaitpas tiers au sens de la police, aux motifs que « le contrat d'assurancecouvre la responsabilite civile de P. O., tant à l'egard des passagerstransportes que des tiers non transportes ; que les [trois premiersdefendeurs] ont la qualite de tiers non transportes des lors qu'ilssubissent un dommage personnel dont ils reclament la reparation à chargedu responsable de l'accident, d'une part, et qu'ils sont des tiers au sensdu contrat d'assurance n'etant ni pilote ni un membre de l'equipage,d'autre part ».

Et l'arret condamne la demanderesse à indemniser les [trois premiersdefendeurs] sur le fondement de tous ses motifs, tenus ici pourintegralement reproduits, et notamment sur le motif specialement[reproduit] ci-avant.

Griefs

La garantie « tiers non transportes » prevue à l'article 14, 1DEG, desconditions speciales [relatif] à la garantie « responsabilite civile destiers » de la police [de la demanderesse], dont l'article 9 desconditions particulieres enonce que, par derogation à l'article 17, 1DEGet 2DEG, des conditions generales, sont tiers « toutes personnes autresque le pilote et les membres d'equipage », stipule que cette couverturegarantit la responsabilite civile du preneur d'assurance du chefd'« accidents corporels ou materiels, y compris ceux resultant d'incendieou d'explosion de l'aeronef, causes aux tiers non transportes pendant lesevolutions aeriennes et en dehors de celles-ci » et ne vise ainsi que lareparation du prejudice à des tiers non transportes lorsqu'ils subissentdirectement un dommage par le fait de l'aeronef et ne s'applique donc pasaux ayants droit des passagers, victimes d'un accident aerien (quisubissent un dommage par repercussion et qui beneficient à ce titre de lacouverture « passagers transportes » [article 14-2DEG]). Dans la mesureou G. F., dans la these de ses ayants droit, etait un passager transporteet pas un copilote mais dont le deces ensuite de l'accident litigieux neleur conferait toutefois pas la qualite de tiers non transportes au sensde la police ainsi que le decide l'arret, la cour d'appel a viole la foidue aux stipulations de la police et en particulier de l'article 14precite, qui fait clairement la distinction, que meconnait l'arret, entrele dommage cause aux tiers transportes (les passagers ou leurs ayantsdroit) et celui subi par les tiers non transportes en cas de dommage ausol cause par l'aeronef.

Second moyen

Dispositions legales violees

* articles 2 et 86 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assuranceterrestre ;

* article 20, 9DEG, de la loi hypothecaire ;

* principe general du droit relatif au respect des droits de la defense.

Decisions et motifs critiques

L'arret souligne en son point 4.2 que « [les trois premiers defendeurs]exercent leur action à l'egard [de la demanderesse], dont ils reclamentla condamnation à les indemniser de leur dommage ; que ces [defendeurs]agissent conformement à l'article 86 de la loi du 25 juin 1992 sur lesassurances, qui confere à la personne lesee le droit propre d'agir contrel'assureur », pour decider que seule [la demanderesse] est tenued'indemniser les ayants droit de feu G. F., à l'exclusion des heritiersdu pilote juge responsable de l'accident.

Et l'arret condamne la demanderesse à indemniser les trois premiersdefendeurs sur le fondement de tous ses motifs, tenus ici pourintegralement reproduits, et notamment sur le motif specialement[reproduit] ci-avant.

Griefs

Premiere branche

La loi du 25 juin 1992 ne s'applique qu'aux assurances terrestres et pasaux assurances aeriennes, du type de celle qui a ete souscrite par feu P.O., qui demeurent soumises aux regles enoncees par la loi du 11 juin 1874,qui ne fait pas naitre une action directe au profit des personnes leseescontre l'assureur du responsable ; partant, l'arret n'a pu condamner [lademanderesse] sans condamner aussi au prealable les heritiers du pilotepuisque, par application de l'article 20, 9DEG, de la loi hypothecaire, lacondamnation de l'assureur de la responsabilite civile suppose aussil'obtention d'un titre contre ledit responsable ou ses heritiers et sansexaminer si les [quatrieme et cinquieme defendeurs] avaient, commel'invoquait en conclusions [la demanderesse], viole les obligations que lapolice leur imposait et etaient partant dechus du benefice de celle-ci(violation des dispositions legales visees au moyen, à l'exception duprincipe general du droit relatif au respect des droits de la defense).

Seconde branche

Aucune des parties au litige n'avait fait valoir que la loi du 25 juin1992 et, en particulier, son article 86 serait applicable à lacontestation que l'arret souleve d'office sans reouverture prealable desdebats et sans donner la possibilite à [la demanderesse] de s'expliquersur ce point (violation du principe general du droit relatif au respectdes droits de la defense).

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Apres avoir cite integralement les articles 14 et 17 des conditionsgenerales du contrat d'assurance, l'arret considere que l'article 9 desconditions particulieres deroge aux conditions generales en enonc,antque sont « consideres comme tiers toutes personnes autres que le piloteet les autres membres de l'equipage », qu'« il resulte clairement durapprochement de ces dispositions que les membres de la famille du preneurd'assurance, du pilote ou du personnel ne sont plus exclus et sontconsideres comme des tiers » et que, « par ailleurs, [la demanderesse]ajoute aux [stipulations] contractuelles des restrictions qui ne s'ytrouvent pas » des lors que « ni l'article 14 des conditions generalesni l'article 7 [lire : 9] des conditions particulieres ne disposent queles `tiers non transportes' sont uniquement les tiers à la surface dontles interets materiels ou l'integrite corporelle sont directement affectespar l'aeronef assure, principalement en cas de chute de celui-cioccasionnant des dommages en surface ».

Par ces enonciations, l'arret ne donne pas des stipulations de la policed'assurance qu'il cite une interpretation inconciliable avec leurs termeset, partant, ne viole pas la foi due à cet acte.

Le moyen manque en fait.

Sur le second moyen :

Quant à la seconde branche :

Lorsque les parties invoquent les faits sur lesquels elles fondent leurdemande sans enoncer aucun fondement juridique à ce propos, le juge quiapplique un fondement juridique à ces faits sans le soumettre à lacontradiction des parties ne viole pas leurs droits de defense.

Il ressort des pieces de la procedure, d'une part, que les trois premiersdefendeurs ont, à titre principal, dirige une action en indemnisationcontre la seule demanderesse, assureur couvrant la responsabilite civiledu pilote de l'avion litigieux, sans preciser le fondement juridique decette action dirigee directement contre l'assureur, d'autre part, que lademanderesse, tout en ne contestant pas aux trois premiers defendeurs ledroit d'agir directement contre elle, n'a pas propose de fondementjuridique à cette action.

La cour d'appel, qui, apres avoir releve « qu'à titre principal, [lestrois premiers defendeurs] exercent leur action à l'egard [de lademanderesse] à qui ils [reclament] la reparation de leur dommage », aconsidere que « [ces defendeurs] agissent conformement à l'article 86 dela loi du 25 juin 1992 sur [le contrat d'assurance terrestre], qui confereà la personne lesee le droit propre d'agir contre l'assureur », aprecise, conformement à sa mission, le fondement juridique de l'actiondont elle etait saisie, alors qu'aucune partie n'avait pris position àcet egard, partant, n'a pas viole le droit de defense de la demanderesse.

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 2, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 25 juin 1992sur le contrat d'assurance terrestre, cette loi s'applique à toutes lesassurances terrestres dans la mesure ou il n'y est pas deroge par des loisparticulieres.

Elle ne s'applique, poursuit l'alinea 2, ni à la reassurance ni auxassurances des transports de marchandises, assurances bagages etdemenagements exceptees.

Il suit de ces dispositions que, si elle ne s'applique ni aux assurancesmaritimes ni aux assurances fluviales, que regissent des loisparticulieres, la loi du 25 juin 1992 s'applique aux assurances aeriennes,à l'exception des assurances des transports de marchandises.

Les declarations faites au cours des travaux preparatoires de cette loisuivant lesquelles les assurances aeriennes seraient exclues du champd'application de celle-ci ne sauraient prevaloir sur ses termes clairs.

Des lors qu'il ressort de ses constatations que l'assurance litigieusen'est pas une assurance de transport de marchandises au sens de l'article2,

S: 1er, alinea 2, de la loi du 25 juin 1992, l'arret decide legalement queles trois premiers defendeurs « agissent conformement à l'article 86 de[cette] loi, qui confere à la personne lesee le droit propre d'agircontre l'assureur», que « l'indemnite due par [la demanderesse leur] estacquise [...], à l'exclusion des autres creanciers de l'assure (article86, alinea 2) » et qu'il n'y a, des lors, pas lieu « d'examiner si les[quatrieme et cinquieme defendeurs] seraient le cas echeant dechus dubenefice de la garantie au cas ou une condamnation serait prononcee àleur charge dans le cadre de l'action formee contre eux à titresubsidiaire ».

Le moyen, en aucune de ses branches, ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de mille cent quatre-vingt-quatre eurosvingt-sept centimes envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, president, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Mireille Delange,Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, et prononce en audience publique dudix-huit decembre deux mille quinze par le president de section ChristianStorck, en presence de l'avocat general Jean-Franc,ois Leclercq, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+------------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|-----------------+----------------+-------------|
| M. Delange | A. Fettweis | Chr. Storck |
+------------------------------------------------+

18 DECEMBRE 2015 C.14.0185.F/9


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.14.0185.F
Date de la décision : 18/12/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-12-18;c.14.0185.f ?
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