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01/12/2015 | BELGIQUE | N°P.15.1508.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 décembre 2015, P.15.1508.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.1508.N

E. D.C.,

inculpee, detenue

demanderesse en cassation.

Me Lotte Van Hasselt, avocat au barreau d'Anvers.

I. la procedure devant la cour

Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 17 novembre 2015 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation, statuant en tantque juridiction de renvoi ensuite de l'arret rendu par la Cour le 3novembre 2015.

La demanderesse invoque deux moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le conseille

r Peter Hoet a fait rapport.

L'avocat general Luc Decreus a conclu.

II. la decision de la cour

Sur le pr...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.15.1508.N

E. D.C.,

inculpee, detenue

demanderesse en cassation.

Me Lotte Van Hasselt, avocat au barreau d'Anvers.

I. la procedure devant la cour

Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 17 novembre 2015 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation, statuant en tantque juridiction de renvoi ensuite de l'arret rendu par la Cour le 3novembre 2015.

La demanderesse invoque deux moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.

L'avocat general Luc Decreus a conclu.

II. la decision de la cour

Sur le premier moyen :

1. Le moyen invoque la violation de l'article 16, S: 2, alinea 2, de laloi du 20 juillet 1990 relative à la detention preventive, ainsi que lameconnaissance du principe general du droit relatif au respect des droitsde la defense et à l'obligation de motivation : aucun argument figurantdans l'arret ne permet de conclure que l'article 16, S: 2, alinea 2, de laloi du 20 juillet 1990 a ete respecte ; cette disposition ne requiert pasque le proces-verbal d'audition indique les raisons pour lesquellesl'avocat se retire ni qu'un retrait non motive apurerait le defautd'assistance par un avocat ; l'arret considere que les articles 5 et 6 dela Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales n'imposent pas une levee immediate du mandat d'arret mais lademanderesse n'a pas invoque la violation de ces dispositions ; ces motifsne sont pas pertinents ; ce n'est pas le depart inopine de l'avocat maisl'absence de remediation à ce depart qui impose la liberation immediatede la demanderesse ; les juges d'appel ne peuvent deduire la force majeurede la circonstance que le delai de vingt-quatre heures etait en cours etqu'il y avait plusieurs inculpes ; il ressort des constatations de l'arretque le juge d'instruction disposait encore d'une delai de 16 heures et 47minutes pour entendre la demanderesse, proceder à son arrestation,signifier son arrestation et garantir le droit legal à l'assistance d'unavocat en convoquant un nouveau conseil ; de meme, le motif suivant lequella demanderesse faisait partie des nombreux prevenus qui devaient etreentendus, ne peut constituer un cas de force majeure ; elle etait, eneffet, la derniere à avoir ete entendue et arretee ; l'arret considere,par ailleurs, à tort, qu'il y avait quinze prevenus ; seuls neuf inculpesont ete prives de liberte ; le juge d'instruction disposait ainsi desuffisamment de temps pour que la demanderesse beneficie des garanties dela loi Salduz ; la force majeure constitue, en effet, une exception quidoit s'entendre au sens strict et ne peut jamais etre interpretee auprejudice de l'inculpe ; la force majeure est une circonstanceimprevisible qui se produit en-dehors de la volonte et des actes du juged'instruction ; le retrait du conseil de la demanderesse n'etait pasimprevisible, ainsi la demanderesse devait etre mise en liberte ; ladecision de l'arret suivant laquelle la loi ne prevoit pas que le juged'instruction doit interrompre l'interrogatoire au depart de l'avocat etne doit pas en chercher un autre, est contraire à l'article 16, S: 2,alinea 2, de la loi du 20 juillet 1990 ; la demanderesse a droit àl'assistance d'un avocat au cours de toute l'audition ; la decision desjuges d'appel suivant laquelle l'audition ne doit pas etre interrompue audepart du conseil ne constitue, des lors, pas une motivation pertinente ;lorsque des incidents se produisent au cours de l'audition portantatteinte aux droits de la defense de maniere telle que la regularite del'audition est mise en peril, le juge d'instruction doit agir et, le casecheant, interrompre l'audition, meme s'il n'est pas legalement tenu de lefaire ; la circonstance que la demanderesse n'a emis aucune reserve, n'aformule aucune observation et n'a pas demande de suspension est sanspertinence ; il ne peut etre question d'aucune renonciation volontaire etpas davantage de motifs imperatifs d'interet general des lors que la loirequiert que de telles circonstances doivent etre mentionnees dans leproces-verbal d'audition, ce qui n'a pas ete le cas ; l'article 16, S: 2,alinea 4, de la loi du 20 juillet 1990 ne peut etre applique par analogieà cette situation ; cet article prevoit uniquement que l'audition peutregulierement commencer en l'absence d'un avocat, mais pas que l'auditionpeut aussi etre regulierement cloturee sans l'assistance d'un avocat.

2. Dans la mesure ou il oblige la Cour à proceder à un examen des faitspour lequel elle est sans competence, le moyen est irrecevable.

3. Lorsqu'une motivation induit des consequences inexactes en droit, celaconstitue une violation de la loi mais pas un defaut de motivation.

Dans la mesure ou il invoque une meconnaissance du devoir de motivation,le moyen manque en droit.

4. L'article 16, S:S: 2 et 4, de la loi du 20 juillet 1990 disposenotamment que :

« S:2. Sauf si l'inculpe est fugitif ou latitant, le juge d'instructiondoit, avant de decerner un mandat d'arret, interroger l'inculpe sur lesfaits qui sont à la base de l'inculpation et qui peuvent donner lieu àla delivrance d'un mandat d'arret et entendre ses observations. A defautde cet interrogatoire, l'inculpe est mis en liberte

L'inculpe a le droit à etre assiste de son avocat lors del'interrogatoire. Seul l'inculpe majeur peut renoncer volontairement et demaniere reflechie à ce droit. Le juge d'instruction fait mention de cetterenonciation dans le proces-verbal d'audition.

L'avocat peut formuler des observations conformement à l'article 2bis, S:2, alinea 4.

Le juge d'instruction informe l'avocat à temps des lieu et heure del'interrogatoire, auquel il peut assister. L'interrogatoire peut commencerà l'heure prevue, meme si l'avocat n'est pas encore present. A sonarrivee, l'avocat se joint à l'audition.

Le juge d'instruction doit egalement informer l'inculpe de la possibilitequ'un mandat d'arret soit decerne à son encontre, et l'entendre en sesobservations à ce sujet et, le cas echeant, en celles de son avocat. Adefaut de respect de ces conditions, l'inculpe est mis en liberte.

Tous ces elements sont relates au proces-verbal d'audition.

Si l'inculpe n'a pas encore d'avocat, le juge d'instruction lui rappellequ'il a le droit de choisir un avocat et il en informe le batonnier del'Ordre ou son delegue. Il est fait mention de ces formalites dans leproces-verbal d'audition. »

Il resulte de ces dispositions que, si l'audition visee à l'article 16,S: 2, se deroule sans l'assistance d'un avocat et sans que l'inculpe y aitrenonce, l'inculpe doit, en principe, etre mis en liberte. Il ne peut etrederoge à l'assistance obligatoire d'un avocat qu'en raison de motifsimperieux d'interet general ou lorsqu'elle se revele impossible en raisond'une force majeure, à savoir d'une circonstance imprevisible.

6. Le juge apprecie souverainement en fait si les circonstances invoqueesconstituent un cas de force majeure.

Dans la mesure ou il critique cette appreciation en fait, le moyen estirrecevable.

7. La Cour peut verifier si le juge a pu deduire la force majeure descirconstances qu'il prend en consideration.

8. L'arret considere que :

- l'avocat de la demanderesse a quitte le cabinet du juge d'instruction aucours de l'interrogatoire par le juge d'instruction ;

- il ressort des debats à l'audience devant la chambre des mises enaccusation, plus specifiquement des propres declarations de lademanderesse, que l'avocat est parti brusquement, sans autre explicationet sans qu'elle ne connaisse la raison de ce depart ;

- le proces-verbal d'audition du 29 septembre 2015 mentionne uniquementque : « Me D.K. s'est retire à 16H24. L'audition s'est ensuitepoursuivie sans l'assistance d'un avocat » et qu'il ne peut en etrededuit la raison pour laquelle Me D.K. a quitte l'audition au cours del'interrogatoire ;

- le proces-verbal d'audition n'explique pas le depart inattendu et queles explications donnees par la demanderesse dans ses conclusions ecritesne repondent pas aux elements dudit proces-verbal ou des autres pieces dudossier repressif ;

- la demanderesse n'a formule aucune reserve lors de la poursuite del'interrogatoire en l'absence d'un avocat et elle n'a pas davantagedemande de suspension ;

- la demanderesse faisait partie des nombreux inculpes, dont environquinze avaient ete prives de liberte dans ce dossier, qui devaient etreinterroges par le juge d'instruction et eventuellement arretes au cours dubref delai de vingt-quatre heures ;

- le juge d'instruction qui, au cours de l'interrogatoire de lademanderesse, a ete confronte au depart inopine de l'avocat qui avait eteconvoque conformement à l'article 16, S: 2, alinea 2, de la loi du 20juillet 1990 pour garantir l'assistance au cours de l'interrogatoire, nedevait pas s'attendre à cet evenement et qu'il a ainsi fait face à unecirconstance imprevisible constituant une force majeure.

Par ces motifs, l'arret a pu considerer qu'en raison de la force majeure,il etait impossible de garantir l'assistance d'un avocat au cours del'interrogatoire de l'inculpe prealable à son arrestation et les jugesd'appel ont ainsi legalement justifie leur decision suivant laquelle cetinterrogatoire s'est deroule de maniere reguliere.

Dans cette mesure, le moyen de ne peut etre acceuilli.

9. Pour le surplus, le moyen critique des motifs surabondants et est ainsiirrecevable.

Le controle d'office

13. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de president,Alain Bloch, Peter Hoet, Antoine Lievens et Sidney Berneman, conseillers,et prononce en audience publique du premier decembre deux mille quinze parFilip Van Volsem, conseiller faisant fonction de president, en presence del'avocat general Luc Decreus, avec l'assistance du greffier FrankAdriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Tamara Konsek ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le conseiller,

1er decembre 2015 P.15.1508.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.15.1508.N
Date de la décision : 01/12/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-12-01;p.15.1508.n ?
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