Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG P.15.1501.N
B.R.,
personne faisant l'objet d'un mandat d'arret europeen,
detenu,
demandeur en cassation,
Me Manuel Huygaerts, avocat au barreau de Turnhout.
I. la procedure devant la cour
Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 17 novembre 2015 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.
Le demandeur fait valoir un moyen dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.
L'avocat general Luc Decreus a conclu.
II. la decision de la cour
Sur le moyen :
1. Le moyen invoque la violation de l'article 6, 4DEG, de la loi du 19decembre 2003 relative au mandat d'arret europeen : c'est à tort quel'arret n'accueille pas la demande du demandeur tendant à voir appliquerle motif de refus facultatif prevu par cette disposition, des lors qu'ils'est soustrait à la justice neerlandaise et ne peut, pour cette raison,etre assimile aux personnes visees par cette disposition ; cettedisposition fait une distinction entre les belges qui demeurent enBelgique et les belges qui resident en Belgique ; le demandeur reside enBelgique sous son vrai nom et est inscrit à Turnhout avec son beau-fils,de sorte qu'il est un resident pour lequel aucun lien durable avec laBelgique ne doit etre demontre ; par consequent, la raison pour laquellel'arret rejette la demande du demandeur, à savoir de s'etre soustrait àla justice neerlandaise, en se referant au lien durable, est sanspertinence.
2. Dans la mesure ou il oblige la Cour à proceder à un examen des faitspour lequel elle est sans competence, le moyen est irrecevable.
3. L'article 4.6 de la Decision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relativeau mandat d'arret europeen et aux procedures de remise entre Etats membresdispose : « Motifs de non-execution facultative du mandat d'arreteuropeen
L'autorite judiciaire d'execution peut refuser d'executer le mandatd'arret europeen: (...)
6. si le mandat d'arret europeen a ete delivre aux fins d'execution d'unepeine ou d'une mesure de surete privatives de liberte, lorsque la personnerecherchee demeure dans l'Etat membre d'execution, en est ressortissanteou y reside, et que cet Etat s'engage à executer cette peine ou mesure desurete conformement à son droit interne ; (...). »
4. Dans l'arret C-66/08 du 17 juillet 2008, en cause de Szymon Kozlowski,la Cour de Justice de l'Union europeenne a indique que pour savoir si,dans une situation concrete, l'execution d'un mandat d'arret europeen peutetre refusee, l'autorite judiciaire d'execution doit d'abord verifier sila personne recherchee est un ressortissant de l'Etat membre d'execution,y demeure ou y reside au sens de l'article 4.6 de la Decision-cadre du 13juin 2002, de telle sorte qu'elle tombe dans le champ d'application decette disposition. Dans l'affirmative, l'autorite judiciaire d'executiondoit apprecier, en outre, si l'execution de la peine infligee dans l'Etatd'emission sur le territoire de l'Etat d'execution est justifiee par unquelconque interet legitime.
5. L'article 6, 4DEG, de la loi du 19 decembre 2003 relative au mandatd'arret europeen dispose : L'execution peut etre refusee (...)
4DEG si le mandat d'arret europeen a ete delivre aux fins d'executiond'une peine ou d'une mesure de surete, lorsque la personne concernee estbelge ou reside en Belgique et que les autorites belges competentess'engagent à executer cette peine ou mesure de surete conformement à laloi belge(...) ».
6. Il ressort de ce qui precede que, meme si la juridiction d'instructiondecide sur la base des elements concrets de l'affaire que la personnefaisant l'objet d'un mandat d'arret europeen demeure ou reside enBelgique, elle peut neanmoins consentir à l'execution du mandat d'arreteuropeen si elle estime que l'execution de la peine infligee dans l'Etatmembre d'emission sur le territoire de l'Etat membre d'execution n'est pasjustifiee par un interet legitime.
7. L'arret considere que le demandeur a ete poursuivi et condamne auxPays-Bas du chef d'homicide sous le nom de P., ne en 1973, qu'avant ladecision definitive, il s'est etabli en Belgique et s'est fait enregistrersous le nom de R., avec une date de naissance differente, et qu'il estevident qu'il s'est ainsi soustrait à la justice neerlandaise. Ilconsidere, en outre, que la circonstance que, selon le demandeur, les deuxnoms de famille sont valables, n'y fait pas obstacle, des lors qu'il aaussi modifie sa date de naissance. L'arret enonce ainsi que l'executionen Belgique de la peine infligee par les Pays-Bas n'est justifiee paraucune interet legitime.
8. L'arret justifie ainsi legalement le rejet du motif de refus prevu parl'article 6, 4DEG, de la loi du 19 decembre 2003 et l'ordre d'execution dumandat d'arret europeenne delivre par l'autorite judiciaire neerlandaisecompetente en vue de l'execution de la peine, de sorte que, dans la mesureou il critique la decision que le demandeur ne demeure ni ne reside enBelgique, ne saurait entrainer la cassation et est, des lors, irrecevable.
Le controle d'office
9. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de president,Alain Bloch, Peter Hoet, Antoine Lievens et Sidney Berneman, conseillers,et prononce en audience publique du premier decembre deux mille quinze parFilip Van Volsem, conseiller faisant fonction de president, en presence del'avocat general Luc Decreus, avec l'assistance du greffier FrankAdriaensen.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Tamara Konsek ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
Le greffier, Le conseiller,
1er decembre 2015 P.15.1501.N/1