Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG C.15.0013.N
CKS RETAIL BELGIUM, s.a.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,
contre
ELICON, s.c.a.,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 5 novembre2014 par le tribunal de commerce de Gand, division Furnes, statuant endegre d'appel.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
L'avocat general Andre Van Ingelgem a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente un moyen.
III. La decision de la Cour
Sur le moyen :
1. L'article 18, alinea 1er, de la loi du 30 avril 1951 sur les bauxcommerciaux dispose que, s'il resulte de la reponse prevue à l'article 14que le bailleur subordonne le renouvellement à des conditions relativesau loyer, à la contribution aux charges, au mode de jouissance ou autresmodalites du bail, et si le desaccord persiste quant à ces conditions, lepreneur se pourvoit devant le juge dans les trente jours de la reponse dubailleur, à peine de forclusion.
Suivant l'article 18, alinea 2, le juge statue en equite.
L'article 19, alinea 1er, de cette meme loi dispose que, si le desaccordporte sur le loyer reclame par le bailleur, le juge prend notamment enconsideration le prix communement demande dans le quartier,l'agglomeration ou la region pour des immeubles, parties d'immeubles oulocaux comparables et egalement, s'il echet, la nature particuliere ducommerce exerce, le profit tire par le locataire de la sous-location detout ou partie des locaux.
L'article 19, alinea 2, dispose que le juge n'a pas egard au rendement,favorable ou defavorable, de l'entreprise resultant du seul fait dupreneur.
2. Il resulte de la combinaison de ces dispositions legales et des travauxpreparatoires que, si lors du renouvellement du bail, un desaccordpersiste sur le loyer, le juge determine en equite, en tenant compte detoutes les circonstances objectives et notamment des criteres enumeres àl'article 19, alinea 1er, la valeur locative normale du bien au moment durenouvellement du bail.
La valeur locative normale du bien au moment du renouvellement du bailcomprend, en principe, les travaux effectues au bien par le preneur aucours de la periode locative anterieure. Le juge peut toutefois considereren equite, sur la base d'elements objectifs sans rapport avec la situationdes parties, qu'il ne doit pas etre tenu compte, lors de la determinationde la valeur locative normale, de certains travaux effectues par lepreneur au bien.
3. La demanderesse soutenait devant les juges d'appel que le premier jugen'avait pas determine en equite le nouveau loyer des lors quel'amenagement et le confort du bien loue jouaient un role important lorsde la determination des points de comparaison et du loyer et que cetamenagement et ce confort resultaient de travaux effectues par elle et àses frais ou par ses ayants droit ou à leurs frais.
4. Les juges d'appel ont considere que :
- contrairement à ce que soutient la demanderesse, le juge ne doit pas,sur la base des articles 18 et 19 de la loi du 30 avril 1951, corriger leloyer à la baisse, en cas de renouvellement de bail, en raisond'investissements faits par le preneur qui ont entraine une plus-value aubien immeuble ;
- le renouvellement de bail fait naitre un contrat de bail entierementnouveau et le juge ne peut tenir compte que de la valeur locative normaletelle qu'elle existe au moment de la demande de renouvellement ;
- ainsi, si le preneur a effectue des travaux de transformation entrainantune hausse de la valeur du bien immobilier, il y a lieu de tenir compte,lors du renouvellement du bail commercial, du fait qu'un tiers peut offrirun loyer plus eleve sur la base de la valeur actuelle du bien immeuble ;
- quand il effectue des transformations, le preneur doit, des lors, tenircompte de cette possibilite ainsi que de la duree restante du contrat encours ;
- la defenderesse invoque à juste titre que, sur la base de l'article 7du contrat de bail, tous les amenagements et transformations effectues parle preneur deviennent immediatement la propriete du bailleur ou, au plustard, à la fin du contrat de bail ;
- contrairement à ce que soutient la demanderesse, le contrat de bailcesse de produire ses effets à la fin de la premiere periode de neuf ansde sorte qu'il pouvait etre tenu compte des transformations effectuees parle preneur et de la plus-value ainsi engendree, mais au prejudice dupreneur.
5. En excluant ainsi que le nouveau loyer puisse etre corrige à la baisseen raison du fait que le preneur a effectue des travaux au bien au coursde la periode de bail anterieure, les juges d'appel ont viole lesdispositions legales precitees.
Le moyen est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementcasse ;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de commerce neerlandophone deBruxelles.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Eric Dirix, les conseillers KoenMestdagh, Geert Jocque, Bart Wylleman et Koenraad Moens, et prononce enaudience publique du vingt-neuf octobre deux mille quinze par le presidentde section Eric Dirix, en presence de l'avocat general Andre Van Ingelgem,avec l'assistance du greffier Vanessa Van de Sijpe.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Marie-Claire Ernotte ettranscrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
Le greffier, Le conseiller,
Requete
29 OCTOBRE 2015 C.15.0013.N/1
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