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23/10/2015 | BELGIQUE | N°C.15.0149.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 octobre 2015, C.15.0149.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

N-o C.15.0149.F

D. L.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

P & V ASSURANCES, societe cooperative à responsabilite limitee, venantaux droits et obligations de la societe anonyme Actel, dont le siegesocial est etabli à Saint-Josse-ten-Noode, rue Royale, 151-153,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour
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Cour de cassation de Belgique

Arret

N-o C.15.0149.F

D. L.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

P & V ASSURANCES, societe cooperative à responsabilite limitee, venantaux droits et obligations de la societe anonyme Actel, dont le siegesocial est etabli à Saint-Josse-ten-Noode, rue Royale, 151-153,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 24 septembre2014 par la cour d'appel de Liege, statuant comme juridiction de renvoiensuite de l'arret de la Cour du 9 octobre 2009.

Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- articles 1235, 1315, 1376 et 1377 du Code civil ;

- article 870 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque « dit que (la defenderesse) demontre qu'(elle) a payeindument à (la demanderesse) ou pour son compte des indemnites suite auvol pretendu du 12 juin 2001 ».

Il fonde sa decision sur les motifs suivants :

« La (defenderesse) entend demontrer, par l'evocation d'une serie decontradictions ou de contre-verites affectant les declarations de sonassuree quant au vol de son vehicule, qu'elle etablit un doute serieuxquant à la veracite de la declaration de vol qui lui a ete faite par sonassuree de sorte que la declaration de vol est depourvue de toutesincerite et qu'en consequence c'est à tort que (la defenderesse) estintervenue pour indemniser son assuree ;

(...) `Il est actuellement de jurisprudence constante qu'il est legitime, compte tenu de la difficulte de la preuve, d'assouplir la charge de la preuve du vol qui incombe à l'assure, lequel peut etre considere commesuffisamment etabli par le depot d'une plainte des le moment ou lesdeclarations de l'assure paraissent etre sinceres et vraisemblables et enl'absence de tout indice susceptible de legitimer quelque suspicionvis-à-vis de l'assure ;

Il ne peut toutefois etre pose en principe que le seul fait de la declaration de sinistre conforte par le depot d'une plainte emporteraitla presomption de la vraisemblance du vol et entrainerait un renversementdu fardeau de la preuve, mettant desormais celui-ci à charge del'assureur ;

Le caractere vraisemblable ou non du vol allegue doit s'apprecier inconcreto en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait de lacause' (sommaire precedant Mons, 16 decembre 2002, 2001/RG/73) ;

La jurisprudence est unanime en ce sens pour etablir la charge de lapreuve et son contenu en matiere d'assurance contre le vol (...) ;

L'ensemble (des elements invoques par la defenderesse) etablit le doutequant à la veracite du vol allegue (par la demanderesse). (Lademanderesse) doit donc rembourser (à la defenderesse) les decaissementseffectues à son profit ».

Griefs

Premiere branche

I. En vertu des articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire,celui qui reclame l'execution d'une obligation doit la prouver.

Selon l'article 1235 du Code civil, « tout paiement suppose une dette :ce qui a ete paye sans etre du est sujet à repetition ». Selon l'article1376 du meme code, « celui qui rec,oit par erreur ou sciemment ce qui nelui est pas du s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indumentrec,u ».

Sur la base de ces dispositions, l'assureur qui estime avoir effectue àtort le paiement d'une indemnite d'assurance, en ce sens qu'il est intervenu en l'absence de sinistre, est fonde à agir en repetition del'indu à l'encontre de l'assure s'il apporte la preuve que le paiementeffectue etait depourvu de cause.

L'assureur doit demontrer de maniere certaine l'absence de l'evenementqui entrainait l'obligation de payer la prestation d'assurance.

Dans le cadre de l'assurance contre le vol, l'assureur ne peut pretendre beneficier, à cet egard, de l'allegement de la charge de la preuve offertà l'assure lorsque ce dernier declare le sinistre et doit demontrer larealite du vol allegue.

Au contraire de l'assure, qui doit uniquement apporter la preuve du caractere vraisemblable du vol dont il affirme avoir ete victime,l'assureur qui a indemnise son assure et, partant, reconnu lavraisemblance du vol doit, s'il agit ulterieurement en repetition,demontrer avec certitude que le vol n'a pas eu lieu.

II. L'arret attaque, apres avoir rappele les enseignements de lajurisprudence majoritaire quant à l'allegement de la charge de la preuvedans le chef de l'assure qui declare un vol, analyse les differentselements factuels invoques par la defenderesse pour demontrer le caractere indu du paiement effectue. Il conclut que ces elements «etablissent le doute quant à la veracite du vol allegue par (lademanderesse) » et que « (la demanderesse) doit donc rembourser à (ladefenderesse) les decaissements effectues à son profit ».

Ce faisant, l'arret attaque accueille illegalement l'action en repetitionen raison de l'existence d'un simple « doute quant à la veracite du vol» et, en consequence, dispense illegalement la defenderesse de prouver lecaractere indu du paiement dont elle reclame la repetition. L'arretmeconnait ainsi les regles relatives à la charge de la preuve (violationdes articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire) et les reglesrelatives à la repetition de l'indu (violation des articles 1235, 1376et 1377 du Code civil).

Seconde branche

Apres avoir considere que « l'ensemble (des elements invoques par ladefenderesse) etablit le doute quant à la veracite du vol allegue (par la demanderesse) », l'arret attaque decide que « (la defenderesse)demontre qu'(elle) a paye indument à (la demanderesse) ou pour soncompte des indemnites suite au vol pretendu du 12 juin 2001 ».

Il est contradictoire de decider, d'une part, qu'il existe un doute quantà la veracite d'un fait et, d'autre part, que ce fait est demontre.

L'arret se fonde sur les motifs contradictoires precites. Sa motivationest des lors entachee d'une contradiction qui equivaut à l'absence de motifs (violation de l'article 149 de la Constitution).

A tout le moins, la decision que la defenderesse demontre qu'elle a payeindument des indemnites à la demanderesse est sans rapport avec le motifque l'ensemble des elements invoques par la defenderesse « etablit ledoute quant à la veracite du vol allegue ». La decision critiquee estdes lors depourvue de motifs susceptibles d'en constituer le fondement(violation de l'article 149 de la Constitution).

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Suivant l'article 1235, alinea 1er, du Code civil, tout paiement supposeune dette : ce qui a ete paye sans etre du est sujet à repetition.

Aux termes de l'article 1315, alinea 1er, du Code civil, celui qui reclamel'execution d'une obligation doit la prouver.

Il en resulte qu'il appartient au demandeur en restitution de l'indud'etablir que le paiement qu'il a effectue est depourvu de cause.

Apres avoir enonce que « [la defenderesse] poursuit le recouvrement desommes qu'elle estime avoir payees indument à son assuree [lademanderesse] », l'arret considere qu'« il est legitime, compte tenu dela difficulte de la preuve, d'assouplir la charge de la preuve du vol quiincombe à l'assure » et que « le caractere vraisemblable ou non du volallegue doit s'apprecier in concreto en tenant compte de l'ensemble descirconstances de fait de la cause ». Il deduit des circonstances qu'ilreleve que « l'ensemble de ces elements etablissent le doute quant à laveracite du vol allegue par [la demanderesse] » et que celle-ci « doitdonc rembourser à son assureur les decaissements effectues à sonprofit ».

En dispensant la defenderesse d'etablir l'inexistence du vol, rendant sanscause le paiement fait à la demanderesse, l'arret viole les dispositionslegales precitees.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillersDidier Batsele, Martine Regout, Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, etprononce en audience publique du vingt-trois octobre deux mille quinze parle president de section Christian Storck, en presence de l'avocat generalThierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+------------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|-----------------+----------------+-------------|
| M. Regout | D. Batsele | Chr. Storck |
+------------------------------------------------+

23 OCTOBRE 2015 C.15.0149.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0149.F
Date de la décision : 23/10/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2015
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-10-23;c.15.0149.f ?
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