Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG S.14.0055.F
OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, etablissement public dont le siege est etablià Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,
contre
N. D. K.,
defenderesse en cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 20 mars 2014par la cour du travail de Mons.
Le 4 septembre 2015, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.
Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :
Dispositions legales violees
- articles 1er, 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs ;
- article 7, specialement S:S: 1er et 11, de l'arrete-loi du 28 decembre1944 concernant la securite sociale des travailleurs ;
- articles 58, tel qu'il etait applicable immediatement avant samodification par l'arrete royal du 6 septembre 2012 (M.B., 19 septembre2012), 59bis, tel qu'il etait applicable immediatement avant samodification par l'arrete royal du 28 septembre 2010 (M.B., 11 octobre2010), 59quinquies, S: 5, et 59sexies, tel qu'il etait applicableimmediatement avant sa modification par l'arrete royal du 28 septembre2010 (M.B., 11 octobre 2010), 142 et 143 de l'arrete royal du 25 novembre1991 portant reglementation du chomage ;
- article 580, 2DEG, du Code judiciaire ;
- principe general du droit suivant lequel la renonciation à un droit estde stricte interpretation ;
- article 149 de la Constitution.
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque annule la decision administrative C29 du 17 septembre 2009pour defaut de motivation adequate et formelle au sens de la loi du 29juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifset, se substituant à l'autorite administrative pour statuer sur lesdroits de la defenderesse, constate que :
- en portant à la connaissance du demandeur sa renonciation au beneficedes allocations de chomage, la defenderesse, conformement à l'article59sexies, S: 1er, alinea 5, de l'arrete royal du 25 novembre 1991, afourni un motif valable pour ne pas s'etre presentee à l'entretien du 11septembre 2009 des lors qu'elle n'etait plus soumise à la reglementationdu chomage ;
- n'etant plus soumise aux obligations des articles 58, 59bis à 59deciesde l'arrete royal du 25 novembre 1991, le demandeur n'etait pas en droitde prendre à son egard une mesure d'exclusion totale du benefice desallocations de chomage en application de l'article 59sexies, S: 6.
L'arret fonde sa decision plus particulierement sur les considerationssuivantes :
« [La defenderesse] a signe le 18 fevrier 2009 un deuxieme contrat [ecritvise à l'article 59quinquies, S: 5]. Elle a ensuite ete convoquee parcourrier simple du 17 juillet 2009 pour un troisieme entretien à tenir le5 aout 2009 ; elle ne s'y est toutefois pas presentee. (...)
Par [lettre recommandee] du 21 aout 2009, [le demandeur] a convoque [ladefenderesse] à un entretien devant se derouler le 11 septembre 2009.(...)
[La defenderesse] a renvoye [au demandeur] un formulaire C59 portant à laconnaissance du directeur [du bureau du chomage] le fait qu'elle nechomait plus depuis le 1er aout 2009 et se trouvait depuis à charge deson compagnon.
Ce formulaire etait date du 10 septembre 2009 et a ete rec,u par ledirecteur [...] le 14 septembre 2009.
La cour [du travail] constate que la procedure visee à l'article 59sexiesde [l'arrete royal du 25 novembre 1991] a ete regulierement suivie par [ledemandeur].
Quant à la decision C29 du 17 septembre 2009
Par C29 du 17 septembre 2009, (le demandeur) a pris la decision d'exclure(la defenderesse) du benefice des allocations de chomage à partir du 21septembre 2009, decision prise sur la base de l'article 59sexies, S:S:1er, alinea 4, et 6, alinea 1er, de l'arrete royal du 25 novembre 1991 enconsiderant que le motif invoque par (la defenderesse) pour ne pas devoirse presenter à l'entretien du 11 septembre 2009 n'etait pas, à sonestime, un motif valable.
De la sorte, (le demandeur) a considere, sans motiver sa position, que larenonciation du chomeur complet au benefice des allocations de chomage (1)ne constituait pas un motif valable pour ne pas donner suite à laprocedure d'activation visant à suivre le comportement de rechercheactive d'emploi dudit chomeur et (2) [autorisait le demandeur] à prendreune mesure d'exclusion totale du benefice des allocations conformement auxdispositions de l'article 59sexies, S: 6, de l'arrete royal.
Or, le cas de (la defenderesse) pose la question de savoir si larenonciation du travailleur [aux allocations de] chomage peut mettre finà la procedure d'activation ou la suspendre ; ou si, independamment decette meme renonciation, (le demandeur) est en droit de prendre une mesured'exclusion à l'egard de ce travailleur des l'instant ou les conditionsde l'article 59sexies [sont] reunies au cours de la periode d'evaluationdevant faire l'objet d'un troisieme entretien.
(Le demandeur) a fait l'impasse sur l'examen de cette question. Interrogeà cet egard, (il) pose pour principe que c'est en debut de procedure dited'activation qu'il convient de controler les conditions du maintien dudroit aux allocations de chomage [et qu']il n'y a pas lieu d'examiner cesconditions à chacun des stades de la procedure d'activation.
(Le demandeur) justifie sa position juridique par le fait que :
- d'une part, le [redacteur reglementaire] n'avait envisage de dispense desanction que dans l'hypothese du chomeur qui, au plus tard au moment del'entretien, avait repris le travail comme travailleur à temps plein ausens de l'article 28, S:S: 1er ou 2. En aucun cas il n'avait envisagel'hypothese du chomeur qui, au plus tard au moment de l'entretien, avaitrenonce [aux allocations de] chomage quel qu'en fut le motif ;
- d'autre part, si une simple declaration du chomeur selon laquelle ilrenonce aux allocations etait suffisante pour empecher la poursuite de laprocedure d'activation, cela ouvrirait la porte à de nombreux abus, àsavoir la conservation par le chomeur des cartes de controle couvrant desmensualites posterieures à sa declaration avec la possibilite d'enreclamer le paiement dans le delai de prescription triennal applicablepour la reclamation des allocations qui sont dues.
(Le demandeur) fait enfin observer que :
- l'arrete royal du 29 septembre 2010, entre en vigueur le 11 novembre2010, permet [...] au chomeur complet de renoncer au benefice desallocations de chomage pour un minimum de six mensualites d'allocations àpartir de sa declaration ecrite et irrevocable, etant acquis que leditchomeur fera l'objet d'une nouvelle convocation ; (...)
- cette reglementation n'est toutefois pas applicable en l'espece.
A l'estime de la cour [du travail], le fait que le [redacteur]reglementaire n'a pas envisage de modaliser le droit du chomeur completindemnise à renoncer au benefice des allocations de chomage avantl'entree en vigueur de l'arrete royal du 29 septembre 2010 ne privait pasce chomeur du droit de porter à la connaissance du directeur [du bureau]du chomage, en charge du suivi de la procedure d'activation de recherchesd'emploi, sa volonte de renoncer provisoirement ou definitivement aubenefice desdites allocations.
La cour [du travail] considere que, en avisant (le demandeur) qu'elle nechomait plus et se trouvait à charge de son compagnon, (la defenderesse)justifie par un motif valable sa non-presentation au troisieme entretiend'evaluation.
En effet, par sa decision de renoncer au benefice des allocations dechomage, (la defenderesse) n'etait plus soumise à la reglementation duchomage et plus particulierement aux obligations des articles 58, 59bis à59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991. Elle ne pouvait parconsequent plus faire l'objet d'une decision d'exclusion (du demandeur) enapplication desdits articles.
Au demeurant, à supposer que (la defenderesse) revienne sur sa decisionde renoncer au benefice des allocations de chomage, le [redacteur]reglementaire (article 59sexies, S: 1er, alinea 5, de l'arrete royal du 25novembre 1991) a prevu la poursuite de la procedure d'activation parl'envoi d'une nouvelle convocation au chomeur des l'instant ou le motifadmis comme justification de l'absence a cesse d'exister.
La cour [du travail] n'aperc,oit, par ailleurs, pas en quoi le cas duchomeur complet qui a repris le travail comme travailleur à temps pleindoit etre dissocie du cas du chomeur qui renonce au benefice desallocations de chomage, en ce sens que le comportement du premierjustifierait une mesure de suspension de la procedure d'activation alorsque l'attitude du second ne le justifierait pas.
En effet, dans l'un ou l'autre cas de figure, le but recherche, à savoirque le travailleur ne depende plus financierement de l'assurance chomage,est atteint.
De la meme maniere, la cour [du travail] n'aperc,oit pas comment lechomeur qui, par le biais de son organisme de paiement, a porte à laconnaissance [du demandeur] qu'il renonc,ait à la perception desallocations de chomage pourrait encore disposer de cartes de controle,dont la delivrance depend de la responsabilite des seuls organismes depaiement.
L'argument (du demandeur) suivant lequel cette renonciation pourrait etresource d'abus ne parait par consequent pas pertinent.
Pour le surplus, suivant l'enseignement de la Cour de cassation (...), laconstatation que, dans le cadre de la procedure dite d'activation, unchomeur ne se presente pas valablement à la seconde convocation [dudemandeur] ne dispense pas [ce dernier] d'examiner si ce chomeur qui nes'est pas presente n'aurait pas recherche activement un emploiconformement à l'engagement qu'il avait souscrit par contrat vise àl'article 59quinquies, S: 5, ce dont (le demandeur) s'est abstenu enl'espece.
La cour [du travail] annulera par consequent la decision administrativelitigieuse et, se substituant à l'autorite administrative, statuera surles droits de (la defenderesse) ainsi qu'il sera dit au dispositif dupresent arret. »
Griefs
Premiere branche
Aux termes de l'article 1er de la loi du 29 juillet 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs, il y a lieu d'entendre paracte administratif, l'acte juridique unilateral de portee individuelleemanant d'une autorite administrative et qui a pour but de produire deseffets juridiques à l'egard d'un ou de plusieurs administres ou d'uneautre autorite administrative.
L'article 2 de la loi dispose que les actes administratifs des autoritesadministratives vises à l'article 1er doivent faire l'objet d'unemotivation formelle.
En vertu de l'article 3 de la loi, la motivation exigee consiste enl'indication, dans l'acte, des considerations de droit et de fait servantde fondement à la decision et elle doit etre adequate.
Il y a lieu d'entendre par une motivation adequate de l'acteadministratif, toute motivation qui fonde raisonnablement la decisionconcernee.
Cette exigence est destinee à procurer à l'administre une informationsuffisante pour pouvoir apprecier les motifs de l'acte et l'opportunite dele contester eventuellement en justice.
Elle n'impose pas que l'acte comporte les motifs de ses motifs.
Aux termes de l'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, de l'arrete royal du25 novembre 1991 portant reglementation du chomage, si, sans motifvalable, le chomeur ne donne pas suite à la seconde convocation autroisieme entretien vise à l'alinea 1er du meme paragraphe du memearticle, il est assimile à un chomeur qui n'a pas respecte l'engagementsouscrit dans le contrat ecrit vise à l'article 59quinquies, S: 5, et estexclu du benefice des allocations conformement aux dispositions duparagraphe 6.
La decision litigieuse [du demandeur], qui indique qu'elle est prise surla base de l'article 59sexies, S:S: 1er, alinea 4, et 6, alinea 1er, 1DEG,de l'arrete royal du 25 novembre 1991, est motivee comme suit : « Parlettre recommandee du 21 aout 2009, vous avez ete convoquee à nouveaupour un troisieme entretien d'evaluation afin de verifier si vous avezrespecte le deuxieme contrat. Cet entretien etait prevu au bureau duchomage [...] le 11 septembre 2009. Vous n'avez pas donne suite à cettedeuxieme convocation, sans motif valable ».
La decision indique ainsi les considerations de droit et de fait qui luiont servi de fondement et est donc regulierement motivee au regard de laloi du 29 juillet 1991.
Celle-ci n'impose en effet pas à l'auteur de l'acte d'indiquer les motifsde ses motifs et donc d'indiquer en outre pourquoi il considere que leselements en sens contraire invoques par le destinataire de l'acte ne sontpas de nature à justifier une decision differente.
Le demandeur n'avait des lors pas à mentionner la raison pour laquelle ilestimait que le motif invoque par la defenderesse pour ne pas devoir sepresenter à l'entretien du 11 septembre 2009 n'etait pas un motif valableau sens de l'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, de l'arrete royal du 25novembre 1991 justifiant une exclusion sur la base de l'article 59sexies,S: 6, de l'arrete royal du 25 novembre 1991.
Il n'etait pas, non plus, tenu d'examiner si la defenderesse avaitrecherche activement un emploi conformement à l'engagement qu'elle avaitsouscrit dans le contrat ecrit vise à l'article 59quinquies, S: 5, del'arrete royal du 25 novembre 1991, des lors qu'il constate conformementà l'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, de l'arrete royal du 25 novembre1991 que la defenderesse n'a pas donne suite à la seconde convocation autroisieme entretien d'evaluation, ce qui lui permettait d'appliquer lasanction d'exclusion.
Il s'ensuit qu'en decidant d'annuler, pour defaut de motivation, ladecision du demandeur excluant la defenderesse du benefice des allocationsde chomage, aux motifs, d'une part, que le demandeur ne motive pas saposition que la renonciation du chomeur complet au benefice desallocations de chomage ne constituait pas un motif valable pour ne pasdonner suite à la procedure d'activation visant à suivre le comportementde recherche active d'emploi dudit chomeur et le justifiait à prendre unemesure d'exclusion totale du benefice des allocations conformement auxdispositions du S: 6 de l'article 59sexies de l'arrete royal et, d'autrepart, que le demandeur s'est abstenu d'examiner si la defenderesse avaitrecherche activement un emploi conformement à l'engagement qu'elle avaitsouscrit dans le contrat vise à l'article 59quinquies, S: 5, l'arretattaque viole la notion legale d'obligation de motivation incombant auxautorites (violation des articles 1er, 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991relative à la motivation formelle des actes administratifs).
Deuxieme branche
L'article 7, S: 1er, de l'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant lasecurite sociale des travailleurs charge l'Office national de l'emploi, ledemandeur, d'assurer, avec l'aide des organismes crees ou à creer àcette fin, le paiement aux chomeurs involontaires et à leur famille desallocations qui leur sont dues.
En vertu de l'article 58 de l'arrete royal du 25 novembre 1991 portantreglementation du chomage, le chomeur complet doit, pour beneficier desallocations de chomage, rechercher activement un emploi.
Conformement à l'article 59bis, S: 1er, de l'arrete royal, le directeurdu bureau du chomage suit le comportement de recherche active d'emploi duchomeur complet (procedure d'activation du comportement de recherched'emploi).
Les articles 59bis à 59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991organisent la procedure de suivi.
Le chomeur est ainsi convoque à differents entretiens d'evaluation et sapresence y est obligatoire.
En vertu de l'article 59sexies, S: 1er, de cet arrete royal, le chomeurest convoque à un troisieme entretien en vue d'evaluer, s'il a souscritun contrat ecrit lors du deuxieme entretien, le respect de ce contrat.
L'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, dispose que si, sans motif valable,le chomeur ne donne pas suite à la seconde convocation au troisiemeentretien d'evaluation prevu à ce paragraphe, il est assimile à unchomeur qui n'a pas respecte l'engagement souscrit dans le contrat ecritet est exclu du benefice des allocations, conformement aux dispositions duparagraphe 6, qui prevoient la sanction d'exclusion du benefice desallocations de chomage en cas de non-respect par le chomeur del'engagement souscrit dans le second contrat ou en cas d'effortsinsuffisants pour s'inserer sur le marche du travail.
La renonciation du chomeur complet indemnise au benefice des allocationsde chomage posterieurement à la periode d'evaluation concernee par letroisieme entretien - s'etalant de la date de la conclusion du deuxiemecontrat d'activation à la premiere convocation au troisieme entretien -ne constitue pas, au sens de l'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, del'arrete royal du 25 novembre 1991, un motif valable pour ne pas donnersuite à la seconde convocation au troisieme entretien d'evaluation.
Une telle renonciation est en effet sans incidence sur la procedured'activation ; elle n'a pas pour effet de la rendre sans objet, à tout lemoins en ce qui concerne la periode d'evaluation concernee par letroisieme entretien, ni d'en entrainer la suspension, des lors qu'avantl'entree en vigueur de l'arrete royal du 28 septembre 2010 (qui aintroduit dans l'article 59bis de l'arrete royal du 25 novembre 1991 unparagraphe 10 qui prevoit que la procedure de suivi peut desormais etresuspendue lorsque le chomeur renonce irrevocablement et pour six mois aumoins aux allocations), la renonciation aux allocations de chomage nesuspendait pas la procedure d'activation.
Le fait que la defenderesse n'a plus pretendu aux allocations de chomageà partir du 1er aout 2009, soit apres sa premiere convocation autroisieme entretien adressee le 17 juillet 2009, et n'etait donc plus, àcette date, soumise aux articles 58 et 59bis de l'arrete royal du 25novembre 1991 n'implique donc pas qu'elle ait ete dispensee del'obligation de rechercher activement un emploi pour la periode durantlaquelle elle pretendait encore beneficier des allocations de chomage,soit jusqu'au 31 juillet 2009.
Par ailleurs, et en vertu de l'article 59bis de l'arrete royal du 25novembre 1991, à tout le moins jusqu'au 31 juillet 2009, le directeur dubureau [du chomage] pouvait verifier le comportement actif de ladefenderesse, des lors que, durant la periode d'evaluation concernee parle troisieme entretien, la defenderesse etait toujours chomeuse completeindemnisee et n'avait pas encore renonce au benefice des allocations.
En outre, la renonciation au benefice des allocations de chomageintervenue apres la periode d'evaluation n'etait pas de nature à empecherle directeur du bureau de chomage competent de prendre une decisionvis-à-vis de la defenderesse, des lors qu'en vertu des articles 142 et143 de l'arrete royal du 25 novembre 1991, le directeur du bureau dechomage competent peut prendre une decision sur le droit aux allocationsà l'egard d'une personne qui a cesse d'emarger à l'assurance chomage aumoment ou la decision est prise ou notifiee ou doit produire ses effets.
Il s'ensuit qu'en decidant que la defenderesse a fourni un motif valablepour ne pas s'etre presentee à l'entretien du 11 septembre 2009, des lorsque, par sa decision de renonciation au benefice des allocations dechomage à partir du 1er aout 2009, la defenderesse n'etait plus soumiseà la reglementation du chomage et, plus particulierement, aux obligationsdes articles 58, 59bis à 59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991portant reglementation du chomage, l'arret attaque viole la notion legalede motif valable au sens de l'article 59sexies, S: 1er, alinea 4, del'arrete royal du 25 novembre [1991] precite (violation de laditedisposition) et ne justifie des lors pas legalement sa decision (violationdes articles 7, specialement S:S: 1er et 11, de l'arrete-loi du 28decembre 1944 concernant la securite sociale des travailleurs et 58,59bis, 59sexies, 142 et 143 de l'arrete royal du 25 novembre 1991 portantreglementation du chomage).
Troisieme branche
D'une part, la renonciation à un droit est de stricte interpretation(principe general du droit vise au moyen).
La renonciation par un chomeur au benefice des allocations de chomage quipresentent un caractere successif ne vaut des lors en regle qu'à compterde cette renonciation ou de la date à laquelle l'auteur de larenonciation indique qu'elle produit ses effets.
Elle ne soustrait des lors pas le chomeur, auteur de cette renonciation,à la reglementation du chomage (notamment les articles 58 et 59bis à59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991) qui lui etait applicableavant que cette renonciation ne produise ses effets.
D'autre part, le directeur du bureau de chomage competent peut, en vertudes articles 142 et 143 de l'arrete royal du 25 novembre 1991, prendre unedecision sur le droit aux allocations à l'egard d'une personne qui acesse d'emarger à l'assurance chomage au moment ou la decision est priseou notifiee ou doit produire ses effets.
Enfin, lorsque [le demandeur] exclut le chomeur du benefice desallocations et que le chomeur conteste cette decision, le jugement decette contestation portant sur le droit du chomeur aux allocations relevede la competence du tribunal du travail en vertu de l'article 580, 2DEG,du Code judiciaire.
Saisi de pareille contestation, le tribunal controle la legalite de ladecision d'exclusion et statue sur les droits du chomeur aux allocationsdont il est exclu.
Il lui appartient donc, en cas de renonciation au benefice des allocationsde chomage, d'apprecier si le chomeur a, pour la periode anterieure,satisfait à ses obligations qui decoulent des articles 58, 59bis à59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991.
Ayant constate que la defenderesse a renonce au benefice des allocationsde chomage à partir du 1er aout 2009, l'arret attaque n'a des lors pas puconsiderer que la defenderesse n'etait plus soumise à la reglementationdu chomage pour la periode anterieure, et devait donc, statuant sur lesdroits du chomeur aux allocations, examiner si la defenderesse avaitrecherche activement un emploi conformement à l'article 58, S: 1er, del'arrete royal du 25 novembre 1991 et à l'engagement souscrit dans lecontrat vise à l'article 59quinquies, S: 5, de l'arrete royal du 25novembre 1991.
En omettant de ce faire, l'arret attaque n'est pas legalement justifie(violation des articles 58, 59bis, 59quinquies, S: 5, 59sexies, 142 et 143de l'arrete royal du 25 novembre 1991 portant reglementation du chomage et580, 2DEG du Code judiciaire, et meconnaissance du principe general citeen tete du moyen) ou, à tout le moins, n'est pas regulierement motive,des lors qu'il ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer soncontrole de legalite à defaut d'indiquer dans ses motifs les elements defait justifiant que la defenderesse avait recherche activement un emploi(violation de l'article 149 de la Constitution).
III. La decision de la Cour
Quant à la deuxieme branche :
L'article 59quinquies, S: 5, alinea 1er, de l'arrete royal du 25 novembre1991 portant reglementation du chomage prevoit dans le cadre du suivi ducomportement de recherche active d'emploi du chomeur complet que, dans lesconditions fixees par cette disposition, le directeur invite le chomeur àsouscrire un nouveau contrat ecrit dans lequel il s'engage à mener lesactions concretes qui sont attendues de lui au cours des mois suivants.
Suivant l'article 59sexies, S: 1er, alinea 1er, au plus tot àl'expiration d'un delai de quatre mois prenant cours le lendemain de lasignature de ce contrat ecrit, le directeur convoque le chomeur à untroisieme entretien au bureau du chomage en vue d'evaluer le respect parle chomeur de l'engagement qu'il a souscrit dans le contrat ecrit.
L'alinea 3 dispose que, si le chomeur ne se presente pas à l'entretiend'evaluation, une nouvelle convocation lui est envoyee par lettrerecommandee et l'alinea 4, que, si, sans motif valable, le chomeur nedonne pas suite à la seconde convocation, il est assimile à un chomeurqui n'a pas respecte l'engagement souscrit dans le contrat ecrit et estexclu du benefice des allocations conformement aux dispositions duparagraphe 6.
L'article 59sexies, S: 6, prevoit que, en cas de non-respect del'engagement souscrit dans le contrat ecrit vise à l'article 59quinquies,S: 5, le chomeur est exclu du benefice des allocations, dans la mesure quecette disposition determine.
L'article 143 du meme arrete royal prevoit que le directeur du bureau duchomage peut prendre des decisions sur le droit aux allocations à l'egarddu travailleur qui n'a pas perc,u ou demande d'allocations le jour ou ladecision est prise, le jour ou elle a ete notifiee ou le jour ou elle doitproduire ses effets.
Cette disposition confere au directeur du bureau du chomage le pouvoird'exclure du benefice des allocations le travailleur qui, sans motifvalable, ne donne pas suite à la seconde convocation envoyee conformementà l'article 59sexies, S: 1er, alinea 3, et qui ne perc,oit ou ne demandepas d'allocations le jour ou la decision est prise, est notifiee ou doitsortir ses effets.
Il s'en deduit que la circonstance que le travailleur ne demande plusd'allocations à la date pour laquelle il est convoque à un troisiemeentretien d'evaluation de son comportement de recherche active d'emploi,en regle, ne fait pas obstacle à l'application de l'article 59sexies, S:6, et ne constitue pas davantage un motif valable, au sens de l'article59sexies, S: 1er, alinea 4, precite, de ne pas donner suite à laconvocation à cet entretien.
L'arret attaque enonce que, le 21 aout 2009 et conformement à l'article59sexies, S: 1er, alinea 3, le demandeur a convoque la defenderesse à untroisieme entretien d'evaluation de son comportement de recherche actived'emploi, qui devait avoir lieu le 11 septembre 2009 ; que cette dernierene s'est pas presentee à l'entretien mais a informe le directeur dubureau du chomage que, depuis le 1er aout 2009, elle ne chomait plus et setrouvait à charge de son compagnon ; que le demandeur a exclu ladefenderesse du benefice des allocations de chomage sur la base del'article 59sexies, S: 6, parce que, sans motif valable, elle n'avait pasdonne suite à la convocation du 21 aout 2009.
En considerant que, « par sa decision de [renoncer] au benefice desallocations de chomage, [la defenderesse] n'etait plus soumise à lareglementation du chomage et plus particulierement aux articles 58 [et]59bis à 59decies de l'arrete royal du 25 novembre 1991 », l'arretattaque ne decide pas legalement que la defenderesse « ne pouvait [...]plus faire l'objet d'une decision d'exclusion [du demandeur] enapplication desdits articles » et qu'elle « justifie par un motifvalable sa non-presentation au troisieme entretien d'evaluation ».
Le moyen, en cette branche, est fonde.
Quant à la premiere branche :
L'arret attaque fonde sa decision d'annuler la decision administrativelitigieuse du demandeur « pour defaut de motivation adequate et formelleau sens de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelledes actes administratifs » sur le motif que le demandeur s'estabstenu d'examiner si la defenderesse a recherche activement un emploiconformement à l'engagement qu'elle avait souscrit par le contrat ecritvise à l'article 59quinquies, S: 5, de l'arrete royal du 25 novembre1991.
Si, en vertu des articles 1er à 3 de la loi du 29 juillet 1991, ledemandeur doit motiver formellement sa decision relative au droit auxallocations de la defenderesse, ces dispositions n'imposent pas audemandeur de proceder à un examen determine avant de prendre cettedecision.
Dans la mesure ou il critique ce motif, le moyen, en cette branche, estfonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arret attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant la cour du travail de Liege.
Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers DidierBatsele, Martine Regout, Mireille Delange et Sabine Geubel, et prononce enaudience publique du cinq octobre deux mille quinze par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general Jean MarieGenicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.
+--------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M. Delange |
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| M. Regout | D. Batsele | A. Fettweis |
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5 OCTOBRE 2015 S.14.0055.F/1