Cour de cassation de Belgique
Arret
* NDEG P.15.0813.N
* SKYPE COMMUNICATIONS, sarl,
* demanderesse en renvoi d'une affaire d'un tribunal à un autre,
* Mes Frederic Thiebaut, avocat au barreau de Malines, Steven DeSchrijver et Thomas Daenens, avocats au barreau de Bruxelles.
* * en la cause
PROCUREUR DU ROI D'ANVERS, division Malines,
contre
SKYPE COMMUNICATIONS, sarl,
prevenue.
I. la procedure devant la cour
VII. VIII. La requete vise le dessaisissement du tribunal correctionneld'Anvers, division Malines, pour cause de suspicion legitime et lerenvoi à un autre tribunal.
IX. Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
X. L'avocat general delegue Alain Winants a conclu.
II. les motifs de la demande
La demanderesse a depose une requete le 9 juin 2015 au greffe de la Cour,invoquant qu'il existe, dans le chef du tribunal de premiere instanced'Anvers, une suspicion legitime, eu egard aux commentaires du magistratde presse dudit tribunal concernant une action publique exercee à chargede la demanderesse et par lesquels il aurait declare que les faits imputesà la demanderesse auraient ete commis, au mepris de la presomptiond'innocence. La suspicion legitime invoquee se fonde egalement sur lepartage par le magistrat de presse sur son compte twitter professionnel,d'un message (un `tweet') assorti en annexe d'un article sur l'affaire,par lequel ce magistrat de presse souscrit au contenu de l'article.
La requete est annexee au present arret, en copie certifiee conforme.
III. la decision de la cour
1. La requete a ete regulierement introduite.
2. Le renvoi d'une affaire d'un tribunal à un autre pour cause desuspicion legitime n'est possible que lorsque tous les juges de lajuridiction ne sont pas en mesure de se prononcer de maniere independanteet impartiale sur l'affaire ou s'il devait exister un doute raisonnable àcet egard, dans le chef des parties, de tiers ou meme dans l'opinionpublique.
3. Une requete visant le renvoi d'une affaire d'un tribunal à un autrepour cause de suspicion legitime n'est recevable que si elle se fonde surdes faits clairement identifiables et precis permettant de justifier cettepresomption à l'egard de tous les juges de cette juridiction.
4. Le magistrat de presse, à savoir le juge designe par le chef de corpsd'une juridiction pour assurer les contacts avec la presse et fournir, lecas echeant, des informations à la presse sur les activites de lajuridiction et les affaires jugees ou en attente de jugement, n'est pas lerepresentant de la juridiction ni de tous les magistrats qui la composent.Il ne s'exprime pas davantage au nom de cette juridiction, niindividuellement au nom des magistrats qui la composent.
5. Il ne peut etre deduit en soi des declarations que le magistrat depresse aurait faites aux medias radio et television et du partage d'un`tweet', quand bien meme il trahirait son opinion sur certains aspects del'action publique exercee à charge de la demanderesse, au mepris de lapresomption d'innocence, que tous les juges du tribunal de premiereinstance d'Anvers ne seraient pas en mesure de se prononcer de maniereindependante et impartiale sur l'affaire ou qu'il existerait un douteraisonnable à cet egard, dans le chef des parties, de tiers ou meme dansl'opinion publique.
La requete est manifestement irrecevable.
Par ces motifs,
* * La Cour
* Rejette la requete ;
Condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Paul Maffei, president, Filip Van Volsem, Alain Bloch, PeterHoet et Sidney Berneman, conseillers, et prononce en audience publique duvingt-trois juin deux mille quinze par le president Paul Maffei, enpresence de l'avocat general delegue Alain Winants, avec l'assistance dugreffier Frank Adriaensen.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.
Le greffier, Le conseiller,
23 JUIN 2015 P.15.0813.N/1