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23/06/2015 | BELGIQUE | N°P.14.0582.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 juin 2015, P.14.0582.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG P.14.0582.N

* I. INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL competent pour le territoire de laprovince de Flandre occidentale,

* demandeur en reparation,

* demandeur,

* * contre

1. WESTFRO, societe anonyme,

2. D. V.,

prevenus,

defendeurs,

II. WESTFRO, societe anonyme,

prevenu,

demanderesse en cassation,

contre

* INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL, precite,

* demandeur en reparation,

* defendeur,

III. D. V., precite,

prevenu,

demand

eur,

Me Frederik Bruloot, avocat au barreau de Gand,

contre

* INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL competent pour le territoire de laprovince de Flandre occidentale, preci...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG P.14.0582.N

* I. INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL competent pour le territoire de laprovince de Flandre occidentale,

* demandeur en reparation,

* demandeur,

* * contre

1. WESTFRO, societe anonyme,

2. D. V.,

prevenus,

defendeurs,

II. WESTFRO, societe anonyme,

prevenu,

demanderesse en cassation,

contre

* INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL, precite,

* demandeur en reparation,

* defendeur,

III. D. V., precite,

prevenu,

demandeur,

Me Frederik Bruloot, avocat au barreau de Gand,

contre

* INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL competent pour le territoire de laprovince de Flandre occidentale, precite,

* demandeur en reparation,

defendeur.

I. la procedure devant la cour

XII. XIII. Les pourvois sont diriges contre un arret rendu le 28 fevrier2014 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.

XIV. Le demandeur I invoque un moyen dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

XV. La demanderesse II invoque un moyen dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

XVI. Le demandeur III invoque deux moyens dans un memoire annexe aupresent arret, en copie certifiee conforme.

XVII. Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

XVIII. L'avocat general Luc Decreus a conclu.

II. la decision de la cour

Sur la fin de non-recevoir opposee au pourvoi I :

1. Les demandeurs II et III invoquent que le pourvoi I est irrecevable. Eneffet, concernant la defenderesse I.1, il n'a pas ete signifie aumandataire ad hoc designe. Des lors que la decision rendue sur l'action enreparation represente un litige indivisible, l'irrecevabilite du pourvoi,en tant qu'il est dirige contre la defenderesse I.1 entraine ainsil'irrecevabilite dudit pourvoi, en tant qu'il est dirige contre ledefendeur I.2.

2. En vertu de l'article 418, alinea 1er, du Code d'instructioncriminelle, le demandeur en reparation est tenu de signifier son pourvoiaux personnes contre lesquelles il est dirige.

3. Il ressort du texte de l'article 2bis du titre preliminaire du Code deprocedure penale et de l'objectif de cette disposition de garantir unedefense independante à la personne morale qu'à partir du moment ou ilest designe, seul le mandataire ad hoc est competent pour representer lapersonne morale dans le proces penal. Il en resulte non seulement que lemandataire ad hoc designe est seul competent pour prendre une decision aunom de la personne morale quant à l'exercice des voies de recours, maisegalement que la signification d'un pourvoi en cassation à une personnemorale pour laquelle un mandataire ad hoc a ete designe, n'est reguliereque si elle est faite à ce mandataire ad hoc.

4. Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que ledemandeur I n'a pas fait signifier son pourvoi au mandataire ad hocdesigne pour la defenderesse I.1.

Dans la mesure ou elle est dirigee contre la defenderesse I.1, la fin denon-recevoir opposee au pourvoi I doit etre admise.

5. Les articles 31 et 1084 du Code judiciaire ne sont pas applicables enmatiere penale, meme si les juridictions repressives se prononcent sur lesactions en reparation introduites en vertu de l'article 6.1.41 du Codeflamand de l'amenagement du territoire par les autorites mentionnees àcette disposition.

6. L'irrecevabilite du pourvoi introduit par un demandeur en reparationcontre la decision rendue sur cette action en reparation en ce quiconcerne un prevenu, n'entraine pas l'irrecevabilite dudit pourvoi en tantqu'il est dirige contre un autre prevenu.

Dans la mesure ou elle est dirigee contre le defendeur I.2, la fin denon-recevoir opposee au pourvoi I est rejetee.

Sur la recevabilite des pourvois II et III :

7. L'arret declare irrecevable l'action en reparation dirigee contre lesdemandeurs II et III.

Dans la mesure ou ils sont egalement diriges contre cette decision, lespourvois II et III sont irrecevables, à defaut d'interet.

Sur le moyen de la demanderesse II et sur le premier moyen du demandeurIII :

8. Le moyen invoque la violation des articles 7.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, 15.1,troisieme phrase, du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques, 12 et 14 de la Constitution, 2, alinea 2, du Code penal,4.2.1, 4.2.2, 4.2.3 et 6.1.1 du Code flamand de l'amenagement duterritoire, ainsi que la meconnaissance du principe general du droitrelatif à l'application de la loi penale plus favorable : l'arret ometd'appliquer à la prevention les nouvelles dispositions penales plusfavorables, telles qu'elles ressortent au moment de l'arret de lacombinaison des articles 4.2.1 à 4.2.3 inclus et 6.1.1, alinea 1er, 1DEG,du Code flamand de l'amenagement du territoire et 3.1.1DEG, 3.2, 4.1 et5.5DEG de l'arrete du Gouvernement flamand du 16 juillet 2010 portantdetermination des actes qui ne requierent pas d'autorisationurbanistique ; la decision selon laquelle l'application de la loi penaleplus favorable ne prevaut pas lorsqu'une modification est apportee, nonpas à une disposition penale, mais à l'arrete d'execution, le fait s'entrouverait-il meme depenalise ensuite de cette modification, est contraireaux articles 7.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertes fondamentales et 15.1, troisieme phrase, du Pacteinternational relatif aux droits civils et politiques ; dansl'appreciation de l'applicabilite de la loi penale plus favorable, l'arretomet de se poser la question de savoir si l'arrete d'execution plusfavorable a ete inspire par un changement de conception du caracterereprehensible par le pouvoir decretal ; de plus, l'arret decide, à tort,que le pouvoir decretal n'a pas modifie la disposition penale au sensstrict ; en effet, la disposition penale est rendue plus favorable, àtout le moins à trois titres ; selon l'article 99, S: 2, du decret duConseil flamand 18 mai 1999 portant organisation de l'amenagement duterritoire, l'exemption d'une autorisation urbanistique etait subordonneeà la nature ou à l'ampleur des travaux, operations et modifications etdonc, non pas aux consequences spatiales concretes ou potentielles, alorsque, depuis l'entree en vigueur du decret du Conseil flamand du 27 mars2009 adaptant et completant la politique d'amenagement du territoire, desautorisations et du maintien et, ensuite, sur la base de l'article 4.2.3du Code flamand de l'amenagement du territoire, l'exemption estsubordonnee au caractere temporaire ou occasionnel ou à impact spatiallimite ; il en ressort, ainsi que de la genese legale, que le but etaitd'encadrer plus largement et plus clairement l'exemption d'uneautorisation urbanistique ; compte tenu de ce regime d'exemption elargi,il est etabli que la disposition penale prevue à l'article 6.1.1, alinea1er, 1DEG, du Code flamand de l'amenagement du territoire est plusfavorable que celle prevue à l'article 146, alinea 1er, 1DEG, du decretdu 18 mai 1999 ; meme l'instauration d'une categorie d'actes soumis àl'obligation de declaration, outre les categories d'actes exemptes dedeclaration et soumis à l'obligation d'autorisation, conforte cetteconclusion ; enfin, il ressort egalement de la definition, faite àl'article 1.1.2, 7DEG, du Code flamand de l'amenagement du territoire, dela notion de "travaux, modifications ou activites ayant des implicationsspatiales" figurant à l'article 6.1.1, alinea 1er, 1DEG, et de lacondition explicite d'impact spatial, que le pouvoir decretal a instaureune disposition penale plus favorable ; l'implication spatiale n'etait pasrequise pour la repression sur la base de l'article 146, alinea 1er, 1DEG,du decret du 18 mai 1999 ; une telle volonte d'adoucir la dispositionpenale apparait egalement au travers du remplacement de l'arrete duGouvernement flamand du 14 avril 2000 portant determination desmodifications de fonction subordonnees à un permis et des travaux, acteset modifications qui ne requierent pas d'autorisation urbanistique parl'arrete du Gouvernement flamand du 16 juillet 2010 portant determinationdes actes qui ne requierent pas d'autorisation urbanistique et du regimed'exemption qu'il elargit et du regime d'exemption encore plus elargi parl'arrete de modification du Gouvernement flamand du 17 janvier 2014.

Dans la mesure ou l'arret aurait decide qu'il n'y aurait pas de loi penaleplus favorable, il y a lieu de poser à la Cour constitutionnelle laquestion prejudicielle suivante :

« Les articles 12 et 14 de la Constitution, lus ou non en combinaisonavec les articles 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'hommeet des libertes fondamentales et 15 du Pacte international relatif auxdroits civils et politiques, sont-ils violes par les articles 1.1.2, 7DEG,et 6.1.1 du Code flamand de l'amenagement du territoire, en ce que cesdispositions prevoient un caractere reprehensible sur la base de la notionde "travaux, modifications ou activites ayant des implications spatiales",notions tellement vagues et larges qu'elles ne permettent pas auxjusticiables d'evaluer à l'avance le caractere punissable ou non de sesactes et, de surcroit, laissent au juge trop de liberte d'appreciationpour determiner le caractere punissable ou non d'un agissement, alors queles normes referentielles ne permettent pas l'utilisation de tellesnotions comme element de l'infraction, et que, par ailleurs, l'utilisationpar le pouvoir decretal d'une notion plus large que celle admise etutilisee en principe n'est pas justifiee et ne peut meme etrereconnue ? »

9. L'article 7.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertes fondamentales dispose : « Nul ne peut etre condamne pour uneaction ou une omission qui, au moment ou elle a ete commise, neconstituait pas une infraction d'apres le droit national ou international.De meme il n'est inflige aucune peine plus forte que celle qui etaitapplicable au moment ou l'infraction a ete commise. »

L'article 15.1 du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques dispose : « Nul ne sera condamne pour des actions ou omissionsqui ne constituaient pas un acte delictueux d'apres le droit national ouinternational au moment ou elles ont ete commises. De meme, il ne serainflige aucune peine plus forte que celle qui etait applicable au momentou l'infraction a ete commise. Si, posterieurement à cette infraction, laloi prevoit l'application d'une peine plus legere, le delinquant doit enbeneficier. »

L'article 2 du Code penal dispose : « Nulle infraction ne peut etre puniede peines qui n'etaient pas portees par la loi avant que l'infraction futcommise.

Si la peine etablie au temps du jugement differe de celle qui etait porteeau temps de l'infraction, la peine la moins forte sera appliquee. »

10. La regle consacree par ces dispositions et le principe general dudroit relatif à l'application de la loi penale plus favorable ne sontapplicables que si la loi en vigueur au moment de la decision judiciairediffere de la loi en vigueur au moment de l'infraction. Cette regle n'estpas applicable lorsqu'un arrete d'execution est remplace par un autre,sans que la loi meme s'en voie modifiee. Les faits qui, ensuite du premierarrete d'execution, etaient punissables au moment de leur commission, lerestent, meme si, ensuite d'un arrete d'execution ulterieur de la meme loirestee inchangee, ils ne sont plus punissables au moment de la decisionjudiciaire. L'absence de changement de la disposition penale revele uneintention inchangee du legislateur quant à la repression, sans qu'y fasseobstacle une modification d'un arrete d'execution qui est, par nature,temporaire et changeant.

Dans la mesure ou il est deduit d'une autre premisse juridique, le moyenmanque en droit.

11. L'article 99, S: 2, du decret du Conseil flamand du 18 mai 1999prevoyait que le Gouvernement flamand pouvait determiner la liste destravaux, operations et modifications qui ne necessitent pas d'autorisationurbanistique en raison de leur nature ou de leur ampleur. L'article 4.2.3du Code flamand de l'amenagement du territoire dispose que le Gouvernementflamand determine la liste des actes à caractere temporaire ouoccasionnel ou à impact spatial limite pour lesquels une autorisationurbanistique n'est pas requise.

De cette modification decretale ou de la genese dudit decret ne peut etrededuite l'intention du legislateur decretal d'attenuer les conditions dela repression des actes, autrefois punis par l'article 146, alinea 1er,1DEG, du decret du 18 mai 1999 et actuellement par l'article 6.1.1, alinea1er, 1DEG, du Code flamand de l'amenagement du territoire.

Une telle intention ne peut davantage etre deduite de l'emploi de lanotion generique des "actes" à l'article 6.1.1, alinea 1er, 1DEG, du Codeflamand de l'amenagement du territoire et la definition qui en est donneeà l'article 1.1.2, 7DEG, dudit Code comme "travaux, modifications ouactivites ayant des implications spatiales" au lieu de l'usage des notionsde "operations, travaux ou modifications" figurant à l'article 146,alinea 1er, 1DEG, du decret du 18 mai 1999, ni de l'instauration d'unecategorie d'actes soumis à l'obligation de declaration, en sus descategories d'actes soumis à l'obligation d'autorisation et de ceuxexemptes de l'obligation de declaration.

Dans la mesure ou il est deduit d'une autre premisse juridique, le moyenmanque en droit.

12. La Constitution prevoit à l'article 12, alinea 2, que nul ne peutetre poursuivi que dans les cas prevus par la loi, et dans la formequ'elle prescrit et, à l'article 14, que nulle peine ne peut etre etablieni appliquee qu'en vertu de la loi.

Le principe de legalite en matiere repressive figurant à ces dispositionsconstitutionnelles est un droit fondamental garanti de maniere totalementou partiellement analogue par les articles 7.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et 15.1 duPacte international relatif aux droits civils et politiques.

Conformement à l'article 26, S: 4, alinea 2, 2DEG, de la loi speciale du6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la Cour peut examiner sil'article 6.1.1, alinea 1er, 1DEG, du Code flamand de l'amenagement duterritoire ne viole manifestement pas les articles 12, alinea 2, et 14 dela Constitution.

13. La legalite d'une disposition penale requiert qu'elle soitsuffisamment accessible et, lue en elle-meme ou dans le contexte avecd'autres dispositions, qu'elle decrive de maniere suffisamment precise lecomportement qualifie de punissable, de sorte que sa portee soitraisonnablement previsible.

Le fait que le juge dispose d'une certaine liberte d'appreciation n'estpas, en soi, contraire à cette condition de previsibilite raisonnable. Eneffet, il y a lieu de tenir compte du caractere general des lois, dessituations variees auxquelles elles s'appliquent et de l'evolution desagissements qu'elles sanctionnent. Du principe meme de la generalite de laloi resulte que ses termes ne peuvent souvent etre d'une precisionabsolue. La condition de la previsibilite raisonnable est remplielorsqu'il est permis à la personne à laquelle s'applique la dispositionpenale, de connaitre, sur la base de cette disposition et, pour autant quede besoin, à la lumiere de son interpretation par les juridictions, lesagissements et omissions pouvant entrainer cette responsabilite penale.

14. L'article 1.1.4 du Code flamand de l'amenagement du territoire disposeque l'amenagement du territoire est axe sur un developpement spatialdurable, gerant l'espace disponible au profit de la generation actuelle,sans pour autant compromettre les besoins des generations futures. A ceteffet, les besoins spatiaux des differentes activites sociales sontsimultanement compares. La portee spatiale, l'impact environnemental etles consequences culturelles, economiques, esthetiques et sociales sontpris en compte. C'est ainsi que l'on cherche à optimiser la qualitespatiale.

En neerlandais, "implicatie" est la relation logique consistant en cequ'une chose en entraine une autre, la consequence ou le fait d'etreimplique.

Eu egard à l'objectif de l'amenagement du territoire tel que decrit àl'article 1.1.4 du Code flamand de l'amenagement du territoire et à lasignification usuelle du terme "implication", la notion de "travaux,modifications ou activites ayant des implications spatiales" permet àquiconque de savoir quels actes ou omissions peuvent conduire à uneresponsabilite penale sur la base de l'article 6.1.1, alinea 1er, 1DEG, duCode flamand de l'amenagement du territoire.

15. Il resulte de ce qui precede que la definition de la notion d' "actes"donnee par l'article 1.1.2, 7DEG, dudit Code comme "travaux, modificationsou activites ayant des implications spatiales" et l'usage qui en est faità l'article 6.1.1, alinea 1er, 1DEG, du Code flamand de l'amenagement duterritoire est precise à suffisance et ne viole manifestement pas lesarticles 12, alinea 2, et 14 de la Constitution, ni les articles 7.1 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales et 15.1 du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques.

Conformement à l'article 26, S: 4, alinea 2, 2DEG, de la loi speciale du6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, il n'y a pas lieu de poserla question prejudicielle.

Sur le second moyen du demandeur III :

16. Le moyen invoque la violation des articles 149 de la Constitution, 5du Code penal, 146, alinea 1er, 1DEG, du decret du Conseil flamand du 18mai 1999 portant organisation de l'amenagement du territoire et 6.1.1,alinea 1er, 1DEG, du Code flamand de l'amenagement du territoire : quantà l'appreciation de l'element moral, la motivation de l'arret estcontradictoire ; il decide, d'une part, que la prevention requiert un dolgeneral, ce qui suppose d'agir sciemment et volontairement, et, d'autrepart, qu'il est satisfait à l'exigence de l'element moral prevu pourl'infraction lorsque les demandeurs II et III agissent en contradictionavec ce qu'une personne normalement prudente et prevoyante, placee dansles memes circonstances de fait, aurait fait, ce qui indique que lanegligence suffit ; de plus, il decide que le demandeur III pouvait etdevait s'informer quant à savoir si une autorisation urbanistique etaitrequise pour les travaux de grande ampleur et prend ainsi en considerationun manque de prevoyance pour une infraction requerant un dol general ; àtout le moins, la motivation precitee est ambigue ou imprecise et elleempeche la Cour d'exercer son controle de la legalite ; la forme deculpabilite à prendre en consideration est toutefois le dol general et lanegligence ne suffit pas ; l'auteur doit savoir qu'il commet l'infractionet meme le vouloir ; un dol general ne peut etre deduit du fait d'agir desa propre volonte ni d'un manque de prevoyance ou de prudence ; l'arret nejustifie pas pourquoi il n'applique pas la cause exclusive de peine del'article 5, alinea 2, du Code penal ; le simple fait que le demandeur IIIa agi sciemment et volontairement n'impose pas au juge qui dispose d'unemarge d'appreciation, de punir les demandeurs II et III.

17. Lorsqu'un prevenu conteste l'existence d'un element constitutif d'uneinfraction mise à charge, sans toutefois proposer de conclusionsexplicites à cet egard, le juge ne meconnait pas son devoir de motivationen decidant le contraire sans en indiquer la raison.

Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

18. L'arret decide qu'il s'agit d'une action consciente et volontaire dansla commission de l'acte materiel, qu'il y a lieu de traduire parl'expression de la volonte libre et consciente des personnes impliquees,des lors qu'elles ne rendent pas admissible l'existence d'une causeexclusive de peine ou justificative. Il decide egalement que le faitd'agir contrairement à ce qu'une personne normalement prudente etprevoyante, placee dans les memes circonstances de fait, aurait fait,satisfait à cette forme de culpabilite.

L'arret constate toutefois que le demandeur III a agi sciemment etvolontairement, sans se fonder sur ces motifs.

Ainsi, le moyen est dirige contre des motifs surabondants et est, danscette mesure, irrecevable.

19. Par le motif que le demandeur III pouvait et devait, le cas echeant,s'informer quant à savoir si des travaux d'une telle ampleur requeraientune autorisation urbanistique, l'arret ne decide pas que l'element moralde l'infraction imputee au demandeur III consiste en une negligence, maisindique que la cause d'ignorance invoquee n'est pas admissible.

Dans cette mesure, le moyen se fonde sur une lecture erronee de l'arret etmanque en fait.

20. Sans contradiction ni imprecision et sans empecher la Cour d'exercerson controle de la legalite, l'arret decide que le demandeur III a commisles faits sciemment et volontairement.

Dans cette mesure, le moyen manque en fait.

21. Dans la mesure ou il critique la decision souveraine en fait selonlaquelle le demandeur III a commis les faits sciemment et volontairement,le moyen est irrecevable.

22. Il resulte de la genese legale et de l'objectif de l'article 5, alinea2, du Code penal que, si le juge constate, dans son appreciation de lacause d'excuse absolutoire inseree par cette disposition, que la personnephysique identifiee a commis la faute sciemment et volontairement, il esttenu de condamner tant la personne morale que cette personne physique. Eneffet, l'article 5, alinea 2, du Code penal ne permet pas qu'en pareilleoccurrence, le juge puisse librement decider s'il va condamner tant lapersonne morale que la personne physique ou seulement l'une d'elle.

Dans la mesure ou il est deduit d'une autre premisse juridique, le moyenmanque en droit.

Sur le moyen souleve d'office concernant la demande de reparationprononcee à charge du defendeur I.2 :

Disposition legale violee

- article 149, S:S: 1er et 2, du decret du Conseil flamand du 18 mai 1999portant organisation de l'amenagement du territoire.

23. En vertu de l'article 149, S: 2, du decret du 18 mai 1999, l'action enreparation est introduite par lettre ordinaire, au nom de la Regionflamande ou du College des bourgmestre et echevins, par les inspecteursurbanistes et les preposes du College des bourgmestre et echevins.

L'autorite demanderesse en reparation peut toujours modifier l'action enreparation en cours de procedure.

24. Selon l'article 149, S: 1er, alinea 1er, du decret de la Regionflamande du 18 mai 1999 applicable en l'espece, l'action en reparationrequiert l'avis conforme du Conseil superieur de la Politique deReparation, actuellement Conseil superieur de la Politique de Maintien(ci-apres : Conseil superieur). Cet avis prealable est une condition à larecevabilite de l'action en reparation et l'autorite demanderesse enreparation ne peut introduire sa demande au parquet de maniere recevablequ'apres avoir rec,u cet avis.

25. Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que :

- le demandeur a informe le parquet, par lettre du 8 decembre 2008, qu'ilsouhaitait introduire une action en reparation, que cette action a etesoumise au meme moment au Conseil superieur en vue d'obtenir l'avisconforme et que cet avis devait etre transmis avec la demande des qu'ilserait rendu ;

- le Conseil superieur a rendu un avis conforme le 19 janvier 2009 ;

- par lettre du 19 fevrier 2009, le demandeur a transmis cet avis auparquet avec la communication : « En complement de mon envoi du 8decembre 2008, avec l'action en reparation en ce dossier, je voustransmets ci-joint l'avis conforme du Conseil superieur de la Politique deMaintien. Puis-je vous demander de m'informer de la suite qui serareservee à ce dossier. »

26. Il resulte de la combinaison de ces pieces que, par la lettre du 8decembre 2008, le demandeur I a uniquement informe le parquet que leConseil superieur serait sollicite pour rendre un avis concernant lareparation qu'il souhaitait reclamer et que, par consequent, l'action enreparation n'a pas ete introduite aupres du parquet par la lettre du 8decembre 2008, mais bien par la lettre du 19 fevrier 2009, apres receptionde l'avis du Conseil superieur.

27. Les juges d'appel qui ont decide que l'avis n'avait pas ete recueilliet obtenu prealablement à l'introduction de l'action en reparation, desorte que cette action est irrecevable, n'ont pas justifie legalementcette decision.

Sur le moyen du demandeur I :

28. Dans la mesure ou il concerne l'action en reparation dirigee contre ladefenderesse I.1, le moyen ne concerne pas la recevabilite du pourvoi et,dans la mesure ou il concerne l'action en reparation dirigee contre ledefendeur I.2, il ne saurait entrainer une cassation sans renvoi.

Il n'y a pas lieu de repondre au moyen.

Le controle d'office

29. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et les decisions sont conformes à la loi.

Par ces motifs,

* * La Cour

* Casse l'arret attaque, en tant qu'il decide, concernant le defendeurI.2, que l'action en reparation est irrecevable ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Rejette le pourvoi I pour le surplus ;

Rejette les pourvois II et III ;

Condamne la Region flamande à la moitie des frais du pourvoi I ;

Condamne le defendeur I.2 au surplus des frais de ce pourvoi ;

Condamne les demandeurs II et III aux frais de leur pourvoi ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, à la cour d'appel d'Anvers.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Paul Maffei, president, Luc Van hoogenbemt, president desection, Filip Van Volsem, Alain Bloch et Sidney Berneman, conseillers, etprononce en audience publique du vingt-trois juin deux mille quinze par lepresident Paul Maffei, en presence de l'avocat general Luc Decreus, avecl'assistance du greffier Frank Adriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le conseiller,

23 JUIN 2015 P.14.0582.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.14.0582.N
Date de la décision : 23/06/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-06-23;p.14.0582.n ?
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