Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG C.14.0513.F
1. G. d. l. M. A. C.,
2. J. M. M. M. V.,
demandeurs en cassation,
representes par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,
contre
B. M.,
defenderesse en cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 6 mai 2014par le tribunal de premiere instance francophone de Bruxelles, statuant endegre d'appel.
Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.
L'avocat general Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Les demandeurs presentent trois moyens, dont le premier est libelle dansles termes suivants :
Dispositions legales violees
- article 747, S:S: 1er et 2, specialement alinea 6, du Code judiciaire ;
- article 149 de la Constitution.
Decisions et motifs critiques
Le jugement attaque ecarte des debats les conclusions de synthese deposees par les demandeurs le 21 fevrier 2014 et prononce à charge deces derniers les condamnations reprises à son dispositif.
Le jugement attaque fonde l'ecartement des conclusions susdites sur ce que:
« [La defenderesse] sollicite l'ecartement des conclusions de synthesedeposees au greffe du tribunal le 21 fevrier 2014 pour [la demanderesse]et [le demandeur].
Dans la mesure ou ces conclusions n'ont pas ete communiquees au conseil de[la defenderesse] dans [les] delais fixes pour l'echange des conclusionsentre les parties par le tribunal dans son ordonnance rendue sur la basede l'article 747, S: 1er, du Code judiciaire le 16 decembre 2013, alorsque l'ordonnance le prevoit expressement, il convient de les ecarter desdebats ».
Griefs
1. Aux termes de l'article 747, S: 2, alinea 6, du Code judiciaire, « sans prejudice de l'application des exceptions prevues à l'article748, S:S: 1er et 2, les conclusions qui sont remises au greffe ouenvoyees à la partie adverse apres l'expiration des delais sont d'officeecartees des debats ».
Ce texte issu de la loi du 26 avril 2007 est de stricte interpretation.
Il suffit pour y satisfaire que les conclusions aient ete envoyees dans ledelai prescrit par l'ordonnance prise sur la base de l'article 747, S:1er, du Code judiciaire sans qu'il faille en outre que ces conclusionsaient ete communiquees à la partie adverse, c'est-à-dire que celle-ciles ait rec,ues.
C'est d'ailleurs en raison de cette modification legislative que l'article745, alinea 2, du Code judiciaire, qui disposait que « la communicationdes conclusions est reputee accomplie cinq jours apres l'envoi », a eteabroge par la loi du 26 avril 2007.
2. Il s'ensuit qu'en ecartant les conclusions de synthese [des demandeurs] deposees le 21 fevrier 2014 au motif que celles-ci n'avaientpas ete communiquees dans le delai prescrit et non pas envoyees dans cedelai, le jugement attaque viole l'article 747, specialement S: 2, alinea6, du Code judiciaire.
A tout le moins, le jugement attaque laisse incertain s'il entend deciderque les conclusions de la demanderesse deposees le 21 fevrier 2014n'avaient pas ete envoyees dans le delai prescrit - ce qui seraitconforme à l'article 747, S: 2, alinea 6, du Code judiciaire - oun'avaient pas ete communiquees dans ce delai - ce qui serait contraireaudit article 747, S: 2, alinea 6, du Code judiciaire. En raison de cetteambiguite, le jugement attaque n'est des lors pas regulierement motive(violation de l'article 149 de la Constitution).
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
En vertu de l'article 747, S: 1er, du Code judiciaire, les parties peuventconvenir entre elles de delais pour conclure à l'audience introductive ouà chaque audience ulterieure et le juge prend acte des delais pourconclure, les confirme et fixe la date de l'audience conformement auparagraphe 2, alinea 3 ; l'ordonnance est mentionnee dans le proces-verbalde l'audience.
Suivant l'article 747, S: 2, alinea 3, au plus tard six semaines apresl'audience d'introduction, le juge arrete le calendrier de procedure, lecas echeant en enterinant l'accord des parties ou en tenant compte desobservations des parties.
Aux termes de l'article 747, S: 2, alinea 6, premiere phrase, sansprejudice de l'application des exceptions prevues à l'article 748, S:S:1er et 2, les conclusions qui sont remises au greffe ou envoyees à lapartie adverse apres l'expiration des delais sont d'office ecartees desdebats.
Il suit de ces dispositions que, lorsque le calendrier de la procedure aete fixe par le juge en consacrant par une ordonnance les delais convenuspar les parties et que les delais pour conclure n'ont pas ete respectes,les conclusions ne peuvent etre ecartees des debats par le juge quelorsqu'au moins l'une des conditions prevue à l'article 747, S: 2, alinea6, est etablie.
Partant, les conclusions remises au greffe dans le delai fixe ne peuventetre ecartees des debats que lorsqu'elles ont ete envoyees à la partieadverse apres l'expiration de ce delai.
Il ressort des pieces de la procedure qu'à l'audience du 16 decembre2013, les parties sont convenues d'un calendrier pour la mise en etat dela cause en application de l'article 747, S: 1er, du Code judiciaireprevoyant notamment que les demandeurs s'engageaient « à communiquer età deposer leurs conclusions suivant le calendrier de [la] procedure » etdevaient etablir leurs « conclusions additionnelles prenant la forme deconclusions de synthese le 21 fevrier 2014 au plus tard » et que, par uneordonnance rendue le meme jour en application de cette disposition, letribunal a pris acte de ce calendrier.
Le jugement attaque, qui ecarte les conclusions de synthese des demandeursdeposees au greffe du tribunal le 21 fevrier 2014 au motif qu'elles n'ontpas ete « communiquees » au conseil de la defenderesse dans le delaifixe par le tribunal dans son ordonnance rendue sur la base de l'article747, S: 1er, du Code judiciaire, sans examiner à quelle date elles luiont ete envoyees, viole cette disposition ainsi que l'article 747, S: 2,alinea 6, du Code judiciaire.
Le moyen est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementcasse ;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de premiere instance du Brabantwallon, siegeant en degre d'appel.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers DidierBatsele, Martine Regout, Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce enaudience publique du vingt-huit mai deux mille quinze par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general Thierry Werquin,avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Lemal |
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| M. Regout | D. Batsele | A. Fettweis |
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28 MAI 2015 C.14.0513.F/1