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18/05/2015 | BELGIQUE | N°S.12.0147.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 mai 2015, S.12.0147.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.12.0147.N

* OFFICE NATIONAL DES PENSIONS, etablissement public,

* * contre

* * W. H.,

* * en presence de

* INSTITUT NATIONAL D'ASSURANCE MALADIE-INVALIDITE, etablissementpublic,

partie appelee en declaration d'arret commun.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 6 septembre2012 par la cour du travail de Bruxelles.

L'avocat general Henri Vanderlinden a depose des conclusions ecrites le 13avril 2015.

Le conseiller Koe

n Mestdagh a fait rapport.

L'avocat general Henri Vanderlinden a conclu.

II. Faits et antecedents de la procedure

Le...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.12.0147.N

* OFFICE NATIONAL DES PENSIONS, etablissement public,

* * contre

* * W. H.,

* * en presence de

* INSTITUT NATIONAL D'ASSURANCE MALADIE-INVALIDITE, etablissementpublic,

partie appelee en declaration d'arret commun.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 6 septembre2012 par la cour du travail de Bruxelles.

L'avocat general Henri Vanderlinden a depose des conclusions ecrites le 13avril 2015.

Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.

L'avocat general Henri Vanderlinden a conclu.

II. Faits et antecedents de la procedure

Le defendeur, qui a la nationalite neerlandaise, etait au service d'unemployeur belge au cours de la periode du 1er novembre 1996 au 31 decembre2004. A d'autres periodes de sa carriere, il a travaille aux Pays-Bas, enAllemagne, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Au cours de son travail, sonemployeur a constitue pour lui une pension complementaire aupres de deuxfonds de pension.

Apres avoir termine sa carriere aux Pays-Bas, le defendeur s'installa àla mi-2007, avec son epouse irlandaise, en Irlande ou il n'a plustravaille.

En fevrier 2008, lorsque le defendeur eut atteint l'age de 60 ans, lesfonds de pension precites lui verserent deux capitaux de pension. Sur cescapitaux, les fonds de pension ont opere au prealable des retenues, àsavoir une retenue de 3,55 p.c. au profit de l'Institut nationald'assurance maladie-invalidite (INAMI), et ce en application de l'article191, alinea 1er, 7DEG, de la loi relative à l'assurance obligatoire soinsde sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, et une cotisationde solidarite de 2 p.c. au profit de l'Office national des pensions (ONP),et ce en application de l'article 68 de la loi du 30 mars 1994 portant desdispositions sociales.

Par citation du 31 decembre 2009, le defendeur contesta ces retenues etdemanda la condamnation de l'INAMI et de l'ONP au remboursement desmontants retenus.

Le jugement du premier juge du 28 octobre 2011 a considere que ledefendeur n'etant pas soumis au moment du versement des capitaux depension à la legislation belge en matiere de securite sociale, mais àcelle d'un autre Etat membre, les retenues imposees sur les fonds depension etaient contraires aux articles 4 et 13 du reglement (CEE) nDEG1408/71. L'ONP et l'INAMI ont ete condamnes chacun separement àrembourser les montants retenus à leur profit.

L'arret considere egalement que les retenues imposees aux fonds de pensionsont contraires à l'article 13 du reglement (CEE) nDEG 1408/71 et ilconfirme la condamnation de l'ONP et de l'INAMI à rembourser les montantsretenus, l'ONP etant egalement condamne solidairement à rembourser lesmontants retenus au profit de l'INAMI.

III. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 duConseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securitesociale aux travailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et auxmembres de leur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute(avant l'entree en vigueur du reglement nDEG 883/2004, qui le remplace) ;

- article 4, alineas 1er et 2, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 duConseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securitesociale aux travailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et auxmembres de leur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute(avant l'entree en vigueur du reglement nDEG 883/2004, qui le remplace) ;

- article 13, alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 du Conseil, du14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securite sociale auxtravailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et aux membres deleur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute (avantl'entree en vigueur du reglement nDEG 883/2004, qui le remplace) ;

- articles 191 de la loi relative à l'assurance obligatoire soins desante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, et 68 de la loi du 30mars 1994 portant des dispositions sociales ;

- « pour autant que de besoin », articles 1er, l), 3, alinea 1er, et11.1 du reglement (CE) nDEG 883/2004, du Parlement europeen et du Conseil,du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systemes de securitesociale.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque considere aux pages 5 à 12 de l'arret :

« IV. Appreciation

Les appels principaux

1. Le premier juge, faisant echo à la these de monsieur H., estime queles retenues qui ont eu lieu etaient contraires au droit europeen, enparticulier à l'article 13 du reglement nDEG 1408/71 du 14 juin 1971(aujourd'hui remplace par le reglement nDEG 883/2004 du 29 avril 2004) del'Union europeenne relatif à l'application des regimes de securitesociale aux travailleurs salaries et aux travailleurs non salaries. Selonl'article 13 dudit reglement, des cotisations de securite sociale nepourraient etre recouvrees que dans un seul Etat membre, et cet Etatmembre serait l'Irlande, pays ou monsieur H. avait sa residence habituelleau moment du paiement de la pension complementaire.

L'Institut national d'assurance maladie-invalidite se refere en premierlieu à l'arret rendu par la Cour de justice europeenne le 6 fevrier 1992,dans un differend entre l'Etat belge et la Commission de la Communauteeuropeenne concernant les retenues en cause au profit de l'assurancemaladie-invalidite. La Cour [de justice] considera qu'il n'y avait pas deviolation de l'article 13 du reglement nDEG 1408/71, ni davantage del'article 33 du meme reglement, parce que ce reglement n'etait pasapplicable aux pensions extra-legales.

L'Institut national d'assurance maladie-invalidite indique toutefois qu'iladmet depuis le 1er avril 2003 que la retenue contestee n'est pluspossible à l'egard des travailleurs salaries qui, au moment ou ilsatteignent l'age legal de la mise à la retraite, ne sont pas à la chargede la securite sociale belge. Il ne peut etre constate que tel est le casqu'au moment ou l'interesse atteint cet age, de sorte qu'il est justifieque la retenue prevue par la loi ait lieu au moment du paiement de lapension extra-legale mais qu'elle puisse alors etre remboursee à l'age de65 ans.

L'Office national des pensions se refere egalement à l'arret rendu par laCour europeenne de justice le 6 fevrier 1992. L'Office national despensions soutient qu'il resulte clairement de l'article 33 du reglementnDEG 1408/71 [que] cette disposition ne s'applique qu'aux pensions legaleset non aux avantages extra-legaux.

L'Office national des pensions se refere en outre à l'article 30 dureglement nDEG 987/2009 dont, selon lui, l'on peut deduire implicitement,mais certainement, que les deductions sont possibles dans differents pays,à la condition specifique qu'une reglementation prevoie le calcul dumontant total que perc,oit une personne recevant une pension de plus d'unEtat membre. L'Office national des pensions souligne que, depuis aout2006, pour les habitants d'un autre pays de l'Union europeenne que laBelgique, la cotisation de solidarite ne sera calculee que sur la base despensions belges legales et extra-legales. Selon l'Office national despensions, il ressort d'un courrier de la Commission europeenne du 4juillet 2005 que cette pratique est conforme à la reglementationeuropeenne. Dans ses conclusions en replique à l'avis du ministerepublic, l'Office national des pensions souligne encore que les articles 27à 33 du reglement europeen nDEG 1408/71 ne concernent que les personnesqui ont la qualite de pensionne, ce qui n'etait pas le cas de monsieur H.,de sorte que ces articles ne peuvent pas non plus etre invoques pourcontester les retenues.

2. Monsieur H. soutient que l'Institut national d'assurancemaladie-invalidite et l'Office national des pensions ont invoque à tortl'arret rendu par la Cour europeenne de justice le 6 fevrier 1992. Selonlui, cet arret est obsolete parce que la reglementation etl'interpretation, sur lesquelles la Cour [de justice] s'est appuyee pourson arret - en particulier, que l'article 13 du reglement et le principede l'unite de la legislation n'etaient pas applicables au motif que lesbeneficiaires d'une pension complementaire ne se trouvaient pas dans l'unedes situations visees aux articles 13, alinea 2, et 14 à 17 du reglement- ont ete remplacees par une modification ulterieure du reglement,prevoyant une reglementation pour sa situation et declarant applicable lalegislation du lieu de residence.

3. Les retenues contestees sur les pensions extra-legales de monsieur H.ont respectivement pour origine l'article 191 de la loi coordonnee le 14juillet 1994 sur l'assurance soins de sante et indemnites et l'article 68de la loi du 30 mars 1994 portant des dispositions sociales.

L'article 191, alinea 1er, 7DEG, de la loi coordonnee le 14 juillet 1994dispose ce qui suit :

7DEG le produit d'une retenue de 3,55 p.c. effectuee sur les pensionslegales de vieillesse, de retraite, d'anciennete, de survie ou sur toutautre avantage tenant lieu de pareille pension ainsi que sur tout avantagedestine a completer une pension, meme si celle-ci n'est pas acquise, etalloue, soit en vertu de dispositions legales, reglementaires oustatutaires, soit en vertu de dispositions decoulant d'un contrat detravail, d'un reglement d'entreprise, d'une convention collectived'entreprise ou de secteur. Cette retenue est egalement effectuee surl'avantage tenant lieu de pension ou completant une pension, qui estoctroye à un travailleur independant en vertu d'un engagement collectifou d'une promesse individuelle de pension, conclus par l'entreprise.

L'article 68 de la loi du 30 mars 1994 dispose au S: 5 que :

L'organisme debiteur belge d'un avantage complementaire paye apres le 31decembre 1996 sous la forme d'un capital dont le montant brut estsuperieur à 2.478,94 euros preleve d'office, lors du paiement decelui-ci, une retenue egale à 2 p.c. du montant brut du capital.

Le meme article dispose à son S: 1er :

Pour l'application des articles 68 à 68quinquies, il y a lieu d'entendre:

c) par « avantage complementaire », tout avantage destine à completerune pension visee au a) ou au b), meme si celle-ci n'est pas acquise, etalloue soit en vertu de dispositions legales, reglementaires oustatutaires, soit en vertu de dispositions decoulant d'un contrat detravail, d'un reglement d'entreprise, d'une convention collective ou desecteur, qu'il s'agisse d'un avantage periodique ou d'un avantage accordesous la forme d'un capital.

Sont egalement consideres comme avantages complementaires au sens du c) :

- les rentes definies au a), 1DEG, payees sous la forme d'un capital ;

- tout avantage paye à une personne, quel que soit son statut, enexecution d'une promesse individuelle de pension.

4. Le reglement de l'Union europeenne nDEG 1408/71 du Conseil du 14 juin1971, actuellement remplace par le reglement nDEG 883/2004 du 29 avril2004 relatif à l'application des regimes de securite sociale auxtravailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et aux membres deleur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute, s'appliqueaux travailleurs salaries ou non salaries qui sont ou ont ete soumis à lalegislation de l'un ou de plusieurs Etats membres et qui sont desressortissants de l'un des Etats membres ou bien des apatrides ou desrefugies residant sur le territoire d'un des Etats membres ainsi qu'auxmembres de leur famille et à leurs « survivants ».

Il s'applique ainsi egalement aux travailleurs salaries ou independants.

Monsieur H. est un ressortissant de l'un des Etats membres et relevait, entant que travailleur salarie, du champ d'application de la legislationd'un ou de plusieurs Etats membres. Il est soumis depuis 2007 à lalegislation irlandaise en matiere de securite sociale. De novembre 1996à decembre 2004, il etait soumis à la legislation belge en matiere desecurite sociale.

La fonction internationale dont il etait investi l'amenait à se deplacerau sein la Communaute. Monsieur H. releve par consequent du champd'application personnel du reglement.

Conformement à l'article 13 du Reglement (CE) nDEG 1408/71 du Conseil,sous reserve des dispositions des articles 14quater et 14septies, ceuxauxquels le present reglement est applicable ne sont soumis qu'à lalegislation d'un seul Etat membre et cette legislation est determineeconformement aux dispositions de ce titre.

Conformement à l'article 13, 2, f) du meme reglement, sous reserve desdispositions des articles 14 à 17, la personne à laquelle la legislationd'un Etat membre cesse d'etre applicable, sans que la legislation d'unautre Etat membre lui devienne applicable en conformite avec l'une desregles enoncees aux alineas precedents ou avec l'une des exceptions ouregles particulieres visees aux articles 14 à 17, est soumise à lalegislation de l'Etat membre sur le territoire duquel elle reside, et ceconformement aux dispositions de cette legislation.

En principe, l'on n'appliquera par consequent que la legislation d'un seulEtat membre. Cette regle a ete confirmee à plusieurs reprises par lajurisprudence de la Cour de justice (CJCE 15 fevrier 2000, nDEG 34/98, S.Van Raepenbusch, in Actualites en droit social europeen, dir. C.-E. Clesseet S. Gilson, Larcier, 2010, p. 16). L'on vise ainsi notamment à eviterde devoir payer des cotisations sociales dans differents Etats membres. Ilen resulte qu'il ne faut payer des cotisations que dans un seul Etatmembre.

Conformement à l'article 33.1 du reglement nDEG 1408/71, l'institutiond'un Etat membre debitrice d'une pension ou d'une rente qui applique unelegislation prevoyant des retenues de cotisations à la charge dutitulaire d'une pension ou d'une rente, pour la couverture des prestationsen cas de maladie ou de maternite, est autorisee à operer ces retenuessur la pension ou rente, dans la mesure ou ces prestations sont à lacharge d'une institution dudit Etat membre.

5. Dans l'arret nDEG C-275/83 du 28 mars 1985 (Jur. 1985, 1097), la Courde justice des Communautes europeennes a considere que la dispositionprevue à l'article 191 de la loi coordonnee sur l'assurancemaladie-invalidite est contraire à l'article 33 du reglement nDEG1480/71dans la mesure ou la cotisation est egalement prelevee à la chargede personnes qui ne beneficient pas de prestations de maladie et dematernite à la charge de l'institution belge.

Dans l'arret nDEG 253/90 du 6 fevrier 1992 (Jur. 1992, 531), la Cour [dejustice] a toutefois considere que, en ce qui concerne les retenuesprevues par l'article 191 de la loi coordonnee sur l'assurance soins desante et indemnites, ni l'article 13 ni l'article 33 du reglement nepeuvent etre invoques lorsqu'il s'agit de retraites complementairesversees par des regimes institues par voie conventionnelle.

S'agissant de l'application de l'article 13 du reglement, la Cour [dejustice] a constate (points 11 et 12) que la regle d'unicite de lalegislation applicable ne regissait que les situations auxquelles sereferent les articles 13, paragraphe 2, et 14 à 17 du reglement, quideterminent les regles de conflit qu'il y a lieu d'appliquer dans chaquesituation et que les beneficiaires d'une retraite complementaire ne setrouvaient pas dans l'une des situations auxquelles se referent lesarticles 13, paragraphe 2, et 14 à 17 du reglement. Ainsi, le principed'unicite de la legislation applicable n'a pas ete invoque en leur faveur.La Cour [de justice] s'est referee à cet egard à son arret anterieurnDEG C-140/88 du 21 fevrier 1991 ou elle avait considere que despersonnes, telles que des travailleurs qui ont cesse leurs activitesprofessionnelles, ne se trouvent pas dans l' une des situations visees auxarticles 13, paragraphe 2, et 14 à 17 du reglement.

S'agissant de l'article 33 du reglement (points 13 à 17), la Cour aconstate que, selon ses termes, lus en combinaison avec la definition de« legislation » figurant à l'article 1er, j), du reglement, des regimesde pension complementaire ayant une base contractuelle ne relevent pas duchamp d'application de l'article 33 du reglement.

La Cour [de justice] a ainsi decide que la reglementation belge, en tantqu'elle etait appliquee aux pensions extra-legales, n'etait pas contraireau reglement.

6. Monsieur H. fait toutefois remarquer à juste titre que l'article 13 dureglement n-o 1408/71 a subi des modifications par rapport au texte auquels'est referee la Cour de justice dans son appreciation.

Le reglement nDEG 2195/91 du 25 juin 1991 a en effet complete l'article13, alinea 2, par la disposition prevoyant que la personne à laquelle lalegislation d'un Etat membre cesse d'etre applicable, sans que lalegislation d'un autre Etat membre lui devienne applicable en conformiteavec l'une des regles enoncees à l'article 13, alinea 2, ou avec l'unedes exceptions ou regles particulieres visees aux articles 14 à 17, estsoumise à la legislation de l'Etat membre sur le territoire duquel ellereside. Selon le preambule du reglement, cette adaptation s'est avereenecessaire parce qu'il etait apparu, sur la base de la jurisprudence de laCour [de justice], qu'il n'existait pas de reglementation explicite pourles situations des personnes qui cessaient de relever du champd'application de la legislation d'un Etat membre sans relever du champd'application de la legislation d'un autre Etat membre conformement àl'une des regles enoncees aux points precedents de l'alinea 2 de l'article13 ou de l'une des exceptions visees aux articles 14 à 17 du reglement.

Conformement au texte modifie du reglement, il est desormais expressementprevu que, dans la situation decrite, la personne concernee est soumise àla legislation applicable dans l'Etat membre sur le territoire duquel ellereside.

L'on ne peut ainsi plus dire en ce moment que la regle de base del'article 13, alinea 1er, en vertu de laquelle l'interesse n'est soumisqu'à la legislation d'un seul Etat membre, ne s'applique pas en l'absenced'un conflit entre les regles figurant à l'article 13, alinea 2, dureglement.

Il s'ensuit que les legislations belges prevoyant des retenues sur lapension d'une personne à laquelle a ete rendue applicable la legislationd'un autre Etat membre est contraire à l'article 13 du reglement, ce quisuffit à ecarter l'application de ces legislations, quoi qu'il en soit dela question de savoir si ces lois sont egalement contraires à l'article33 du reglement.

7. L'Office national des pensions estime à tort pouvoir puiser unargument dans l'article 30 du reglement nDEG 987/2009 du 16 septembre2009, pris en execution du reglement nDEG 883/2004 du 29 avril 2004, quiremplace l'ancien reglement nDEG 1408/71. Cet article dispose quelorsqu'une personne perc,oit une pension provenant de plus d'un Etatmembre, le montant des cotisations prelevees sur toutes les pensionsversees ne peut en aucun cas etre superieur au montant qui serait preleveaupres d'une personne recevant une pension du meme montant provenant del'Etat membre competent. Selon l'Office des pensions, il en ressortiraitque, en ce qui concerne les habitants d'un autre Etat membre, il n'estplus interdit de prelever une prime ou une cotisation, la regle etantseulement devenue une limitation.

L'article 30 du reglement nDEG 987/2009 est pris en execution des articles23 et suivants, plus particulierement aussi de l'article 30 du reglementnDEG 883/2004 du 29 avril 2004, dont le texte est la reprise du contenu del'ancien article 33 du reglement nDEG 1408/71 du 14 juin 1971.

Ces articles du reglement nDEG 883/2004 font partie du titre III, chapitreI, de ce reglement qui concerne les prestations en cas de maladie ou dematernite, et les prestations de paternite assimilees, et qui concernedans sa section 2 le droit aux prestations en nature des indemnites demaladie mentionnees pour les titulaires de pension et les membres de leurfamille.

Ils ne concernent ainsi pas en premier lieu la cotisation de solidariteretenue par l'Office national des pensions, mais ne se rapportentspecifiquement qu'à la cotisation pour les frais de maladie.

L'article 30.1 du reglement nDEG 883/2004 confirme la regle en vertu delaquelle l'institution d'un Etat membre chargee de retenir des primes [ou]cotisations pour la couverture des prestations de maladie et de maternite,et de paternite assimilees, ne peut recouvrer ces primes et cotisationsque dans la mesure ou les depenses liees aux prestations en nature quidoivent etre servies sont à la charge d'une institution dudit Etatmembre. L'article 30 du reglement nDEG 987/2009 ne peut concerner que leshypotheses particulieres, prevues aux articles 24 et 25 du reglement nDEG883/2004, ou soit le droit aux soins de sante n'est pas ne dans l'Etatmembre ou l'interesse a sa residence, soit l'Etat membre de residenceaccorde le droit aux soins de sante sans le subordonner à des conditionsd'assurance, d'activite salariee ou non salariee (et du chef de laquelleaucune pension n'est versee à l'interesse), auquel cas les prestations ennature sont servies pour le compte de l'Etat qui verse une pension. Iln'est pas soutenu et il ne ressort pas des pieces produites que l'on setrouve dans l'une de ces hypotheses.

La lettre de la Commission europeenne du 4 juillet 2005 ne contient pas,contrairement à ce qu'en deduit l'Office national des pensions,d'elements clairs susceptibles de suggerer que la Commission europeennesouscrirait au point de vue de l'Etat. Il convient de noter à cet egardque, malgre l'observation que le premier juge fit sur ce point, l'Officenational demeure toujours en defaut de produire l'integralite de lacorrespondance echangee avec la Commission europeenne, ce qui rendimpossible une interpretation certaine de la lettre du 4 juillet 2005.

8. Il y a encore, enfin, l'argumentation de l'Institut nationald'assurance maladie-invalidite et de l'Office national des pensionssuivant laquelle monsieur H. n'a pas encore à l'heure actuelle le statutde pensionne legal, de sorte qu'il n'est pas encore possible de determinersi, au moment ou il prendra sa pension, il sera pris en charge parl'assurance maladie-invalidite belge. Ainsi, il serait justified'effectuer des retenues à titre provisionnel sur les cotisations et, àun stade ulterieur de proceder à leur remboursement, lorsqu'il apparaitraque l'interesse n'est pas à la charge de l'assurance maladie-invaliditebelge.

La preoccupation de l'Institut national d'assurance maladie-invalidite etde l'Office national des pensions est comprehensible. Si monsieur H.revenait en Belgique à l'age de la pension, il n'est pas exclu qu'il aitdroit, sur la base de sa carriere en Belgique, à des prestations del'assurance maladie-invalidite belge. A ce moment-là, il n'y auraitaucune raison qu'il ne paye pas la cotisation speciale pour l'assurancemaladie-invalidite, tandis que la perception de la cotisation pourraitetre prescrite, eu egard au temps ecoule entre le versement de la pensioncomplementaire et le recouvrement de la cotisation.

Cette preoccupation ne donne toutefois pas à l'Institut nationald'assurance maladie-invalidite et à l'Office national des pensions unebase juridique suffisante pour la pratique administrative qui s'estapparemment developpee, la cotisation etant retenue tout en admettant dereverser la cotisation si l'interesse demontre, lorsqu'il atteint l'agelegal de la pension, qu'il est à la charge de l'assurancemaladie-invalidite d'un autre Etat membre.

D'une part, cette pratique administrative est difficile à concilier avecla regle selon laquelle les cotisations ne sont dues que dans un seul Etatmembre (article 13 du reglement nDEG 1408/71 et le texte identiqueulterieur du reglement nDEG 883/2004).

D'autre part, il s'agit d'une pratique administrative qui n'a pas defondement suffisant dans la legislation belge existante, lue conjointementavec les reglements europeens. Pareille pratique devrait à tout le moinsavoir un soutenement juridique explicite, de telle sorte que, à cemoment-là aussi, les autorites europeennes competentes puissent exercerun controle efficace de la conformite d'une telle reglementation avec ledroit europeen.

9. En fonction de l'ensemble de ces elements, il y a lieu de rejeter commenon fonde l'appel principal ».

Griefs

* L'arret attaque dit à tort à la page 9 :

« 6. Monsieur H. fait toutefois remarquer à juste titre que l'article 13du reglement nDEG 1408/71 a subi des modifications par rapport au texteauquel s'est referee la Cour de justice dans son appreciation.

Le reglement nDEG 2195/91 du 25 juin 1991 a en effet complete l'article13, alinea 2, par la disposition prevoyant que la personne à laquelle lalegislation d'un Etat membre cesse d'etre applicable, sans que lalegislation d'un autre Etat membre lui devienne applicable en conformiteavec l'une des regles enoncees à l'article 13, alinea 2, ou avec l'unedes exceptions ou regles particulieres visees aux articles 14 à 17, estsoumise à la legislation de l'Etat membre sur le territoire duquel ellereside. Selon le preambule du reglement, cette adaptation s'est avereenecessaire parce qu'il etait apparu, sur la base de la jurisprudence de laCour [de justice], qu'il n'existait pas de reglementation explicite pourles situations des personnes qui cessaient de relever du champd'application de la legislation d'un Etat membre sans relever du champd'application de la legislation d'un autre Etat membre conformement àl'une des regles enoncees aux points precedents de l'alinea 2 de l'article13 ou de l'une des exceptions visees aux articles 14 à 17 du reglement.

Conformement au texte modifie du reglement, il est desormais expressementprevu que, dans la situation decrite, la personne concernee est soumise àla legislation applicable dans l'Etat membre sur le territoire duquel ellereside.

L'on ne peut ainsi plus dire actuellement que la regle de base del'article 13, alinea 1er, en vertu de laquelle l'interesse n'est soumisqu'à la legislation d'un seul Etat membre ne s'applique pas en l'absenced'un conflit entre les regles figurant à l'article 13, alinea 2, dureglement.

Il s'ensuit que les legislations belges prevoyant des retenues sur lapension d'une personne à laquelle a ete rendue applicable la legislationd'un autre Etat membre est contraire à l'article 13 du reglement, ce quisuffit à ecarter l'application de ces legislations, quoi qu'il en soit dela question de savoir si ces lois sont egalement contraires à l'article33 du reglement.

La cour du travail ecarte tout à fait à tort les legislations belgesprevoyant des retenues sur la pension d'une personne, en raison d'unepretendue contrariete à l'article 13 du reglement.

La cour du travail commet une faute flagrante de raisonnement :

Les regimes belges concernes ne constituent pas des « legislations » ausens de l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement nDEG 1408/71 etles deux capitaux de pension (extra-legale) ne relevent pas du « champd'application materiel » du reglement nDEG 1408/71.

L'arret attaque dit aux pages 6 et 7 :

« 3. Les retenues contestees sur les pensions extra-legales de monsieurH. ont respectivement pour origine l'article 191 de la loi coordonnee le14 juillet 1994 sur l'assurance soins de sante et indemnites et l'article68 de la loi du 30 mars 1994 portant des dispositions sociales.

L'article 191, alinea 1er, 7DEG, de la loi coordonnee le 14 juillet 1994dispose ce qui suit :

7DEG le produit d'une retenue de 3,55 p.c. effectuee sur les pensionslegales de vieillesse, de retraite, d'anciennete, de survie ou sur toutautre avantage tenant lieu de pareille pension ainsi que sur tout avantagedestine à completer une pension, meme si celle-ci n'est pas acquise, etalloue soit en vertu de dispositions legales, reglementaires oustatutaires, soit en vertu de dispositions decoulant d'un contrat detravail, d'un reglement d'entreprise, d'une convention collectived'entreprise ou de secteur. Cette retenue est egalement effectuee surl'avantage tenant lieu de pension ou completant une pension, et qui estoctroye à un travailleur independant en vertu d'un engagement collectifou d'une promesse individuelle de pension, conclus par l'entreprise.

L'article 68 de la loi du 30 mars 1994 dispose au S: 5 que :

L'organisme debiteur belge d'un avantage complementaire paye apres le 31decembre 1996 sous la forme d'un capital dont le montant brut estsuperieur à 2.478,94 euros preleve d'office, lors du paiement decelui-ci, une retenue egale à 2 p.c. du montant brut du capital.

Le meme article dispose en son S: 1er :

Pour l'application des articles 68 à 68quinquies, il y a lieu d'entendre:

(c) par àvantage complementaire', tout avantage destine à completer unepension visee au a) ou au b), meme si celle-ci n'est pas acquise etallouee, soit en vertu de dispositions legales, reglementaires oustatutaires, soit en vertu de dispositions decoulant d'un contrat detravail, d'un reglement d'entreprise, d'une convention collective ou desecteur, qu'il s'agisse d'un avantage periodique ou d'un avantage accordesous forme d'un capital.

Sont egalement consideres comme avantages complementaires au sens du c) :

- les rentes definies au a), 1DEG, payees sous la forme d'un capital ;

- tout avantage paye à une personne, quel que soit son statut, enexecution d'une promesse individuelle de pension.'."

Le demandeur se refere à l'arret nDEG 253/90 du 6 fevrier 1992 (Jur.1992, 531) de la Cour de justice :

9. Il y a lieu de constater d'abord que les beneficiaires d'une retraitecomplementaire sont des travailleurs au sens de l'article 1er, sous a), dureglement n-o 1408/71 et qu'ils entrent dans le champ d' applicationpersonnel de ce reglement, tel qu'il est decrit en son article 2.

10. Il convient de constater ensuite que, selon une jurisprudenceconstante de la Cour (voir notamment l'arret du 10 juillet 1986, Luijten,points 12 et 13, 60/85, Rec., p. 2365), le principe d'unicite de lalegislation applicable aux travailleurs qui se deplacent à l'interieur dela Communaute, dejà applique sous l'empire du reglement n-o 3 du Conseilconcernant la securite sociale des travailleurs migrants, est exprime parle titre II, relatif à la `determination de la legislation applicable' dureglement n-o 1408/71, dont l'article 13, paragraphe 1er, precise que lesinteresses ne sont soumis qu'à la legislation d'un seul Etat membre etque cette legislation `est determinee conformement aux dispositions dupresent titre'.

11. Ce principe d'unicite de la legislation applicable ne regit toutefoisque les situations auxquelles se referent les articles 13, paragraphe 2,et 14 à 17 du reglement, qui determinent les regles de conflit qu'il y alieu d'appliquer dans chaque situation .

En effet, il ressort de l'arret du 21 fevrier 1991, Noij, points 9 et 10(C-140/88, Rec., p. I-387), que des personnes, telles que des travailleursqui ont cesse definitivement leurs activites professionnelles, qui ne setrouvent pas dans l'une des situations visees à ces articles, peuventetre soumises simultanement à la legislation de plusieurs Etats membres.

12. Etant donne que les beneficiaires d'une retraite complementaire ne setrouvent pas dans l'une des situations auxquelles se referent les articles13, paragraphe 2, et 14 à 17 du reglement nDEG 1408/71, il en resulte quele principe de l'unicite de la legislation applicable ne saurait etreinvoque à leur profit ».

L'arret considere que le reglement nDEG 2195/91 du 25 juin 1991 a completel'article 13, alinea 2, par la disposition prevoyant que :

« f) la personne à laquelle la legislation d'un Etat membre cesse d'etreapplicable, sans que la legislation d'un autre Etat membre lui devienneapplicable en conformite avec l'une des regles enoncees aux alineasprecedents ou avec l'une des exceptions ou regles particulieres visees auxarticles 14 à 17, est soumise à la legislation de l'Etat membre sur leterritoire duquel elle reside, conformement aux dispositions de cetteseule legislation ».

L'arret en deduit à tort que le principe d'unicite de la legislationapplicable pourrait maintenant etre invoque en faveur de monsieur H., aumotif que monsieur H. releverait de l'article 13, alinea 2, f). Selonl'arret, l'on ne peut en effet plus dire en ce moment que la regle de basede l'article 13, alinea 1er, à savoir que l'interesse n'est soumis qu'àla legislation d'un seul Etat membre, ne s'applique pas en l'absence d'unconflit entre les regles figurant à l'article 13, alinea 2, du reglement.

Le demandeur souligne que les deux capitaux de pension (extra-legale) nerelevent toutefois pas du « champ d'application materiel » du reglementnDEG 1408/71, ce qui rendait de toute fac,on impossible l'application del'article 13, alinea 1er, du reglement.

Le demandeur se refere à l'arret nDEG 253/90 du 6 fevrier 1992 (Jur.1992, 531) de la Cour de justice :

« 15. Selon l'article 1er, sous j), premier alinea, du reglement nDEG1408/71, le terme « legislation » designe, pour chaque Etat membre, leslois, les reglements, les dispositions statutaires et toutes autresmesures d' application, existants ou futurs, qui concernent les brancheset les regimes de securite sociale vises à l'article 4, paragraphes 1eret 2.

16. L'alinea 2 de cet article dispose que ce terme « legislation »exclut les dispositions conventionnelles existantes ou futures, qu'ellesaient fait ou non l'objet d'une decision des pouvoirs publics les rendantobligatoires ou etendant leur champ d'application, pour autant que cettelimitation n'est pas levee, dans les cas prevus à cet alinea, par unedeclaration faite par l'Etat membre interesse.

17. Etant donne que, comme l'a reconnu d'ailleurs la Commission dans sarequete, les regimes belges en cause ne constituent pas des legislationsau sens de l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement n-o 1408/71,il convient de constater que l'article 33 ne leur est pas applicable ».

Les regimes belges concernes ne constituent pas des « legislations » ausens de l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement nDEG 1408/71 etles deux capitaux de pension (extra-legale) ne relevent pas du « champd'application materiel » du reglement nDEG 1408/71, ce qui rendait detoute fac,on impossible l'application de l'article 13, alinea 1er, dureglement.

Au vu des considerations precedentes, il y a lieu de constater que nil'Institut national d'assurance maladie-invalidite ni l'Office nationaldes pensions, n'ont manque aux obligations qui leur incombaient, ninotamment viole les dispositions prevues à l'article 13, alinea 1er, dureglement nDEG 14087/71.

Les legislations belges, prevoyant des retenues sur la pension d'unepersonne, ne pouvaient par consequent pas etre ecartees, du chef d'unepretendue contrariete à l'article 13, alinea 1er, du reglement.

En preambule à la directive 98/49/CE du Conseil du 29 juin 1998 relativeà la sauvegarde des droits à pension complementaire des travailleurssalaries et non salaries qui se deplacent à l'interieur de la Communaute,il est dit au point (3):

« Considerant que la legislation dejà adoptee par le Conseil en vue deproteger les droits à la securite sociale des travailleurs qui sedeplacent à l'interieur de la Communaute et des membres de leur famille,à savoir le reglement (CEE) nDEG 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971relatif à l'application des regimes de securite sociale aux travailleurssalaries et à leur famille qui se deplacent à l'interieur de laCommunaute (4) et le reglement (CEE) nDEG 574/72 du Conseil du 21 mars1972 fixant les modalites d'application du reglement (CEE) nDEG 1408/71relatif à l'application des regimes de securite sociale aux travailleurssalaries et à leur famille qui se deplacent à l'interieur de laCommunaute (5), ne concerne que les regimes legaux de pension ; que lesysteme de coordination prevu par ces reglements n'a pas pour effetd'etendre les regimes de pension complementaire, à l'exception desregimes couverts par le terme `legislation', tel qu'il est defini àl'article 1er, point j), alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71, ouayant fait l'objet d'une declaration à cet effet par un Etat membre envertu de cet article ».

Le demandeur mentionne par ailleurs que le reglement (CE) nDEG 883/2004 duParlement europeen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur lacoordination des systemes de securite sociale ne peut pas non pluss'appliquer aux regimes belges.

Le demandeur se refere aux considerants precedant ce reglement :

« 30. Comme l'a constamment reaffirme la Cour de justice, le Conseiln'est pas repute competent pour mettre en oeuvre des regles limitant lecumul de deux ou plusieurs pensions dont le droit a ete acquis dans desEtats membres differents en reduisant le montant d'une pension acquiseuniquement au titre de la legislation nationale.

31. Selon la Cour de justice, c'est au legislateur national qu'ilappartient de les mettre en oeuvre, etant entendu que c'est au legislateurcommunautaire qu'il incombe de determiner les limites dans lesquellespeuvent s'appliquer les dispositions du droit national en matiere dediminution, de suspension ou de suppression d'une pension.

[...]

44. Il convient d'introduire un nouveau reglement pour abroger lereglement (CEE) nDEG 1408/71. Il convient toutefois que ce dernierreglement reste en vigueur et que ses effets juridiques soient preservesaux fins de certains actes et accords communautaires auxquels laCommunaute est partie afin de garantir la securite juridique ».

L'arret attaque viole par consequent :

- l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 duConseil du 14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securitesociale aux travailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et auxmembres de leur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute ;

- l'article 4, alineas 1er et 2, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 duConseil du 14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securitesociale aux travailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et auxmembres de leur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute ;

- l'article 13, alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 du Conseil du14 juin 1971, relatif à l'application des regimes de securite sociale auxtravailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et aux membres deleur famille qui se deplacent à l'interieur de la Communaute ;

- les articles 191 de la loi relative à l'assurance obligatoire soins desante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, et 68 de la loi du 30mars 1994 portant des dispositions sociales ;

- pour autant que de besoin, les articles 1er, l), 3, alinea 1er, et 11.1du reglement (CE) nDEG 883/2004 du Parlement europeen et du Conseil du 29avril 2004, portant sur la coordination des systemes de securite sociale.

IV. La decision de la Cour

Sur la recevabilite du moyen :

1. Le defendeur souleve une fin de non-recevoir : le moyen qui ne designepas precisement la decision concrete qu'il critique ne satisfait pas à lacondition de l'article 1082, alinea 1er, du Code judiciaire.

2. Il resulte clairement de la reproduction des motifs critiques et de lacritique exercee à leur encontre que le moyen est dirige contre ladecision suivant laquelle les retenues effectuees, sur la base desarticles 191, alinea 1er, 7DEG, de la loi relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994,et 68 de la loi du 30 mars 1994, sur les capitaux de pension verses audefendeur sont contraires à l'article 13 du reglement (CEE) nDEG 1408/71,et la condamnation, à laquelle elle sert de fondement, du demandeur auremboursement des montants retenus, majores des interets.

La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.

Sur le fondement du moyen :

3. En vertu de l'article 191, alinea 1er, 7DEG, de la loi coordonnee telqu'applicable en l'espece, les ressources de l'assurance obligatoire soinsde sante et indemnites sont notamment constituees par le produit d'uneretenue de 3,55 p.c. effectuee sur les pensions legales de vieillesse, deretraite, d'anciennete, de survie ou sur tout autre avantage tenant lieude pareille pension ainsi que sur tout avantage destine à completer unepension, meme si celle-ci n'est pas acquise, et alloue soit en vertu dedispositions legales, reglementaires ou statutaires, soit en vertu dedispositions decoulant d'un contrat de travail, d'un reglementd'entreprise, d'une convention collective d'entreprise ou de secteur. Laretenue est operee à chaque paiement de la pension ou de l'avantage parl'organisme debiteur qui en est civilement responsable. Celui-ci verse leproduit de la retenue à l'INAMI dans le mois qui suit celui au coursduquel elle a ete operee.

L'article 191, alinea 1er, 7DEG, de la loi coordonnee dispose en outre,dans sa version applicable aux faits, que le Roi fixe toutes les modalitesnecessaires à l'execution de cette mesure ainsi que la repartition de laressource et la partie de celle-ci destinee au financement d'autresregimes d'assurance soins de sante, et que le Roi peut etendrel'application de cette retenue à d'autres avantages accordes auxpensionnes ainsi qu'aux revenus professionnels non soumis aux retenues desecurite sociale dont ils beneficient.

Conformement à l'article 8 de l'arrete royal, encore applicable auxfaits, du 15 septembre 1980 portant execution de l'article 191, alinea1er, 7DEG, de la loi coordonnee, le produit de la retenue, apres deductiondes frais d'administration exposes en cette matiere par l'INAMI, estreparti entre les organismes qui organisent un regime d'assurance soins desante, à savoir l'INAMI, l'Office de securite sociale d'outre-mer et laCaisse de secours et de prevoyance en faveur des marins. Le comite generalde gestion de l'INAMI repartit annuellement le produit en question auprorata du nombre de titulaires affilies à ces regimes en qualite depensionne ou de beneficiaire d'une pension de survie.

4. L'article 68, S: 5, de la loi du 30 mars 1994 portant des dispositionssociales dispose que l'organisme debiteur belge d'un avantagecomplementaire paye apres le 31 decembre 1996 sous la forme d'un capitaldont le montant brut est superieur à 2.478,94 euros preleve d'office,lors du paiement de celui-ci, une retenue egale à 2 p.c. de ce capital.Ce pourcentage de 2 p.c. est remplace par 1 p.c. pour les capitaux dont lemontant brut est inferieur à 24.789,36 euros.

L'organisme debiteur est tenu de verser à l'ONP le produit de la retenueeffectuee dans le mois qui suit le paiement du capital.

Selon l'article 68, S: 1er, c), de la loi precite du 30 mars 1994, pourl'application des articles 68 à 68quinquies, il y a lieu d'entendre par« avantage complementaire » tout avantage destine à completer unepension visee au a) ou au b), meme si celle-ci n'est pas acquise, etalloue soit en vertu de dispositions legales, reglementaires oustatutaires, soit en vertu de dispositions decoulant d'un contrat detravail, d'un reglement d'entreprise, d'une convention collective ou desecteur, qu'il s'agisse d'un avantage periodique ou d'un avantage accordesous forme d'un capital.

Il ressort de la genese de la loi que la cotisation de solidarite visee àl'article 68 de la loi precitee du 30 mars 1994, qui est versee à l'ONP,a ete instauree pour renforcer la solidarite interpersonnelle entrepensionnes. Le produit serait à terme employe en partie de fac,on àpermettre des adaptations selectives au bien-etre pour les pensions lesmoins elevees.

5. L'article 4, alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 dispose que cereglement s'applique à toutes les legislations relatives aux branches desecurite sociale qui concernent : a) les prestations de maladie et dematernite ; b) les prestations d'invalidite, y compris celles qui sontdestinees à maintenir ou à ameliorer la capacite de gain ; c) lesprestations de vieillesse ; d) les prestations de survivants ; e) lesprestations d'accident du travail et de maladie professionnelle ; f) lesallocations de deces ; g) les prestations de chomage ; h) les prestationsfamiliales.

L'article 4, alinea 2, dudit reglement dispose que ce reglement s'appliqueaux regimes de securite sociale generaux et speciaux, contributifs et noncontributifs, ainsi qu'aux regimes relatifs aux obligations de l'employeurou de l'armateur concernant les prestations visees au paragraphe 1er.

Selon l'article 1er, sous j), du reglement, le terme « legislation »designe, pour chaque Etat membre, les lois, les reglements, lesdispositions statutaires et toutes autres mesures d'application, existantsou futurs, qui concernent les branches et les regimes de securite socialevises à l'article 4, S:S: 1er et 2, ou les prestations speciales àcaractere non contributif visees à l'article 4, S: 2bis. Ce terme exclutles dispositions conventionnelles existantes ou futures, qu'elles aient ounon fait l'objet d'une decision des pouvoirs publics les rendantobligatoires ou etendant leur champ d'application.

L'article 13, alinea 1er, du reglement dispose que, sous reserve desdispositions des articles 14quater et 14septies, ceux auxquels le presentreglement est applicable ne sont soumis qu'à la legislation d'un seulEtat membre et cette legislation est determinee conformement auxdispositions de ce titre.

Selon l'article 13, alinea 2, sous f), du reglement, sous reserve desdispositions des articles 14 à 17, la personne à laquelle la legislationd'un Etat membre cesse d'etre applicable, sans que la legislation d'unautre Etat membre lui devienne applicable en conformite avec l'une desexceptions ou regles particulieres visees aux articles 14 à 17, estsoumise à la legislation de l'Etat membre sur le territoire duquel ellereside, et ce conformement aux dispositions de cette seule legislation.

6. L'arret attaque considere, sans etre critique, que le defendeur relevedu champ d'application personnel du reglement (CEE) nDEG 1408/71. Lepremier juge a egalement considere, et l'arret attaque l'admetimplicitement, sans etre critique sur ce point, que les prelevementsprevus aux articles 191, alinea 1er, 7DEG, la loi relative à l'assuranceobligatoire soins de sante et indemnites, coordonnee le 14 juillet 1994,et 68 de la loi precitee du 30 mars 1994 sont des cotisations de securitesociale, qui relevent du champ d'application materiel du reglement (CEE)nDEG 1408/71.

L'arret attaque constate que le defendeur est soumis depuis 2007 à lalegislation irlandaise en matiere de securite sociale en application del'article 13, alinea 2, sous f), du reglement (CEE) nDEG 1408/71.

7. Le moyen soutient que les juges d'appel n'ont pas vu que les capitauxde pension verses au defendeur proviennent de regimes qui ne sont pas deslegislations au sens de l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement(CEE) nDEG 1408/71 et, ainsi, ne relevent pas du champ d'applicationmateriel dudit reglement. Selon le demandeur, les prelevements contestessur ces pensions complementaires ne sont par consequent pas contraires àl'article 13, alinea 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71.

8. Le moyen souleve la question de savoir si l'article 13, alinea 1er, dureglement (CEE) nDEG 1408/71 s'oppose egalement à ce qu'une cotisation,telle que les cotisations dues sur la base de l'article 191, alinea 1er,7DEG, de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de sante,coordonnee le 14 juillet 1994, et de l'article 68 de la loi du 30 mars1994 portant des dispositions sociales, soit levee sur les prestations desregimes belges de pension complementaire qui ne sont pas des legislationsau sens de l'article 1er, sous j), alinea 1er, du reglement (CEE)nDEG 1408/71, lorsque ces prestations sont dues à un beneficiaire neresidant pas en Belgique qui, conformement à l'article 13, alinea 2, sousf), du reglement (CEE) nDEG 1408/71, est soumis à la legislation del'Etat membre ou il reside.

Cette question ne peut etre resolue que par une interpretation del'article 13 du reglement (CEE) nDEG 1408/71.

Le moyen souleve donc un probleme qui releve de la competence exclusive dela Cour de justice de l'Union europeenne.

En vertu de l'article 267, alinea 3, du Traite sur le fonctionnement del'Union europeenne, la Cour est en regle tenue de poser une questionprejudicielle à la Cour de justice.

Par ces motifs,

La Cour

Sursoit à statuer jusqu'à ce que la Cour de Justice de l'Unioneuropeenne, par voie de decision prejudicielle, ait statue sur la questionsuivante :

L'article 13, paragraphe 1er, du reglement (CEE) nDEG 1408/71 du Conseildu 14 juin 1971 relatif à l'application des regimes de securite socialeaux travailleurs salaries, aux travailleurs non salaries et aux membres deleur famille qui se deplacent à l'interieur de la communaute doit-il etreinterprete en ce sens qu'il fait obstacle à ce qu'une cotisation, telleque la retenue operee en application de l'article 191, paragraphe 1er,7DEG, de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de sante etindemnites, coordonnee le 14 juillet 1994, et que la cotisation desolidarite due en application de l'article 68 de la loi du 30 mars 1994portant des dispositions sociales, soit retenue sur des prestations deregimes de pension complementaires belges qui ne sont pas des legislationsau sens de l'article 1er sous j), alinea 1er, de ce reglement lorsque lesprestations de pension sont dues à un ayant droit qui n'habite pas enBelgique et qui, conformement à l'article 13, paragraphe 2, sous f), dece meme reglement, est soumis à la legislation sur la securite sociale del'Etat membre dans lequel il habite ?

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, president, lesconseillers Didier Batsele, Koen Mestdagh, Mireille Delange en AntoineLievens, et prononce en audience publique du dix-huit mai deux millequinze par le president de section Christian Storck, en presence del'avocat general Henri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier VanessaVan de Sijpe.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Mireille Delange ettranscrite avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

Le greffier, Le conseiller,

18 MAI 2015 S.12.0147.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.12.0147.N
Date de la décision : 18/05/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-05-18;s.12.0147.n ?
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