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09/03/2015 | BELGIQUE | N°S.12.0062.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 09 mars 2015, S.12.0062.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.12.0062.N

1. S.A.,

2. CENTRE POUR L'EGALITE DES CHANCES ET LA LUTTE CONTRE LERACISME, societe de droit public dotee de la personnalitejuridique,

Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

* contre

* * G4S SECURE SOLUTIONS, s.a.,

* Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 23decembre 2011 par la cour du travail d'Anvers.

L'avocat general Henri Vanderlinden

a depose des conclusionsecrites le 19 decembre 2014.

Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

L'avocat genera...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.12.0062.N

1. S.A.,

2. CENTRE POUR L'EGALITE DES CHANCES ET LA LUTTE CONTRE LERACISME, societe de droit public dotee de la personnalitejuridique,

Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

* contre

* * G4S SECURE SOLUTIONS, s.a.,

* Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 23decembre 2011 par la cour du travail d'Anvers.

L'avocat general Henri Vanderlinden a depose des conclusionsecrites le 19 decembre 2014.

Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

L'avocat general Henri Vanderlinden a conclu.

II. Faits et antecedents de la procedure

Il ressort de l'arret attaque que :

- la defenderesse est une entreprise qui fournit notamment desservices de reception et d'accueil à l'attention d'une clienteledifferenciee, ses clients provenant tant du secteur public que dusecteur prive ;

- le 12 fevrier 2003, la demanderesse est entree au service de ladefenderesse comme receptionniste, moyennant un contrat detravail à duree indeterminee ;

- la defenderesse appliquait une regle, à l'origine non ecrite,en vertu de laquelle il etait interdit aux travailleurs de portersur les lieux du travail des signes exterieurs de convictionspolitiques, philosophiques ou religieuses ;

- au depart, et ce pendant plus de trois ans, sans protestation,la demanderesse, qui etait dejà musulmane au moment de sonentree en service, ne portait un voile qu'en dehors des heures detravail ;

- en avril 2006, la demanderesse fit savoir qu'elle avaitl'intention de porter desormais un voile egalement pendant lesheures de travail ;

- la direction de la defenderesse fit savoir à la demanderesseque ce ne serait pas tolere au motif que le port de signespolitiques, philosophiques ou religieux irait à l'encontre desprincipes de neutralite chers à l'entreprise ;

- le 12 mai 2006, apres une periode de maladie, la demanderesse aannonce qu'elle reprendrait le travail le 15 mai 2006 avec levoile ;

- le 29 mai 2006, le conseil d'entreprise de la defenderesse aapprouve une adaptation du reglement de travail, entree envigueur le 13 juin 2006, libellee comme suit : il est interditaux travailleurs de porter sur le lieu du travail des signesexterieurs de convictions politiques, philosophiques oureligieuses et/ou de manifester tout rituel en decoulant ;

- le 12 juin 2006, la demanderesse fut licenciee en raison de saferme intention de porter le voile au travail en tant quemusulmane moyennant paiement d'une indemnite de preaviscorrespondant à 3 mois de remuneration et aux avantages acquisen vertu du contrat de travail.

Par exploit du 26 avril 2007, la demanderesse intenta devant letribunal du travail d'Anvers une action en justice contre ladefenderesse tendant à entendre condamner celle-ci, selon sesdernieres conclusions, en ordre principal au paiement d'uneindemnite pour abus du droit de rupture et en ordre subsidiaireau paiement d'une indemnite pour violation de la loi du 25fevrier 2003 tendant à lutter contre la discrimination etmodifiant la loi du 15 fevrier 1993 creant un Centre pourl'egalite des chances et la lutte contre le racisme (ci-apres :loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contre ladiscrimination).

Par jugement du 27 avril 2010, le tribunal du travail rejetal'action de la demanderesse tendant à obtenir une indemnite pourabus du droit de rupture au motif qu'il n'y avait pas, enl'espece, de discrimination directe ou indirecte. L'actionsubsidiaire fut rejetee au motif, notamment, que la demanderessene releve pas de l'une des quatre categories de travailleurssusceptibles d'avoir droit à l'indemnite forfaitaire prevue parcette loi.

Sur l'appel que la demanderesse interjeta, la cour du travaild'Anvers rejeta ses demandes par l'arret du 23 decembre 2011, aumotif que :

- eu egard aux conceptions divergentes exprimees par la doctrineet la jurisprudence, la defenderesse ne savait pas et ne pouvaitsavoir que l'ordre donne par elle etait illegal, de sorte que lelicenciement donne pour avoir enfreint cet ordre ne peut etreconsidere comme manifestement deraisonnable :

- l'interdiction ne constitue pas une discrimination directe, ladiscrimination indirecte est fort discutable, de meme quel'entrave à la liberte individuelle et/ou à la liberte dereligion, de sorte que le licenciement ne peut davantage etreconsidere comme manifestement deraisonnable pour ces motifs ;

- le premier juge a statue legalement sur la demande subsidiaired'indemnite forfaitaire fondee sur la loi du 25 fevrier 2003tendant à lutter contre la discrimination.

III. Les moyens de cassation

Les demanderesses presentent trois moyens libelles dans lestermes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 288 du Traite du 13 decembre 2007 sur le fonctionnementde l'Union europeenne, tel qu'il etait en vigueur apres le Traitemodifiant le Traite sur l'Union europeenne et le Traiteinstituant la Communaute europeenne, signe à Lisbonne le 13decembre 2007 et approuve par la loi du 19 juin 2008, ancienarticle 249 du Traite CE, signe à Rome le 25 mars 1957 etapprouve par la loi du 2 decembre 1957 ;

- articles 1er, 2.2.a) et b), 3.1.c), 4.1 et 17 de la directive2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant creation d'uncadre general en faveur de l'egalite de traitement en matiered'emploi et de travail ;

- article 2, S:S: 1er, 2, 4 et 5, de la loi du 25 fevrier 2003tendant à lutter contre la discrimination, telle qu'il etaitapplicable apres son annulation par l'arret nDEG 157/2004 rendule 6 octobre 2004 par la Cour constitutionnelle et avant sonabrogation par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contrecertaines formes de discrimination ;

- article 1134, alinea 3, du Code civil ;

- principe general du droit interdisant l'abus de droit ;

- principe general du droit relatif à l'interpretation conformeà une directive des normes nationales ;

- pour autant que de besoin, article 9 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales,signee à Rome le 4 novembre 1950, approuvee par la loi du 13 mai1955 ;

- pour autant que de besoin, articles 6, 1108, 1131, 1133, 1382et 1383 du Code civil ;

- pour autant que de besoin, article 63, alinea 1er, de la loi du3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque declare l'appel forme par les deux demandeurs nonfonde et conclut à nouveau à la legalite du licenciement par ladefenderesse de la premiere demanderesse en raison de son refusde se conformer à l'interdiction de porter sur le lieu dutravail des signes exterieurs de convictions politiques,philosophiques ou religieuses.

L'arret statue ainsi apres avoir considere qu'il n'y a pas d'abusdu droit de rupture au motif que la defenderesse n'a pas agi demaniere manifestement deraisonnable et que, dans le cadre d'uneaction pour abus du droit de rupture, il n'y a pas lieu deverifier si l'interdiction de porter des signes exterieurs deconviction religieuse est ou non proportionnee au but ainsipoursuivi, en fondant cette decision sur les motifs suivants :

« 2.1. Indemnite pour abus du droit de rupture

(...)

Pour pouvoir pretendre à l'indemnite qu'elle demande, madame A.(ou le Centre) doit apporter la preuve que la societedefenderesse s'est rendue coupable d'un abus du droit de ruptureet qu'ensuite de son licenciement, madame A. a subi un dommagequi differe de celui qui est indemnise de fac,on forfaitaire parl'indemnite de preavis qui lui a ete versee.

Il ressort suffisamment de l'ensemble des elements de faitspresentes que madame A. a ete licenciee en raison de son refuspersistant d'encore fournir des prestations de travail sansporter un voile, alors qu'elle avait auparavant fourni desprestations pendant plus de trois ans sans voile et alors qu'ellesavait qu'il existait au sein de la societe une interdictiongenerale de porter des signes visibles de convictions politiques,philosophiques ou religieuses sur le lieu du travail.

Selon madame A. et le Centre, le licenciement donne dans cescirconstances est un abus de droit.

Ils se fondent à cet egard sur une these formulee comme uneregle generale selon laquelle il y a automatiquement abus dudroit de rupture lorsque le licenciement a ete donne en raison durefus du travailleur de suivre une instruction injustifiee del'employeur, une `instruction injustifiee' visant manifestementun ordre contraire à une disposition legale ou à une autrenorme juridique.

Plus concretement, il y a, selon madame A. et le Centre, abus dudroit de rupture parce que le licenciement et/ou l'interdictionen vigueur au sein de la societe constituerait une discriminationdirecte ou à tout le moins indirecte, contraire à la loi du 25fevrier 2003 tendant à la lutte contre la discrimination et àla directive-cadre, en se referant aux `croyances', à la`religion' et aux `convictions religieuses' en tant que critereprotege.

L'interdiction et le licenciement qui a suivi seraient en outreegalement contraires à la liberte de religion, garantie par lesarticles 9.1. de la Convention de sauvegarde des droits del'homme, 18 du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques, 18 de la Declaration universelle des droits del'homme et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'Unioneuropeenne.

La cour du travail ne peut adherer à ce point de vue, et ce pourles raisons suivantes :

L'abus du droit de rupture peut etre defini comme l'exercice dudroit de licenciement d'une maniere qui excede manifestement leslimites de l'exercice normal de ce droit par un employeur prudentet diligent.

L'element crucial de cette definition est qu'il faut qu'il y aitun comportement manifestement deraisonnable.

Lorsqu'il apprecie le caractere manifestement deraisonnable dulicenciement donne, le juge ne peut se borner à substituer sonjugement d'opportunite à celui de l'employeur.

En d'autres mots, il ne peut s'en tenir à la constatation que,selon lui, le licenciement n'etait pas souhaitable ou n'etait pasopportun (D. CUYPERS, Misbruik van ontslagrecht - bedienden, inA.T.O., Kluwer, O-501-135 et la doctrine et la jurisprudence quiy sont citees).

Pour pouvoir decider qu'il y a abus du droit de rupture, le jugedoit constater qu'un employeur normalement prudent et diligent,place dans la meme circonstance, n'aurait pas mis fin à larelation de travail ou n'y aurait pas mis fin de cette maniere.

Cela requiert dans chaque dossier une appreciation in concreto,tenant compte de toutes les circonstances de fait qui ont aboutiau licenciement ou qui l'ont accompagne.

Dans la presente hypothese d'un licenciement en raison du refusd'un ordre `illegal', le juge doit egalement verifier in concretosi l'employeur a agi de maniere manifestement deraisonnable.

Dans ce cadre, le juge doit en particulier tenir compte de lanature de la norme enfreinte par l'employeur lorsqu'il a donnel'ordre par hypothese `illegal' et, correlativement, de la mesuredans laquelle l'employeur savait ou devait savoir que son ordreetait illegal et ne devait pas etre respecte par l'employe.

A la lumiere des considerations qui precedent, la cour du travailne peut, pour apprecier ce dossier, faire abstraction du fait quel'interdiction imposee par la societe defenderesse est regie parun eventail de normes nationales et internationales, presentantun degre tres eleve de difficulte sur le plan de la techniquejuridique, que d'importantes composantes de la societe estimentqu'une telle interdiction est legitime et meme opportune, quecette position est egalement confortee par une partie de lajurisprudence et de la doctrine et que les autorites publiquesnationales et etrangeres edictent des interdictions comparablesprima facie, qui ont ete admises à plusieurs reprises commevalides par des juridictions internationales.

(voir notamment R. BLANPAIN, `Geen hoofddoek op de werkvloer', DeStandaard, 20 juin 2006; c. trav. Bruxelles, 15 janvier 2008,JTT, 2008, 140; Cour eur. D. H., 30 juin 2009, nDEG 43563/08,AKTAS/France; Cour eur. D. H., 29 juin 2004, 44774/98,SAHIN/Turquie; Cour eur. D. H., 15 fevrier 2001, nDEG 42393/98,DAHLAB/Suisse ; c. trav. Anvers, 16 mai 1999, Soc. Kron., 1999,79; E. VERMEERSCH, De Islam en de hoofddoek in Belgie - eenbredere benadering, piece 43 de la defenderesse ; trib. trav.Nivelles, 11 mars 1994, JTT, 1995, 14; civ. Bruxelles (Pres.), 11decembre 1997, www.juridat.be, meme date; Liege 23 fevrier 1995,www.juridat.be, meme date; C.E., 17 mars 2009, piece 33 de ladefenderesse).

La cour du travail constate en outre que dans des situationssimilaires à celles de madame A., il a ete maintes fois juge parles juridictions du travail belges qu'il est permis à unemployeur du secteur prive d'imposer à ses employesl'interdiction de porter un voile ou un autre signe de convictionreligieuse.

(c. trav. Anvers, 3 juin 2004, piece 26, trib. trav. Bruxelles,21 mars 2006, piece 32, confirme par c. trav. Bruxelles, 15janvier 2008, JTT, 2008, 140).

Dans l'affaire qui a donne lieu à l'arret de la cour du travailde Bruxelles du 15 janvier 2008, il a meme ete juge que lameconnaissance de cette interdiction par une travailleusejustifiait son licenciement pour motif grave.

Si la jurisprudence existante des tribunaux du travail belgess'est prononcee explicitement en faveur de la legalite d'unetelle interdiction et la regularite d'un licenciement pourviolation de cette interdiction, l'on ne peut que difficilementpretendre que la societe a agi de maniere `manifestementderaisonnable' dans ce dossier.

En outre, il n'est pas du tout evident mais serieusementcontestable que le licenciement donne et/ou le licenciement et/oul'interdiction en vigueur au sein de la societe etait contraireaux dispositions de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination ou à une autre norme juridique.

(...)

2.1.4. Conclusion : pas de licenciement manifestementderaisonnable

Eu egard à ce qui a ete expose ci-avant, il n'est pasmanifestement deraisonnable que la societe ait choisi -d'ailleurs en concertation avec les representants destravailleurs - de mener au sein de son entreprise une politiquede `neutralite', au sens d'une interdiction de porter sur le lieudu travail des signes exterieurs de convictions politiques,philosophiques ou religieuses.

Il n'est pas davantage deraisonnable de licencier madame A. apresson refus persistant de travailler sans voile, la cour du travailde ceans entendant signaler par là qu'elle a auparavant respectesans encombre cette regle de neutralite trois annees durant, quele licenciement a ete precede de plusieurs avertissements et quela societe a verse à madame A. une indemnite de preavis.

Que madame A. aurait propose d'assumer une autre fonction, danslaquelle elle n'aurait pas de contact avec les clients, ou deporter un voile discret, ne change rien à ce qui precede.

La question de savoir si une telle interdiction et lelicenciement qui a suivi sa violation constituent la voie la plusindiquee pour aboutir à un climat de tolerance au sein del'entreprise ne necessite pas de reponse dans le contexte dupresent dossier, qui traite de l'abus du droit de rupture ».

Griefs

1. L'arret attaque constate que « madame A. a ete licenciee enraison de son refus persistant d'encore fournir des prestationsde travail sans porter un voile, alors qu'elle avait auparavantfourni des prestations pendant plus de trois ans sans voile etalors qu'elle savait qu'il existait au sein de la societe uneinterdiction generale de porter des signes visibles deconvictions politiques, philosophiques ou religieuses sur le lieudu travail ».

2. L'action de la premiere demanderesse tendait à entendrecondamner la defenderesse au paiement d'un montant de 13.220,90euros ou 6 mois de remuneration à titre d'indemnite pour abus dudroit de rupture ou d'indemnite forfaitaire prevue à l'article21, S: 5, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contrela discrimination.

A l'appui de cette action, la premiere demanderesse avait enpremier lieu invoque le caractere fautif du licenciement enraison de l'illegalite de l'interdiction de porter des signesexterieurs d'une conviction religieuse, du fait de sa contrarieteà la loi du 25 fevrier 2003 tendant à la lutte contre ladiscrimination et à la CEDH.

En deuxieme lieu, la premiere demanderesse avait soutenu que,meme si l'interdiction de porter des signes exterieurs d'uneconviction religieuse etait legale, quod non, il y avait quandmeme abus du droit de rupture en raison des circonstancesconcretes ayant entoure le licenciement.

3. En vertu de l'article 1134, alinea 3, du Code civil, et duprincipe general du droit interdisant l'abus de droit, qui y estconsacre, il est interdit à l'employeur d'abuser de son droit delicencier le travailleur (comp. le licenciement abusif desouvriers traite à l'article 63, alinea 1er, de la loi du 3juillet 1978 relative aux contrats de travail).

Se rend coupable d'un abus de droit l'employeur qui exerce ledroit de licenciement d'une maniere qui excede manifestement leslimites d'un exercice normal de ce droit par un employeur prudentet diligent. L'abus de droit suppose donc un acte fautif del'employeur (comp. les articles 1382 et 1383 du Code civil).

L'employeur qui licencie le travailleur sur la base d'un motifillegal, plus precisement au motif que ce dernier ne se conformepas à un ordre ou à une interdiction qui sont illegaux, agitipso facto de fac,on illegale et est ipso facto repute excedermanifestement les limites d'un exercice normal du droit derupture.

La circonstance que l'employeur ne savait pas ou ne devait passavoir que l'ordre ou l'interdiction auxquels son travailleurrefusait d'obtemperer etait illegal, n'y change rien. La seuleillegalite de l'ordre ou de l'interdiction rend en effet illegalle licenciement du chef de son non-respect par le travailleur, cequi suffit pour considerer le licenciement comme fautif et commeconstituant un abus de droit.

Il en est d'autant plus ainsi lorsque le licenciement est illegalen raison de la violation d'une loi qui est, comme en l'espece,d'ordre public (voir les articles 6, 1108, 1131 et 1133 du Codecivil).

4. Il s'ensuit, que lorsque le travailleur intente une action enindemnite pour abus du droit de rupture et qu'il soutient àl'appui de cette action que le licenciement repose sur une baseillegale, en l'espece une base contraire à l'interdiction dediscrimination prevue par la directive 2000/78/CE du Conseil du27 novembre 2000 et à la loi du 25 fevrier 2003 tendant àlutter contre la discrimination, ainsi qu'à la liberte dereligion prevue à l'article 9 de la CEDH, le juge est tenu deverifier si ladite illegalite existe et ne peut se contenter,comme en l'espece, de constater que l'employeur pouvaitraisonnablement supposer qu'il agissait legalement ou qu'il nesavait pas ni ne devait savoir qu'il agissait illegalement.

5. Toute autre decision enfreindrait en outre l'obligationd'interpreter les normes nationales de fac,on conforme à ladirective (voir l'article 288 du Traite du 13 decembre 2007 surle fonctionnement de l'Union europeenne et le principe general dudroit y afferent) et de les appliquer de maniere à rendreeffective et efficace la protection prevue par la directive2000/78/CE (voir egalement l'article 17 de la directive).

6. La directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portantcreation d'un cadre general en faveur de l'egalite de traitementen matiere d'emploi et de travail, transposee dans la loi du 25fevrier 2003 tendant à lutter contre la discrimination(partiellement annulee par l'arret nDEG 157/2004 rendu par laCour constitutionnelle le 6 octobre 2004), interdit toute formede discrimination directe ou indirecte sur le plan, notamment,des conditions de travail, dont le licenciement (voir lesarticles 3.1.c de la directive precitee et 2, S: 4, de la loiprecitee du 25 fevrier 2003).

Un licenciement qui trouve son origine dans une discriminationdirecte ou indirecte est, partant, par principe interdit. Lesarticles 1er et 2.2.a) et b) de la directive 2000/78/CE, et 2,S:S: 1er et 2 de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination (interpretee de fac,on conforme à ladirective) definissent les notions de discrimination directe etde discrimination indirecte. Il ressort de ces dispositions quece n'est que dans le cas d'une justification objective etraisonnable qu'il n'y a pas de discrimination interdite.

Conformement aux articles 4.1 de la directive et 2, S: 5, de laloi du 25 fevrier 2003 tendant à la lutte contre ladiscrimination, en matiere de discrimination directe dans lesrelations de travail, la regle qui s'applique est que letraitement inegal n'est justifie objectivement et raisonnablementque si le critere sur lequel le traitement inegal se fondeconstitue, en raison de la nature de l'activite professionnelle,une exigence professionnelle essentielle et determinante, pourautant que l'objectif soit legitime et que l'exigence soitproportionnee à cet objectif.

Conformement aux articles 2.2.b).i) de la directive et 2, S: 2,de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à la lutte contre ladiscrimination (lue de fac,on conforme à la directive), la reglequi s'applique pour une discrimination indirecte est que letraitement defavorable n'est justifie objectivement etraisonnablement que si un but legitime est poursuivi, si lamesure est appropriee et necessaire pour atteindre ce but et sicette mesure est proportionnee au but poursuivi (voir egalementle troisieme moyen de cassation) (comp. article 9 de la CEDH oules memes criteres de controle, parmi lesquels la regle de laproportionnalite, s'appliquent aux restrictions à la liberte dereligion).

Il s'ensuit qu'il n'y a donc pas de discrimination directe ouindirecte interdite que si un but legitime est poursuivi et quela mesure est proportionnee au but. La legalite d'un traitementinegal est des lors subordonnee à ces conditions, dont lacondition de proportionnalite.

La circonstance que l'employeur qui opere une discrimination enetablissant les conditions de travail ou en procedant à unlicenciement ne sait pas et n'est pas tenu de savoir que son acteest discriminatoire ne constitue pas une cause de justificationsusceptible de priver le travailleur de la protection juridiquede la directive et de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination.

7. Il ressort de l'arret attaque que les juges d'appelconsideraient qu'il ne suffit pas que l'interdiction du port designes exterieurs de convictions politiques, philosophiques oureligieuses soit illegale pour qu'il y ait abus du droit derupture dans le chef de la defenderesse. Selon les juges d'appel,il est en outre requis que la defenderesse ait su ou du savoirque l'interdiction etait illegale, ce qui, suivant l'arret, n'estpas le cas.

En effet, puisque, suivant l'arret, les normes nationales etinternationales applicables en l'espece presentent un degre dedifficulte tres eleve sur le plan de la technique juridique,qu'il existe d'importantes composantes de la societe quiconsiderent comme legitime l'interdiction du port du voile et quecertaines decisions de justice nationales et internationales ontdejà considere que l'interdiction du voile est valable, l'arretdecide qu'il ne peut etre reproche à la defenderesse d'avoir agide maniere manifestement deraisonnable et donc d'avoir commis unabus du droit de rupture en licenciant la premiere demanderessepour ne pas s'etre conformee à l'interdiction litigieuse.

Certes, dans les motifs suivants, l'arret attaque examinesurabondamment si l'interdiction litigieuse est contraire àl'interdiction de discrimination prevue à l'article 2 de la loidu 25 fevrier 2003 tendant à lutter contre la discrimination età la liberte de religion consacree par l'article 9 de la CEDH,mais sans operer un controle complet de l'ensemble des conditionsde legalite. Ainsi, lorsqu'il apprecie une eventuellediscrimination indirecte, l'arret attaque omet de verifier sil'interdiction en question du port de signes exterieurs deconviction religieuse sur le lieu du travail est proportionnee aubut poursuivi, consistant à tendre à un environnement detravail paisible, et ce au motif que ce ne serait pas necessairedans le cadre d'un abus du droit de rupture.

8. En statuant ainsi, l'arret attaque subordonne le caracterefautif du licenciement de la premiere demanderesse en raison d'unabus du droit de rupture commis par la defenderesse à laconnaissance que la defenderesse avait ou aurait du avoir del'eventuelle illegalite de l'interdiction du port de signesexterieurs de conviction religieuse sur laquelle le licenciementse fonde, alors que la seule illegalite de cette interdictionsuffit pour que la premiere demanderesse puisse invoquer àl'egard de la defenderesse une protection contre l'abus du droitde rupture.

L'arret attaque viole de ce fait l'article 1134, alinea 3, duCode civil et le principe general du droit interdisant l'abus dedroit, ainsi que les articles 1er, 2.2.a) et b), 3.1.c) et 4.1 dela directive 2000/78/CE et les articles 2, S:S: 1er, 2, 4 et 5,de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contre ladiscrimination, mieux precises dans le moyen, et de meme leprincipe general du droit relatif à l'interpretation conforme àune directive des normes nationales, l'article 288 du Traite du13 decembre 2007 sur le fonctionnement de l'Union europeenne,mieux precise dans le moyen, et l'article 17 de la directive2000/78/CE dejà mentionnee et, pour autant que de besoin,l'ensemble des autres dispositions legales indiquees dans lemoyen.

* Deuxieme moyen

Dispositions legales violees

- article 288 du Traite du 13 decembre 2007 sur le fonctionnementde l'Union europeenne, tel qu'il etait en vigueur apres le Traitemodifiant le Traite sur l'Union europeenne et le Traiteinstituant la Communaute europeenne, signe à Lisbonne le 13decembre 2007 et approuve par la loi du 19 juin 2008, ancienarticle 249 du Traite CE, signe à Rome le 25 mars 1957 etapprouve par la loi du 2 decembre 1957 ;

- articles 1er et 2.2.a) et b), de la directive 2000/78/CE duConseil du 27 novembre 2000 portant creation d'un cadre generalen faveur de l'egalite de traitement en matiere d'emploi et detravail ;

- article 2, S:S: 1er et 2, de la loi du 25 fevrier 2003 tendantà lutter contre la discrimination, telle qu'elle etaitapplicable apres son annulation partielle par l'arret nDEG 157/2004 rendu le 6 octobre 2004 par la Cour constitutionnelle etavant son abrogation par la loi du 10 mai 2007 tendant à luttercontre certaines formes de discrimination ;

- principe general du droit relatif à l'interpretation conformeà une directive des normes nationales ;

- pour autant que de besoin, article 2, S:S: 4 et 5, de la loi du25 fevrier 2003 tendant à lutter contre la discrimination,precisee ci-dessus ;

- pour autant que de besoin, articles 3.1.c) et 4.1 de ladirective 2000/78/CE, precisee ci-dessus.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque declare l'appel forme par les deux demandeurs nonfonde et conclut donc à nouveau à la legalite du licenciementpar la defenderesse de la premiere demanderesse en raison de sonrefus de se conformer à l'interdiction de porter sur le lieu dutravail des signes exterieurs de convictions politiques,philosophiques ou religieuses.

L'arret statue ainsi apres avoir considere que l'interdiction,imposee par la defenderesse, de porter des signes exterieurs deconvictions politiques, philosophiques ou religieuses neconstitue pas une forme de discrimination directe interdite parl'article 2, S: 1er, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant àlutter contre la discrimination, et ce pour les motifs suivants :

« 2.1.1 Pas de discrimination directe

La loi du 25 janvier [lire : fevrier] 2003 tendant à luttercontre la discrimination visait notamment à mettre en oeuvre ladirective 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portantcreation d'un cadre general en faveur de l'egalite de traitementen matiere d'emploi et de travail, ci-apres la directive-cadre.

En ce qui concerne le but poursuivi, l'article 1er de ladirective-cadre dispose :

La presente directive a pour objet d'etablir un cadre generalpour lutter contre la discrimination fondee sur la religion oules convictions, le handicap, l'age ou l'orientation sexuelle, ence qui concerne l'emploi et le travail, en vue de mettre enoeuvre, dans les Etats membres, le principe de l'egalite detraitement.

La directive-cadre opere donc à l'aide d'un nombre limite decriteres proteges.

En ce qui concerne la notion de discrimination, l'article 2 de ladirective-cadre dispose :

Concept de discrimination

1. Aux fins de la presente directive, on entend par `principe del'egalite de traitement' l'absence de toute discriminationdirecte ou indirecte, fondee sur un des motifs vises à l'article1er.

2. Aux fins du paragraphe 1er :

a) une `discrimination directe' se produit lorsqu'une personneest traitee de maniere moins favorable qu'une autre ne l'est, nel'a ete ou ne le serait dans une situation comparable, sur labase de l'un des motifs vises à l'article 1er ;

b) une `discrimination indirecte' se produit lorsqu'unedisposition, un critere ou une pratique apparemment neutre estsusceptible d'entrainer un desavantage particulier pour despersonnes d'une religion ou de convictions, d'un handicap, d'unage ou d'une orientation sexuelle donnes, par rapport à d'autrespersonnes, à moins que :

i) cette disposition, ce critere ou cette pratique ne soitobjectivement justifie par un objectif legitime et que les moyensde realiser cet objectif ne soient appropries et necessaires, ouque

ii) dans le cas des personnes d'un handicap donne, l'employeur outoute personne ou organisation auquel s'applique la presentedirective ne soit oblige, en vertu de la legislation nationale,de prendre des mesures appropriees conformement aux principesprevus à l'article 5 afin d'eliminer les desavantagesqu'entraine cette disposition, ce critere ou cette pratique.

L'article 2 de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contrela discrimination disposait :

paragraphe 1er. Il y a discrimination directe si une differencede traitement qui manque de justification objective etraisonnable est directement fondee sur le sexe, une pretenduerace, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique,l'orientation sexuelle, l'etat civil, la naissance, la fortune,l'age, la conviction religieuse ou philosophique, l'etat de santeactuel ou futur, un handicap ou une caracteristique physique.

paragraphe 2. Il y a discrimination indirecte lorsqu'unedisposition, un critere ou une pratique apparemment neutre a entant que tel un resultat dommageable pour des personnesauxquelles s'applique un des motifs de discrimination vises au S:1er, à moins que cette disposition, ce critere ou cette pratiquene repose sur une justification objective et raisonnable.

paragraphe 3. L'absence d'amenagements raisonnables pour lapersonne handicapee constitue une discrimination au sens de lapresente loi.

Est considere comme amenagement raisonnable l'amenagement qui nerepresente pas une charge disproportionnee, ou dont la charge estcompensee de fac,on suffisante par des mesures existantes.

paragraphe 4. Toute discrimination directe ou indirecte estinterdite, lorsqu'elle porte sur :

- la fourniture ou la mise à la disposition du public de bienset de services ;

- les conditions d'acces au travail salarie, non salarie ouindependant, y compris les criteres de selection et lesconditions de recrutement, quelle que soit la branche d'activiteet à tous les niveaux de la hierarchie professionnelle, ycompris en matiere de promotion, les conditions d'emploi et detravail, y compris les conditions de licenciement et deremuneration, tant dans le secteur prive que public ;

- la nomination ou la promotion d'un fonctionnaire oul'affectation d'un fonctionnaire à un service ;

- la mention dans une piece officielle ou dans un proces-verbal ;

- la diffusion, la publication ou l'exposition en public d'untexte, d'un avis, d'un signe ou de tout autre support comportantune discrimination ;

- l'acces, la participation et tout autre exercice d'une activiteeconomique, sociale, culturelle ou politique accessible aupublic.

paragraphe 5. Dans le domaine des relations de travail tellesqu'elles sont definies au S: 4, 2e et 3e tirets, une differencede traitement repose sur une justification objective etraisonnable lorsque, en raison de la nature d'une activiteprofessionnelle ou des conditions de son exercice, lacaracteristique en cause constitue une exigence professionnelleessentielle et determinante, pour autant que l'objectif soitlegitime et que l'exigence soit proportionnee.

paragraphe 6. Le harcelement est considere comme une forme dediscrimination lorsqu'un comportement indesirable qui est lie auxmotifs de discrimination figurant au S: 1er a pour objet ou poureffet de porter atteinte à la dignite d'une personne et de creerun environnement intimidant, hostile, degradant, humiliant ouoffensant.

paragraphe 7. Tout comportement consistant à enjoindre à(quiconque) de pratiquer une discrimination à l'encontre d'unepersonne, d'un groupe, d'une communaute ou de leurs membres pourun des motifs vises au S: 1er est considere comme unediscrimination au sens de cette loi.

La transposition de la directive-cadre en droit belge, qui etaitdefectueuse pour de nombreuses raisons, fut severement critiqueepar la doctrine et, finalement, fit l'objet d'une annulationpartielle par la Cour d'arbitrage (l'actuelle Courconstitutionnelle).

Par son arret nDEG 157/2004 du 6 octobre 2004 (MB 18 octobre2004), la Cour d'arbitrage annula :

- à l'article 2, S: 1er, les mots `qui' et `est directementfondee sur le sexe, une pretendue race, la couleur, l'ascendance,l'origine nationale ou ethnique, l'orientation sexuelle, l'etatcivil, la naissance, la fortune, l'age, la conviction religieuseou philosophique, l'etat de sante actuel ou futur, un handicap ouune caracteristique physique', avec les effets decrits au B.15 ;

- à l'article 2, S: 2, les mots àuxquelles s'applique un desmotifs de discrimination vises au S: 1er' ;

- à l'article 2, S: 6, les mots `qui est lie aux motifs dediscrimination figurant au S: 1er' ;

- à l'article 2, S: 7, les mots `pour un des motifs vises au S:1er' ;

- l'article 2, S: 4, cinquieme tiret.

La liste initiale, restrictive, des motifs de discrimination dela loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contre ladiscrimination a donc ete annulee par la Cour d'arbitrage, lareference à cette liste etant supprimee dans toutes lesdispositions legales qui y renvoyaient.

Cette suppression de la liste limitative des motifs dediscrimination a donne naissance à une interdiction generale dediscrimination, qui s'etendit à tout critere de distinction, cequi aboutit notamment dans le domaine des relations de travail àune reglementation carrement absurde, farouchement contestee parla Commission europeenne.

(voir A. WITTERS, I. VERELST et D. DEJONGHE, De absurde gevolgenvan de Antidiscriminatiewet voor het arbeidsrecht, Or., 2004,178)

Du fait que la Cour d'arbitrage avait substitue à l'enumerationlimitative des motifs de discrimination interdits uneinterdiction generale de discrimination, la distinction entre unediscrimination directe et une discrimination indirecte etait memedevenue, selon certains auteurs, denuee de pertinence, puisqu'iln'y avait plus de critere neutre.

(voir M. DE VOS, De bestrijding van discriminatie in dearbeidsverhoudingen: van impasse naar doorbraak ?, RW, 2006-07,326).

Au moment du licenciement de madame A., la loi du 10 mai 2007tendant à lutter contre certaines formes de discriminationn'etait bien entendu pas encore entree en vigueur.

La question du caractere discriminatoire du licenciement demadame A. et/ou l'interdiction, existant au sein de la societedefenderesse de porter sur le lieu du travail des signesexterieurs de convictions politiques, philosophiques oureligieuses et/ou de manifester tout rituel en decoulant, doiventetre appreciees en fonction des normes juridiques qui etaientapplicables à ce moment-là.

Cet aspect a ete manifestement perdu de vue par les parties,etant donne qu'elles pensent devoir developper toute uneargumentation autour de l'existence ou non d'un critere protege,alors qu'une interdiction generale de discrimination etait envigueur au moment des faits.

Une discrimination directe au sens de la loi du 25 fevrier 2003tendant à lutter contre la discrimination et de ladirective-cadre requiert en premier lieu un traitement inegal desituations comparables.

(C. BAYART, Discriminatie tegenover differentiatie.Arbeidsverhoudingen na de Discriminatiewet. Arbeidsrecht na deEuropese Ras - en Kaderrichtlijn, Bruxelles, De Boeck etLarcier, 2004, 92).

Les [demandeurs] doivent par consequent rendre au moins credibleque madame A. a ete traitee par la societe defenderesse d'unemaniere plus defavorable qu'une personne de reference l'a ete oul'aurait ete, ou pour le dire autrement qu'elle a ete traiteed'une maniere plus defavorable qu'un autre travailleur comparablede la societe (hypothetique ou non).

En effet, il n'y a pas de discrimination lorsqu'une difference detraitement est denoncee entre des personnes qui ne se trouventpas dans une situation comparable (C. BAYART, DeDiscriminatiewet, Or, 2003, 50).

La cour du travail estime qu'en l'espece, il n'y a pas un teltraitement inegal.

Il n'est en effet pas conteste que madame A. n'a pas etelicenciee en raison de son intime conviction religieusemusulmane.

Madame A. a au contraire ete licenciee pour son intention,manifestee et persistante, d'exprimer clairement cette convictionau cours des heures de travail, plus particulierement en portantun voile.

Il ressort du dossier qu'il y avait à ce moment-là au sein dela societe une regle interdisant aux travailleurs de porter surle lieu du travail les signes exterieurs de convictionspolitiques, philosophiques ou religieuses.

Cette regle etait à l'origine non ecrite.

Madame A. a respecte cette regle pendant plus de trois ans sansaucune protestation, en otant son voile toutes les fois ou elleetait au travail.

Le fait que cette regle existait et que madame A. la connaissaitbien est encore corrobore par le fait qu'en avril 2006, elle n'apas commence à porter tout simplement son voile pendant letravail, mais a juge necessaire d'informer prealablement sonsuperieur de son intention de le faire à l'avenir.

L'adaptation du reglement du travail n'a donc fait que confirmerune regle qui existait depuis un certain temps dejà au sein del'entreprise et etait egalement respectee.

La cour du travail ne trouve pas dans ce dossier des elementsindiquant que la societe s'est ou se serait montree plustolerante vis-à-vis d'une personne de reference comparable, plusparticulierement d'un travailleur ayant une autre convictionreligieuse ou une autre conviction philosophique, quirefuse(rait) en permanence de respecter cette interdiction.

C'est en vain que madame A. et le Centre pensent à cet egardpouvoir puiser un argument dans le fait que peu apres lelicenciement, il a ete constate que deux autres receptionnistesengagees chez Atlas Copco n'ont pas porte l'uniformereglementaire et n'ont pas ete licenciees.

Cette forme d'insubordination n'est pas comparable à l'attitudede madame A. et decoule d'une autre obligation.

Il y a en effet une difference essentielle entre un refuspersistant et manifeste explicitement, de se conformer àl'interdiction de porter des signes exterieurs de convictionreligieuse sur les lieux du travail et la violation signalee del'obligation de porter un uniforme, pour laquelle les damesconcernees ont du reste rec,u un avertissement ecrit.

La cour du travail ne peut davantage se rallier à l'affirmationde madame A. et du Centre, suivis en cela par le ministerepublic, que l'interdiction, en vigueur au sein de la societe, deporter des signes exterieurs de conviction religieuse ouphilosophique impliquerait en soi une discrimination directe àl'egard de madame A., en etablissant une distinction quelque peuforcee entre `croyants' et `non-croyants'.

Ainsi qu'il a dejà ete indique ci-avant, l'interdiction emise ausein de la societe ne concerne pas seulement le port de signesexterieurs de convictions religieuses, mais egalement le port designes exterieurs de convictions philosophiques.

L'interdiction existant au sein de la societe se rapproche doncetroitement du critere protege de `conviction religieuse ouphilosophique' du texte original de la loi du 25 fevrier 2003tendant à lutter contre la discrimination et du critere protegede `religion ou convictions' de la directive-cadre.

En ce qui concerne la portee de ces criteres, l'on peut sereferer utilement à ce que le Centre mentionne lui-meme à cetegard sur son site web (www.diversiteit.be) dans larubrique conviction religieuse et philosophique :

`Le Centre entend par convictions religieuses ou philosophiquesles convictions qui concernent l'existence ou non d'un dieu ou dedivinites. Sont donc egalement visees les convictionsphilosophiques telles que l'atheisme, l'agnosticisme ou lalaicite'.

Cette definition coincide parfaitement avec les travauxpreparatoires de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination (Doc. parl. Senat 2001-2002, nDEG 2 -12/15, 64) ainsi qu'avec la tres large interpretation confereepar le Comite des droits de l'homme à la liberte de religion etde conviction garantie à l'article 18 de la Declarationuniverselle des droits de l'homme, article qui - selon le Comitedes droits de l'homme - protege les croyances `theistes, nontheistes et athees' ainsi que `le droit de ne professer aucuneconviction'.

(voir J. Temperman, Het recht op geloofsvrijheid, in S. DEWULF etD. PACQUEE (eds), 60 jaar Universele verklaring van de rechtenvan de mens 1948-2008, Anvers - Oxford, Intersentia, 2008, 162).

Avoir `une croyance ou une conviction' est donc, comme le faitd'avoir une `origine', un àge', une `couleur de peau' ou un`etat civil', en soi une caracteristique neutre, generique detous les travailleurs de la societe defenderesse et ne permet pasen soi d'etablir une distinction entre certains (groupes de)travailleurs, et ce à la difference d'un critere tel que le`handicap'.

Il est des lors insense de pretendre qu'un travailleur ou ungroupe de travailleurs est discrimine du fait d'avoir une`conviction religieuse ou philosophique', une `origine', unàge', une `couleur de peau' ou un `etat civil'.

Il n'y a discrimination que lorsque certaines personnes sonttraitees d'une maniere moins favorable que d'autres, du faitqu'elles ont ou non une conviction religieuse determinee ou uneconviction philosophique determinee (par ex. parce qu'elles sontmusulmanes ou catholiques, ou athees).

Sous cet angle, on renverra avec profit à l'article 2 b de ladirective-cadre ou il est question de personnes d'une religion oude convictions donnees, subissant un desavantage particulier parrapport à d'autres personnes.

L'interdiction generale, ainsi qu'elle a ete formulee par lasociete, vise sans distinction tous les signes exterieurs dequelque conviction religieuse ou philosophique que ce soit,s'adresse par consequent de la meme maniere à tous lestravailleurs de la societe et s'applique à tous cestravailleurs.

A cet egard, la cour du travail souhaite faire remarquer qu'ilest egalement parfaitement possible pour des `non-croyants' demanifester par le port de signes exterieurs leurs conceptionsphilosophiques.

L'interdiction existant au sein de la societe n'etablit donc pasde distinction entre des (groupes de) travailleurs, n'utilise pasde critere de distinction pour traiter de maniere moins favorablecertains (groues de) travailleurs et ne peut, pour ce motif, etrequalifiee de discrimination directe ».

Griefs

1. Conformement à l'article 2, S: 4, de la loi du 25 fevrier2003 tendant à lutter contre la discrimination, toute forme dediscrimination directe ou indirecte sur le plan, notamment, desconditions de travail, dont le licenciement, est interdite, et cetant dans le secteur prive que dans le secteur public (voiregalement l'article 3.1.c de la directive 2000/78/CE du Conseildu 27 novembre 2000 portant creation d'un cadre general en faveurde l'egalite de traitement en matiere d'emploi et de travail).

En vertu de l'article 2, S: 5, de la meme loi du 25 fevrier 2003,dans le domaine des relations de travail, une discriminationdirecte ne peut reposer sur une justification objective etraisonnable que si le critere sur lequel repose le traitementinegal constitue, en raison de la nature de l'activiteprofessionnelle, une exigence professionnelle essentielle etdeterminante (voir egalement l'article 4.1 de la directiveprecitee).

Cette restriction ne s'applique pas à une discriminationindirecte et, conformement à l'article 2, S: 2, de la loi du 25fevrier 2003 tendant à lutter contre la discrimination, toutecause de justification poursuivant un but legitime, dont lanecessite et la proportionnalite sont etablies, est admise (voiregalement l'article 2.2.b).i) de la directive 2000/78/CEprecitee) (voir egalement le troisieme moyen de cassation).

2. L'article 2, S: 1er, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant àlutter contre la discrimination definit la discriminationdirecte. Avant l'arret nDEG 157/2004 rendu par la Courconstitutionnelle le 6 octobre 2004, il y avait, sauf en cas dejustification objective et raisonnable, discrimination directe sides personnes avaient ete traitees de fac,on differente sur labase d'une serie de motifs de discrimination bien determines,dont la conviction religieuse.

L'article 2, S: 2, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination definit la discrimination indirecte.Avant l'arret de la Cour constitutionnelle, il y avait, sauf encas de justification objective et raisonnable, discriminationindirecte lorsqu'une disposition ou un critere apparemment neutreavait pour resultat que des personnes pouvant faire l'objet d'unmotif de discrimination donne, par exemple une convictionreligieuse bien determinee, etaient traitees de fac,on plusdesavantageuse que d'autres personnes ne presentant pas cettecaracteristique.

La discrimination directe supposait donc qu'une dispositionfondee sur un critere legalement protege ou un motif dediscrimination (par exemple une conviction religieuse) soitappliquee à des personnes ainsi traitees de maniere inegale.

La discrimination indirecte, en revanche, supposait qu'en raisonde l'application d'une disposition apparemment neutre, etrangereà un critere protege ou à un motif de discrimination (parexemple un vetement), des personnes presentant unecaracteristique bien determinee, liee à un motif dediscrimination (par exemple les adeptes d'une convictionreligieuse determinee) se voyaient finalement traiteesdifferemment des personnes depourvues de cette caracteristique.

3. Apres l'annulation par l'arret de la Cour constitutionnelle del'enumeration limitative des motifs de discrimination, l'article2, S: 1er, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contrela discrimination s'enonc,ait encore comme suit : « Il y adiscrimination directe si une difference de traitement manque dejustification objective et raisonnable ». Cette dispositionetait en vigueur à la date à laquelle la premiere demanderessea ete licenciee.

Apres l'arret de la Cour constitutionnelle, l'article 2, S: 2,s'enonc,ait encore comme suit : « Il y a discriminationindirecte lorsqu'une disposition, un critere ou une pratiqueapparemment neutre a en tant que tel un resultat dommageable pourdes personnes, à moins que cette disposition, ce critere oucette pratique ne repose sur une justification objective etraisonnable ».

Pour donner un sens à ces dispositions, elles doivent etreinterpretees à la lumiere de la directive 2000/78/CE du Conseildu 27 novembre 2000 portant creation d'un cadre general en faveurde l'egalite de traitement en matiere d'emploi et de travail. Laloi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contre la discriminationavait en effet pour but de transposer cette directive dansl'ordre juridique belge. Une interpretation des normes nationalesqui soit conforme à la directive s'impose dans ce cas (voir leprincipe general du droit y afferent et l'article 288 du Traitedu 13 decembre 2007 sur le fonctionnement de l'Union europeenne,exprimant ce principe).

Il resulte de l'article 1er de la directive precitee qu'elleavait pour objet d'etablir, en ce qui concerne l'emploi et letravail, un cadre pour lutter contre la discrimination fondee surdes motifs bien determines, dont la religion ou les convictions.Les definitions de discrimination directe et de discriminationindirecte à l'article 2.2.a) et b) de la directive contiennentun renvoi aux motifs vises à l'article 1er, et donc aussi à lareligion ou aux convictions.

Il s'ensuit qu'apres l'arret de la Cour constitutionnelle,l'article 2 de la loi du 25 fevrier 2003 tendant à lutter contrela discrimination devait encore etre lu à la lumiere de motifsde discrimination specifiques, plus precisement à la lumiere desmotifs enumeres dans la directive.

4. Cela signifie que la religion est un critere protege, et non,donc, un critere neutre, de sorte qu'un traitement inegal fondesur la religion constitue une discrimination directe au sens del'article 2, S: 1er, de la loi du 25 fevrier 2003 tendant àlutter contre la discrimination, interprete conformement à ladirective.

La circonstance que chaque travailleur a l'une ou l'autreconviction philosophique ou religieuse ne fait pas du critere deconviction un critere neutre ayant pour consequence que letraitement inegal pourrait encore constituer tout au plus unediscrimination indirecte. La circonstance elle aussi que ce n'estpas une conviction bien determinee, mais toute conviction qui estvisee, ne fait pas du critere de conviction un critere neutre.

5. En ce qui concerne le traitement inegal, il n'est pascontestable qu'un reglement qui interdit à ses travailleurs deporter des signes exterieurs de toute conviction religieuse creeun traitement inegal entre les travailleurs. Alors que destravailleurs qui portent un voile en raison de leur convictionreligieuse ne sont pas admis sur le lieu du travail ou sontlicencies, les travailleurs adeptes d'une autre conviction oud'aucune sont admis sur les lieux du travail et ne sont paslicencies.

La circonstance que l'interdiction s'adresse à tous lestravailleurs, croyants ou non-croyants, musulmans ou catholiques,et pas seulement aux travailleurs ayant une conviction biendeterminee, ne supprime pas le traitement inegal precite sur labase du critere de conviction et ne fait donc pas del'interdiction une disposition non discriminatoire ou unedisposition discriminatoire indirecte. La question n'est en effetpas de savoir dans quelle mesure l'interdiction s'impose à tousles travailleurs (egalite devant la norme), mais dans quellemesure une difference est faite dans cette interdiction elle-memeentre ces travailleurs (discrimination par la norme).

6. Il est constant qu'au sein de l'entreprise de la defenderesse,il existait une interdiction pour les travailleurs de porter surle lieu du travail des signes exterieurs de convictionspolitiques, philosophiques ou religieuses et que la premieredemanderesse a ete licenciee parce qu'elle refusait de seconformer à l'interdiction precitee en voulant garder son voile.

L'arret attaque dit qu'une conviction religieuse ou uneconviction philosophique est une caracteristique neutre ougenerique que possedent tous les travailleurs de la defenderesseet considere pour ce motif que cette caracteristique « ne permetpas en soi d'etablir une distinction entre certains (groupes de)travailleurs, et ce à la difference d'un critere tel que le`handicap' ».

En outre, l'arret dit qu'il n'y a discrimination que lorsquecertaines personnes sont traitees d'une maniere moins favorable,« du fait qu'elles ont ou non une conviction religieusedeterminee ou une conviction philosophique determinee (par ex.parce qu'elles sont musulmanes ou catholiques ou athees) ». Aumotif que l'interdiction en vigueur dans l'entreprise de ladefenderesse vise tous les signes exterieurs de quelqueconviction religieuse ou philosophique que ce soit, et non d'uneconviction religieuse ou d'une conviction philosophique biendeterminee, l'arret attaque considere qu'il n'y a pas dediscrimination directe ou de traitement defavorable.

7. En statuant ainsi, et en particulier en considerant comme uncritere neutre la conviction religieuse sur laquellel'interdiction litigieuse se fonde et en ne voyant pas dansl'interdiction un traitement inegal entre les travailleursportant un voile et les travailleurs n'en portant pas au motifque l'interdiction ne concerne pas une conviction religieuse biendeterminee et au motif qu'elle s'impose à tous les travailleurs,l'arret attaque meconnait la notion de « discriminationdirecte » et la distinction entre cette notion et celle de« discrimination indirecte », ainsi qu'elles ressortent del'article 2, S:S: 1er et 2 de la loi du 25 fevrier 2003 tendantà lutter contre la discrimination, apres son annulationpartielle par la Cour constitutionnelle, mais lu de fac,onconforme à la directive.

L'arret attaque viole par consequent l'article 2, precite, S:S:1er et 2, de la loi precitee du 23 fevrier 2003 tendant à luttercontre la discrimination, les articles 1er et 2.2.a) et b) de ladirective 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portantcreation d'un cadre general en faveur de l'egalite de traitementen matiere d'emploi et de travail, le principe general du droitrelatif à l'interpretation conforme à une directive des normesnationales, l'article 288 du Traite du 13 decembre 2007 sur lefonctionnement de l'Union europeenne, mieux precise dans lemoyen, et, pour autant que de besoin, l'ensemble des autresdispositions, indiquees au moyen, de la loi 25 fevrier 2003tendant à lutter contre la discrimination et de la directive2000/78/CE.

* (...)

* IV. La decision de la Cour

Sur le deuxieme moyen :

1. En vertu de l'article 1er de la directive 2000/78/CE duConseil du 27 novembre 2000 portant creation d'un cadre generalen faveur de l'egalite de traitement en matiere d'emploi et detravail, cette directive a pour but d'etablir un cadre generalpour lutter contre la discrimination fondee sur la religion oules convictions, le handicap, l'age ou l'orientation sexuelle, ence qui concerne l'emploi et le travail, en vue de mettre enoeuvre, dans les Etats membres, le principe de l'egalite detraitement.

En vertu des articles 2.1 et 2.2 de la directive precitee, auxfins de cette directive, on entend par principe de l'egalite detraitement l'absence de toute discrimination directe ouindirecte, fondee sur un des motifs vises à l'article 1er, etaux fins du paragraphe 1er :

a) une discrimination directe se produit lorsqu'une personne esttraitee de maniere moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'aete ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base del'un des motifs vises à l'article 1er ;

b) une discrimination indirecte se produit lorsqu'unedisposition, un critere ou une pratique apparemment neutre estsusceptible d'entrainer un desavantage particulier pour despersonnes d'une religion ou de convictions, d'un handicap, d'unage ou d'une orientation sexuelle donnes, par rapport à d'autrespersonnes.

2. Les juges d'appel considerent que la regle existant chez ladefenderesse en tant qu'employeur interdisant aux travailleurs deporter sur le lieu du travail des signes exterieurs deconvictions politiques, philosophiques ou religieuses neconstitue pas une discrimination directe au motif qu'il ne peut yavoir de discrimination directe que lorsque des personnes d'unereligion ou de convictions donnees sont desavantagees par rapportà d'autres personnes, alors que la regle existant chez ladefenderesse vise sans distinction toutes les manifestationsvisibles de quelque croyance ou philosophie de vie que ce soit ets'adresse par consequent de la meme maniere à tous lestravailleurs.

3. La demanderesse soutient que cette interpretation des jugesd'appel n'est pas compatible avec le texte de l'article 2.2.a) dela directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, en vertuduquel il y a une discrimination directe des qu'une personne esttraitee de maniere moins favorable qu'une autre dans unesituation comparable, sur la base de l'un des motifs vises àl'article 1er, parmi lesquels sont compris la religion et lesconvictions.

4. La contestation ainsi soulevee ne peut etre resolue que parune interpretation de la disposition precitee de la directive2000/78/CE, pour laquelle la Cour de justice de l'Unioneuropeenne est seule competente.

La Cour est ainsi tenue, conformement à l'article 267 du Traitesur le fonctionnement de l'Union europeenne, de poser à la Courde justice la question prejudicielle formulee dans le dispositifdu present arret.

Par ces motifs,

La Cour

Sursoit à statuer jusqu'à ce que la Cour de Justice de l'Unioneuropeenne, par voie de decision prejudicielle, ait statue sur laquestion suivante:

L'article 2.2.a) de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27novembre 2000 portant creation d'un cadre general en faveur del'egalite de traitement en matiere d'emploi et de travail doit-iletre interprete en ce sens que l'interdiction de porter un voileen tant que musulmane sur le lieu du travail ne constitue pas unediscrimination directe lorsque la regle existant chez l'employeurinterdit à tous les travailleurs de porter sur le lieu dutravail des signes exterieurs de convictions politiques,philosophiques et religieuses ?

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, president, les conseillers, Alain Smetryns, KoenMestdagh, Mireille Delange et Antoine Lievens, et prononce enaudience publique du neuf mars deux mille quinze par le presidentde section Christian Storck, en presence de l'avocat generalHenri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier Vanessa Van deSijpe.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Martine Regoutet transcrite avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

Le greffier, Le conseiller,

9 MARS 2015 S.12.0062.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.12.0062.N
Date de la décision : 09/03/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-03-09;s.12.0062.n ?
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