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29/01/2015 | BELGIQUE | N°F.14.0007.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 29 janvier 2015, F.14.0007.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0007.F

1. J. B. et

2. M. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Louvain, Koning Leopold I-straat, 3, ou il estfait election de domicile,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue

de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation e...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0007.F

1. J. B. et

2. M. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Louvain, Koning Leopold I-straat, 3, ou il estfait election de domicile,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 20 mars 2013par la cour d'appel de Mons.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Andre Henkes a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demandeurs presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 33 de la Constitution ;

- articles 85, S:S: 1er et 2, 89 et 91, S: 4, du Code de la taxe sur lavaleur ajoutee ;

- en tant que de besoin, article 67 de la loi du 8 aout 1980 relative auxpropositions budgetaires 1979-1980.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque declare la contrainte de nul effet et depourvue de touteforce executoire et condamne le demandeur, si besoin en est, à payer audefendeur les sommes enumerees dans le dispositif [...] aux motifs que :

« Partant, monsieur M. D., inspecteur principal-chef de service attacheà la direction regionale de l'administration de la taxe sur la valeurajoutee à Mons ne pouvait pas viser et rendre executoire le 14 mai 2007,à peine d'exces de pouvoir, en sa qualite de fonctionnaire designe par ledirecteur regional de la taxe sur la valeur ajoutee de Mons, la contrainteemise à charge des [demandeurs] ; [...]

Une contrainte litigieuse, visee et rendue executoire par un fonctionnairedesigne par le directeur regional en dehors des conditions d'habilitationprecisees par l'autorite delegante, n'a pas de force executoire et ne peutdonc produire aucun effet juridique lorsqu'elle procede d'un exces depouvoir ;

Il convient par consequent de la declarer sans effet ;

En raison du caractere d'ordre public de l'impot, les juridictions del'ordre judiciaire doivent statuer elles-memes en fait et en droit dansles limites du litige dont elles sont saisies, quelle que soit la nullitedont est entachee la decision administrative intervenue ;

Meme si la contrainte n'a pas de force executoire et ne peut produireaucun effet, la cour [d'appel] doit cependant statuer sur la contestationportant sur l'existence de la dette d'impot ».

Griefs

L'article 85 du Code de la taxe sur la valeur ajoutee dispose, en ses deuxpremiers paragraphes, que :

« En cas de non-paiement de la taxe, des interets, des amendes fiscaleset des accessoires, une contrainte est decernee par le fonctionnairecharge du recouvrement ; elle est visee et rendue executoire par ledirecteur regional de l'administration de la taxe sur la valeur ajoutee,de l'enregistrement et des domaines ou par un fonctionnaire designe parlui. Elle est notifiee par pli recommande à la poste. La remise de lapiece à la poste vaut notification à compter du lendemain.

Cette notification :

1DEG interrompt le delai de prescription pour le recouvrement de la taxe,des interets, des amendes fiscales et des accessoires ;

2DEG permet l'inscription de l'hypotheque legale visee à l'article 88 ;

3DEG permet au redevable de faire opposition à l'execution de lacontrainte de la maniere prevue à l'article 89 ;

4DEG fait courir les interets moratoires conformement à l'article 91, S:4 ».

Il resulte de cette disposition que c'est la notification de la contrainteau redevable et, partant, l'existence de la contrainte qui ouvre lapossibilite, pour le redevable, de contester devant le tribunal, par lavoie d'une opposition à l'execution de cette contrainte, les montants detaxe sur la valeur ajoutee, interets et frais reclames parl'administration dans ce titre.

Premiere branche

La contrainte en matiere de taxe sur la valeur ajoutee, visee et rendueexecutoire conformement à l'article 85 du Code de la taxe sur la valeurajoutee, constitue le titre executoire que l'administration fiscale estautorisee à se delivrer, en vertu du principe du droit administratif dit« du prealable », et qui lui permet de poursuivre le recouvrement de lacreance fiscale qui y est visee, et ce, en vertu d'un autre principe dudroit administratif, dit de l'execution d'office.

Cette contrainte est un acte administratif à portee individuelle quin'est pas soumis aux dispositions du Code judiciaire relatives auxnullites des actes de procedure. Partant, elle doit etre annuleelorsqu'elle procede de la violation des formes substantielles ouprescrites à peine de nullite, detournement ou exces de pouvoir, et ce,sans qu'une disposition legale prevoie, de maniere expresse, la sanctionde la nullite.

Il est constant que les lois d'impot sont d'ordre public et que, pour quel'annulation de la contrainte pour exces de pouvoir soit prononcee, ilsuffit que le juge du fond constate ce vice, moyennant le respect desdroits de la defense.

Apres avoir analyse les arguments de chacune des parties quant à lavalidite de la contrainte litigieuse, dont les demandeurs sollicitaient enconclusions la nullite, l'arret attaque constate que monsieur M. D. nepouvait pas viser et rendre executoire le 14 mai 2007, à peine d'exces depouvoir, la contrainte emise à charge des demandeurs.

Il s'ensuit que l'arret, qui se contente de declarer depourvue de forceexecutoire et de nul effet la contrainte, apres avoir constate que lacontrainte litigieuse avait ete rendue executoire par un fonctionnaire endehors des conditions d'habilitation precisees par l'autorite delegante etqu'elle procedait, des lors, d'un exces de pouvoir, ne justifie paslegalement sa decision au regard de l'article 85 du Code de la taxe sur lavaleur ajoutee, plus specialement en ses paragraphes 1er et 2, dans lamesure ou cet exces de pouvoir doit etre sanctionne par la nullite del'acte qui en est affecte, ainsi que les demandeurs le sollicitaient(violation des articles 33 de la Constitution, 85, S:S: 1er, specialementalinea 1er, et 2, 89 et 91, S: 4, du Code de la taxe sur la valeur ajouteeet, en tant que de besoin, de l'article 67 de la loi du 8 aout 1980relative aux propositions budgetaires 1979-1980).

Deuxieme branche

Aux termes de l'article 89 du Code de la taxe sur la valeur ajoutee,l'execution de la contrainte ne peut etre interrompue que par uneopposition motivee, formee par le redevable.

L'opposition du redevable ne saisit le juge d'aucune autre contestationque la contestation portant sur la validite et le bien-fonde de lacontrainte decernee par le fonctionnaire de l'administration fiscale etce, dans les limites de l'opposition à la contrainte faite par leredevable.

Il s'ensuit qu'il n'appartenait pas à l'arret de statuer sur une detteautre que celle dont le paiement etait reclame au redevable par la voie dela contrainte litigieuse et ce, sous peine de violer les limites del'opposition et, en consequence, d'aggraver la situation des demandeursfaisant opposition, en substituant un titre judiciaire à un titreadministratif entache de nullite et, des lors, impuissant à justifier lerecouvrement de la moindre somme en faveur de l'Etat (violation desarticles 33 de la Constitution, 85, S:S: 1er, specialement alinea 1er, et2, 89 et 91, S: 4, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee et, en tantque de besoin, de l'article 67 de la loi du 8 aout 1980 relative auxpropositions budgetaires 1979-1980).

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Dans leurs conclusions d'appel, les demandeurs soutenaient que laprocedure fiscale n'etait pas reguliere, la contrainte litigieuse ayantete decernee par un fonctionnaire qui, ne justifiant pas de l'habilitationrequise, avait commis un exces de pouvoir. Ils faisaient valoir « qu'enl'absence de delegation, la contrainte est depourvue de force executoireet est de nul effet » et que la contrainte est « nulle et de nuleffet » lorsqu'un exces de pouvoir a ete commis.

En termes de dispositif, ils demandaient à la cour d'appel de dire lacontrainte nulle et de nul effet.

En declarant que la contrainte litigieuse est depourvue de toute forceexecutoire et, partant, de nul effet, l'arret fait droit à cette demande.

Les demandeurs sont des lors sans interet à critiquer cette decisionconforme à leur demande.

Le moyen, en cette branche, est irrecevable.

Quant à la seconde branche :

Si l'opposition du redevable visee à l'article 89 du Code de la taxe surla valeur ajoutee saisit le juge de la seule contestation de la validiteet du bien-fonde de la contrainte decernee par le fonctionnaire charge durecouvrement de la taxe, aucune disposition legale n'exclut que la saisinedu juge devant qui est forme ce recours soit etendue ou modifiee par desdemandes incidentes.

Il ressort des pieces de la procedure que la cour d'appel a ete saisied'une demande reconventionnelle du defendeur tendant à se faire delivrer,si la contrainte etait dite de nul effet, un titre condamnant le demandeurà lui payer les sommes litigieuses.

En faisant droit à cette demande, l'arret, qui ne statue pas sur unedette autre que celle qui faisait l'objet de la contrainte qu'il declarede nul effet, ne viole aucune des dispositions legales visees au moyen, encette branche.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux depens.

Les depens taxes à la somme de huit cent vingt euros cinquante-sixcentimes envers les parties demanderesses et à la somme de deux centcinquante-six euros trente-trois centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, le conseiller DidierBatsele, le president de section Albert Fettweis, les conseillers MartineRegout et Sabine Geubel, et prononce en audience publique du vingt-neufjanvier deux mille quinze par le president de section Christian Storck, enpresence de l'avocat general Andre Henkes, avec l'assistance du greffierPatricia

De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Regout |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

29 JANVIER 2015 F.14.0007.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.14.0007.F
Date de la décision : 29/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2015
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-01-29;f.14.0007.f ?
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