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06/11/2014 | BELGIQUE | N°C.13.0610.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 06 novembre 2014, C.13.0610.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.13.0610.F

AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

ETHIAS, societe anonyme dont le siege social est etabli à Liege, rue desCroisiers, 24,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pour

voi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 20 decembre2012 par la cour d'appel de Liege.

Le 21 octobr...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.13.0610.F

AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

ETHIAS, societe anonyme dont le siege social est etabli à Liege, rue desCroisiers, 24,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 20 decembre2012 par la cour d'appel de Liege.

Le 21 octobre 2014, l'avocat general Thierry Werquin a depose desconclusions au greffe.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport et l'avocat generalThierry Werquin a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 1142, 1147, 1149, 1150, 1151, 1384, alinea 1er, 1721, 1732 et1733 du Code civil

Decisions et motifs critiques

Apres avoir considere qu'« il apparait à suffisance des rapports desexperts des assureurs que l'insuffisance d'etancheite entre le foyer etla poutre decorative est à l'origine de l'incendie » mais que « lesexperts evoquent toutefois une cause concurrente à l'incendie, etant unusage intensif du feu ouvert », l'arret decide, « quant auxresponsabilites », que :

« En vertu de l'article 1733 nouveau du Code civil, modifie par la loi du20 fevrier 1991, le preneur repond de l'incendie, à moins qu'il prouveque celui-ci s'est declare sans sa faute.

La responsabilite du preneur est contractuelle et decoule de sonobligation de restitution, qui est une obligation de resultat.

Il s'ensuit que le preneur doit etablir, à l'egard du bailleur ou de son subroge, l'absence de tout comportement fautif ayant contribue àl'incendie tel qu'il s'est produit, tant dans son chef que dans celui despersonnes dont il repond en vertu de l'article 1384, alinea 3, du Codecivil (...).

Il n'est donc exonere que si le sinistre ne peut etre du qu'à une causequi lui est etrangere et dont il peut rapporter la preuve de manieredirecte ou indirecte en prouvant l'absence de toute faute dans son chef.La preuve de la non-responsabilite du preneur peut etre faite de maniereinductive à condition d'etre decisive (...).

Le locataire n'est notamment pas libere lorsque le sinistre pourrait etredu à un vice de la chose louee ou à une negligence du bailleur, desl'instant ou il a commis lui-meme une faute en relation avec le dommage.La cause etrangere doit exister à l'etat pur, non melee de faute (...).

Enfin, ce n'est que si le locataire parvient à s'exonerer de laresponsabilite que les articles 1733 et 1734 du Code civil mettentnormalement à sa charge qu'il dispose à son tour d'un droit de recourseventuel contre son bailleur conformement à l'article 1721 du Code civil. S'il n'a pas ete en mesure de demontrer que l'incendie est survenusans sa faute, il assume en effet entierement toutes les consequences del'incendie en vertu de l'article 1733 du Code civil et la preuve d'unvice de la chose qui a contribue à (la) survenance de l'incendie ne peutdeboucher sur un quelconque partage de responsabilite.

En l'espece et sur la base des principes ainsi rappeles, la (demanderesse)tente de demontrer que son assur(ee) ne repond pas de l'incendie sur labase de l'article 1733 du Code civil, en prouvant, de maniere directe,que l'incendie resulte d'une cause etrangere, plus precisement du vice dela chose louee.

Si la preuve du vice de la cheminee à l'origine de l'incendie est effectivement rapportee par la (demanderesse), cela ne suffit pas àprouver, conformement à l'article 1733 du Code civil, que l'incendies'est declare sans la faute du locataire.

La faute de ce dernier residerait dans le fait, evoque par les conseils techniques, d'avoir utilise l'atre en y faisant, non un feu d'appoint,mais un feu intensif et continu, destine à compenser l'absence dechauffage central, feu laisse sans surveillance pendant la nuit.

Cet usage intensif et anormal du feu ouvert expliquerait, à tout le moinspartiellement, la survenance de l'incendie.

La (demanderesse) reste en defaut d'apporter le moindre element qui tendrait à demontrer que les locataires n'ont pas commis cette faute ouqu'elle ne peut etre à l'origine de l'incendie.

Elle ne prouve pas que la seule cause de l'incendie est le vice de la cheminee, à l'exclusion de toute faute du locataire. La presomption deresponsabilite de l'article 1733 du Code civil n'est pas renversee, desorte que la (demanderesse) doit seule etre tenue de reparer lesconsequences de l'incendie et ce, meme si un vice de la chose a puconstituer une des causes de l'incendie ».

Griefs

En vertu de l'article 1733 du Code civil, le preneur repond de l'incendie,à moins qu'il prouve que celui-ci s'est declare sans sa faute. Ce n'estqu'une application particuliere de l'article 1732 du meme code, auxtermes duquel le preneur repond des degradations ou des pertes quiarrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il prouve qu'elles ont eu lieusans sa faute. Il se deduit notamment de cette disposition que, lorsquela cause de l'incendie demeure inconnue, ses consequences demeurent à lacharge du preneur.

L'arret decide, sans etre critique, que la responsabilite de l'assuree dela demanderesse est engagee au motif qu'elle a commis une faute en liencausal avec la survenance de l'incendie, faute consistant à « avoirutilise l'atre en y faisant, non un feu d'appoint, mais un feu intensifet continu, destine à compenser l'absence de chauffage central, feu laisse sans surveillance pendant la nuit ».

Mais il retient egalement « que l'insuffisance d'etancheite entre lefoyer et la poutre decorative est à l'origine de l'incendie », que lademanderesse rapporte « la preuve du vice de la cheminee, à l'originede l'incendie », que la faute de la locataire « expliquerait, à tout lemoins partiellement, la survenance de l'incendie » et qu'« un vice dela chose a pu constituer une des causes de l'incendie ».

L'article 1721 du Code civil dispose que le bailleur doit garantie aupreneur pour tous les vices ou defauts de la chose louee qui en empechentl'usage, quand meme le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail, etque, s'il resulte de ces vices ou defauts quelque perte pour le preneur,le bailleur est tenu de l'indemniser.

Lorsqu'il est etabli, comme en l'espece, que l'incendie fut cause conjointement par une faute du preneur et un vice cache du bien loue, lafaute du locataire n'expliquant que « partiellement la survenance del'incendie » et le locataire apportant « la preuve d'un vice de lachose qui a contribue à (la) survenance de (celui-ci) », il ne resulted'aucune disposition legale que la responsabilite du preneur ne pourraitse combiner avec cet autre fait generateur de responsabilite et que lelocataire devrait assumer seul « toutes les consequences de l'incendie ». Exclure en pareil cas tout partage de responsabilitesequivaut à decharger purement et simplement le bailleur de sonobligation de repondre du vice de la chose, qui a pourtant constitue l'une des causes de l'incendie.

En considerant que le locataire n'est « pas libere lorsque le sinistrepourrait etre du à un vice de la chose louee ou à une negligence dubailleur, des l'instant ou il a commis lui-meme une faute en relation avecle dommage », car « la cause etrangere doit exister à l'etat pur, non melee de faute », de sorte que, « s'il n'a pas ete en mesure dedemontrer que l'incendie est survenu sans sa faute, il assume (...)entierement toutes les consequences de l'incendie en vertu de l'article1733 du Code civil et la preuve d'un vice de la chose qui a contribue à(la) survenance de l'incendie ne peut deboucher sur un quelconque partagede responsabilite », l'arret ne deduit pas les consequences legales deses constatations au regard des articles 1384, alinea 1er, 1721, 1732 et1733 du meme code, dont il resulte qu'il n'est pas legalement justifie, enpresence d'un incendie dont il est etabli qu'il est du à la conjugaisond'une faute du preneur et d'un vice de la chose, d'en faire peserl'ensemble des consequences sur le preneur seul, puisque celui-ci se voitdes lors contraint de remedier à ses frais au vice de la chose et derendre au proprietaire une chose exempte du vice qui l'affectait et quilui a occasionne une perte, ce qui excede les bornes de son obligation derestitution des lors que le bailleur doit garantie au preneur pour tousles vices ou defauts de la chose louee qui en empechent l'usage, et doitindemniser le preneur s'il resulte de ces vices ou defauts quelque pertepour lui (violation de ces dispositions).

En outre, en se determinant ainsi, l'arret meconnait la theorie de l'equivalence des conditions, selon laquelle toute faute contractuellesans laquelle le dommage ne se serait pas produit tel qu'il s'est produitoblige le debiteur à la reparer au moyen de dommages et interets,moyennant un partage de responsabilites en presence de fautes ou de causesconcurrentes (violation des articles 1142, 1147, 1149, 1150 et 1151 duCode civil).

III. La decision de la Cour

En vertu de l'article 1733 du Code civil, le preneur repond de l'incendiede la chose louee, à moins qu'il prouve que celui-ci s'est declare sanssa faute.

L'article 1721 du meme code dispose qu'il est du garantie au preneur pourtous les vices ou defauts de la chose louee qui en empechent l'usage,quand bien meme le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail et que,s'il resulte de ces vices ou defauts quelque perte pour le preneur, lebailleur est tenu de l'indemniser.

Ces dispositions n'excluent pas qu'un partage de responsabilite puisseetre prononce lorsque l'incendie de la chose louee a ete cause à la foispar une faute du preneur et par un vice ou un defaut de la chose loueepour lequel le bailleur doit garantie.

Apres avoir tenu pour etabli que l'incendie litigieux a pour origine,d'une part, un defaut d'etancheite de la cheminee de l'immeuble loue dontl'assure de la defenderesse est le bailleur, d'autre part, un usageintensif et continu du feu ouvert destine comme chauffage d'appoint,constitutif de faute à charge de la locataire, assuree de lademanderesse, l'arret considere que, « si [le locataire] n'a pas ete enmesure de demontrer que l'incendie est survenu sans sa faute, il assume[...] entierement toutes les consequences de l'incendie en vertu del'article 1733 du Code civil et la preuve d'un vice de la chose qui acontribue à la survenance de l'incendie ne peut deboucher sur unquelconque partage de responsabilite ».

En statuant ainsi, l'arret viole les articles 1733 et 1721 du Code civil.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, president, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Michel Lemal,Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononce en audience publique dusix novembre deux mille quatorze par le president de section ChristianStorck, en presence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistancedu greffier Patricia De Wadripont.

+------------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
|-----------------+-------------+----------------|
| M. Lemal | A. Fettweis | Chr. Storck |
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6 NOVEMBRE 2014 C.13.0610.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.13.0610.F
Date de la décision : 06/11/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-11-06;c.13.0610.f ?
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