Cour de cassation de Belgique
Arret
437
NDEG P.14.0557.F
M.C.N.,
etranger, detenu en vue d'extradition,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maitre Christophe Marchand, avocat au barreau deBruxelles.
* I. la procedure devant la cour
* Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 27 mars 2014 par lacour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le conseiller Benoit Dejemeppe a fait rapport.
L'avocat general Raymond Loop a conclu.
* II. la decision de la cour
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 5.3 et 5.4 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, et 7,alinea 3, de la Convention du 7 juillet 1997 entre le Royaume de Belgiqueet le Royaume du Maroc sur l'extradition, ainsi que de la meconnaissancedu principe non bis in idem. Ayant fait valoir qu'il avait dejà ete jugeen Espagne pour les faits à l'origine du mandat d'arret internationaldelivre à sa charge, le demandeur soutient que l'arret ne releve pas lescirconstances concretes justifiant de ne pas faire application du principeprecite.
En vertu de l'article 7, alinea 3, de ladite Convention, l'extraditionpeut etre refusee si l'individu recherche a ete juge par les autoritesd'un Etat tiers pour le ou les faits à raison desquels l'extradition estdemandee.
Lorsque ce cas de refus facultatif est invoque par la personneinternationalement recherchee, il appartient au juge de preciser lescirconstances propres à la cause qui, à son estime, justifient ou non derendre executoire le mandat d'arret decerne en vue d'extradition.
Par adoption des motifs du requisitoire complementaire du ministere publicet par motifs propres, l'arret expose que la decision de la juridictionespagnole constitue un classement provisoire fonde, en substance, sur unmanque d'indices suffisants. Il ajoute que, l'Etat espagnol n'extradantpas ses nationaux, cette decision a ete prise sans prejudice de la suitede la procedure judiciaire ouverte au Maroc.
Par ces considerations, la chambre des mises en accusation a legalementjustifie sa decision d'ecarter la cause de refus d'extradition invoqueepar le demandeur.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 5.3 et 5.4 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, et2bis, alinea 2, de la loi du 15 mars 1874 sur les extraditions. Ledemandeur allegue qu'il est en realite poursuivi pour des faits relevantdu terrorisme, de sorte que la decision de la chambre des mises enaccusation porte atteinte aux droits fondamentaux vises à cette dernieredisposition.
Lorsqu'en cas de demande d'extradition, les juridictions d'instruction seprononcent sur le caractere executoire d'un mandat d'arret ou d'un titreequivalent decerne par l'autorite etrangere, elles verifient, dans lerespect des droits de la defense, si le titre produit reunit lesconditions legales et conventionnelles en matiere d'extradition.
En vertu de l'article 2bis, alinea 2, de la loi precitee, l'extradition nepeut etre accordee s'il existe des raisons serieuses que la personne, sielle etait extradee, serait soumise dans l'Etat requerant à un deniflagrant de justice, à des faits de torture ou des traitements inhumainset degradants.
Cette disposition institue une condition generale de l'extradition, dontla verification ressortit au controle des juridictions d'instruction. Illeur appartient des lors, au titre de cette verification, de s'assurer àtout le moins de l'absence de motif grave et evident etablissantl'impossibilite de satisfaire à la condition precitee.
L'arret considere qu'il n'existe pas de raisons serieuses d'admettrel'existence d'un des risques prevus à l'article 2bis, alinea 2.
A l'appui de cette decision, par adoption des motifs du requisitoirecomplementaire du ministere public et par motifs propres, l'arret enonceque, contrairement à ce que le demandeur pretend, l'extradition n'est passollicitee pour une infraction terroriste et la poursuite ne s'inspire pasd'un motif religieux, les faits ne relevant pas de l'appartenance à ungroupe islamiste fanatique, mais de preventions d'assassinat et deguet-apens. Les juges d'appel ont ensuite considere que le demandeur estprotege par le principe de specialite. Ils ont egalement enonce que laCour europeenne des droits de l'homme n'avait pas declare la situationgenerale au Maroc comme suffisamment grave pour en conclure quel'extradition des personnes, quelle que soit leur nationalite, emporteraiten soi une violation de l'article 3 de la Convention. Ils ont encoreexpose qu'il ne ressortait d'aucun element concret de la cause qu'ilexisterait en l'espece un risque serieux d'utilisation de la torturecontre le demandeur ou des tiers afin d'obtenir des preuves à charge decelui-ci. Enfin, selon l'arret, il ne ressort pas de la demanded'extradition que les soupc,ons contre le demandeur s'inspirent d'aveuxd'eventuels co-auteurs dont on pourrait douter de la maniere dont ils ontete obtenus.
Dans la mesure ou il critique cette appreciation en fait ou exige pour sonexamen une verification d'elements de fait, pour laquelle la Cour est sanspouvoir, le moyen est irrecevable.
Il l'est egalement en tant qu'il soutient que, le Maroc n'etant pas partieà la Convention europeenne d'extradition, les juges d'appel n'ont pulegalement se fonder sur le principe de specialite inscrit à l'article 14de cette Convention. En effet, une erreur dans la mention du texte legalne peut donner ouverture à cassation et l'obligation au respect duprincipe de specialite en cas d'extradition vers l'Etat marocain estreprise à l'article 12 de la Convention du 7 juillet 1997 entre leRoyaume de Belgique et le Royaume du Maroc sur l'extradition.
Par les considerations precitees, la chambre des mises en accusation alegalement justifie sa decision qu'il n'existait pas de motif grave etevident pour admettre la cause de refus de l'extradition du demandeur.
A cet egard, le moyen ne peut etre accueilli.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxes à la somme de soixante-quatre euros quarante et uncentimes dus.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, premier president, Frederic Close,president de section, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis et GustaveSteffens, conseillers, et prononce en audience publique du sept mai deuxmille quatorze par le chevalier Jean de Codt, premier president, enpresence de Raymond Loop, avocat general, avec l'assistance de FabienneGobert, greffier.
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| F. Gobert | G. Steffens | P. Cornelis |
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| B. Dejemeppe | F. Close | J. de Codt |
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7 MAI 2014 P.14.0557.F/1