Cour de cassation de Belgique
Arret
5088
NDEG F.13.0112.F
SITMEDIA, societe de droit suisse dont le siege est etabli à Geneve(Suisse), boulevard Georges Favon, 43,
demanderesse en cassation,
ayant pour conseil Maitre Roland Forestini, avocat au barreau deBruxelles, dont le cabinet est etabli à Ixelles, avenue Adolphe Buyl,173, ou il est fait election de domicile,
contre
Ville DE HUY, representee par son college communal, dont les bureaux sontetablis à Huy, en l'hotel de ville, Grand-Place, 1,
defenderesse en cassation,
representee par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 25 juin 2013par la cour d'appel de Liege.
Le conseiller Sabine Geubel a fait rapport.
L'avocat general Andre Henkes a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente un moyen.
III. La decision de la Cour
Sur le moyen :
La regle de l'egalite des Belges devant la loi contenue dans l'article 10de la Constitution, celle de la non-discrimination dans la jouissance desdroits et libertes reconnus aux Belges inscrite dans l'article 11 de laConstitution ainsi que celle de l'egalite devant l'impot exprimee dansl'article 172 de la Constitution impliquent que tous ceux qui se trouventdans la meme situation soient traites de la meme maniere mais n'excluentpas qu'une distinction soit faite entre differentes categories depersonnes pour autant que le critere de distinction soit susceptible dejustification objective et raisonnable ; l'existence d'une tellejustification doit s'apprecier par rapport au but et aux effets de lamesure prise ou de l'impot instaure ; le principe d'egalite est egalementviole lorsqu'il est etabli qu'il n'existe pas de rapport raisonnable deproportionnalite entre les moyens employes et le but vise.
L'arret constate que « la motivation du reglement-taxe litigieux estnotamment libellee comme suit : `Vu les dispositions legales etreglementaires en vigueur en matiere d'etablissement et de recouvrementdes taxes communales ; Vu les finances de la ville ».
Il enonce que « les motifs de cette imposition sont donc essentiellementvoire exclusivement financiers ».
Il considere, sans etre critique, que, « si l'objectif principal de toutetaxe communale est d'ordre budgetaire, rien ne s'oppose à ce quel'autorite communale poursuive des objectifs accessoires, non financiers,d'incitation ou de dissuasion » mais ajoute qu' « il n'appartient [...]pas à la cour [d'appel] de rechercher l'existence de tels objectifs, deslors que l'objectif budgetaire, seul objectif repris au reglement-taxelitigieux, suffit à justifier l'adoption dudit reglement-taxe ».
Il considere egalement « qu'au regard du but et de l'effet de la taxe,les distributeurs d'ecrits publicitaires adresses ou payants dont ladistribution ne s'effectue pas de maniere generalisee dans toutes lesboites aux lettres situees dans la commune, et les distributeurs `toutesboites' d'ecrits non publicitaires appartiennent à une categorie decontribuables distincte des autres categories de distributeurs d'ecrits »et detaille en quoi ces categories sont objectivement differentes quantaux destinataires des ecrits concernes et, le cas echeant, quant au butpoursuivi par leur distribution.
Par ces enonciations, d'ou il ne ressort pas que le critere de distinctionentre, d'une part, les distributeurs d'ecrits publicitaires gratuits nonadresses distribues à domicile, qui sont soumis à la taxe, et, d'autrepart, les distributeurs d'ecrits publicitaires gratuits adressesdistribues à domicile, qui echappent à la taxe, est susceptible d'unejustification raisonnable au regard du but financier de la taxe instaureeet de ses effets, l'arret ne justifie pas legalement sa decision que lereglement-taxe litigieux n'est pas contraire aux articles 10, 11 et 172 dela Constitution.
Le moyen est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arret attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arret casse;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Gustave Steffens, Mireille Delange et Sabine Geubel, etprononce en audience publique du vingt-huit fevrier deux mille quatorzepar le president de section Albert Fettweis, en presence de l'avocatgeneral Andre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Delange |
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| G. Steffens | M. Regout | A. Fettweis |
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28 FEVRIER 2014 F.13.0112.F/5