Cour de cassation de Belgique
Arret
1033
NDEG C.12.0545.F
A. N.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,
contre
H. G.,
defenderesse en cassation,
representee par Maitre Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 480, ou il est faitelection de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 29 mai 2012par le tribunal de premiere instance de Bruxelles, statuant en degred'appel.
Le conseiller Martine Regout a fait rapport.
L'avocat general Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, le demandeur presente deux moyens.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
Sur la premiere fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche,par la defenderesse et deduite de ce qu'il ne reproduit pas l'ensemble desmotifs critiques du jugement attaque :
Le fait de ne pas reproduire l'integralite des motifs de la decisionattaquee n'est pas une cause d'irrecevabilite de la demande.
Le moyen reproduit notamment des motifs que le demandeur a interet àcritiquer.
Sur la deuxieme fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche,par la defenderesse et deduite du defaut d'interet :
Les constatations factuelles du jugement attaque sur lesquelles s'appuiela defenderesse pour qualifier de surabondants les motifs critiques par lemoyen, en cette branche, ne constituent pas un fondement distinct etsuffisant de la decision.
Sur la troisieme fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche,par la defenderesse et deduite du defaut d'interet :
Les motifs critiques par les deux autres branches du moyen ne constituentpas des fondements distincts suffisant à justifier la decision quecritique le moyen, en cette branche.
Sur la quatrieme fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche,par la defenderesse et invitant la Cour à proceder à une substitution demotifs :
La defenderesse n'indique pas le motif de droit qu'il conviendrait desubstituer aux motifs critiques par le moyen.
Les fins de non-recevoir ne peuvent etre accueillies.
Sur le fondement du moyen, en cette branche :
En vertu de l'article 1280, alinea 1er, du Code judiciaire, le presidentdu tribunal ou le juge qui en exerce les fonctions, statuant en refere,connait jusqu'à la dissolution du mariage des mesures provisoiresrelatives notamment aux aliments des parties et des enfants.
Aux termes de l'article 1039, alinea 1er, du meme code, les ordonnancessur refere ne portent pas prejudice au principal.
Il s'ensuit que le juge appele à statuer sur la demande de pensionalimentaire apres divorce n'est lie ni par le dispositif ni par les motifsde la decision de refere fixant le montant du secours alimentaire du à unepoux pendant l'instance en divorce.
Le jugement attaque considere que « l'appreciation en fait par la courd'appel, [dans son arret du 12 mai 2011 fixant le montant du secoursalimentaire pendant l'instance en divorce], des elements du patrimoine desparties qui sont demeures inchanges dans le cadre de la presente procedurelie les parties et le tribunal », que « la motivation de la courd'appel, en ce qu'elle tranche des contestations qui lui etaient soumises,constitue des motifs decisoires qui sont, au meme titre que le dispositif,revetus de l'autorite de la chose jugee » et que, « sauf si lescirconstances ont change ou si l'application des criteres fixes parl'article 301 doit conduire à une appreciation differente de celle [qui aete] effectuee dans le cadre de la procedure en refere, on voit malcomment le tribunal pourrait modifier la valeur determinee quelques moisauparavant par la cour d'appel, au motif que la base de l'action a change».
Sous l'intitule « elements juges par la cour d'appel qui lient lesparties et le tribunal », le jugement attaque enonce que, « dans lamesure ou, sur les points indiques ci-dessous, les circonstances n'ont paschange et les criteres applicables dans le cadre de la presente procedurene justifient pas une appreciation differente de celle effectuee dans lecadre de la procedure en refere, le tribunal s'estime lie par l'arret dela cour d'appel ».
Lors de l'examen des charges de la defenderesse, le jugement attaquerepete que « les charges prises en consideration par la cour d'appels'elevent à 1.600 euros par mois (arret du 12 mai 2011, pp. 14 et 15) [etque], des lors que les circonstances n'ont pas change, ce montant doitetre admis ».
A l'occasion de l'examen des revenus mobiliers du demandeur, il considereque, « à ce montant [de 685.052 euros], s'ajoutent les revenus ducapital supplementaire de 475.000 euros [que le demandeur] a retire de sonportefeuille ou d'un de ses comptes en 2006 et en 2007 [...] et sur ladestination duquel il ne fournit aucune explication, se contentant d'ennier à nouveau l'existence dans les conclusions d'appel prises dans lapresente procedure [...] au mepris de la chose jugee », et que, « autotal, le patrimoine mobilier dont la cour d'appel a tenu compte pour [ledemandeur] s'eleve à 1.530.052 euros ».
En retenant, pour fixer à 720,50 euros par mois le montant de la pensionalimentaire apres divorce due par le demandeur à la defenderesse, lemontant des charges de la defenderesse et des revenus mobiliers dudemandeur determine par l'arret de la cour d'appel du 12 mai 2011, enraison de l'autorite de chose jugee qu'il attribue à cet arret, lejugement attaque viole les articles 1039 et 1280, alinea 1er, du Codejudiciaire.
Le moyen, en cette branche, est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugement casse;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de premiere instance de Nivelles,siegeant en degre d'appel.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Martine Regout, Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du sept fevrier deux mille quatorze par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistancedu greffier Patricia
De Wadripont.
+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Lemal |
|-----------------+------------+-------------|
| M. Regout | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+
7 fevrier 2014 C.12.0545.F/6