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30/01/2014 | BELGIQUE | N°C.12.0134.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 janvier 2014, C.12.0134.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.12.0134.N

A. P.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,

contre

D. B.

I. la procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 novembre 2011par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Beatrijs Deconinck a fait rapport.

L'avocat general Christian Vandewal a conclu.

II. le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 546, 894, 139

8, 1399, 1400, 1401, 1405, 1432 et 1435 du Codecivil

Motifs et decisions critiquees

L'arret attaque declare fonde l'appel limite d...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.12.0134.N

A. P.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,

contre

D. B.

I. la procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 novembre 2011par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Beatrijs Deconinck a fait rapport.

L'avocat general Christian Vandewal a conclu.

II. le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 546, 894, 1398, 1399, 1400, 1401, 1405, 1432 et 1435 du Codecivil

Motifs et decisions critiquees

L'arret attaque declare fonde l'appel limite de la defenderesse, reformele jugement dont appel et declare non fondee la difficulte introduite parle demandeur concernant la recompense pour l'habitation familiale et ditqu'il y a lieu de suivre la these du notaire de la masse, qui prevoyaitune recompense pour le patrimoine commun de 125.000 euros, sur la base desconsiderations suivantes :

Appreciation

Il n'est pas conteste que les parties ont erige une habitation familialedurant le mariage sur un terrain dont le demandeur est le proprietaire,ensuite d'une donation par ses parents.

Le demandeur est, des lors, presume etre aussi le proprietaire de cettehabitation, par accession. Aucun fait n'est, par ailleurs, presente afinde renverser cette presomption.

Il n'est pas conteste que cette habitation a, à tout le moins, en partieete financee par des fonds du patrimoine commun et que la valeur de cettehabitation, sans le terrain à batir, doit etre evaluee, au moment de ladissolution du regime, à 125.000 euros.

En application de l'article 1432 du Code civil, il est du recompense parchaque epoux à concurrence des sommes qu'il a prises sur le patrimoinecommun pour acquitter une dette propre et generalement toutes les foisqu'il a tire un profit personnel du patrimoine commun.

En application de l'article 1435 du Code civil, la recompense ne peut etreinferieure à l'appauvrissement du patrimoine creancier. Toutefois, si lessommes et fonds entres dans le patrimoine debiteur ont servi à acquerir,conserver ou ameliorer un bien, la recompense sera egale à la valeur ouà la plus-value acquise par ce bien.

Il apparait que les parties conviennent que les factures d'achat desmateriaux ont ete payees au moyen de fonds provenant du patrimoine commun,de sorte qu'une recompense s'impose.

Le demandeur pretend qu'il a lui-meme realise d'importants travaux dansl'habitation, ce qui n'est pas conteste en soi.

Toutefois, meme si le patrimoine commun est appauvri en ce que la valeurde l'usage de la force de travail n'entre pas dans le patrimoine commun,mais a servi à acquerir, conserver ou ameliorer un bien propre d'un desepoux, il est du par le patrimoine propre, conformement à l'article 1432du Code civil, une recompense au patrimoine commun (voir à ce sujet :Boone K., artikel 1432-1434 Burgerlijk Wetboek in Personen- enfamilierecht. Artikelsgewijze commentaar met overzicht van rechtspraak enrechtsleer).

Les propres travaux du demandeur entrent, des lors, egalement en ligne decompte pour une recompense.

Il ressort des declarations des parties que divers membres de la familleet des amis auraient aussi travaille dans la maison, selon le demandeur ils'agissait principalement de son pere, tout cela gracieusement.

Il n'apparait, toutefois, nullement que cette aide venant de membres de lafamille et d'amis avait exclusivement lieu au profit du demandeur etc'est, des lors, bien le patrimoine commun, beneficiaire de cette aidebenevole, qui a ete appauvri, l'aide aboutissant par accession dans lepatrimoine d'un des epoux, en l'occurrence celui du demandeur.

Cet element entre, des lors, egalement en ligne de compte pour unerecompense.

Des lors que tant les investissements pecuniaires, les efforts consentispar le demandeur lui-meme, ainsi que ceux des membres de la famille et desamis, entrent en ligne de compte pour une recompense et qu'ils ont tousservi à eriger l'habitation, la recompense doit etre egale, enapplication de l'article 1435 du Code civil, à la valeur ou la plus-valuede ce bien.

En l'espece, le notaire de la masse a evalue la valeur du bien lors de ladissolution du regime à 125.000 euros, sans la valeur du terrain àbatir, ce qui n'est pas conteste en soi.

Il y a, des lors, lieu de suivre la these du notaire de la masse et lejugement du premier juge est reforme sur ce point ».

Griefs

Premiere branche

1. En vertu de l'article 1432 du Code civil, il est du recompense parchaque epoux à concurrence des sommes qu'il a prises sur le patrimoinecommun pour acquitter une dette propre et generalement toutes les foisqu'il a tire un profit personnel du patrimoine commun.

Aux termes de l'article 1435 du Code civil, la recompense ne peut etreinferieure à l'appauvrissement du patrimoine creancier.

Toutefois, si les sommes et fonds entres dans le patrimoine debiteur ontservi à acquerir, conserver ou ameliorer un bien, la recompense seraegale à la valeur ou à la plus-value acquise par ce bien, soit à ladissolution du regime, s'il se trouve à ce moment dans le patrimoinedebiteur, soit au jour de son alienation s'il a ete aliene auparavant ;si un nouveau bien a remplace le bien aliene, la recompense est evalueesur ce nouveau bien.

Aux termes de l'article 1400, 1DEG, du Code civil, sont propres, quel quesoit le moment de l'acquisition et sauf recompense s'il y a lieu, lesaccessoires d'immeubles ou de droits immobiliers propres.

Aux termes de l'article 546 du Code civil, la propriete d'une chose, soitmobiliere, soit immobiliere, donne droit sur tout ce qu'elle produit, etsur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soitartificiellement et ce droit s'appelle droit d'accession.

Aux termes de l'article 1405, 1DEG, du Code civil, sont communs, lesrevenus de l'activite professionnelle de chacun des epoux, tous revenus ouindemnites en tenant lieu ou les completant, ainsi que les revenusprovenant de l'exercice de mandats publics ou prives. Aux termes del'article 1405, 4DEG, de ce code, sont communs, tous biens dont il n'estpas prouve qu'ils sont propres à l'un des epoux par application d'unedisposition de la loi.

2. La recompense due au patrimoine commun en application de l'article 1432du Code civil, suppose un enrichissement du patrimoine propre, unappauvrissement du patrimoine commun et un lien causal entre les deux.

La seule circonstance qu'un epoux acquiert, conserve ou ameliore un bienpropre par sa propre force du travail, ne suffit pas pour conclure à uneobligation de recompense envers le patrimoine commun.

En effet, il en ressort seulement que le patrimoine propre de l'epouxs'est enrichi, mais pas necessairement que cela s'est fait au detriment dupatrimoine commun.

Une recompense n'est due au patrimoine commun que si un appauvrissement dupatrimoine commun est aussi demontre in concreto, dans un lien decausalite avec l'enrichissement du patrimoine propre.

La seule circonstance qu'un epoux a effectue des « prestations de travailnon remunerees » en realisant lui-meme des travaux à un bien propre, nesignifie pas que la valeur de ces prestations doit etre consideree commeetant commune. Elles ne concernent pas des revenus professionnels au sensde l'article 1405, 1DEG, du Code civil et ne constituent pas davantage un« bien » au sens de l'article 1405, 4DEG, de ce code. Ce n'est quelorsqu'il a ete demontre in concreto que le patrimoine commun a ete privede revenus par le fait que des forces de travail d'un epoux ont servi àl'amelioration d'un bien propre plutot qu'à la realisation de revenuspour le patrimoine commun, qu'une recompense sera due.

3. Tel qu'il ressort des constatations de l'arret attaque, les parties sesont mariees en 1989 sous le regime legal, une habitation familiale a eteerigee durant le mariage sur un terrain propre au demandeur, l'habitationfamiliale est aussi, par accession, un bien propre au demandeur,l'habitation a en partie ete financee par des fonds du patrimoine commun,à savoir par le paiement de factures d'achat de materiaux et la valeur del'habitation, sans le terrain à batir, s'elevait au moment de ladissolution du regime à 125.000 euros.

Le litige entre les parties concerne l'evaluation de l'etendue de larecompense due par le demandeur au patrimoine commun.

Selon le demandeur, la recompense ne peut pas avoir trait à ses proprestravaux dans l'habitation, ni à l'aide fournie par des membres de lafamille et la decision entreprise doit, des lors, etre confirmee en cequ'elle fixait la recompense due au patrimoine commun proportionnellementaux montants payes par le patrimoine commun.

Dans ses conclusions, le demandeur soulignait que dans la mesure ou lesparties auraient participe à la construction de l'habitation, unerecompense ne saurait etre due au patrimoine commun que dans la mesure ouil est demontre in concreto que le patrimoine commun a ete prive d'unrevenu. Selon le demandeur « il n'est pas demontre que la communauteaurait ete prive d'un seul euro de revenus (...) ou de revenusprofessionnels ; et le demandeur aurait, en effet, toujours exerce sesactivites professionnelles normales, dont les revenus ont enrichi lacommunaute ».

4. L'arret attaque decide, toutefois, que « les activites propres dudemandeur » entrent aussi en ligne de compte pour la recompense aupatrimoine commun, sur la base de la consideration que « meme si lepatrimoine commun est appauvri en ce que la valeur de l'usage de la forcede travail n'entre pas dans le patrimoine commun, mais a servi àacquerir, conserver ou ameliorer un bien propre d'un des epoux, il est dupar le patrimoine propre, conformement à l'article 1432 du Code civil,une recompense au patrimoine commun ».

En retenant, ainsi, un appauvrissement du patrimoine commun au seul motifque « la valeur de l'usage de la force de travail n'entre pas dans lepatrimoine commun » c'est à tort que l'arret attaque retient « lavaleur de l'usage de la force de travail » comme un revenu qui entre dansle patrimoine commun et qui aurait, en l'espece, servi à eriger un bienpropre ayant pour consequence une obligation de recompense envers lepatrimoine commun.

La « valeur de l'usage de la force de travail » ne constitue pas unrevenu appartenant au patrimoine commun au sens de l'article 1405, 1DEG,du Code civil, si le caractere professionnel n'en est pas etabli. Il nes'agit pas davantage d'un « bien » qui, en application de l'article1405, 4DEG, du Code civil, doit etre qualifie de commun. Lorsque, comme enl'espece, la force de travail a servi à construire une habitation sur unterrain propre, les fruits de ce travail appartiennent aussi, enapplication des articles 546 et 1400, 1DEG, du Code civil, au patrimoinepropre et ils ne peuvent, des lors, pas etre consideres comme etantcommuns en application de la presomption residuaire de l'article 1405,4DEG du Code civil.

La seule constatation qu'un epoux a fait usage de sa force de travail poureriger une habitation sur un terrain propre n'implique des lors pasnecessairement un appauvrissement du patrimoine commun au motif qu'unrevenu appartenant à ce patrimoine aurait ete utilise au profit d'un bienpropre.

Conclusion

En considerant, de maniere implicite mais certaine, la « valeur del'usage de la force de travail » pour eriger une habitation sur unterrain propre comme un revenu appartenant au patrimoine commun, sansconstater le caractere professionnel de la force de travail utilisee,l'arret attaque viole l'article 1405, 1DEG, du Code civil et il nepouvait, des lors, pas legalement conclure à un appauvrissement dupatrimoine commun au benefice du patrimoine propre du demandeur (violationde l'article 1432 du Code civil).

En considerant à tout le moins la « valeur de l'usage de la force detravail » pour eriger une habitation sur un terrain propre, de maniereimplicite mais certaine, en application de l'article 1405, 4DEG, du Codecivil, comme un bien appartenant au patrimoine commun, au motif qu'iln'est pas prouve qu'il est propre à l'un des epoux par application d'unedisposition quelconque de la loi, l'arret attaque viole l'article 1400,1DEG, du Code civil, des lors que le fruit de cette force de travailconstitue l'accessoire realise d'un immeuble propre et est, en applicationdes articles 546 et 1400, 1DEG, du Code civil, aussi un bien propre(violation des articles 546, 1400, 1DEG et 1405, 4DEG, du Code civil) etil ne pouvait, des lors, pas legalement conclure à un appauvrissement dupatrimoine commun au benefice du patrimoine propre du demandeur (violationde l'article 1432 du Code civil).

En considerant que le demandeur est redevable d'une recompense envers lepatrimoine commun au motif qu'il a tire un « profit personnel » dupatrimoine commun au sens de l'article 1432 du Code civil, en raison del'usage de sa force de travail pour eriger une habitation sur un terrainpropre, sans qu'il ressorte des constatations de l'arret attaque que lesactifs du patrimoine commun, tels que determines à l'article 1405 du Codecivil, aient ete utilises au benefice du patrimoine propre, la decisionn'est pas legalement justifiee (violation des articles 1405 et 1432 duCode civil).

En retenant une obligation de recompense du demandeur envers le patrimoinecommun pour les « activites propres » du demandeur dans l'habitationerigee sur son terrain, sans egalement constater, contrairement à cequ'alleguait le demandeur dans ses conclusions, qu'en raison de cesactivites le demandeur n'a pas pu exercer ses activites professionnellesnormales qui generaient des revenus pour le patrimoine commun, ou, enn'excluant, à tout le moins, pas que nonobstant les activites dans sonhabitation propre, le demandeur a tout de meme pu exercer ses activitesprofessionnelles normales et enrichir le patrimoine commun de revenus,l'obligation de recompense retenue par l'arret attaque n'est paslegalement justifiee, des lors qu'il n'apparait pas que l'enrichissementdu patrimoine propre du demandeur a eu lieu au detriment du patrimoinecommun et qu'il n'apparait, des lors, pas que le patrimoine commun a eteappauvri par les activites propres du demandeur (violation de l'article1432 du Code civil).

Seconde branche

5. Aux termes de l'article 1398 du Code civil, le regime legal est fondesur l'existence de trois patrimoines : le patrimoine propre de chacun desdeux epoux et le patrimoine commun aux deux epoux.

Les articles 1399, 1400 et 1401 du Code civil enumerent les elementsconstitutifs du patrimoine propre, alors que l'article 1405 enumere leselements constitutifs du patrimoine commun.

Aux termes de l'article 1400, 1DEG, du Code civil, sont propres, quel quesoit le moment de l'acquisition et sauf recompense s'il y a lieu, lesaccessoires d'immeubles ou de droits immobiliers propres.

En vertu de l'article 546 du Code civil, la propriete d'une chose, soitmobiliere, soit immobiliere, donne droit sur tout ce qu'elle produit, etsur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soitartificiellement et ce droit s'appelle droit d'accession.

Conformement à l'article 1399, alinea 1er, du Code civil, sont propres,les biens et creances appartenant à chacun des epoux au jour du mariageet ceux que chacun acquiert au cours du regime, par donation, successionou testament.

Aux termes de l'article 1405, 3DEG, du Code civil, sont communs, les biensdonnes ou legues aux deux epoux conjointement ou à l'un d'eux avecstipulation que ces biens seront communs.

Conformement à l'article 894 du Code civil, la donation entre vifs est unacte par lequel le donateur se depouille actuellement et irrevocablementde la chose donnee, en faveur du donataire qui l'accepte.

Aux termes de l'article 1405, 4DEG, du Code civil, sont communs, tousbiens dont il n'est pas prouve qu'ils sont propres à l'un des epoux parapplication d'une disposition de la loi.

En vertu de l'article 1432 du Code civil, il est du recompense par chaqueepoux à concurrence des sommes qu'il a prises sur le patrimoine communpour acquitter une dette propre et generalement toutes les fois qu'il atire un profit personnel du patrimoine commun.

Conformement à l'article 1435 du Code civil, la recompense ne peut etreinferieure à l'appauvrissement du patrimoine creancier. Toutefois, si lessommes et fonds entres dans le patrimoine debiteur ont servi à acquerir,conserver ou ameliorer un bien, la recompense sera egale à la valeur ouà la plus-value acquise par ce bien, soit à la dissolution du regime,s'il se trouve à ce moment dans le patrimoine debiteur, soit au jour deson alienation s'il a ete aliene auparavant ; si un nouveau bien aremplace le bien aliene, la recompense est evaluee sur ce nouveau bien.

6. La donation a pour objet la cession d'un element du patrimoine.

Des prestations gracieuses ne constituent pas une donation au sens desarticles 894, 1399, alinea 1er, et 1405, 3DEG, du Code civil precites.

Des lors que la prestation gracieuse ne constitue pas un element dupatrimoine, elle n'est pas davantage un « bien » au sens des articles1398, 1399, alinea 1er, 1405, 3DEG, et 1405, 4DEG, du Code civil precites,elle ne fait pas partie des elements constitutifs des patrimoines propreset commun enonces aux articles 1399, 1400, 1401 et 1405 et elle ne peutpas davantage donner lieu à une recompense en application de l'article1432 du Code civil, qui suppose, en effet, des transferts d'elementspatrimoniaux du patrimoine commun vers le patrimoine propre.

7. La recompense due au patrimoine commun en application de l'article 1432du Code civil suppose un enrichissement du patrimoine propre, unappauvrissement du patrimoine commun et un lien causal entre les deux.

8. La seule circonstance que des tiers ont gracieusement fourni desprestations au benefice des deux epoux, ne signifie pas que cesprestations appartiennent au patrimoine commun. Elles ne constituent, eneffet, pas une « donation », de sorte que l'article 1405, 3DEG, du Codecivil ne peut pas etre applique. Elles ne constituent en tout cas pas un« bien » qui pourrait appartenir au patrimoine propre, voire commun.

Lorsque, comme en l'espece, des tiers (membres de la famille et amis) ontgracieusement effectue des travaux dans une habitation erigee sur unterrain propre à l'un des epoux, qui, par accession, en application desarticles 546 et 1400, 1DEG, du Code civil, est aussi un bien propre de cetepoux, la seule circonstance que ces travaux ont enrichi le patrimoinepropre de cet epoux ne signifie pas que cela a eu lieu au detriment d'unelement patrimonial appartenant au patrimoine commun, meme si les tiersvisaient à en faire beneficier les deux epoux.

9. En l'espece, le demandeur contestait que les travaux gracieusementeffectues par des tiers lors de l'erection de l'habitation sur son terrainpropre pouvaient donner lieu à une recompense en application des articles1432 et 1435 du Code civil, au motif que ces articles ne permettent unerecompense au benefice du patrimoine commun que pour les plus-valuesacquises grace au patrimoine commun.

10. Apres avoir constate « qu'il ressort des declarations des parties,que divers membres de la famille et des amis auraient aussi travaille dansla maison, selon le demandeur il s'agissait principalement de son pere,tout cela gracieusement », l'arret attaque considere que « cet elemententre, des lors, egalement en ligne de compte pour une recompense », surla base de la consideration « qu'il n'apparait nullement que cette aidevenant de membres de la famille et d'amis avait exclusivement lieu auprofit du demandeur et c'est, des lors, bien le patrimoine commun,beneficiaire de cette aide benevole, qui a ete appauvri, l'aideaboutissant par accession dans le patrimoine d'un des epoux, enl'occurrence celui du demandeur ».

C'est, ainsi, à tort que l'arret attaque considere « l'aide benevole »comme un « bien » appartenant au patrimoine commun, dont le patrimoinepropre du demandeur aurait tire un profit au detriment du patrimoinecommun.

Conclusion

En considerant le patrimoine commun des parties comme un« beneficiaire » de l'aide benevole de « divers membres de la familleet des amis » et en considerant que ce patrimoine commun est appauvri parle fait que, par accession, « cette aide benevole » a abouti dans lepatrimoine propre du demandeur, c'est à tort que l'arret attaqueconsidere cette « aide benevole » comme un « bien » ou elementpatrimonial pouvant appartenir au patrimoine commun et pouvant donner lieuà un appauvrissement de ce patrimoine lorsque cette « aide benevole » abeneficie au patrimoine propre (violation des articles 1398, 1399, 1400,1401 et 1405 du Code civil et, pour autant que de besoin, des articles 546et 1400, 1DEG du Code civil) et il ne pouvait pas legalement decider quecet avantage pour le patrimoine propre implique un appauvrissement dupatrimoine commun devant donner lieu à une recompense au patrimoinecommun (violation des memes dispositions legales, ainsi que des articles1432 et 1435 du Code civil).

Dans la mesure ou la motivation de l'arret attaque doit etre comprise ence sens que le juge d'appel a considere l'aide gracieusement fournie pardes amis et membres de la famille comme une donation, l'arret attaqueviole les articles 894, 1399, aliena 1er, et 1405, 3DEG, du Code civil.

III. la decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

1. En vertu de l'article 1432 du Code civil, il est du recompense parchaque epoux à concurrence des sommes qu'il a prises sur le patrimoinecommun pour acquitter une dette propre et generalement toutes les foisqu'il a tire un profit personnel du patrimoine commun.

L'article 221, alinea 1er, du Code civil dispose que chacun des epouxcontribue aux charges du mariage selon ses facultes.

L'article 1435 du Code civil dispose que la recompense ne peut etreinferieure à l'appauvrissement du patrimoine creancier. Toutefois, si lessommes et fonds entres dans le patrimoine debiteur ont servi à acquerir,conserver ou ameliorer un bien, la recompense sera egale à la valeur ouà la plus-value acquise par ce bien, soit à la dissolution du regime,s'il se trouve à ce moment dans le patrimoine debiteur, soit au jour deson alienation s'il a ete aliene auparavant ; si un nouveau bien aremplace le bien aliene, la recompense est evaluee sur ce nouveau bien.

En vertu de l'article 1405 du Code civil, sont notamment communs : lesrevenus de l'activite professionnelle de chacun des epoux, tous revenus ouindemnites en tenant lieu ou les completant, ainsi que les revenusprovenant de l'exercice de mandats publics ou prives et tous biens dont iln'est pas prouve qu'ils sont propres à l'un des epoux par applicationd'une disposition de la loi.

2. Il s'ensuit que l'epoux qui fournit des efforts durant le mariage auprofit d'un bien propre qui a, ainsi, acquis une plus-value, ne doit pasde recompense au patrimoine commun lorsque ces efforts constituent unecontribution aux charges du mariage.

Lorsqu'ils ne constituent pas une contribution au charges du mariage, cesefforts ne donnent lieu à une recompense que dans la mesure ou à causede ceux-ci le patrimoine commun a ete prive de revenus.

3. Le juge d'appel a considere que « meme si le patrimoine commun estappauvri en ce que la valeur de l'usage de la force de travail n'entre pasdans le patrimoine commun, mais a servi à acquerir, conserver ouameliorer un bien propre d'un des epoux, il est du par le patrimoinepropre, conformement à l'article 1432 du Code civil, une recompense aupatrimoine commun ».

En admettant, ainsi, un appauvrissement du patrimoine commun ensuite desefforts fournis par un epoux durant le mariage au profit d'un bien propre,sans distinguer si ces efforts constituent une contribution aux charges dumariage et, lorsque ces travaux ne constituent pas une contribution auxcharges du mariage, sans examiner dans quelle mesure la communaute a eteprivee de revenus, l'arret ne justifie pas legalement sa decision.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Sur les autres griefs :

4. Les autres griefs ne sauraient entrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs

La Cour

Casse l'arret attaque en tant qu'il statue sur la recompense pour laconstruction d'une habitation familiale.

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse.

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge du fond.

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Gand.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Eric Dirix, president, le president desection Albert Fettweis, les conseillers Beatrijs Deconinck, Geert Jocqueet Koenraad Moens, et prononce en audience publique du trente janvier deuxmille quatorze par le president de section Eric Dirix, en presence del'avocat general Christian Vandewal, avec l'assistance du greffier JohanPafenols.

Traduction etablie sous le controle du president de section AlbertFettweis et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia DeWadripont.

Le greffier, Le president de section,

30 janvier 2014 C.12.0134.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.12.0134.N
Date de la décision : 30/01/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-01-30;c.12.0134.n ?
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