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17/12/2013 | BELGIQUE | N°P.13.1354.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 décembre 2013, P.13.1354.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.13.1354.N

I

1. W.V.,

prevenu,

2. M.-C. S.,

prevenue,

demandeurs,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

(...)



V

1. W. V., precite,

inculpe,

2. M.-C. S., precitee,

inculpee,

demandeurs,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

tous les pourvois de W. V. contre

1. J. B.,

partie civile,

2. F. P.,

partie civile,

defendeurs.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation I (acte nDEG 2013/247) sont diriges contre unarret rendu le 17 juin 2013 par la cour d'appel de Gand, chambrecorrectionnelle.

Les pourvois en cassation II (acte nDEG 2013/248) so...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.13.1354.N

I

1. W.V.,

prevenu,

2. M.-C. S.,

prevenue,

demandeurs,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

(...)

V

1. W. V., precite,

inculpe,

2. M.-C. S., precitee,

inculpee,

demandeurs,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

tous les pourvois de W. V. contre

1. J. B.,

partie civile,

2. F. P.,

partie civile,

defendeurs.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation I (acte nDEG 2013/247) sont diriges contre unarret rendu le 17 juin 2013 par la cour d'appel de Gand, chambrecorrectionnelle.

Les pourvois en cassation II (acte nDEG 2013/248) sont diriges contre unarret interlocutoire rendu le 13 janvier 2012 par la cour d'appel de Gand,chambre correctionnelle.

Les pourvois en cassation III (acte nDEG 2013/249) sont diriges contre unarret interlocutoire rendu le 19 fevrier 2010 par la cour d'appel de Gand,chambre correctionnelle.

Le pourvoi en cassation IV (acte nDEG 2013/250) est dirige contre un arretrendu le 12 decembre 2006 par la cour d'appel de Gand, chambre des misesen accusation.

Les pourvois en cassation V (acte nDEG 2013/251) sont diriges contre unarret rendu le 19 juin 2007 par la cour d'appel de Gand, chambre des misesen accusation.

Les demandeurs font valoir deux moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le conseiller Luc Van hoogenbemt a fait rapport.

L'avocat general Marc Timperman a conclu.

II. La decision de la Cour :

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 6 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, 149 de la Constitution, 42, 3DEG, et 505, alinea 1er, 3DEG,du Code penal : par arret du 17 juin 2013, les juges d'appel ont decideque l'infraction de blanchiment est etablie pour un montant de 987.672,92euros en ce qui concerne la Roumanie et de 3.939.353,12 euros en ce quiconcerne le Canada et que toute provenance legale de ces fonds peut etreexclue, sans qu'il soit necessaire de preciser l'infraction qui est à sabase ; ils ont constate que ces fonds, objet de l'infraction deblanchiment, ne peuvent provenir des revenus personnels officiels desdemandeurs ni des resultats de leur societe et que les demandeurs n'ont pufournir aucun eclaircissement concret sur l'origine du patrimoine, à toutle moins que la veritable provenance n'a pu etre demontree à suffisance ;ainsi, ils n'ont pas legalement constate que toute provenance legaledevait etre exclue avec certitude et qu'il ne fait aucun doute que lesfonds, objet de l'infraction de blanchiment mise à charge, ont uneorigine illicite.

2. Il suffit, pour qu'il y ait declaration de culpabilite et condamnationde l'auteur d'infractions de blanchiment au sens de l'article 505, aliena1er, 2DEG, 3DEG et 4DEG du Code penal, que la provenance ou l'origineillicites des choses visees à l'article 42, 3DEG, du Code penal et laconnaissance qu'il en avait, soient etablies, sans qu'il soit requis quele juge penal connaisse l'infraction precise, pour autant que, sur la basedes donnees de fait, le juge puisse exclure toute provenance ou originelegale.

3. Lorsque, tel qu'en l'espece, la loi ne prescrit aucun moyen de preuveparticulier de la provenance ou de l'origine illicite des choses visees àl'article 505, alinea 1er, 2DEG, 3DEG et 4DEG du Code penal, le jugerepressif apprecie souverainement la valeur probante des elements qui luiont ete regulierement soumis et que les parties ont pu contredire.L'origine illicite des choses peut egalement etre deduite de lacirconstance qu'il ne ressort d'aucune donnee credible que cette originepeut etre legale.

Dans la mesure ou il critique cette appreciation des juges d'appel sur leselements de fait dont ils ont deduit la provenance ou l'origine illicitedes fonds ou oblige la Cour à proceder à un examen des faits pour lequelelle est sans pouvoir, le moyen, en cette branche, est irrecevable.

4. Les juges d'appel ont souverainement constate et considere que :

- en ce qui concerne les investissements en Roumanie, seul un montant de987.672,92 euros est retenu, mais aucun montant plus eleve à defaut deconstatation ou de certitude (arret, rubrique 2.1.2.1) ;

- en ce qui concerne les investissements au Canada, seul un montant de3.939.353,12 euros est retenu avec suffisamment de certitude (arret,rubrique 2.1.2.2) ;

- il ressort à suffisance de l'examen des revenus communs imposables desdemandeurs pour la periode 1982-2002, des comptes annuels de la sa VoedersVandroemme pour les exercices 1983-2004, des investissements faits et desachats et ventes, que toute provenance ou origine legales des fondssusmentionnes peut etre exclue (arret, rubrique 2.1.2.3) ;

- ces sommes ne correspondent pas à la realite economique ;

- il ressort à suffisance que les demandeurs ne disposaient pas desources legales de revenus justifiant la detention d'un tel patrimoine ;

- les demandeurs n'ont pu fournir d'explication complementaire sur laprovenance ou l'origine des fonds ayant constitue le portefeuilled'investissement mis à jour par l'instruction penale de l'ISP (Inspectionspeciale des Impots) ;

- toute provenance ou origine legale des fonds de ce portefeuilled'investissement ou de ses revenus peut egalement etre exclue ;

- il n'est pas question de donations ni d'heritages ;

- il ne ressort pas davantage des pieces produites par les demandeurs,dont certaines sont revetues de mentions manuscrites non datees, que lestransferts vers la Roumanie et le Canada proviennent de la vente ou desrevenus des valeurs du portefeuille de titres Bendor 44675 ;

- les demandeurs ne rendent pas plausibles le fait que les fonds utilisesauraient eu une provenance ou une origine legale et leur raisonnementselon lequel les investissements faits auraient ete realises grace àl'augmentation de leurs capitaux mobiliere meubles resultant d'un unnouvel investissement, ne peut etre suivi.

Ainsi, les juges d'appel ont legalement constate que toute provenancelegale des fonds investis en Roumanie et au Canada, dont le montant a etelimite dans la mesure susmentionnee et qui constituent l'objet del'infraction de blanchiment mise à charge, peut etre exclue aveccertitude et qu'il ne fait aucun doute de leur origine illegale

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

(...)

Sur le second moyen :

9. Le moyen invoque la violation des articles 149 de la Constitution, 42,3DEG, et 505, alinea 1er, 3DEG, du Code penal : par arret du 17 juin 2013,les juges d'appel ont confisque les biens immeubles au Canada commeprovenant de l'infraction de blanchiment ; la prevention initiale deblanchiment etait deduite d'un montant blanchi de 6.880.539,78 euros ; lesrequisitions initiales du ministere public tendant à la confiscation desbiens immeubles etait clairement fondee sur cette prevention initiale ;les juges d'appel ont rectifie la prevention A et ont condamne lesdemandeurs du chef de blanchiment de 4.927.026,04 euros ; ils onttoutefois declare fondee les requisitions tendant à la confiscation de latotalite des biens immeubles sans verifier si la reduction du montant desfonds blanchis avait ou non une repercussion sur la mesure dans laquelleles biens immeubles concernes pouvaient etre confisques et n'ont paslimite la confiscation à la partie des biens immeubles ayant ete obtenuepar l'utilisation de la somme de 4.927.026,04 euros ; ainsi, ils ontconfisque plus que ce que l'infraction de blanchiment avait effectivementproduit, la Cour etant à tout le moins dans l'impossibilite de verifierla legalite de la decision attaquee.

10. Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que lesdemandeurs ont ete initialement poursuivis du chef de la prevention A pourblanchiment de fonds, provenant d'activites criminelles, à concurrenced'au moins 6.880.539 euros, dont « au moins une somme totale de 2.788.951EUR (112.503.007 BEF) a ete utilisee en Roumanie pour la creation etl'exploitation de la societe Sc Eso Agra Srl (huilerie creee le 2 mars1998) et de la societe Sc New Avirom Srl (elevage de poulets cree le 16juin 2003) en ce compris l'achat des biens immeubles » et « à tout lemoins une somme totale de 4.091.588 EUR (165.054.280 BEF) a ete utiliseeau Canada pour la creation et l'exploitation de la societe Eso Agri CanadaInc (creee le 1er juin 1998) et de la societe Royal Michael's Bay Golf andCountry Club Resort Inc (creee le 19 juillet 2001), en ce compris l'achatdes biens immeubles (villa, restaurant, Greenkeeper's House, terrain degolf, quatre fermes, hangar, terrains) en nom propre ou au nom dessocietes precitees sur une superficie totale de 6,2 km^2 achetes pour lasomme de 2.345.544 CAD$ (...) ».

Le ministere public a redige des requisitions ecrites le 20 fevrier 2008en vue de la confiscation speciale « de biens immeubles sis au Canada etsaisis par le juge d'instruction Allaert Alexander par ordonnance desaisie immobiliere conservatoire en matiere repressive du 2 aout 2005 »,en plus de la confiscation speciale comme objet de l'infraction deblanchiment de fonds pour un montant de 6.880.539 euros, « deductionfaite ou non de la valeur des biens immeubles, objet de la saisine auCanada ».

Il en resulte que les requisitions du ministere public tendant à laconfiscation concernait, d'une part, la confiscation de biens immeubles auCanada, d'autre part, la confiscation de l'objet de l'infraction deblanchiment, « deduction faite ou non de la valeur des biens immeubles,objet de la saisine au Canada ». Le point de savoir si la requete enconfiscation de biens immeubles au Canada etait fondee sur la declarationde culpabilite du chef de blanchiment de l'integralite du montant de6.880.539 euros, enonce sous la prevention initiale, ou sur le montantreduit à 4.927.026,04 euros, requiert un examen des faits pour lequel laCour est sans competence.

Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.

11. Le juge decide en fait si l'avantage patrimonial auquel s'applique laconfiscation speciale est tire de l'infraction de blanchiment et ilappartient au juge d'estimer cet avantage et eventuellement de l'evaluer.La Cour se borne à examiner, d'une part, si le juge, sur la base de sonappreciation souveraine, n'a pas viole la notion legale d'avantagepatrimonial, d'autre part, si l'objet de la confiscation est compris dansles limites des requisitions ecrites du procureur du Roi et s'il concernel'infraction declaree etablie.

12. Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que,au-delà de l'arret rendu par defaut le 8 avril 2011, les juges d'appelont, par arret du 17 juin 2013, rectifie la prevention A (infraction deblanchiment) en ce qui concerne les montants blanchis, à savoir enreduisant le montant total des sommes blanchies à 4.927.026,04 euros,dont « 3.939.353,12 EUR a ete utilisee au Canada pour la creation etl'exploitation de la societe Eso Agri Canada Inc (creee le 1er juin 1998)et de la societe Royal Michael's Bay Golf and Country Club Resort Inc(creee le 19 juillet 2001), en ce compris l'achat des biens immeubles (àsavoir villa, restaurant, Greenkeeper's House - librement convertie enmaison du jardiner sur le parcours du golf -, terrain de golf, quatrefermes, hangar et terrains) en nom propre ou au nom des societes preciteessur une superficie totale de 6,2 km^2 achetes pour la somme de 2.345.544CAD$ (...) ».

Les juges d'appel ont reconnu les demandeurs coupables du chef del'infraction de blanchiment mise à charge pour le montant reduit à4.927.026,04 euros, dont 3.939.353,12 EUR ont ete investis au Canada(creation et exploitation de Eso Agri Canada et Royal Michael's Bay Golfand Country Club Resort, achat des biens immeubles compris). Ils ont parailleurs decide que 3.939.353,12 euros correspondent à 5.976.589,59 CAD$et ont prononce la confiscation des biens immeubles saisis au Canada quifurent achetes pour un montant de 2.345.544 CAD$, en tant que biens tiresde l'infraction de blanchiment.

13. La confiscation prononcee par les juges d'appel entre dans les limitesdes requisitions ecrites du ministere public et concerne des biensimmeubles dont les juges d'appel ont decide qu'ils ont ete achetes avecles fonds dont toute provenance legale peut etre exclue et dont ils ontconstate que la valeur d'achat etait sensiblement inferieure au montantdes avantages patrimoniaux blanchis. Ainsi, les juges d'appel ontlegalement justifie leur decision et l'arret permet à la Cour d'exercerson controle de la legalite.

Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.

Le controle d'office :

1. L'ordonnance de renvoi du 19 juin 2007

14. L'ordonnance n'est pas entachee d'une illegalite pouvant encore etresoumise à l'appreciation de la Cour.

2. Les autres decisions

15. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et que la decision est conforme à la loi.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux frais de leurs pourvois.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le conseiller Luc Van hoogenbemt, faisant fonction depresident, les conseillers Filip Van Volsem, Alain Bloch, Peter Hoet enAntoine Lievens, et prononce en audience publique du dix-sept decembredeux mille treize par le conseiller Luc Van hoogenbemt, en presence del'avocat general Marc Timperman, avec l'assistance du greffier KristelVanden Bossche.

Traduction etablie sous le controle du president de section Frederic Closeet transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le president de section,

17 decembre 2013 P.13.1354.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.13.1354.N
Date de la décision : 17/12/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-12-17;p.13.1354.n ?
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