Cour de cassation de Belgique
Arret
1157
NDEG C.13.0105.F
PROCUREUR DU ROI PRES LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE LIEGE, dontl'office est etabli à Liege, en l'annexe Nord du palais de Justice, ruede Bruxelles, 2/002,
demandeur en cassation,
contre
M.-S. D.,
defenderesse en cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 1er fevrier 2013 par le tribunal de premiere instance de Liege, statuant endegre d'appel.
Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.
L'avocat general Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifiee
conforme, le demandeur presente quatre moyens.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
En vertu de l'article 30, S: 3, de la loi du 26 juin 1990 relative à laprotection de la personne des malades mentaux, l'appel contre un jugementrendu en application de cette loi par le juge de paix est forme par unerequete adressee au president du tribunal de premiere instance, qui fixel'audience, l'affaire etant renvoyee devant une chambre composee de troisjuges.
Cette disposition n'interdit pas au president de deleguer un autre juge dutribunal pour fixer la cause.
Le moyen, qui suppose que cette disposition confere au president unecompetence exclusive de fixation de la cause à l'audience, manque endroit.
Sur le quatrieme moyen :
Le jugement attaque decide « qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner la miseen observation de la defenderesse à la clinique ... à ... pour une dureede quarante jours maximum à partir du 27 decembre 2012 », soit à partirdu lendemain du jour de sa mise en observation sur saisine d'office par leprocureur du Roi, aux motifs que les conditions prevues par l'article 2 dela loi du 26 juin 1990 sur la protection de la personne des maladesmentaux ne sont pas reunies.
Le jugement fonde cette decision sur les considerations suivantes :
1. « Le tribunal estime ne pas pouvoir se satisfaire de l'avis ecrit dudocteur L., [medecin requis par le procureur du Roi], et de l'audition dudocteur P. par le juge de paix » aux motifs que « le premier n'arencontre [la defenderesse] qu'une quinzaine de minutes le 26 decembre2012 et a fonde son avis sur des elements qu'il n'a manifestement pasconstates lui-meme, et que le second est le psychiatre de la maman de [ladefenderesse] et n'avait plus rencontre [cette derniere] depuis plus d'unan [...].
En outre [la defenderesse] depose un certificat medical tres recent (du 18janvier 2013) de son medecin traitant, lequel certifie n'avoir jamaisobserve de probleme `type psychose' durant les quelques consultationsqu'il a eues avec [elle], laquelle a toujours eu un discours coherent,sans le moindre signe de delire paranoiaque. Les declarations de la[defenderesse] à l'audience etaient coherentes, comme le courrier qu'elledepose et qu'elle destinait au docteur L. et au procureur du Roi » ;
2. « [La defenderesse ] a indique à l'audience qu'elle acceptait d'etresuivie par le docteur M., psychiatre qu'elle a rencontre à la clinique..., et de prendre le traitement qu['il] estimerait utile de luiprescrire. Elle a aussi precise qu'elle accepterait les injections qui,selon elle, lui sont administrees tous les quinze jours. [Elle] a rec,u,à de nombreuses reprises et depuis plusieurs jours, l'autorisation desortir seule de la clinique et meme de passer le week-end, nuit comprise,hors de l'etablissement (elle n'aurait ete interdite de sortie que lesquelques premiers jours de la mesure d'observation). Elle a par ailleursloue un appartement qu'elle peut occuper à partir du 1er fevrier 2013.L'on peut donc legitimement s'interroger sur l'absence reelle de toutautre traitement approprie, comme un suivi ambulatoire par exemple. Aucunelement du dossier ne donne d'information satisfaisante à cet egard et lapartie publique n'en a pas donne à l'audience » ;
3. « Enfin, aucun element concret du dossier ne permet au tribunal deverifier si l'etat de [la defenderesse] met gravement en peril sa sante etsa securite, ou constitue une menace grave pour la vie ou l'integrited'autrui. La seule declaration de caractere general du docteur P., quidate de surcroit du 31 decembre 2012, selon laquelle la paranoia de [ladefenderesse] `peut l'amener à poser des actes dangereux tant pourelle-meme que pour autrui' n'est pas, à l'estime du tribunal, suffisantedans les circonstances de la cause. Et, surtout, [...] on ignore tout descirconstances concretes qui ont amene le procureur de Roi à se saisird'office, à requerir le docteur L. le
26 decembre 2012 et à faire emmener sur le champ [la defenderesse] à laclinique de ... ».
Quant à la premiere branche :
Le jugement attaque, qui se fonde sur l'ensemble des considerationsprecitees pour decider que les conditions prevues à l'article 2 de la loidu
26 juin 1990 ne sont pas reunies, ne considere pas qu'il est interdit aumedecin auteur du rapport medical prescrit par l'article 5, S: 2, de cetteloi de se fonder, pour la redaction de son rapport, sur des elements qu'iln'a pas personnellement constates. Ce jugement n'ajoute des lors pas à laloi une condition qu'elle ne prevoit pas.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Quant à la seconde branche :
En considerant que le tribunal ignore tout des circonstances concretes quiont amene le procureur du Roi à se saisir d'office, le jugement attaque« ne conditionne pas la prolongation de la mesure [de mise enobservation] à l'opportunite de decider d'une mise en observationurgente [par le ministere public] ».
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur une interpretation inexacte dujugement attaque, manque en fait.
Sur le deuxieme et le troisieme moyen :
Les considerations reproduites en reponse au quatrieme moyen constituentun fondement distinct et suffisant de la decision qu'il n'y a pas lieud'ordonner la mise en observation de la defenderesse à la clinique ... de... pour quarante jours maximum à partir du 27 decembre 2012.
Les moyens, qui ne sauraient entrainer la cassation, sont denuesd'interet, partant, irrecevables.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Delaisse les depens à l'Etat.
Les depens taxes à la somme de quarante-trois euros trente et un centimesenvers la partie demanderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, le conseiller Didier Batsele, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Alain Simon etMichel Lemal, et prononce en audience publique du quinze novembre deuxmille treize par le president Christian Storck, en presence de l'avocatgeneral Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia DeWadripont.
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| P. De Wadripont | M. Lemal | A. Simon |
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| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
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15 NOVEMBRE 2013 C.13.0105.F/6