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05/11/2013 | BELGIQUE | N°P.12.2030.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 05 novembre 2013, P.12.2030.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.2030.N

* I

* G. S. sa,

* prevenue et partie civilement responsable,

* demanderesse,

* Me Filiep Deruyck, avocat au barreau d'Anvers,

* II

* W. D'H.,

* prevenu,

* demandeur,

* III

* M. S.,

* prevenu,

* demandeur,

* tous les pourvois contre

* L'ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances,

* partie poursuivante,

* defendeur,

* Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation.

I. la procedure dev

ant la Cour

XIX. Le pourvoi I est dirige contre les arrets rendus les 18 avril 2013et 31 octobre 2012 par la cour d'appel d'Anvers.

XX. Les pourvois II et III sont diriges ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.2030.N

* I

* G. S. sa,

* prevenue et partie civilement responsable,

* demanderesse,

* Me Filiep Deruyck, avocat au barreau d'Anvers,

* II

* W. D'H.,

* prevenu,

* demandeur,

* III

* M. S.,

* prevenu,

* demandeur,

* tous les pourvois contre

* L'ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances,

* partie poursuivante,

* defendeur,

* Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation.

I. la procedure devant la Cour

XIX. Le pourvoi I est dirige contre les arrets rendus les 18 avril 2013et 31 octobre 2012 par la cour d'appel d'Anvers.

XX. Les pourvois II et III sont diriges contre l'arret rendu le 31octobre 2012 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.

XXI. La demanderesse I fait valoir deux moyens dans un memoire annexe aupresent arret, en copie certifiee conforme.

XXII. Les demandeurs II et III ne font valoir aucun moyen.

XXIII. Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

XXIV. L'avocat general Luc Decreus a conclu.

II. la decision de la Cour

(...)

Sur le premier moyen de la demanderesse I :

2. Le moyen invoque la violation des articles 5 de la directive 92/12/CEEdu Conseil du 25 fevrier 1992 relative au regime general, à la detention,à la circulation et aux controles des produits soumis à accise, telleque modifiee par la directive 96/99/CE du Conseil du 30 decembre 1996, et5 de la loi du 10 juin 1997 relative au regime general, à la detention,à la circulation et aux controles des produits soumis à accise : l'arretrejette, à tort, la defense de la demanderesse I selon laquelle aucunedette d'accise n'est nee, des lors que les marchandises litigieuses n'ontpas depasse la zone dans laquelle se trouve le premier bureau de douane ;la Cour de Justice a decide, par l'arret du 20 avril 2010 rendu en lacause C-230/08 Dansk Transport og Logistik, que la notion d'importation demarchandises au sens de la directive 92/12/CEE suppose que lesmarchandises ont depasse la zone dans laquelle se trouve le premier bureaude douane situe à l'interieur du territoire douanier de la Communaute ;le fait qu'en ce qui concerne l'extinction de la dette douaniere, la Courde Justice interprete par ledit arret la notion d'entree dans laCommunaute à la lumiere de l'article 233, alinea 1er, d, du Code desdouanes communautaire, n'implique pas que la condition de la saisie et dela confiscation, enoncee à cette disposition, soit pertinente pourapprecier la naissance de la dette douaniere, conformement aux articles 5de la directive 92/12/CEE et 5 de la loi du 10 juin 1997 ; les conditionsd'extinction de la dette douaniere ne sont pas pertinentes pour apprecierla naissance de la dette d'accise.

3. L'article 5.1 de la directive 92/12/CEE dispose :

« 1. Les produits vises à l'article 3, paragraphe 1er, sont soumis àaccise lors de leur production sur le territoire de la Communaute tel quedefini à l'article 2 ou lors de leur importation sur ce territoire.

Est consideree comme `importation d'un produit soumis à accise', l'entreede ce produit à l'interieur de la Communaute (...).

Toutefois, lorsque ce produit est place lors de son entree à l'interieurde la Communaute sous un regime douanier communautaire, l'importation dece produit est consideree comme ayant lieu au moment ou il sort du regimedouanier communautaire. »

L'article 6 de cette meme directive dispose :

« 1. L'accise devient exigible lors de la mise à la consommation ou lorsde la constatation des manquants qui devront etre soumis à acciseconformement à l'article 14, paragraphe 3.

Est consideree comme mise à la consommation de produits soumis àaccise :

a) toute sortie, y compris irreguliere, d'un regime suspensif;

(...)

c) toute importation, y compris irreguliere, de ces produits lorsque cesproduits ne sont pas mis sous un regime suspensif. »

L'article 5 de la loi du 10 juin 1997 dispose : « Les produits vises àl'article 3 sont soumis à l'accise lors de leur production ou lors deleur importation. »

L'article 6 de la loi du 10 juin 1997 dispose :

« L'accise devient exigible lors de la mise à la consommation ou lors dela constatation de manquants qui doivent etre soumis à l'accise,conformement à l'article 14, S: 3. (...)

Est consideree comme mise à la consommation de produits soumis àaccise :

- toute sortie, y compris irreguliere, d'un regime suspensif ;

- (...)

- toute importation, y compris irreguliere, de ces produits ne se trouvantpas sous un regime suspensif. »

4. L'article 5.1, alinea 1er, de la directive 92/12/CEE prevoit lesconditions d'assujettissement à l'accise. L'article 6.1 prevoit, en casd'assujettissement à l'accise, les conditions d'exigibilite de l'accise.L'exigibilite de l'accise ne peut naitre qu'en cas d'assujettissement àl'accise.

5. Par l'arret Dansk Transport og Logistik du 29 avril 2010, rendu en lacause C-230/08 (motifs 72, 73, 76) la Cour de Justice decide que lesmarchandises soumises à accise doivent etre considerees comme etantentrees à l'interieur de la Communaute au sens de l'article 5, paragraphe1er, de la directive 92/12/CEE à partir du moment ou celles-ci ontdepasse la zone dans laquelle se trouve le premier bureau de douane situeà l'interieur du territoire douanier de la Communaute.

C'est à partir de ce moment que les marchandises sont entreesdefinitivement à l'interieur de la Communaute et qu'elles sont soumisesà accise. Aussi longtemps que les marchandises n'ont pas quitte la zonedans laquelle se trouve le premier bureau de douane situe à l'interieurdu territoire douanier, elles ne sont pas soumises à accise et il n'y pasd'exigibilite au sens de l'article 6.1 de la directive 92/12/CEE.

6. L'arret qui rejette, à defaut de pertinence, la defense de lademanderesse I selon laquelle les cigarettes litigieuses ne sont nullementsoumises à accise parce qu'elles n'avaient pas encore depasse la zonedans laquelle se trouve le premier bureau de douane, au motif que lesmarchandises saisies n'ont pas ete confisquees, n'est pas legalementjustifie.

Le moyen est fonde.

Sur le second moyen de la demanderesse I :

7. Le moyen invoque la violation de l'article 202.3 du Code des douanescommunautaire : l'arret declare, à tort, la demanderesse I civilementresponsable de la condamnation prononcee dans le chef de sa preposee aupaiement des droits eludes et des interets sur ces droits ; il ne constateen effet pas que la demanderesse I a participe, en tant qu'employeur, àl'introduction des marchandises, en particulier alors qu'elle savait ouaurait raisonnablement du savoir que cela se deroulait de maniereirreguliere ; l'arret constate, au contraire, que le prepose a agi àl'insu de la demanderesse.

8. L'article 202 du Code des douanes communautaire dispose :

« 1. Fait naitre une dette douaniere à l'importation:

a) l'introduction irreguliere dans le territoire douanier de la Communauted'une marchandise passible de droits à l'importation

ou

b) s'agissant d'une telle marchandise se trouvant dans une zone franche ouen entrepot franc, son introduction irreguliere dans une autre partie dece territoire.

Au sens du present article, on entend par introduction irreguliere, touteintroduction en violation des articles 38 à 41 et article 177, deuxiemetiret.

2. La dette douaniere nait au moment de l'introduction irreguliere.

3. Les debiteurs sont:

- la personne qui a procede à cette introduction irreguliere,

- les personnes qui ont participe à cette introduction en sachant ou endevant raisonnablement savoir qu'elle etait irreguliere,

- ainsi que celles qui ont acquis ou detenu la marchandise en cause et quisavaient ou devaient raisonnablement savoir au moment ou elles ont acquisou rec,u cette marchandise qu'il s'agissait d'une marchandise introduiteirregulierement. »

9. Par les arrets Spedition Ulustrans et consorts du 23 septembre 2004rendu en la cause C-414/02 et Oliver Jestel du 17 novembre 2011 rendu enla cause C-454/10, la Cour de Justice a interprete l'article 202.3 du Codedes douanes communautaires ainsi qu'il suit :

- en cas de dette douaniere nee de l'introduction irreguliere demarchandises dans le territoire douanier de la Communaute visee àl'article 202 du Code des douanes communautaire, l'alinea 3 dudit articledetermine qui peut etre considere comme debiteur ;

- le legislateur communautaire a entendu definir de fac,on large lespersonnes susceptibles d'etre reconnues debitrices de la dette douanierelors de l'introduction irreguliere de marchandises passibles de droits àl'importation, sans pour autant rendre l'employeur automatiquementcodebiteur de la dette douaniere de son employe ;

- l'article 202, paragraphe 3, premier tiret, du Code des douanescommunautaire vise les personnes physiques ou les personnes morales quiont procede à l'introduction en fait des marchandises sans les declarerà la douane ;

- le deuxieme tiret qualifie de debitrices les personnes physiques ou lespersonnes morales qui ont participe à l'introduction des marchandises ensachant ou en devant raisonnablement savoir qu'elle etait irreguliere ;

- le troisieme tiret vise les personnes physiques ou morales qui ontacquis ou detenu les marchandises apres leur introduction, en sachant oudevant raisonnablement savoir, au moment de l'acquisition ou de lareception, que ces marchandises avaient ete irregulierement introduites ;

- la qualification d'une personne en tant que debitrice, sur la base del'article 202, paragraphe 3, deuxieme tiret, du Code des douanescommunautaire, est subordonnee à deux conditions, dont la premiere estobjective, et la seconde subjective ;

- la condition objective de participation à l'introduction est remplie sila personne a pris une quelconque part dans cette introduction, à savoiren contribuant soit directement à l'introduction irreguliere, soitindirectement, compte tenu de l'implication dans les agissements lies àl'introduction, comme par exemple le financement de l'importation, le faitde servir d'intermediaire pour la conclusion du contrat de vente oul'intervention de moyens ou de personnel ;

- la condition subjective est remplie si la personne qui a pris part àl'introduction savait ou devait raisonnablement savoir qu'elle etaitirreguliere, les termes « devant raisonnablement savoir » faisantreference au comportement d'un operateur avise et diligent.

10. Selon l'article 1384, alinea 3, du Code civil, le maitre et lescommettants sont responsables du dommage cause par leurs domestiques etpreposes dans les fonctions auxquelles ils les ont employes.

11. En vertu de cette disposition et eu egard à l'article 202, paragraphe3, deuxieme tiret, du Code des douanes communautaire, tel qu'il estinterprete par la Cour de Justice, le juge peut declarer un commettantcivilement responsable de la dette douaniere qui est nee à la suited'actes poses par le prepose dans le cadre de son emploi au cours desquelsdes marchandises soumises à des droits d'importation sont entrees demaniere irreguliere à l'interieur du territoire douanier de laCommunaute, à condition qu'il soit etabli que le commettant a pris partà l'introduction de ces marchandises au sens de l'article 202, paragraphe3, deuxieme tiret, du Code des douanes communautaire et qu'il savait oudevait raisonnablement savoir qu'elles avaient ete introduites de maniereirreguliere.

12. L'arret ne decide pas que la demanderesse a pris part àl'introduction des marchandises et qu'elle savait ou devaitraisonnablement savoir qu'elle etait irreguliere. Il constate au contraireque le fait que son prepose a agi à son insu n'est pas pertinent.

Cette decision n'est pas legalement justifiee.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

* * La Cour

* Casse l'arret du 31 octobre 2012, en tant qu'il declare lademanderesse I civilement responsable pour le paiement des droits eludes,accises et interets, prononce dans le chef de J. G. ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Rejette les pourvois pour le surplus ;

Condamne la demanderesse à la moitie des frais de son pourvoi ;

Condamne le defendeur à l'autre moitie ;

Condamne les demandeurs II et III aux frais de leur pourvoi ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, à la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Maffei, les conseillers Luc Vanhoogenbemt, Filip Van Volsem, Peter Hoet et Antoine Lievens, et prononceen audience publique du cinq novembre deux mille treize par le presidentde section Paul Maffei, en presence de l'avocat general Luc Decreus, avecl'assistance du greffier delegue Veronique Kosynsky.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le conseiller,

5 novembre 2013 P.12.2030.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.12.2030.N
Date de la décision : 05/11/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-11-05;p.12.2030.n ?
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