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16/09/2013 | BELGIQUE | N°S.10.0084.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 septembre 2013, S.10.0084.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

1270



NDEG S.10.0084.F

C. D. G.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

FEDERAL-MOGUL, societe anonyme dont le siege social est etabli à Aubange,Zoning industriel, avenue Champion, 1,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Anvers,

Amerikalei, 187/302, ou il est faitelection de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

1270

NDEG S.10.0084.F

C. D. G.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

FEDERAL-MOGUL, societe anonyme dont le siege social est etabli à Aubange,Zoning industriel, avenue Champion, 1,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Anvers, Amerikalei, 187/302, ou il est faitelection de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 27 janvier 2010par la cour du travail de Liege, section de Neufchateau.

Le president Christian Storck a fait rapport.

L'avocat general Jean Marie Genicot a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* article 149 de la Constitution ;

* article 1134 du Code civil ;

* articles 3, 17, 1DEG et 2DEG, 20, 1DEG, 25 et 32 de la loi du 3juillet 1978 relative aux contrats de travail.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate les faits suivants : « [le demandeur] est entre auservice de la [defenderesse] en date du 14 juin 1974 (lire : 1976) enqualite d'operateur de machine. Il a evolue au sein de l'entreprisejusqu'au poste de `Assy Pack Production Superintendant' (superintendant dela production d'assemblage et d'emballage), auquel il a ete nomme le 22aout 2000. En septembre 2005, la [defenderesse] a procede à unereorganisation. Jusqu'alors, il existait deux departements de production(Components Production et Assy Pack Production) (production des composantset production de l'assemblage-emballage), diriges chacun par unsuperintendant, qui rapportaient directement au General Plant Manager(directeur general de l'usine) [...]. Depuis septembre 2005, la productionest divisee en trois Business Units (unites d'entreprise) [...] : -Business Unit Metal/Plastic/Painting, - Business Unit Rubber, - BusinessUnit Assy Pack (unite d'entreprise metal, plastique, peinture - united'entreprise caoutchouc et unite d'entreprise d'assemblage-emballage).Dans le cadre de cette reorganisation, plusieurs personnes, parmilesquelles [le demandeur], ont change de fonction (des ouvriers, desemployes, des cadres et des managers). La [defenderesse] a par ailleursconsidere que [le demandeur] ne reunissait pas toutes les competences pourremplir la nouvelle fonction de Superintendant Business Unit Assy Pack(superintendant de l'unite d'entreprise d'assemblage -emballage), quiimpliquait des responsabilites plus importantes. [...] Le nouveau poste deSuperintendant Business Unit Assy Pack a ete confie à un autre employe.La [defenderesse] a informe [le demandeur] de cette reorganisationquelques jours avant son annonce officielle. Aussitot, il a adresse à sonemployeur un certificat medical attestant de son incapacite de travail ».Celle-ci perdura jusqu'au 25 octobre 2005. « Par courrier du 13 septembre2005, [...] le conseil [du demandeur] a reclame sa `reintegrationimmediate' », ce que la defenderesse a refuse par lettre du 3 octobre2005,

l'arret, par confirmation de la decision du premier juge, 1. decide que ledemandeur « a invoque à tort l'acte equipollent à rupture de la[defenderesse] » et deboute le demandeur de son action visant à obtenirune indemnite de rupture ; 2. decide que, « dans la mesure ou il ainvoque à tort l'existence d'un acte equipollent à rupture, [ledemandeur] est redevable d'une indemnite compensatoire de preavis à [ladefenderesse] » et le condamne de ce chef à payer un euro provisionnel,tout en precisant que cette condamnation vise egalement le remboursementdes sommes indument perc,ues par le demandeur entre le 3 et le 25 octobre2005, et 3. condamne le demandeur aux depens.

L'arret fonde ces decisions en substance sur les motifs suivants :

1. Selon les principes applicables en la matiere, la partie qui, d'unemaniere unilaterale, modifie un des elements essentiels du contrat detravail met fin à celui-ci d'une maniere illicite. Le temps de travail etla remuneration constituent des elements essentiels du contrat de travail.Pour les autres elements, la volonte des parties est determinante. Ces autres elements ne sont pas essentiels lorsque les parties n'ont rienconvenu à ce sujet lors de la conclusion du contrat de travail des lorsque le travailleur en a ainsi abandonne la determination à l'employeur enraison du rapport de subordination dans lequel il se place ;

2. En l'espece, « [le demandeur] a ete maintenu dans les memes conditionsde travail » ; il « occupait, au moment de la rupture des relationscontractuelles, le poste de Assy Pack Production Superintendant. En cettequalite, il etait responsable de la production. Le contrat de travailn'avait pas pour objet l'occupation de ce poste. [Le demandeur] a evolueau cours des annees au sein de la societe, puisque initialement il a eteengage en qualite d'operateur de machine et que c'est seulement engravissant les echelons hierarchiques qu'il a accede à cette fonction deniveau hierarchique eleve. [...] L'exercice de cette fonction neconstituait pas un element essentiel du contrat dans le sens qu'enl'absence de l'exercice de cette fonction, il n'aurait pas signe lecontrat de travail » ;

3. « En septembre 2005, la [defenderesse] a procede à unereorganisation [...]. La nouvelle fonction de Superintendant Unit AssyPack est tres differente et bien plus large que celle de Assy PackProduction Superintendant exercee par [le demandeur] et limitee à laseule production. La fonction exercee par [le demandeur] a disparu, ensorte que le titre du [demandeur] a ete modifie en Project PlanningCoordinator (coordinateur de planification de projet), bras droit dusuperintendant (nouvelle version). Les pieces deposees par [ladefenderesse] etablissent que [le demandeur] n'avait pas les competencesrequises pour exercer la fonction de Superintendant Business Unit Assy Pack definie en septembre 2005 » ;

4. « Pour ce qui concerne la fonction, outre le fait que l'exercice decelle-ci ne constituait pas un element essentiel du contrat, la nouvellefonction ne consistait pas en une retrogradation puisque la comparaisondes organigrammes [...] montre tres clairement qu'un nouvel echelonhierarchique a ete cree entre [le demandeur] et le manager. Aucuntravailleur anciennement dirige par [le defendeur] n'a, dans la nouvelleorganisation, ete place au-dessus de lui ».

Griefs

Premiere branche

En vertu de l'article 32 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contratsde travail, les engagements resultant des contrats de travail prennent finpar les modes prevus à cette disposition, « sans prejudice des modesgeneraux d'extinction des obligations ». Aux termes de l'article 1134,alineas 1er et 2 , du Code civil, « les conventions legalement formeestiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; elles ne peuvent etrerevoquees que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loiautorise ». Des lors, sauf stipulation contraire, les conditionsconvenues dans un contrat ne peuvent pas etre modifiees ou revoqueesunilateralement et la partie qui modifie unilateralement un elementessentiel du contrat de travail met fin immediatement à celui-ci demaniere illicite.

L'article 3 de la loi du 3 juillet 1978 dispose que « le contrat detravail d'employe est un contrat par lequel un travailleur, l'employe,s'engage contre remuneration à fournir un travail principalement d'ordreintellectuel sous l'autorite d'un employeur ». En vertu de l'article 17,1DEG, de cette loi, « le travailleur a l'obligation d'executer sontravail avec soin, probite et conscience, au temps, au lieu et dans lesconditions convenus ». De son cote, l'employeur a, aux termes del'article 20, 1DEG, de la meme loi, l'obligation « de faire travailler letravailleur dans les conditions, au temps et au lieu convenus ». Ilressort de ces dispositions que la nature de la fonction exercee par letravailleur constitue en principe un element essentiel du contrat detravail dont les parties ont du convenir, à moins que le contraire puisseetre deduit des termes de la convention ou de la fac,on dont celle-ci aete executee.

L'obligation dans laquelle se trouve le travailleur, en vertu de l'article17, 2DEG, de la loi du 3 juillet 1978, « d'agir conformement aux ordreset aux instructions qui lui sont donnes par l'employeur, ses mandatairesou ses preposes, en vue de l'execution du contrat » n'implique pasl'obligation d'exercer une nouvelle fonction ou de renoncer à exercer lafonction dans laquelle le travailleur est occupe. Ni la consideration quela fonction du travailleur au sein de l'entreprise n'a pas ete preciseelors de la conclusion du contrat ni la consideration que la fonctioninitialement occupee par le travailleur a fait l'objet de modificationspar le passe ne suffisent à justifier legalement que l'employeur puisseimposer au travailleur une modification unilaterale de sa fonction, fut-ceen raison d'un manque de competence. D'ailleurs, l'employeur ne peut sereserver contractuellement le droit de modifier unilateralement lesconditions de travail, car une clause qui reserverait ce droit àl'employeur serait nulle en vertu de l'article 25 de la loi.

En l'espece, il ressort des constatations de l'arret que le demandeur estentre au service de la defenderesse en 1976 « en qualite d'operateur demachine », qu'il « a evolue au sein de l'entreprise » et que,« gravissant les echelons », il a accede le 22 aout 2000 au poste de« Assy Pack Production Superintendant » (superintendant de la productiond'assemblage et d'emballage), soit à une « fonction de niveauhierarchique eleve ».

De la seule constatation que le contrat de travail conclu en 1976 n'avaitpas pour objet l'occupation par le demandeur, en 2000, du poste de « AssyPack Production Superintendant », il ne se deduit pas que les fonctionsexercees successivement par le demandeur, depuis son entree dansl'entreprise avec une qualite bien definie (« operateur de machine »)jusqu'à obtenir un poste eleve dans la hierarchie, n'avaient pas lecaractere d'elements essentiels du contrat de travail et que ladefenderesse aurait eu le droit d'imposer au demandeur une modificationimportante de la derniere fonction exercee.

L'arret ne denie pas que la defenderesse a unilateralement retire audemandeur sa fonction de niveau hierarchique eleve de « Assy PackProduction Superintendant », ou il etait responsable de la production,puisqu'il constate que « la fonction exercee par [le demandeur] adisparu » et que la defenderesse a impose au demandeur d'occuperdesormais le poste de « Project Planning Coordinator (coordinateur deplanification de projet), bras droit du superintendant (nouvelleversion) ».

L'arret decide neanmoins que le demandeur « a invoque à tort un acteequipollent à rupture de la [defenderesse] » aux motifs que le demandeura « ete maintenu dans les memes conditions de travail » ; qu'enprincipe, si les parties n'ont pas convenu de la fonction lors de laconclusion du contrat, c'est que le travailleur en a abandonne ladetermination à l'employeur, en raison du rapport de subordination danslequel il se place ; qu'en l'espece, « le contrat de travail n'avait paspour objet l'occupation de ce poste » de superintendant de la productiond'assemblage et d'emballage, puisque le demandeur « a ete initialementengage en qualite d'operateur de machine et que c'est seulement engravissant les echelons hierarchiques qu'il a accede à cette fonction deniveau hierarchique eleve » ; que, des lors, « l'exercice de cettefonction ne constituait pas un element essentiel du contrat de travaildans le sens qu'en l'absence de l'exercice de cette fonction, il n'auraitpas signe de contrat de travail » ; que, d'ailleurs, le demandeur« n'avait pas les competences requises pour exercer la fonction deSuperintendant Business Unit Assy Pack (superintendant de l'united'entreprise d'assemblage-emballage) definie en septembre 2005 ». Par cesmotifs, l'arret ne justifie pas legalement sa decision (violation detoutes les dispositions legales citees en tete du moyen, à l'exception del'article 149 de la Constitution).

Deuxieme branche

Dans ses conclusions d'appel, le demandeur faisait valoir que « lesmodifications de fonctions successives ont toujours ete dans un seul sens,promotionnel, qui ont conduit le [demandeur] à de tres importantesresponsabilites au second rang de l'ensemble de l'entreprise, ce qui nepouvait conduire [la defenderesse] à lui imposer subitement en sensinverse une retrogradation ou perte de prestige dans la fonction,ressentie comme etant de nature totalement devalorisante et memehumiliante ; que jamais le [demandeur] n'a pretendu que sa dernierefonction etait devenue definitivement inamovible ; que, cependant, laretrogradation decidee ne pouvait etre envisagee sans son accord » ;« que le [demandeur] avait une fonction assuree de cadre superieur (etnon moyen à superieur) ; que la modification intervenue etait à ce pointdevalorisante que [la defenderesse] commettait necessairement une faute enla decidant unilateralement ; que toute suppression meme de ce poste [...]aurait du, à defaut de tout accord entre les parties, conduirelogiquement à la reaffectation du [demandeur] à un niveau egal sansperte de prestige ni retrogradation ou bien à son licenciement » ;« que le [demandeur] a fait toute sa carriere au sein de la[defenderesse], y etant entre en date du 14 juin 1976 d'abord commeouvrier durant six mois, avec une formation d'A2, pour arriver pres detrente ans plus tard à la fonction de cadre superieur, avec le titre desuperintendant, la responsabilite du departement assemblage plus emballagedes essuie-glaces, ainsi que la qualite de membre du personnel dedirection repondant directement au Plant Manager (à savoir directeur del'usine) ; qu'un tel curriculum ne peut avoir lieu sans un investissementmaximum de la part de la personne concernee, qui consacra toute sacarriere à son entreprise, ne comptant jamais ses heures, y revenant lanuit lorsqu'il fallait regler un probleme urgent, laissant meme tomber sesconges à l'occasion afin de se vouer entierement à la reussite del'entreprise » ; « qu'une telle progression fulgurante au sein del'entreprise sur une carriere de pres de trente ans ne peut evidemmentavoir lieu que de maniere consentie, tant dans le chef de l'une que del'autre des deux parties impliquees, à savoir le [demandeur] et la[defenderesse], son employeur ; qu'en effet, cette maniere de valoriserdans la hierarchie le personnel extremement motive relevait d'unepolitique deliberee de la [defenderesse], puisque, des 1976, il y avaitune volonte deliberee de recruter du personnel technique pour en faire,moyennant investissement important de sa part en formation, desresponsables [...] ; que chacune des parties y trouvait son avantage etque le [demandeur] a pu ainsi progresser jusqu'au sommet de l'entrepriseà force de motivation, de formations et de travail, la reussiteaccompagnant d'ailleurs la promotion de l'interesse, au plus grand profitde l'entreprise elle-meme qui y trouvait une situation tout à faitprofitable, notamment en termes de niveau de remuneration ».

L'arret constate que le demandeur est entre au service de la defenderessele 14 juin 1976 en qualite d'operateur de machine et qu'il a evolue ausein de l'entreprise jusqu'au poste de « Assy Pack ProductionSuperintendant » auquel il a ete nomme le 22 aout 2000. Au motif que« le contrat de travail n'avait pas pour objet l'occupation de ceposte », des lors que le demandeur a evolue au sein de la societe engravissant les echelons hierarchiques, l'arret decide que « l'exercice decette fonction ne constituait pas un element essentiel du contrat dans lesens qu'en l'absence de l'exercice de celle-ci, [le demandeur] n'auraitpas signe le contrat de travail » et qu'on ne pouvait donc reprocher àla defenderesse d'avoir modifie unilateralement un element essentiel ducontrat de travail.

L'arret laisse ainsi sans reponse le moyen precite des conclusions dudemandeur selon lequel les modifications successives de fonctions exerceespar le demandeur au sein de l'entreprise pendant pres de trente ansavaient eu lieu avec son propre consentement, vu l'investissementpersonnel qu'il a du fournir, en temps de travail, formation etresponsabilites, en sorte que la defenderesse ne pouvait unilateralementlui retirer sa fonction.

L'arret n'est des lors pas regulierement motive et viole l'article 149 dela Constitution.

Troisieme branche

Dans ses conclusions d'appel, le demandeur faisait valoir qu'il« occupait le second rang en hierarchie dans l'ensemble des cadres del'entreprise, ayant la direction sur la plus grosse unite de l'ensemble del'usine [...] ; qu'il dirigeait en outre un ensemble de 105 à 125 ou 140personnes ouvrieres » ; que « la decision de la direction de changerunilateralement la fonction du [demandeur] a incontestablement constitueune modification unilaterale importante du contrat de travail, setraduisant par une perte de prestige ou une retrogradation du[demandeur] » ; qu'en effet, selon le nouvel organigramme, le demandeur« perdait toute direction d'equipe pour exercer desormais [...] un simpletravail d'execution avec une seule personne sous ses ordres ; [qu'] ils'agit simplement de taches purement administratives, alors qu'il avait eula responsabilite de l'ensemble du departement assemblage plus emballagedes essuie-glaces ».

L'arret admet, dans l'enonce des principes, qu'une modification dans lastructure hierarchique peut donner lieu à rupture irreguliere du contratde travail s'il s'agit d'une « degradation ». L'arret decide que « lanouvelle fonction ne consistait pas en une retrogradation », sansrepondre au moyen precite des conclusions du demandeur qui invoquaient laperte de la direction d'une importante equipe d'ouvriers dans la plusgrosse unite de l'usine et le confinement à l'execution de tachesadministratives avec une seule personne sous ses ordres. L'arret n'est deslors pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution).

Quatrieme branche

Dans ses conclusions d'appel, le demandeur faisait valoir que lechangement de fonction consistait en une retrogradation ou en une perte deprestige et qu'il n'y avait pas seulement un nouvel echelon hierarchiquecree entre le demandeur et le Plant Manager (ou directeur de l'usine), aumotif suivant : « G. qui etait son homologue en `Components production'(production des composants) est reste l'egal du remplac,ant du [demandeur]dans le nouvel organigramme, juste sous le Plant Manager ; il en va dememe pour ses autres homologues G., L. ou C., tous restes en liaisondirecte avec le Plant Manager ; les sieurs P., S., B., C. ou B. qui setrouvaient auparavant sous les ordres du demandeur se trouvent desormaisà egalite dans l'organigramme [...] alors que leur fonction desuperviseur Assy Pack (superviseur de l'assemblage-emballage) les amenaitmeme en realite à controler [le demandeur], voire à pouvoir [lui] donnerdes ordres ».

L'arret admet, dans l'enonce des principes, qu'une modification dans lastructure hierarchique peut donner lieu à une rupture irreguliere ducontrat de travail s'il s'agit d'une « degradation ». Il decide que« la nouvelle fonction ne consistait pas en une retrogradation », deslors qu' « aucun travailleur anciennement dirige par [le demandeur] n'a,dans la nouvelle organisation, ete place au-dessus de lui ». L'arretlaisse ainsi sans reponse le moyen precite des conclusions du demandeur etn'est partant pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution).

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Sur la fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche, par ladefenderesse et deduite de ce qu'il est denue d'interet :

Il ne ressort d'aucune des considerations de l'arret que la cour dutravail aurait tenu pour non importante la modification unilaterale par ladefenderesse de la fonction exercee par le demandeur.

Sur la fin de non-recevoir opposee au moyen, en cette branche, par ladefenderesse et deduite de ce qu'il est dirige contre une appreciation dela cour du travail qui git en fait :

Le moyen, en cette branche, fait valoir que l'arret ne justifie legalementpar aucune de ses considerations sa decision que la fonction exercee parle demandeur, que la defenderesse a unilateralement modifiee, neconstituait pas un element essentiel du contrat de travail.

Les fins de non-recevoir ne peuvent etre accueillies.

Sur le fondement du moyen, en cette branche :

La partie qui modifie unilateralement de maniere importante un elementessentiel du contrat de travail met immediatement fin à celui-ci demaniere illicite.

La nature de la fonction exercee par le travailleur constitue en principeun element essentiel du contrat de travail, à moins que le contrairepuisse etre deduit de la convention ou de l'execution que les parties luiont donnee.

L'arret constate que le demandeur « est entre au service de [ladefenderesse] en date du 14 juin 1974 en qualite d'operateur demachine », qu' « il a evolue au sein de l'entreprise jusqu'au posted'àssy pack production superintendant', auquel il a ete nomme le 22 aout2000 », qu'« en septembre 2005, la [defenderesse] a procede à unereorganisation » et que « la fonction exercee par [le demandeur] adisparu, en sorte que [son] titre [...] a ete modifie en `projet/planningcoordinator', bras droit » du titulaire de la fonction nouvelle de« superintendant business unit assy pack », dont il releve qu'elle« est tres differente et bien plus large que celle d'àssy packproduction superintendant' exercee par [le demandeur] ».

Ni en considerant que « le contrat de travail » conclu entre les parties« n'avait pas pour objet l'occupation [du] poste [...] de niveauhierarchique eleve » qu'il occupait au moment de la rupture des relationscontractuelles et auquel il n'avait accede qu' « en gravissant lesechelons hierarchiques » ni en ajoutant qu'il n'est pas etabli « qu'enl'absence de l'exercice de cette fonction, [le demandeur] n'aurait [...]pas signe le contrat de travail », l'arret ne justifie legalement sadecision que « l'exercice de cette fonction ne constituait pas un elementessentiel du contrat ».

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour du travail de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Alain Simon, Mireille Delange et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du seize septembre deux mille treize par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Jean Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M. Delange |
|----------+------------+-------------|
| A. Simon | D. Batsele | Chr. Storck |
+-------------------------------------+

16 SEPTEMBRE 2013 S.10.0084.F/13


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.10.0084.F
Date de la décision : 16/09/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-09-16;s.10.0084.f ?
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