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16/09/2013 | BELGIQUE | N°C.11.0511.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 septembre 2013, C.11.0511.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

1730



NDEG C.11.0511.F

C. S.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

A. R.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 9 mars 2011par le tribunal de premiere instance de Nivelles, statuant en degred'appel.

Par ordonnance du 28

aout 2013, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme chambre.

Le 28 aout 2013, l'avocat general Jean Marie G...

Cour de cassation de Belgique

Arret

1730

NDEG C.11.0511.F

C. S.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

A. R.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 9 mars 2011par le tribunal de premiere instance de Nivelles, statuant en degred'appel.

Par ordonnance du 28 aout 2013, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme chambre.

Le 28 aout 2013, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

Le demandeur presente deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- articles 1738, 1740, 2013 et 2015 du Code civil ;

- article 3, S: 6, contenu dans l'article 2 de la loi du 20 fevrier 1991modifiant et completant les dispositions du Code civil relatives aux bauxà loyer et portant les regles particulieres aux baux relatifs à laresidence principale du preneur ;

- articles 10 et 11 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate que, le 17 juin 2004, un bail de residence principalede courte duree (trois annees) a ete conclu entre, d'une part, ladefenderesse, bailleresse, et, d'autre part, P. C., preneuse, et ledemandeur en qualite de caution de cette derniere ; qu'aucun conge n'a etedonne à l'expiration du bail dans les delais legaux de l'article 3, S: 6,de la loi sur les baux de residence principale du preneur et que lapreneuse est restee dans les lieux sans opposition de la defenderesse ;que la preneuse est restee en defaut de payer les loyers de juillet, aoutet septembre 2008 et un solde des charges des annees 2006 et 2007 ; que,par jugement non frappe d'appel par P. C., le juge de paix a declareresolue la convention de bail aux torts et griefs de cette derniere et l'acondamnee à payer 4.235,01 euros à titre d'arrieres de loyer et 1.885,77euros à titre d'indemnite de relocation, le jugement attaque fait droità la demande de la defenderesse visant à la condamnation du demandeur ensa qualite de caution et le condamne à payer la somme de 6.120,78 eurosà majorer des interets judiciaires et des depens.

Cette decision est fondee sur tous les motifs du jugement reputes iciintegralement reproduits, et plus particulierement sur les motifs que :

« II.2. Quant à l'application de l'article 1740 du Code civil àl'obligation de la caution

1. Le premier juge a estime devoir faire application de l'article 1740 duCode civil qui precise que, `dans le cas des articles 1738 et 1739, lesobligations de la caution ne s'etendent pas aux obligations resultant dubail reconduit'.

Partant du constat que les defauts d'execution à charge de P. C. seraientposterieurs à la date presumee de reconduction du bail, le premier juge adeboute (la defenderesse) de sa demande formulee à l'encontre (dudemandeur) sur la base de cette disposition.

2.1. En application de cet article, la caution n'est pas tenue desobligations du locataire dans le cas ou le bail a ete reconduit tacitement(article 1738 du Code civil) ou lorsque, cas qui ne nous interesse pas enl'espece, le locataire se maintient sans titre ni droit dans les lieuxloues au-delà de l'expiration du bail et nonobstant l'existence d'unconge donne par le bailleur qui interdise l'invocation de toute tacitereconduction (article 1739 du Code civil).

La tacite reconduction est `le mecanisme par lequel un nouveau bail seforme lorsque, à l'expiration d'un bail ecrit à duree expressementdeterminee, le preneur reste dans les lieux sans opposition du bailleur'.Il n'existe donc, par definition, de tacite reconduction que pour autantque l'on se trouve dans le cadre d'un bail à duree expressementdeterminee qui prenne fin automatiquement à l'expiration du terme,independamment de tout conge.

En cas de poursuite de l'occupation par le preneur sans opposition dubailleur, un nouveau bail se forme alors selon les modalites de l'ancienbail, y compris la duree. La reconduction n'est pas synonyme de poursuited'un ancien bail mais se definit au contraire par l'extinction du bailancien et la conclusion tacite d'une nouvelle convention de louage.

2.2. Ce sort particulier de la caution s'inscrit dans le cadre du regimegeneral des baux de droit commun qui doit neanmoins ceder le pas auxamenagements particuliers que le legislateur aurait organises, comme enl'espece, pour certains types de baux precis.

C'est le cas de l'article 3, S: 6, de la loi relative aux baux deresidence principale du preneur, qui ne sanctionne pas le defaut de congeou le maintien du locataire apres depassement du terme sans opposition dubailleur par une reconduction tacite mais organise au contraire un regimede transformation du bail initial, ce dernier etant `repute avoir eteconclu pour une duree de neuf ans à compter de la date à laquelle lebail initial de courte duree est entre en vigueur'.

Ainsi, ce type de bail n'est-il jamais reconduit, c'est-à-dire renouvelesous forme d'un nouveau bail identique au premier, mais demeure aucontraire, mue par l'effet de la loi en bail de droit commun de neufannees. La loi ne consacre pas l'extinction du premier bail de courteduree, mais son maintien sous une autre forme.

Surabondamment, il ne s'agit pas non plus d'une simple prorogation quis'analyse comme un report du terme du bail sans autre modificationpuisque, en effet, le regime propre aux baux de neuf ans vient à sesubstituer aux regles particulieres applicables au bail de courte duree.

2.3. Quoi qu'il en soit, aucune tacite reconduction du bail ne peut etreinvoquee, le bail initial n'ayant pas pris fin, et, partant, l'article1740 du Code civil ne peut trouver à s'appliquer.

II.3. Portee de l'engagement de la caution

1. L'article 2015 du Code civil indique que le cautionnement ne se presumepoint ; il doit etre expres et on ne peut l'etendre au-delà des limitesdans lesquelles il a ete contracte.

Il importe donc d'analyser la clause de cautionnement de maniere strictesans l'etendre au-delà des engagements clairs pris par la caution.

En l'espece, le bail porte sous le nom de la caution la mention : `quideclare se porter caution solidaire et indivisible de toutes lesobligations du preneur resultant du present bail dont elle reconnait avoirpris connaissance, et de ses suites'.

L'analyse de la convention de bail permettra de cerner les limites del'engagement de la caution. (...)

4. Il faut donc admettre que la caution s'est engagee sur la base d'unexemplaire ou etait biffee la mention de la transformation du bail decourte duree en bail de neuf ans à defaut de conge notifie dans le delaiimparti par la loi. Elle plaide que la presence de cette biffure demontreque son engagement aurait ete strictement limite aux seules trois anneesinitiales.

Force est cependant de constater que la biffure de cette mention, quiequivaut à ce qu'elle disparaisse du corps du contrat, n'entraine en soistrictement aucune consequence juridique sur le plan des obligationsissues du bail des lors que le texte biffe est la reproduction presqueservile d'un article de la loi du 20 fevrier 1991 dont les dispositionssont imperatives en vertu de son article 12.

Cette rature apposee lors de la signature de la convention ne pouvait doncavoir pour objectif d'affranchir le bailleur de son obligation legale dedonner conge trois mois avant l'expiration du terme, dans la mesure ouaucune des parties n'avait le pouvoir de deroger à cette disposition lorsde la signature du contrat. La transformation du bail initialement decourte duree en bail de neuf ans demeurait des lors, dans les conditionsimposees par la loi, une consequence automatique et obligatoire.

Il importe donc peu que ce texte apparaisse ou non au sein de laconvention signee par la caution pour pouvoir s'appliquer, comme il s'estd'ailleurs applique en l'espece, le bail s'etant effectivement transformeà l'expiration de son terme initial.

Se portant caution de maniere generale des obligations de la locataireresultant du bail `et de ses suites', sans distinguer les suitescontractuelles, judiciaires ou legales, (le demandeur) ne pourraitlegitimement vouloir tirer pretexte des biffures pour limiter sonengagement au seul terme des trois annees initialement souscrites, alorsque la transformation du bail de trois ans en bail de droit commun de neufannees est une suite legale, obligatoire en l'absence de conge valide,previsible et d'ailleurs courante - à defaut d'etre certaine - d'un telcontrat ».

Griefs

Dans ses conclusions d'appel, le demandeur faisait valoir qu'en vertu del'article 2015 du Code civil, le consentement de la caution doit etreexpres et que l'on ne peut l'etendre au-delà des limites pour lesquellesil a ete contracte ; que « le bail etait souscrit pour une dureedeterminee de trois ans venant à echeance le 30 juin 2007 » et « qu'iln'a pas ete porte à la connaissance de la caution que les partiesenvisageaient puis decidaient une reconduction du bail ; il n'a pas etesollicite de renouvellement de l'engagement de la caution quant à ce »,pour en deduire qu'il ne pouvait etre tenu des obligations nees du bailau-delà de la periode de trois ans initialement souscrite.

Il faisait egalement valoir qu'en vertu de l'article 1740 du Code civil,les obligations de la caution ne s'etendent pas aux obligations resultantdu bail reconduit, pour en deduire que les obligations resultant ducautionnement de l'espece ne pouvaient trouver à porter sur les dettes dela locataire nees de la reconduction de son bail posterieurement àl'echeance determinee initialement convenue et seule connue de la cautionau moment de sa signature.

Premiere branche

En vertu de l'article 3, S: 6, alinea 1er, de la loi du 20 fevrier 1991,un bail portant sur la residence principale du preneur peut, parderogation au paragraphe 1er, etre conclu pour une duree inferieure ouegale à trois ans. En vertu de l'article 3, S: 6, alinea 5, de cette loi,si le preneur continue d'occuper les lieux sans opposition du bailleur,soit à defaut de conge notifie par l'une ou l'autre des parties au moinstrois mois avant l'expiration de la duree convenue ou nonobstant un telconge, le bail est repute avoir ete conclu pour une duree de neuf ans àcompter de la date à laquelle le bail initial est entre en vigueur.

Il se deduit de cet article 3, S: 6, qu'un bail conclu pour une courteduree ne peut etre « repute avoir ete conclu pour une periode de neufans » sans un acte du preneur qui continue d'occuper les lieux alorsqu'un conge a ete donne ou en l'absence d'un tel conge.

L'article 1738 du Code civil prevoit que si, à l'expiration du bail ecritconclu pour une duree determinee, le preneur reste dans les lieux sansopposition du bailleur, le bail est reconduit aux memes conditions, ycompris la duree.

L'article 1740 du Code civil prevoit quant à lui que, dans le cas del'article 1738, les obligations de la caution ne s'etendent pas au bailreconduit.

Ces dispositions doivent se lire en conformite avec les reglesparticulieres relatives aux differents types de baux.

Lorsqu'il s'agit d'un bail de residence principale, il faut ainsi lirel'article 1738 du Code civil comme comprenant l'hypothese dans laquelle ilest fait application de l'article 3, S: 6, alinea 5, de la loi du 20fevrier 1991, etant entendu que, dans ce cas, la duree du bail est de neufans à compter de la date à laquelle le bail initial est entre envigueur.

Au sens de l'article 1740 du Code civil, il faut entendre par « bailreconduit » tout bail etendu au-delà de la duree initialement souscrite,quel que soit le mecanisme juridique ayant entraine que le preneur puisserester dans les lieux sous couvert d'un bail.

En toute hypothese, à supposer que l'article 1740 du Code civil neconcerne pas l'hypothese prevue par l'article 3, S: 6, alinea 5, de la loidu 20 fevrier 1991, en vertu des articles 2013 et 2015 du Code civil lecautionnement ne peut etre etendu au-delà des limites dans lesquelles ila ete contracte. Cette disposition est applicable à toutes lesobligations, y compris celles decoulant d'un bail de residence principale.

Le preneur qui reste dans les lieux, entrainant ainsi l'application del'article 3, S: 6, alinea 5, etend l'obligation de la caution, en sorteque celle-ci, sauf si elle donne son consentement, n'est tenue que de ladette originaire, soit celle qui a ete contractee dans la periodeinitialement convenue, que ce soit par application de l'article 1740 oudes articles 2013 et 2015 du Code civil.

Le jugement attaque, qui, sans constater que le consentement du demandeurau maintien dans les lieux du preneur à l'expiration de la periode detrois ans initialement convenue a ete obtenu, decide que le demandeur doitcautionner les obligations du preneur nees posterieurement à la mutationdu bail conclu pour une duree initiale de trois ans en un bail de droitcommun de neuf annees, viole, partant, les articles 1738, 1740, 2013, 2015du Code civil et 3, S: 6, de la loi du 20 fevrier 1991.

Deuxieme branche

Si les articles 1738, 1740, 2015 du Code civil et 3, S: 6, alinea 5, de laloi du 20 fevrier 1991 doivent s'interpreter en ce sens que la cautiond'un bail de courte duree est tenue des obligations d'un bailautomatiquement etendu à une duree de neuf ans par l'effet du maintiendans les lieux du preneur à l'expiration de la duree initialementconvenue, meme si cette caution n'en a pas ete avisee et n'y a pasconsenti, ces dispositions instaurent alors entre les personnescautionnant les obligations d'un preneur d'un bail de residence principalede courte duree à l'issue de laquelle le preneur s'est maintenu dans leslieux et les personnes cautionnant toutes autres obligations, unedifference de traitement qui n'est ni objectivement ni raisonnablementjustifiee des lors qu'en regle, les obligations de la caution ne peuventetre etendues sans son consentement. Ils sont dans cette interpretationincompatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

Il s'ensuit que le jugement attaque, qui decide 1. que l'article 1740 duCode civil n'est pas applicable au motif qu'il ne vise que l'hypothese ou« le bail a ete reconduit tacitement » et que le sort particulier de lacaution est en l'espece amenage par l'article 3, S: 6, de la loi du 20fevrier 1991 qui ne prevoit pas « une reconduction » du bail « maisorganise au contraire un regime de transformation du bail initial » et 2.que cette transformation, etant « une suite legale, obligatoire enl'absence de conge valide », n'emporte pas d'extension de l'obligationcautionnee au sens de l'article 2015 du Code civil, pour en deduire que ledemandeur est tenu de toutes les obligations du bail au-delà de la dureede trois ans initialement souscrite, viole les articles 10 et 11 de laConstitution.

Il s'impose en ce cas de poser à la Cour constitutionnelle la questionprejudicielle reprise au dispositif de la requete.

Second moyen

Dispositions legales violees

* articles 1200 à 1216 du Code Civil ;

* articles 19, 23 à 28, 1020, alinea 2, 1022, alinea 4, et 1068, alinea1er, du Code judiciaire ;

* article 6, S: 1er, de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre1950, approuvee par la loi du 13 mai 1955 ;

* principe general du droit relatif au respect des droits de ladefense.

Decision et motifs critiques

Le jugement attaque condamne le demandeur solidairement avec madame C.aux depens de premiere instance, etant 1'indemnite de procedure liquideeà 594,98 euros, par tous ses motifs reputes ici integralementreproduits, et specialement, aux motifs que :

« Le tribunal constate que la condamnation initialement prononcee par lepremier juge dans son jugement non entrepris du 3 decembre 2008 porte surdes montants de 4.235,01 euros (arrieres locatifs et de charges) outre lesdepens (594,98 euros) et les interets judiciaires, ainsi que sur une sommede 1.885,77 euros (indemnites de relocation).

Il est reserve à statuer sur le surplus de la demande, etant notamment,en termes de condamnation de sommes, la condamnation aux eventuels degatslocatifs.

Le tribunal releve, d'une part, que la demande à 1'encontre du(demandeur) est limitee aux sommes pour lesquelles madame C. a dejà etecondamnee sans qu'il soit demande de reserver à statuer sur le poste desdegats locatifs dont la caution aurait pu egalement devoir repondre,d'autre part, que (la defenderesse) fait une erreur de calcul quand ellesollicite la condamnation solidaire (du demandeur) à un montant de6.220,78 euros, la somme de 4.235,01 euros et de 1.885,77 euros etant6.120,78 euros.

Le premier juge avait condamne la (defenderesse) aux depens exposes par(le demandeur) en premiere instance, etant une indemnite de procedureliquidee à 650 euros.

Cette partie du jugement a egalement ete entreprise par (ladefenderesse), qui revendique la condamnation solidaire (du demandeur etde la dame C.) aux depens qu'elle ne liquide pas, de sorte qu'il y a lieupour le tribunal de statuer d'office et de condamner (le demandeur) commesuit.

A cet egard, 1'article 1020, alinea 2, du Code judiciaire prevoit que lacondamnation aux depens doit etre prononcee solidairement si, comme enl'espece, la condamnation principale emporte elle-meme la solidarite desdebiteurs. Le legislateur n'a cependant pas prevu quoi que ce soitlorsque la condamnation aux depens risque de ne pas etre identique pourles deux parties succombantes, comme c'est le cas ici, (le demandeur)faisant la demonstration de ce qu' il releve de 1'aide juridique dedeuxieme ligne, alors que madame C., perpetuellement defaillante, n'enapporte aucune preuve et devrait des lors theoriquement etre condamneeaux indemnites de base à defaut d'autres elements d'appreciation.

On devrait donc deduire du double constat qui semblerait devoir s'imposerdans notre cas, à savoir, d'une part, que la condamnation aux depensdoive etre prononcee solidairement et, d'autre part, que la partiesuccombante beneficiant de l'aide juridique de deuxieme ligne ne puisseetre condamnee qu'au minimum de l'indemnite de procedure (sauf surdecision specialement motivee dans des cas ou la situation est manifestement deraisonnable - quod non en 1'espece), que 1'indemnite de procedure à laquelle doivent etre condamnees solidairement ces deuxparties doit etre identique et devrait des lors etre ramenee au pluspetit montant du par l'une des parties succombantes.

Neanmoins en 1'espece, le tribunal doit constater qu'aucun appel desparties n'a ete forme à 1'encontre de la premiere decision du 3decembre 2008 qui fixe les depens auxquels est condamnee dans unpremier temps madame C. seule, de sorte que 1'autorite de chose jugeequi s'attache à cette decision non contestee nous impose de condamner(le demandeur) à ce montant de 594,98 euros solidairement avec madameC., nonobstant les arguments qu'il aurait pu tirer de ce qui precede ».

Griefs

Le demandeur faisait valoir, en termes de conclusions d'appel, que, « si,par ailleurs, subsidiairement, le tribunal devait estimer qu'il y a lieuà condamnation du (demandeur) qui alors succomberait, le tribunalretiendrait alors que (ce dernier) est actuellement beneficiaire de 1'aidejuridique de deuxieme ligne (en tant que beneficiaire lui-meme d'une procedure de mediation de dette à l'instar de la dame C. du reste), etqu'à ce titre , il ne pourrait etre tenu que de l'indemnite de procedurefixee au minimum (article 1022, alinea 4, du Code judiciaire) ».

En vertu de l'article 19 du Code judiciaire, le jugement du juge de paixdu canton de Nivelles du 3 decembre 2008 n'a dessaisi ce juge que de1'action de la defenderesse contre la dame C. L'autorite de chose jugee decette decision au sens des articles 19 et 23 à 28 du Code judiciaire n'aporte que sur les condamnations prononcees contre cette partie.

Il ne ressort pas plus de ces dispositions que des articles 1200 à 1216du Code civil, qui reglent les condamnations solidaires, ou de l'article1020, alinea 2, du Code judiciaire, qui regle le sort des depens en casde condamnation principale solidaire, que, lorsqu'une decision qui n'estpas soumise à la juridiction d'appel prononce une condamnation auprincipal et aux depens contre une des parties obligee à une meme dette,le juge d'appel, saisi de l'appel du creancier contre une decision subsequente statuant sur 1'action du creancier contre 1'autre cooblige,serait tenu de fixer 1'indemnite de procedure de premiere instance aumontant qui a dejà ete fixe dans le premier jugement.

Il ressort au contraire tant de l'article 1068, alinea 1er, du Codejudiciaire que de l'article 6, S: 1er, de la Convention de sauvegardedes droits de l'homme et des libertes fondamentales et du principe generaldu droit relatif au respect des droits de la defense que, saisi de1'appel de la defenderesse contre le jugement du juge de paix de Nivellesdu 24 fevrier 2010 1'ayant deboutee de son action contre le demandeur, le tribunal de premiere instance de Nivelles devait statuer sur 1'ensemble du litige opposant ces deux parties, y compris la condamnationaux depens et devait, conformement à l'article 1022, alinea 4, du Codejudiciaire, des lors qu'il reconnait que le demandeur beneficie de1'aide juridique de seconde ligne et que la situation n'est pasmanifestement deraisonnable, fixer au minimum l'indemnite de procedure depremiere instance due par le demandeur.

En decidant qu'il ne peut pas fixer 1'indemnite de procedure au minimumaux motifs que la condamnation aux depens doit etre prononceesolidairement et que son montant a ete definitivement fixe par lejugement du 3 decembre 2008 contre la dame C. seule, le jugement attaqueviole toutes les dispositions legales et le principe general du droitvises au moyen.

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

L'article 3, S: 6, alinea 5, des regles particulieres aux baux relatifs àla residence principale contenues dans l'article 2 de la loi du 20 fevrier1991 prevoit que, à defaut d'un conge notifie dans les delais ou si lepreneur continue à occuper les lieux sans opposition du bailleur, le bailde residence principale conclu pour une duree inferieure ou egale à troisans est repute conclu pour une periode de neuf ans à compter de la dateà laquelle le bail initial de courte duree est entre en vigueur et estdes lors regi par les paragraphes 1er à 5 ; dans ce cas, le loyer et lesautres conditions demeurent en regle inchanges par rapport à ceuxconvenus dans le bail initial de courte duree.

Suivant l'article 2015 du Code civil, on ne peut pas etendre lecautionnement au-delà des limites dans lesquelles il a ete contracte.

Sauf restriction de duree prevue dans le cautionnement, les engagements dela caution couvrent, dans le cas prevu à l'article 3, S: 6, alinea 5precite, les obligations du bail de residence principale sur l'ensembledes neufs annees de sa duree.

Les obligations de la caution restent ainsi limitees à celles resultantdu bail pour lequel elles ont ete consenties, dans le respect de l'article2015 du Code civil.

Le jugement attaque constate que le demandeur s'est porte caution desobligations souscrites par le preneur en vertu d'un bail de residenceprincipale, conclu initialement pour une « courte duree » et« transforme en bail de droit commun de neuf ans », « le preneur[etant] demeure dans les lieux sans opposition du bailleur » àl'expiration de la duree initialement convenue, et que le bail a pris findans les neuf annees à compter de la date à laquelle le bail initial decourte duree est entre en vigueur.

Il enonce, sans etre critique, que le demandeur « s'est porte caution demaniere generale des obligations [du preneur] resultant du bail `et de sessuites', sans distinguer les suites contractuelles, judiciaires oulegales », et considere que « la transformation du bail de trois ans enbail de droit commun de neuf annees est une suite legale, obligatoire enl'absence de conge valide, previsible et d'ailleurs courante, à defautd'etre certaine, d'un contrat » de bail de residence principale.

Par ces enonciations, il justifie legalement sa decision de condamner ledemandeur « jusqu'à concurrence des condamnations prononcees par lepremier juge à l'encontre [du preneur] », non seulement pour la courteduree initialement convenue, mais pour toute la duree du bail.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Quant à la seconde branche :

Il ressort de la reponse à la premiere branche du moyen que, encondamnant le demandeur à garantir les obligations du preneur au bail deresidence principale litigieux pour toute la duree du bail, le jugementattaque n'etend pas les obligations de la caution sans son consentement.

Il n'y pas lieu de poser à la Cour constitutionnelle la questionprejudicielle suggeree par la demanderesse, qui suppose le contraire,cette question etant sans interet pour la solution du litige.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Sur le second moyen :

Aux termes de l'article 1068, alinea 1er, du Code judiciaire, tout appeld'un jugement definitif ou avant dire droit saisit du fond du litige lejuge d'appel.

Selon l'article 1017, alinea 1er, du meme code, tout jugement definitifprononce, meme d'office, la condamnation aux depens contre la partie qui asuccombe, sauf les exceptions legalement prevues.

La condamnation aux depens etant, en vertu de cette disposition, uneconsequence juridique de la condamnation sur le fond, il appartient aujuge d'appel qui, recevant l'appel et le declarant fonde, reforme ladecision du premier juge, de prononcer entre l'appelant et l'intime lacondamnation aux depens de premiere instance qui decoule de sa decisionsur le fond de la contestation.

Lorsque la partie qui succombe en vertu de sa decision beneficie de l'aidejuridique de deuxieme ligne, le juge d'appel fixe l'indemnite deprocedure, conformement à l'article 1022, alinea 4, du Code judiciaire,au minimum etabli par le Roi, sauf situation manifestement deraisonnable.

Le jugement attaque rec,oit l'appel de la defenderesse et, reformantpartiellement le jugement du premier juge, fait entierement droit à sademande contre le demandeur et condamne ce dernier aux depens.

S'agissant de l'indemnite de procedure de premiere instance, il constateque le defendeur beneficie de l'aide juridique de deuxieme ligne et que lareduction de l'indemnite au minimum etabli par le Roi n'est pasderaisonnable. Toutefois, considerant que la condamnation aux depens estsolidaire entre le defendeur et le preneur du bail de residence principaleet que ce dernier doit payer un montant superieur, il condamne ledefendeur à payer ce montant superieur.

En statuant de la sorte, il viole les dispositions precitees.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaque en tant qu'il condamne le demandeur à payer àla defenderesse la somme de 594,98 euros à titre de depens pour lapremiere instance ;

Rejette le pourvoi pour le surplus ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementpartiellement casse ;

Condamne le demandeur à la moitie des depens ; en reserve le surplus pourqu'il soit statue sur celui-ci par le juge du fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant le tribunal de premiere instancede Bruxelles, siegeant en degre d'appel.

Les depens taxes à la somme de six cent quinze euros quatre-vingt-troiscentimes en debet envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Alain Simon, Mireille Delange et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du seize septembre deux mille treize par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Jean Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M. Delange |
|----------+------------+-------------|
| A. Simon | D. Batsele | Chr. Storck |
+-------------------------------------+

16 SEPTEMBRE 2013 C.11.0511.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.11.0511.F
Date de la décision : 16/09/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-09-16;c.11.0511.f ?
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