Cour de cassation de Belgique
Arret
2507
NDEG P.13.0889.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR DE CASSATION,
demandeur en revision,
en cause
L. V.
condamne,
contre
L. N.
partie civile.
I. la procedure devant la cour
Par un requisitoire du procureur general pres la Cour de cassation, rec,uau greffe le 15 mai 2013, la Cour a ete saisie d'une demande en revisiondans les termes suivants :
« A la deuxieme chambre de la Cour de cassation,
Le procureur general soussigne à l'honneur d'exposer que, par lettre du28 fevrier 2013, ref. CAB./SL/2013-7266, la ministre de la Justice l'acharge d'introduire en son nom, conformement à l'article 444, 3DEG, duCode d'instruction criminelle, une demande en revision de l'arret rendupar la cour d'appel de Liege en date du 6 juin 2006 (lire 21 mars 2006) encause de V. L..
Par courrier adresse à la ministre de la Justice le 14 fevrier 2013, V.L., a sollicite qu'elle introduise une demande en revision de sacondamnation rendue par la cour d'appel de Liege le 6 juin 2006 (lire 21mars 2006) aux termes de laquelle il aurait ete condamne « à cinq anneesde prison pour attouchements et violence sur (ses) enfants, alors qu'(il)etait innocent ». A l'appui de sa requete, M. L. produit la copie de deuxattestations qu'il declare emaner de ses enfants.
Par arret du 21 mars 2006, rendu de fac,on contradictoire et passe enforce de chose jugee, la cour d'appel de Liege a condamne V. L. à unepeine d'emprisonnement de trois ans avec sursis de cinq ans pour la moitiede la peine et a prononce la decheance des droits enumeres à l'article 31du Code penal pour une duree de cinq ans du chef des preventionssuivantes :
Cause I.
A.1. entre le 1er janvier 2000 et le 24 avril 2001, avoir tente decommettre le crime repute viol à l'aide de violences par le seul fait dela penetration sexuelle, de quelque nature et par quelque moyen que l'acteait ete commis, sur la personne de L. M., mineur de plus de dix ansaccomplis et de moins de quatorze ans accomplis au moment des faits, etantne le 25 avril 1987, avec la circonstance que le coupable est une personnede la classe de celles qui ont autorite sur la victime, en l'occurrence lecompagnon de sa mere ;
B.2. du 25 avril 2001 au 28 fevrier 2002, avoir tente de commettre lecrime de viol sur la personne de L. M., mineur de plus de quatorze ansaccomplis et de moins de seize ans accomplis au moment des faits, etant nele 25 avril 1987, l'acte de penetration sexuelle, de quelque nature qu'ilsoit et par quelque moyen que ce soit, ayant ete impose notamment parviolence, contrainte ou ruse, ou ayant ete rendu possible en raison d'uneinfirmite ou d'une deficience physique ou mentale de la victime, avec lacirconstance que le coupable est une personne de la classe de celles quiont autorite sur la victime, en l'occurrence le compagnon de sa mere ;
C. entre le 1er janvier 2000 et le 28 fevrier 2002, avoir commis desattentats à la pudeur avec violences ou menaces sur la personne demineurs de moins de seize ans accomplis au moment des faits, avec lacirconstance que le coupable est une personne de la classe de celles quiont autorite sur la victime, en l'occurrence le compagnon de sa mere,
C. 3. sur la personne de L. M., ne le 25 avril 1987 ;
C.4. sur la personne de L. N., nee le 17 mars 1990.
Cause II.
A.1. entre le 1er janvier 1995 et le 17 fevrier 1998, avoir commis lecrime repute viol à l'aide de violences, par le seul fait de lapenetration sexuelle, de quelque nature et par quelque moyen que l'acteait ete commis, sur la personne de T.J., ne le 14 aout 1991, mineur demoins de dix ans accomplis au moment des faits :
B.2. entre le 1er janvier 1995 et le 17 fevrier 1998, avoir commis desattentats à la pudeur avec violences ou menaces, sur les personnes de T.J., ne le 14 aout 1991, de T.M., ne le 27 octobre 1988 et de T. L., nee le9 aout 1987, mineurs de moins de seize ans accomplis au moment des faits ;
C.3. notamment le 22 fevrier 1997, avoir volontairement fait des blessuresou porte des coups à T. M., ne le 27 octobre 1988, avec la circonstanceque les faits ont ete commis par une personne ayant autorite sur lesvictimes.
Sur le plan civil, la cour d'appel a condamne V. L.à payer à N.L. 2.500euros à titre provisionnel et procede à la designation d'un expert. Pourle surplus, elle a dit la constitution de la partie civile N. T. nonfondee et celle de Maitre Georges Rigo en sa qualite de tuteur ad hoc deM. L. irrecevable.
V. L. soutient qu'il n'a pas pu prouver son innocence à l'epoque del'arret rendu par la cour d'appel mais que l'attestation de L. T., M. T.et J. T. etablit qu'il est innocent.
Suivant la Cour, la retractation d'une declaration faite par la victime,mineure d'age, d'un attentat à la pudeur avec violences ou menaces commispar son pere, ne repond aux conditions de l'article 443, alinea 1er, 3DEG,du Code d'instruction criminelle que dans la mesure ou quelque elementrend vraisemblable la sincerite de cette retractation (Cass., 22 septembre1999, RG P.99.1089.F, Pas., 1999, nDEG 479).
Par ces motifs,
le procureur general soussigne requiert qu'il plaise à la Cour de statuersur la recevabilite de la presente demande en revision.
Bruxelles, le 14 mai 2013
Pour le procureur general,
l'avocat general,
(s) D. Vandermeersch. ».
A l'audience du 11 septembre 2013, le conseiller Benoit Dejemeppe a faitrapport et l'avocat general precite a conclu.
II. la decision de la cour
L'arret dont la revision est demandee concerne des faits de moeurs et deviolences ressortissant à deux causes distinctes qui ont ete jointes parla cour d'appel en raison de leur connexite. Les elements invoques àl'appui de la demande concernent la seconde cause.
Selon les pieces jointes à la lettre adressee par le ministre de laJustice au procureur general, L., M. et J. T., mineurs à l'epoque desfaits dont ils ont ete declares victimes, ont atteste que V. L.etaitinnocent.
L'article 443, alinea 1er, 3DEG, du Code d'instruction criminelle faitdependre la recevabilite de la demande en revision des condamnationscriminelles et correctionnelles passees en force de chose jugee, del'existence d'un fait nouveau survenu depuis la condamnation ou d'unecirconstance que le condamne n'a pas ete à meme d'etablir lors du proces,d'ou parait resulter la preuve de son innocence quant à tout ou partiedes faits pour lesquels il a ete condamne.
Dans la seconde cause, l'arret fonde la declaration de culpabilite deVittorio Loi essentiellement sur les accusations des trois enfants enprecisant les circonstances dans lesquelles ils ont formule cesaccusations.
Ainsi, les juges d'appel ont d'abord considere que J. T. a fait desconfidences spontanees à la police et que son recit a ete juge coherentpar un expert indiquant que les details donnes par l'enfant accreditaientson temoignage. Ils ont ensuite releve que les premieres confidences de L.T. n'ont pas ete recueillies par sa mere, mais par un tiers qui les aconfirmees durant l'enquete tandis qu'un expert a estime ce temoignagecomme hautement probable et a exclu toute forme de suggestion exterieure.Ils ont enfin enonce que le devoilement des faits par M.T. a ete realisedans un contexte qui ne coincide pas avec la these de la manipulation,l'expert ne pouvant exclure la realite des faits.
Les declarations etablies collectivement au nom des enfants du condamne,datees des 18 septembre 2007 et 31 janvier 2012, se bornent à affirmerque les accusations formulees par leur mere sont fausses, que l'affaire aete montee de toutes pieces par celle-ci et qu'ils ont choisi de vivreavec leur pere. Elles ne contredisent toutefois pas le faisceau depresomptions retenues par l'arret pour considerer que V. L. est coupableet ne font pas apparaitre pourquoi, à l'epoque, ils auraient faussementaccuse ce dernier.
Les declarations invoquees à l'appui de la demande de revision nepresentent pas le caractere de vraisemblance requis par la loi pour donnerouverture à ce recours.
La demande en revision est irrecevable.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Declare la demande en revision irrecevable ;
Laisse les frais à charge de l'Etat.
Lesdits frais taxes jusqu'ores à zero euro.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, president de section, president,Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis etGustave Steffens, conseillers, et prononce en audience publique du onzeseptembre deux mille treize par le chevalier Jean de Codt, president desection, en presence de Damien Vandermeersch, avocat general, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | G. Steffens | P. Cornelis |
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| B. Dejemeppe | F. Close | J. de Codt |
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11 SEPTEMBRE 2013 P.13.0889.F/1