Cour de cassation de Belgique
Arret
444
NDEG C.13.0053.F
E. H.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,
contre
PROCUREUR general pres la cour d'appel de liege, dont l'office est etablià Liege, au palais de Justice, place Saint-Lambert, 16,
defendeur en cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er octobre2012 par la cour d'appel de Liege.
Le president Christian Storck a fait rapport.
L'avocat general Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Le demandeur presente deux moyens, dont le premier est libelle dans lestermes suivants :
Dispositions legales violees
- articles 50, alinea 1er, 532, specialement alinea 3, 860, alinea 2, 862,specialement S:S: 1er, 1DEG, et 2, et 1052, specialement alinea 2, du Codejudiciaire ;
- article 1er de l'arrete royal nDEG 261 du 24 mars 1936 relatif auxdelais de recours en matiere disciplinaire.
Decisions et motifs critiques
Apres avoir constate que « [le demandeur] [a ete] nomme huissier dejustice [...] par arrete royal du 24 juin 1982 ; que, le 5 avril 2006, leprocureur du Roi [...] cite [le demandeur] aux fins d'entendre prononcerla suspension de celui-ci pour une duree d'un an ou, à tout lemoins, jusqu'à l'obtention d'une decision judiciaire definitive dans lecadre des differents dossiers le concernant, et ce, conformement àl'article 532 du Code judiciaire ;
que, aux termes d'un jugement prononce le 18 janvier 2007, le tribunal depremiere instance dit que la suspension preventive [du demandeur] n'estpas fondee, sous reserve d'une eventuelle sanction disciplinairedefinitive ; que, par jugement du tribunal correctionnel [...] du 22juillet 2010, passe en force de chose jugee, [le demandeur] [a ete]condamne à une peine de huit mois d'emprisonnement assortie d'un sursisd'une duree de cinq ans pour l'integralite de la peine du chef despreventions suivantes [...] ; que, par citation du 27 decembre 2010, leprocureur du Roi sollicite, sur la base de l'article 532 du Codejudiciaire, que le tribunal inflige [au demandeur] telle peinedisciplinaire que de droit ; que, aux termes d'un jugement prononce le 20octobre 2011, le tribunal de premiere instance dit les poursuitesirrecevables, se fondant sur le principe `non bis in idem' ; que, le 18novembre 2011, le procureur du Roi interjette appel de cette decision[...] ; que l'objet de l'appel principal tend à entendre dire l'actiondisciplinaire recevable ; à prononcer la destitution [du demandeur] deses fonctions d'huissier de justice [...] ou, subsidiairement, telle peinedisciplinaire que de droit ; à statuer comme de droit quant aux depens ; que [le demandeur] sollicite la confirmation du jugement entrepris, sousla seule emendation qu'il y a lieu de condamner l'etat belge aux depens,comprenant les indemnites de procedure de premiere instance et d'appel »,l'arret « rec,oit les appels principal et incident ; dit seul l'appelprincipal partiellement fonde ; reforme le jugement entrepris : prononcela suspension [du demandeur] [...] de ses fonctions d'huissier de justice[...], auxquelles il a ete nomme par arrete royal du 24 juin 1982, pourune duree de six mois, et condamne [le demandeur] aux frais et depens desdeux instances non liquides ».
Griefs
Aux termes de l'article 532, alinea 3, du Code judiciaire, les jugementsde suspension, destitution et condamnation d'amendes prononces contre leshuissiers de justice par le tribunal de premiere instance, à la diligencedu procureur du Roi, sont susceptibles d'appel.
Le delai d'appel contre ces jugements est fixe à quinze jours parl'article 1er de l'arrete royal nDEG 261 du 24 mars 1936 relatif auxdelais de recours en matiere disciplinaire. Pour le ministere public, cedelai court à partir de la prononciation de la decision entreprise,conformement à l'article 1052, alinea 2, du Code judiciaire.
Aux termes de l'article 860 du Code judiciaire, le delai pour former appelest prescrit à peine de decheance. Les delais etablis à peine dedecheance ne peuvent etre proroges, meme de l'accord des parties (article50, alinea 1er, du Code judiciaire). Cette sanction etant d'ordre public,le juge doit verifier d'office si le recours a ete introduit dans le delaiet prononcer d'office la sanction, sans que la preuve d'un grief doiveetre rapportee (article 862,
S:S: 1er, 1DEG, et 2, du meme code).
Il ressort des pieces de la procedure auxquelles la Cour peut avoir egard,et notamment des constatations de l'arret, que c'est le 18 novembre 2011que le procureur du Roi a releve appel du jugement prononce le
20 octobre 2011 par le tribunal de premiere instance declarantirrecevables les poursuites disciplinaires exercees à l'encontre dudemandeur.
Des lors que plus de quinze jours se sont ecoules entre la date de laprononciation du jugement entrepris et la date de l'appel introduit parle procureur du Roi, l'arret aurait du constater que ce dernier etaitdechu de son droit de former appel, et prononcer d'office l'irrecevabilitede son appel du
18 novembre 2011. En declarant cet appel recevable, l'arret violel'ensemble des dispositions legales visees en tete du moyen.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
En vertu de l'article 1er de l'arrete royal nDEG 261 du 24 mars 1936relatif aux delais de recours en matiere disciplinaire, le delai pourinterjeter appel, tel qu'il est actuellement fixe à l'article 1051,alinea 1er, du Code judiciaire, est, en matiere disciplinaire, reduit àquinze jours.
A l'egard du ministere public, ce delai court, aux termes de l'article1052, alinea 2, de ce code, des la prononciation du jugement.
L'article 860, alinea 2, du meme code dispose que les delais pour formerun recours sont prescrits à peine de decheance.
Cette decheance doit etre prononcee d'office par le juge.
L'arret constate que le jugement defere à la cour d'appel par leministere public, qui statuait sur l'action disciplinaire dirigee, sur labase de l'article 532 du Code judiciaire, par le procureur du Roi contrele demandeur, huissier de justice, a ete prononce le 20 octobre 2011 etque la requete d'appel a ete rec,ue au greffe de la cour d'appel le 18novembre 2011.
En disant cet appel recevable, l'arret viole les dispositions legalesprecitees.
Le moyen est fonde.
Et lorsque, en matiere civile, une decision est cassee parce qu'elle aillegalement declare l'appel recevable, la cassation est prononcee avecrenvoi.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arret attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Alain Simon, Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du vingt-sept juin deux mille treize par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistancedu greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Lemal |
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| A. Simon | D. Batsele | Chr. Storck |
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27 JUIN 2013 C.13.0053.F/6