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27/06/2013 | BELGIQUE | N°C.11.0782.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 juin 2013, C.11.0782.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

5416



NDEG C.11.0782.F

1. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE DU SACRE-COEUR DENEUFVILLES-GAGE, association sans but lucratif dont le siege est etablià Soignies (Neufvilles), rue des Sept Blasons, 2,

2. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE SAINT MARTIN DE HORRUES,association sans but lucratif dont le siege est etabli à Soignies, ruedu Pontin, 30,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Watermael-

Boitsfort, boulevard du Souverain,36, ou il est fait election de domicile,

contre

VILLE DE SOIGN...

Cour de cassation de Belgique

Arret

5416

NDEG C.11.0782.F

1. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE DU SACRE-COEUR DENEUFVILLES-GAGE, association sans but lucratif dont le siege est etablià Soignies (Neufvilles), rue des Sept Blasons, 2,

2. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE SAINT MARTIN DE HORRUES,association sans but lucratif dont le siege est etabli à Soignies, ruedu Pontin, 30,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain,36, ou il est fait election de domicile,

contre

VILLE DE SOIGNIES, representee par son college communal, dont les bureauxsont etablis à Soignies, en l'hotel de ville, place Verte, 32,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile.

NDEG C.12.0087.F

VILLE DE SOIGNIES, representee par son college communal, dont les bureauxsont etablis à Soignies, en l'hotel de ville, place Verte, 32,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

contre

1. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE DU SACRE-COEUR DENEUFVILLES-GAGE, association sans but lucratif dont le siege est etablià Soignies (Neufvilles), rue des Sept Blasons, 2,

2. POUVOIR ORGANISATEUR DE L'ECOLE PAROISSIALE SAINT MARTIN DE HORRUES,association sans but lucratif dont le siege est etabli à Soignies, ruedu Pontin, 30,

defenderesses en cassation,

representees par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain,36, ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation inscrit au role general sous le numero C.11.0782.Fest dirige contre les arrets rendus le 12 fevrier 2010 et le

10 janvier 2011 par la cour d'appel de Mons.

Le pourvoi en cassation inscrit au role general sous le numero C.12.0087.Fest dirige contre l'arret rendu le 10 janvier 2011 par la cour d'appel deMons.

Le conseiller Didier Batsele a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Les moyens de cassation

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.11.0782.F,les demanderesses presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* article 24, specialement S:S: 1er et 4, de la Constitution ;

* articles 1370 et 2262bis, specialement S: 1er, du Code civil ;

* article 33 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositionsde la legislation de l'enseignement, telle que cette disposition etaitd'application en Communaute franc,aise avant l'entree en vigueur dudecret de la Communaute franc,aise du 7 juin 2001 sur les avantagessociaux ;

* articles 2 et 3, specialement alinea 1er, du decret de la Communautefranc,aise du 7 juin 2001 sur les avantages sociaux.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque du 12 fevrier 2010 decide que les demanderesses ne peuventse prevaloir d'un droit de creance à l'egard de la defenderesse et queleur demande est prescrite pour la periode s'etalant jusqu'au 4 mai 2000,par tous ses motifs reputes integralement reproduits, et notamment par lesmotifs suivants :

« 2DEG Quant à la prescription

[Les demanderesses] reclament la condamnation de [la defenderesse] aupayement d'une somme provisionnelle de 100.000 euros à titre de chargesdu passe depuis le 1er janvier 1996.

[La defenderesse] invoque la disposition de l'article 2262bis du Codecivil et estime qu'il y a lieu d'appliquer la prescription quinquennale àla demande [des demanderesses], ce qui a pour consequence que leur action,en ce qu'elle porte sur les charges du passe, est prescrite depuis le 27juillet 2003.

Subsidiairement, elle considere que [les demanderesses] ne pourraientreclamer une indemnisation pour le passe qu'en remontant cinq ans enarriere à compter de leur citation introductive d'instance, soit le 3aout 2001.

Se pose le probleme du fondement de la demande [des demanderesses].

Celles-ci precisent que leur demande est fondee sur l'article 33 du pactescolaire, l'article 24 de la Constitution et l'article 2 du decret du 7juin 2001.

Elles soulignent qu'à defaut de moyens propres, elles ont prefinance lesservices representes par les avantages sociaux auxquels elles ont droit enfaisant appel à l'intervention financiere des parents et en organisant uncertain nombre d'activites lucratives.

Elles s'estiment ainsi creancieres de [la defenderesse] et postulent leremboursement des sommes depensees.

Cette argumentation ne peut etre suivie.

[Les demanderesses] ne justifient pas leur qualite de creancieres dans lamesure ou elles admettent qu'elles n'ont pas personnellement finance lesservices dont elles reclament le cout, que ce soit directement ou par lebiais d'un emprunt.

Elles ne soutiennent pas non plus qu'elles auraient pris un engagementvis-à-vis des parents, qui auraient, selon leurs affirmations, dusuppleer à la carence de [la defenderesse].

Par contre, elles peuvent pretendre à la reparation de leur prejudicedans l'hypothese ou serait demontree une faute dans le chef de la commune,laquelle consisterait dans l'octroi, au mepris de ses obligations legales,d'avantages sociaux aux seuls enfants de son reseau.

L'article 2262bis du Code civil est ainsi d'application, lequel prevoitune prescription de cinq ans.

[Les demanderesses] n'ont eu connaissance de leur eventuel dommage qu'aumois de mai 2005, lorsqu'elles ont pu prendre connaissance de la liste desavantages sociaux octroyes aux enfants frequentant l'enseignementcommunal.

Le fait que [les demanderesses] sont forcement au courant des dispositionsresultant du pacte scolaire et du decret du 7 juin 2001 n'entraine pasnecessairement qu'elles etaient conscientes d'une inegalite entre lesreseaux depuis le pacte scolaire.

Il s'ensuit que la demande n'est pas prescrite pour la periode posterieureau 4 mai 2000 ».

Griefs

Le droit de creance, que la doctrine definit comme un lien de droit entredeux personnes determinees permettant à son titulaire de reclamer d'unepersonne determinee l'accomplissement d'une prestation, peut trouver sonorigine dans la loi suivant l'article 1370 du Code civil : « certainsengagements se forment sans qu'il intervienne aucune convention, ni de lapart de celui qui s'oblige, ni de la part de celui envers lequel il estoblige. Les uns resultent de l'autorite seule de la loi [...] ».

En vertu de l'article 2262bis, S: 1er, du Code civil, l'action ducreancier à l'egard de son debiteur se prescrit par dix ans : « Toutesles actions personnelles sont prescrites par dix ans. Par derogation àl'alinea 1er, toute action en reparation d'un dommage fondee sur uneresponsabilite extracontractuelle se prescrit par cinq ans à partir dujour qui suit celui ou la personne lesee a eu connaissance du dommage oude son aggravation et de l'identite de la personne responsable ».

Pour pouvoir se prevaloir d'un droit subjectif de creance à l'egard despouvoirs publics, deux elements doivent etre reunis : 1DEG l'existenced'une obligation juridique precise (dare, facere ou non facere) qu'uneregle du droit objectif met directement à charge des pouvoirs publics ;2DEG un interet propre dans le chef de celui qui exige l'execution decette obligation.

Il existe une regle de droit attribuant directement à l'administre lepouvoir d'exiger de l'autorite un comportement determine lorsque lacompetence de l'autorite administrative est entierement liee, ce quisuppose que les conditions à la reunion desquelles est subordonnel'exercice de la competence soient definies de maniere objective par laregle de droit, de sorte que l'autorite ne dispose d'aucun pouvoird'appreciation.

L'article 24 de la Constitution dispose :

« S: 1er. L'enseignement est libre [...].

La Communaute assure le libre choix des parents. [...]

S: 4. Tous les eleves ou etudiants, parents, membres du personnel etetablissements d'enseignement sont egaux devant la loi et le decret. Laloi et le decret prennent en compte les differences objectives, notammentles caracteristiques propres à chaque pouvoir organisateur, quijustifient un traitement approprie ».

Avant sa modification par le decret du 7 juin 2001 sur les avantagessociaux, l'article 33 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certainesdispositions de la legislation de l'enseignement, dite loi du pactescolaire, disposait :

« Sans prejudice des dispositions derogatoires prevues par la presenteloi, l'intervention financiere des provinces et des communes au profit del'enseignement libre est limitee à la tutelle sanitaire et aux avantagessociaux accordes aux eleves. Les provinces et communes ne peuvent faireaucune distinction entre les enfants, quelle que soit l'ecole qu'ilsfrequentent. Elles n'ont toutefois aucune obligation vis-à-vis desenfants frequentant les ecoles de l'Etat ».

Le decret de la Communaute franc,aise du 7 juin 2001 sur les avantagessociaux, en vigueur depuis le 1er septembre 2001, enumere les avantagessociaux admissibles en son article 2 et dispose, en son article 3, que «les communes qui accordent des avantages sociaux au benefice des elevesfrequentant les ecoles qu'elles organisent accordent dans des conditionssimilaires les memes avantages au benefice des eleves frequentant desecoles de meme categorie situees dans la meme commune et relevant del'enseignement libre subventionne par la Communaute franc,aise pour autantque le pouvoir organisateur de ces ecoles en fasse la demande ecrite à lacommune ».

Il suit de la combinaison de ces dispositions que le legislateur ainstitue, à charge des communes, une obligation de traiter de maniereegale les eleves frequentant les etablissements de l'enseignement libre etles eleves frequentant les etablissements de l'enseignement qu'ellesorganisent. Cette obligation ne souffre aucun pouvoir d'appreciation dansle chef de l'autorite, puisqu'il s'agit d'une competence integralementliee.

Il en decoule un droit subjectif de creance dans le chef des pouvoirsorganisateurs de l'enseignement dit libre, lesquels peuvent exiger del'autorite communale qu'elle leur accorde les memes avantages sociaux queceux qui sont accordes aux eleves de l'enseignement qu'elle organise. Lespouvoirs organisateurs de l'enseignement dit libre sont, à l'exception deleurs eleves individuellement, seuls titulaires du droit de creance, ainsiqu'il resulte des dispositions suivantes :

- l'article 3 de la loi du 29 mai 1959 precitee, qui dispose que « l'Etatsubventionne, conformement aux dispositions de la presente loi, lesetablissements et sections d'etablissements d'enseignement repondant auxnormes legales et organisees par les provinces, les communes, lesassociations de communes, par d'autres personnes publiques et despersonnes privees » ;

- l'article 36 de la meme loi du 29 mai 1959, qui dispose que « lessubventions de fonctionnement et d'equipement sont payees au pouvoirorganisateur de chaque etablissement » ;

- l'article 3 du decret du 7 juin 2001 precite, qui dispose que lescommunes doivent accorder des avantages sociaux au benefice des elevesfrequentant les ecoles relevant de l'enseignement libre subventionne parla Communaute franc,aise, « pour autant que le pouvoir organisateur deces ecoles en fasse la demande ecrite à la commune », confirmant ainsique le creancier direct des avantages sociaux est le pouvoir organisateuret non les eleves qui frequentent les ecoles qu'il organise.

Dans leurs troisiemes conclusions de synthese, les demanderessesinvoquaient l'existence d'un droit de creance à l'egard de ladefenderesse :

« Que, competente[s] pour demander la condamnation de [la defenderesse],[les demanderesses] postulent le remboursement des sommes depensees afinde pouvoir accorder aux eleves frequentant l'ecole qu'elle[s] organise[nt]les services couverts par la notion d'avantage social accordes par [ladefenderesse] aux eleves frequentant l'enseignement communal mais nonaccordes aux eleves frequentant l'ecole organisee par [lesdemanderesses] ;

Que [les demanderesses] poursuivent donc le recouvrement d'une creance àl'encontre de [la defenderesse] ;

Que, si celle-ci avait execute son obligation legale à temps et à heure,elle ne serait pas en dette à l'egard [des demanderesses] ;

Que le debat qui oppose notamment [les demanderesses] à [ladefenderesse] est un debat entre creancier et debiteur ;

Que la cour [d'appel] observera que ce sont [les demanderesses] qui onthonore la charge des services couverts par la notion d'avantage social ;

Qu'ayant supporte cette charge, [les demanderesses] sont non seulementcompetentes pour obtenir la condamnation de [la defenderesse] mais enoutre recevables et fondees à obtenir cette condamnation ;

Que [les demanderesses] auraient pu recourir à la formule de l'emprunt ;que [les demanderesses] ont eu recours au prefinancement et à lasolidarite, ce qui ne doit nullement dispenser [la defenderesse]d'intervenir et d'executer son obligation legale ».

L'arret attaque du 12 fevrier 2010, relevant que les demanderessesreclament la condamnation de la defenderesse au payement d'une sommeprovisionnelle de 100.000 euros à titre de charges du passe depuis le

1er janvier 1996, demande fondee sur l'article 24 de la Constitution,l'article 33 du pacte scolaire et l'article 2 du decret du 7 juin 2001,decide que les demanderesses ne justifient pas leur qualite decreancieres. L'arret justifie sa decision par les considerations que lesdemanderesses « admettent qu'elles n'ont pas personnellement finance lesservices dont elles reclament le cout, que ce soit directement ou par lebiais d'un emprunt », d'une part, et « ne soutiennent pas non plusqu'elles auraient pris un engagement vis-à-vis des parents, qui auraient,selon leurs affirmations, du suppleer à la carence de [ladefenderesse] », d'autre part.

En deniant l'existence d'un droit de creance des demanderesses, alorsqu'en vertu des articles 24 de la Constitution, 33 de la loi dite du pactescolaire, 2 et 3 du decret de la Communaute franc,aise du 7 juin 2001,elles ont le droit d'exiger de la defenderesse qu'elle leur accorde lesmemes avantages sociaux que ceux qui sont accordes aux eleves del'enseignement qu'elle organise, l'arret du 12 fevrier 2010 viole cesdispositions constitutionnelle et legales.

Les circonstances, relevees par l'arret precite, selon lesquelles lesdemanderesses n'auraient pas personnellement finance les services dontelles reclament le cout ni contracte d'engagement envers ceux qui les ontfinances, ne sont nullement elusives de l'existence d'un droit de creance.

En decidant en outre que la demande des demanderesses tendant à lacondamnation de la defenderesse au paiement de la somme provisionnelle de100.000 euros à titre de charges du passe depuis le 1er janvier 1996 estprescrite pour la periode s'etalant jusqu'au 4 mai 2000, alors qu'en vertude l'article 2262bis, S: 1er, alinea 1er, du Code civil, les demanderessesdisposent d'un delai de dix ans pour exercer leur droit de creance,l'arret attaque du

12 fevrier 2010 viole egalement l'article 2262bis, S: 1er, alinea 1er, duCode civil.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.12.0087.F,la demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* articles 10, 11 et 24, S: 1er, alinea 2, de la Constitution ;

* article 33 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositionsde la legislation de l'enseignement, tant dans sa version anterieureà sa modification par le decret de la Communaute franc,aise du 7 juin2001 sur les avantages sociaux que dans sa version en vigueur depuiscette modification ;

* articles 2, 3 et 8 du decret de la Communaute franc,aise du 7 juin2001 sur les avantages sociaux.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque fait interdiction à la demanderesse d'intervenirfinancierement dans des avantages qui ne sont pas repris dans la listevisee à l'article 2 du decret du 7 juin 2001 sous peine d'une astreintede 1.000 euros par mois exigible à l'echeance d'un delai de trois mois àdater de sa signification, par les motifs que :

« Si l'on se place avant le 1er septembre 2001 (date d'entree envigueur du decret du 7 juin 2001), la cour [d'appel] considere queconstituent des avantages sociaux, en ce qu'ils ne s'inscrivent pas dansl'organisation normale de l'enseignement :

- [...]

- l'intervention dans les classes de depaysement et leur transport : ilest exact que les classes de depaysement sont organisees durant lesperiodes scolaires et qu'elles contribuent à la decouverte d'unenvironnement culturel, geographique et historique suppose peu connu de laplupart des enfants qui y participent.

Ceci etant, l'aspect economique et financier du sejour est preponderantpour les familles et est susceptible d'orienter le choix de celles-ci.

Il en est de meme pour le cout des deplacements en vue d'excursions, deslors qu'il s'agit d'un accessoire d'activites qui peuvent etre considereescomme des avantages sociaux.(...)

Pour la periode posterieure au 1er septembre 2001, il y a lieu de sereferer à la liste reprise à l'article 2 du decret lequel vise : 1DEG(....)

Il a ete egalement juge qu'il pouvait etre deduit de l'arret de la Courd'arbitrage du 14 mai 2001 qu'en ce qui concerne les avantages sociaux quine se retrouvent pas sur la liste precitee, ils ne peuvent, sous peine devioler le decret, etre accordes à aucun reseau d'enseignement.

(...) 3) Quant aux avantages accordes par la [demanderesse]

Il ressort des pieces auxquelles la cour [d'appel] peut avoir egard que :

- pour les annees scolaires 2002-2003, 2004-2005 et 2005-2006, unegarderie et une etude etaient organisees de 6 heures 30 à 8 heures et de

16 heures à 18 heures 30 ;

- pour l'annee scolaire 2005-2006, la garderie et l'etude organisees àCasteau de 7 heures à 8 heures 30 et de 15 heures 40 à 18 heures sontgratuites. Il en est de meme pour plusieurs autres ecoles communales ;

- lors d'une interpellation au conseil communal sur les avantages sociauxoctroyes en 2000, il a ete repondu qu'il s'agissait de la garderie dumatin, du soir et de la surveillance du repas du midi `hors subvention' ;

- le conseil communal de [la demanderesse] a vote le 8 avril 2002 la listedes avantages sociaux accordes aux eleves de l'enseignement maternelordinaire et de l'enseignement primaire ordinaire de l'enseignementcommunal arretee au 1er septembre 2001 ; il s'agit de la garderie durepas de midi d'une duree d'une demi-heure hors subventionnement, del'accueil des eleves une heure avant le debut et une heure apres la findes cours ;

- une etude surveillee gratuite est organisee dans plusieurs ecolesdependant de [la demanderesse], à tout le moins durant l'annee scolaire2007-2008 ;

- les budgets communaux font apparaitre le payement de frais de classes deplein air (Soignies annees 2002, 2003, 2004, 2005), de classes de neige(annees 2003, 2004, 2005), de divers voyages scolaires (Casteau,Neufvilles, ... annees 2003, 2004, 2005), de classes de foret et classesde mer (Casteau, Naast, Thieusies : annees 2003, 2004, 2005) et detransports scolaires (annee 2004).

Pour le surplus, il n'est pas etabli que [la demanderesse] accorderait desremises de prix portant sur autre chose que des ouvrages pedagogiques ouinterviendrait dans le cout de l'acces à la piscine.

[La demanderesse] reconnait que dans certaines ecoles communales et pourcertains types de garderie, les prescriptions decretales sont depassees.

Les considerations de [la demanderesse] sur le fait que certainesgarderies du soir s'apparenteraient en etude surveillee sont sanspertinence dans la mesure ou ces etudes tout comme les garderies doiventetre considerees comme des avantages sociaux des lors qu'elles neressortissent pas à l'organisation de l'enseignement mais constituent uneaide sociale qui permet à l'enfant de ne pas attendre le retour à lamaison pour effectuer ses devoirs et aux parents d'etre decharges de cettetache lorsque, par manque de temps ou de competences, ils ne peuvent laremplir.

Les defenderesses reconnaissent que la Communaute franc,aise intervientforfaitairement dans le cout des surveillances de midi et c'est à justetitre que [la demanderesse] estime que les [defenderesses] n'etablissentpas que cette subvention serait insuffisante en maniere telle qu'ellesdevraient obtenir une majoration de cette aide.

Par ailleurs, les [defenderesses] ne contestent pas que l'organisation degarderies `hors decret' est subventionnee par l'Office de la naissance etde l'enfance. La cour [d'appel] releve toutefois que l'agrement duprogramme CLE a ete octroye avec effet au 1er juin 2005 alors que lademande des defenderesses debute au premier mai 2000.

[La demanderesse] soutient que l'organisation des surveillances du mididans certaines implantations communales est justifiee par des contingencespratiques l'empechant de respecter les horaires du decret.

D'une part, la [demanderesse], pas plus du reste que les [defenderesses],ne demontre les contingences materielles auxquelles elles doivent faireface pour organiser les surveillances du temps de midi.

D'autre part, à supposer que des contingences materielles existent, iln'en demeure pas moins qu'elles impliqueraient l'octroi aux enfants desecoles communales d'un avantage supplementaire `hors liste'.

La cour [d'appel], dans son arret precite, a juge que, pour la periodecourant depuis le 1er septembre 2001, elle ne possede pas de pouvoird'appreciation et que les pretentions des [defenderesses] `relatives auxaides accordees par la commune que la cour [d'appel] considererait commedes avantages sociaux qui ne seraient pas repris dans le decret seraientnon fondees dans la mesure ou en les accordant la commune aurait viole letexte legal'.

Il s'ensuit que la cour [d'appel] ne peut en tout etat de cause accueillirla demande des [defenderesses] visant le retablissement de l'egaliterelative aux avantages supplementaires hors liste.

La cour [d'appel] observe toutefois que cette demande, dont il seraquestion ci-apres, a ete modifiee par les [defenderesses], qui reclamentactuellement à titre subsidiaire qu'interdiction soit faite à la[demanderesse] d'octroyer de tels avantages.

Il n'y a donc pas lieu pour la solution du litige de poser les questionsprejudicielles relatives aux avantages sociaux reclames dans l'hypothesede contingences organisationnelles empechant le respect du decret.

Il resulte de ce qui precede que [la demanderesse] accorde à ses elevesdes avantages sociaux qu'elle n'octroie pas aux [defenderesses] et ce, enviolation du decret du 7 juin 2001.

Elle commet ainsi une faute engageant sa responsabilite sur la base desarticles 1382 et 1383 du Code civil.

Il a dejà ete juge que les parties [defenderesses] pouvaient pretendre àla reparation de leur prejudice dans l'hypothese ou serait demontree unefaute de la [demanderesse].

Cela implique que la demande de production de documents de [lademanderesse] n'est pas fondee des lors qu'il n'y a pas lieu de fixer demaniere precise le montant des interventions communales dans les avantagessociaux accordes, dans la mesure ou il a ete juge que les [defenderesses]ne les ont pas personnellement finances, mais d'evaluer le dommage quiresulte du non-respect par la [demanderesse] de son obligation legalefondee sur le decret du 7 juin 2001.

Il n'y a donc pas lieu de poser la question prejudicielle proposee par [lademanderesse] relative à la constitutionnalite de la demanded'indemnisation des [defenderesses].

Dans leurs troisiemes conclusions de synthese deposees le 3 septembre2009, les [defenderesses] sollicitaient à titre subsidiaire lacondamnation de [la demanderesse] au payement d'une somme de 50.000 euroscompte tenu du fondement legal de la demande d'indemnisation retenu par lacour [d'appel].

Les [defenderesses] estiment que les montants qu'il convient de leuraccorder doivent avoir un caractere dissuasif et les evaluent à la moitiede ce que [la demanderesse] aurait du decaisser si elle avait respecte sesobligations legales.

Le dommage auquel peuvent pretendre les [defenderesses] ne doit pas etrecalcule en fonction du cout des avantages dont elles furent privees, àdefaut pour elles d'etablir qu'elles ont du en assumer personnellement lefinancement.

De meme, il ne peut etre question d'une indemnisation-sanction mais decerner de la maniere la plus precise possible les consequencesdommageables pour les [defenderesses] de la faute de la [demanderesse].

Le prejudice des [defenderesses] doit etre evalue en prenant enconsideration les elements suivants :

- depuis plusieurs annees, la confiance que les [defenderesses]supposaient pouvoir placer dans le respect par la commune de sesobligations legales a ete trompee ;

- le caractere necessairement moins attrayant de l'etablissement des[defenderesses] : meme si celles-ci n'etablissent pas que des parents ontchoisi l'enseignement communal en raison des avantages offerts, il n'ensubsiste pas moins une depreciation de l'enseignement subventionne libreen ce qu'il est incapable d'offrir des services concurrents à ceux de lacommune ;

- l'ampleur des avantages sociaux dont les [defenderesses] n'ont pu fairebeneficier les eleves frequentant leurs etablissements.

La cour [d'appel] estime qu'à defaut de pouvoir evaluer le dommage subide maniere concrete, seule une indemnisation en equite est de nature àreparer le prejudice invoque par la premiere [defenderesse] ; celle-cisera fixee à la somme definitive de 8.000 euros pour chaque[defenderesse].

Cette somme sera majoree d'un interet compensatoire depuis la date moyennedu 1er mai 2005.

La demande des [defenderesses] tendant à la condamnation de [lademanderesse] à accorder dans l'avenir aux eleves frequentant les ecolesqu'elles organisent tous les avantages sociaux repris à l'article 2 dudecret du 7 juin 2001 et qui sont alloues par [la demanderesse] aux elevesfrequentant les ecoles communales apparait sans interet dans la mesure ouil s'agit d'une obligation legale de la [demanderesse].

Pour la periode posterieure à l'entree en vigueur du decret, la cour[d'appel] releve que la [demanderesse] accorde des avantages qui ne sontpas repris dans la liste visee à l'article 2 du decret.

L'indemnisation d'un dommage basee sur une faute consiste à retablir lavictime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvee si la fauten'avait pas ete commise.

Pas plus que [la demanderesse], les [defenderesses] ne peuvent pretendreà un avantage social qui n'est pas repris dans la liste exhaustive dudecret du 7 juin 2001, en maniere telle que les [defenderesses] ne sontpas fondees à reclamer des dommages et interets equivalents à lacontre-valeur des avantages sociaux `hors liste'.

Par contre, il y a lieu, conformement à la demande des [defenderesses],d'interdire à la [demanderesse] d'intervenir financierement dans cesavantages sous peine d'une astreinte qu'il convient de fixerraisonnablement au montant de 1.000 euros par mois ».

Griefs

Aux termes de l'article 33, alinea 1er, de la loi du 29 mai 1959, avant samodification par le decret du 7 juin 2001 et applicable jusqu'à l'entreeen vigueur de ce decret fixee le 1er septembre 2001 :

« Sans prejudice des dispositions derogatoires prevues par la presenteloi, l'intervention financiere des provinces et des communes au profit del'enseignement libre est limitee à la tutelle sanitaire et aux avantagessociaux accordes aux eleves. Les provinces et les communes ne peuventfaire aucune distinction entre les enfants, quelles que soient les ecolesqu'ils frequentent.

Elles n'ont toutefois aucune obligation vis-à-vis des enfants frequentantles ecoles de l'Etat ».

Cette disposition consacre, conformement aux articles 10, 11 et 24 de laConstitution, le principe de l'egalite entre les ecoles officielles et lesecoles subventionnees en ce qui concerne la tutelle sanitaire et lesavantages sociaux et garantit aux parents que le choix de l'enseignementqui sera dispense à leurs enfants ne pourra etre influence par desconsiderations d'ordre financier liees à l'octroi d'avantages sociaux auxeleves frequentant les ecoles communales.

La notion d' « avantages sociaux » n'etait definie ni dans la loi du

29 mai 1959 ni dans les travaux preparatoires de celle-ci.

Les travaux preparatoires de la loi precisent d'ailleurs à cet egard :« En ce qui concerne les avantages sociaux, il est difficile d'en donnerune definition limitative eu egard à l'evolution constante à laquelle onassiste dans ce domaine. Il vaut mieux ne pas freiner cette evolution parune definition trop precise et partant restrictive mais plutot permettreà celle-ci de s'elargir. Une jurisprudence sera etablie à ce sujet »(Doc. parl., Chambre, sess. ord. 1958-1959, nDEG 199-2, p.11).

Le legislateur avait en effet considere qu'il s'agit d'une notion evoluantavec le temps qu'il serait dangereux d'enfermer dans une definition troprigide et qu'il convenait d'abandonner à la jurisprudence tantadministrative que judiciaire le soin de determiner en fonction del'evolution sociale, les avantages entrant dans le champ d'application del'article 33 qu'une commune ne peut accorder aux eleves qui frequententles ecoles communales sans l'accorder aux eleves qui frequentent lesecoles libres subventionnees etablies sur le territoire communal.

Depuis l'origine et jusqu'à ce jour, des activites telles que les« classes de depaysement » ou les excursions au sens large, ainsi queles frais que ces activites impliquent et notamment les frais detransport, ont toujours ete exclus de la notion d' « avantages sociaux » dans la mesure ou ces activites font partie de l'organisation normalede l'enseignement.

Les « ecoles de plein air » auxquelles peuvent raisonnablement etreassimilees les « classes de depaysement » et les voyages ou excursionsscolaires, ainsi que les frais de transport lies à ces activites, etaientainsi exclus des avantages sociaux par la circulaire ministerielle du 1erjuin 1960 enumerant les activites couvertes par la notion d'« avantagessociaux » au sens de l'article 33 de la loi du 29 mai 1959, dans lamesure ou ces classes ou excursions dispensent un enseignement dans desconditions optimales de salubrite à des eleves reguliers « et fontpartie de l'organisation scolaire normale ».

Cette exclusion et l'absence d'evolution conduisant à considerer quel'organisation de « classes de depaysement » et les excursionsscolaires au sens large, ainsi que les frais de transport lies à cesactivites, feraient partie des avantages sociaux ont ete confirmees par ledecret du 7 juin 2001 de la Communaute franc,aise relatif aux avantagessociaux ainsi que par le decret du Conseil flamand du 5 juillet 1989relatif à l'enseignement et son arrete d'execution du 24 juillet 1991.

Par ces deux decrets et par cet arrete, les communautes flamande etfranc,aise sont en effet intervenues par voie legislative et reglementairepour indiquer les seuls avantages qui constituent des « avantagessociaux » au sens de l'article 33 de la loi du 29 mai 1959 modifiantcertaines dispositions de la legislation de l'enseignement.

Par le decret de la communaute franc,aise du 7 juin 2001, l'article 33 dela loi du 29 mai 1959 a ete modifie comme suit :

« Sans prejudice des dispositions derogatoires prevues par la presenteloi, l'intervention financiere des communes, des provinces et de lacommission communautaire franc,aise au profit de l'enseignement libre estlimitee à la tutelle sanitaire et aux avantages sociaux accordes auxeleves, tels qu'ils sont prevus par le decret du 7 juin 2001 relatif auxavantages sociaux ».

L'arret reprend dans ces motifs la liste exhaustive des « avantagessociaux » etablie par le decret du 7 juin 2001.

Il en ressort que les « classes de depaysement » et les excursionsscolaires au sens large, ainsi que le transport s'y rapportant, ne fontpas partie des avantages sociaux vises par le decret.

Il s'en deduit que l'organisation de « classes de depaysement » etd'excursions scolaires ne sont toujours pas considerees comme des« avantages sociaux ». Les frais lies à ces activites et notamment lesfrais de transport qui en sont l'accessoire ne peuvent pas davantage etrequalifies d'« avantages sociaux ».

Ces activites, qui sont depuis toujours considerees comme faisant partiede l'organisation normale de l'enseignement, ne peuvent des lors en aucuncas etre qualifiees d'avantage social.

Relevant de l'organisation normale de l'enseignement, les « classes dedepaysement » et les excursions scolaires, ainsi que les frais detransport qui en constituent l'accessoire, peuvent en consequence etrepris en charge par les communes sans violer ni l'article 33 de la loi du29 mai 1959, tant dans sa version anterieure au decret du 7 juin 2001 quedans sa version modifiee par ledit decret, ni le decret du 7 juin 2001vise au moyen.

L'arret attaque rappelle que, dans son arret du 12 fevrier 2010, la courd'appel a decide que, pour la periode courant depuis le 1er septembre 2001(soit celle posterieure au decret), elle n'a pas de pouvoir d'appreciationet que les pretentions des defenderesses « relatives aux aides accordeespar la commune que la cour [d'appel] considererait comme des avantagessociaux qui ne seraient pas repris dans le decret seraient non fondeesdans la mesure ou, en les accordant, la commune aurait viole le textelegal ».

L'arret attaque, se fondant sur les pieces auxquelles la cour d'appel peutavoir egard, enumere les avantages sociaux ou les avantages qu'ellequalifie d'avantages sociaux accordes par la demanderesse, à savoir :

- les garderies, etudes, surveillance de repas de midi pour les periodesindiquees et jusqu'à concurrence des tranches horaires precisees ;

- les « frais de classes de plein air (Soignies 2002, 2003, 2004, 2005),de classes de neige (annees 2003, 2004, 2005), de divers voyagesscolaires (Casteau , Neuvilles, ... : annees 2003, 2004, 2005), de classesde foret et classes de mer (Casteau, Naast, Thieusies : annees 2003,2004, 2005) et de transports scolaires (annee 2004) ».

Parmi les avantages sociaux repris dans l'enumeration de la cour d'appel,deux categories se distinguent :

- d'une part, les avantages sociaux figurant dans la liste exhaustive dudecret de 2001 et non accordes aux defenderesses ;

- d'autre part, les avantages qualifies par la cour d'appel d'avantagessociaux accordes par la demanderesse aux ecoles de son reseau mais nonaccordes aux defenderesses alors qu'ils ne figurent pas sur la listeexhaustive des seuls avantages sociaux pouvant etre accordes suivant ledecret du 7 juin 2001.

Parmi cette deuxieme categorie de pretendus avantages sociaux, sont viseespar l'arret, les garderies, etudes et surveillance de midi depassant lesdurees prevues par le decret ainsi que les « classes de depaysement »(classes de plein air, classes de foret, classes de neige et classes demer) et les frais de transports scolaires y afferents.

Apres avoir ecarte les moyens de defense de la demanderesse, qui faisaitvaloir que les « classes de depaysement » et les frais s'y rapportant nepouvaient etre classes parmi les « avantages sociaux » puisquel'organisation de ces classes faisait partie integrante de l'organisationnormale de l'enseignement, l'arret decide qu'il y a lieu « d'interdire à[la demanderesse] d'intervenir financierement dans ces avantages souspeine d'une astreinte qu'il convient de fixer raisonnablement au montantde 1.000 euros par mois ».

L'arret estime en effet que ces « classes de depaysement », bienqu'organisees durant les periodes scolaires et contribuant à ladecouverte d'un environnement culturel, geographique et historique supposepeu connu de la plupart des enfants qui y participent, constituent desavantages sociaux, bien que non repris dans la liste du decret, en raisondu fait que « l'aspect economique et financier du sejour est preponderantpour les familles et est susceptible d'orienter le choix de celles-ci »et que, pour cette unique raison, l'organisation de ces classes ne faitpas partie integrante de l'organisation normale de l'enseignement.

Or, le seul critere socio-economique auquel se refere l'arret n'estnullement pertinent à cet egard.

Pour conclure qu'un avantage constitue un avantage social, il convient eneffet uniquement de determiner si cet avantage s'inscrit dans un choixpedagogique specifique qui, s'il est susceptible de seduire les parentsd'eleves, incitera les parents à choisir ce type d'enseignement, un telchoix etant etranger à des considerations socio-economiques.

Il en resulte que l'arret n'a pu legalement decider que les « classes dedepaysement » organisees par la demanderesse constituent un avantagesocial parce que « l'aspect economique et financier du sejour estpreponderant pour les familles et est susceptible d'orienter le choix decelles-ci », que ce soit

- au sens de l'article 33 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certainesdispositions de la legislation de l'enseignement, tant dans sa versionanterieure à sa modification par le decret du 7 juin 2001 que dans saversion applicable depuis lors, qui impose un traitement egalitaireuniquement en cas d'octroi d'avantages sociaux, c'est-à-dire en casd'octroi d'avantages ne s'inscrivant pas dans l'organisation normale del'enseignement ;

- au sens de l'article 2 du decret de la Communaute franc,aise du 7 juin2001 sur les avantages sociaux, qui ne reprend pas dans son enumerationexhaustive les « classes de depaysement ».

En decidant qu'il y a lieu « d'interdire à [la demanderesse]d'intervenir financierement dans ces avantages sous peine d'une astreintequ'il convient de fixer raisonnablement au montant de 1.000 euros parmois », parce qu'il s'agirait d'avantages sociaux ne figurant pas dans laliste exhaustive du decret du 7 juin 2001, l'arret viole l'ensemble desdispositions visees au moyen, et plus specialement l'article 33 de la loidu 29 mai 1959 vise au moyen, ainsi que les articles 2, 3 et 8 du decretde la Communaute franc,aise du 7 juin 2001.

III. La decision de la Cour

Le pourvoi inscrit sous le numero C.11.0782.F est dirige contre les arretsrendus les 12 fevrier 2010 et 10 janvier 2011 par la cour d'appel de Monset le pourvoi inscrit sous le numero C.12.0087.F est dirige contre l'arretrendu le 10 janvier 2011. Il y a lieu de les joindre.

Sur le pourvoi inscrit au role general sous le numero C.11.0782.F :

Sur la fin de non-recevoir opposee au pourvoi par la defenderesse en tantqu'il est dirige contre l'arret rendu le 10 janvier 2011 :

Le moyen ne critique pas l'arret du 10 janvier 2011.

La fin de non-recevoir est fondee.

Sur le surplus du pourvoi :

Sur le moyen :

En vertu de l'article 33, alinea 1er, de la loi du 29 mai 1959 modifiantcertaines dispositions de la legislation de l'enseignement, dans saversion applicable jusqu'au 31 aout 2001, sans prejudice des dispositionsderogatoires prevues par cette loi, l'intervention financiere des communesau profit de l'enseignement libre est limitee à la tutelle sanitaire etaux avantages sociaux accordes aux eleves, et les communes ne peuventfaire aucune distinction entre les enfants, quelles que soient les ecolesqu'ils frequentent.

Telle qu'elle a ete modifiee par le decret de la Communaute franc,aise du7 juin 2001 sur les avantages sociaux et qu'elle est applicable à partirdu

1er septembre 2001, cette disposition precise que les avantages sociauxqu'elle vise sont ceux qui sont prevus par ce decret.

Aux termes de l'article 3, alinea 1er, du decret de la Communautefranc,aise du 7 juin 2001, les communes qui accordent des avantagessociaux au benefice des eleves frequentant les ecoles qu'elles organisentaccordent dans des conditions similaires les memes avantages au beneficedes eleves frequentant des ecoles de meme categorie situees dans la memecommune et relevant de l'enseignement libre subventionne par la Communautefranc,aise, pour autant que le pouvoir organisateur de ces ecoles en fassela demande ecrite.

Suivant l'article 4, alinea 1er, les communes qui octroient des avantagessociaux au benefice des eleves frequentant les ecoles qu'elles organisentcommuniquent la liste de ces avantages aux pouvoirs organisateursconcernes de l'enseignement libre subventionne par la Communautefranc,aise de la meme categorie dans le mois qui suit celui ou la decisiond'octroi est prise.

Il suit de ces dispositions que la decision prise par une communed'octroyer un avantage social au benefice des eleves frequentant une ecolequ'elle organise ouvre au profit du pouvoir organisateur d'une ecole dememe categorie situee dans la meme commune et relevant de l'enseignementlibre subventionne par la Communaute franc,aise le droit d'obtenir decette commune le meme avantage au benefice des eleves frequentant cetteecole.

L'arret attaque du 12 fevrier 2010 constate que, « par citation du 3 aout2006, les demanderesses [...] ont sollicite du premier juge qu'il constateque [la defenderesse] accorde aux eleves de l'enseignement communalqu'elle organise une serie d'avantages sociaux et qu'[elle] ne leuraccorde pas ces avantages sociaux pour les enfants frequentant les ecolesqu'elles organisent, qu'il condamne [la defenderesse] à leur servir pourles eleves qui frequentent les ecoles qu'elles organisent les avantagessociaux dont question et ce, aux memes conditions que celles auxquellesles avantages sociaux sont consentis aux enfants frequentantl'enseignement communal, et qu'il condamne [la defenderesse] à leur payerune somme provisionnelle de 100.000 euros pour couvrir les charges dupasse, l'indemnite definitive etant fixee en prosecution de cause ».

L'arret, qui, pour decider que « l'article 2262bis du Code civil est[...] d'application, lequel prevoit une prescription de cinq ans »,considere que « [les demanderesses] ne justifient pas leur qualite decreancieres dans la mesure ou elles admettent qu'elles n'ont paspersonnellement finance les services dont elles reclament le cout, que cesoit directement ou par le biais d'un emprunt, qu'elles ne soutiennent pasnon plus qu'elles auraient pris un engagement vis-à-vis des parents quiauraient selon leurs affirmations du suppleer à la carence de [ladefenderesse] » et que, « par contre, elles peuvent pretendre à lareparation de leur prejudice, dans l'hypothese ou serait demontree unefaute de la commune, laquelle consisterait dans l'octroi, au mepris de sesobligations legales, d'avantages sociaux aux seuls enfants de sonreseau », viole les dispositions visees au moyen.

Le moyen est fonde.

Sur l'etendue de la cassation :

La cassation de l'arret attaque du 12 fevrier 2010 en tant qu'il statuesur la prescription entraine l'annulation de l'arret du 10 janvier 2011 entant qu'il condamne la ville de Soignies à payer aux demanderesses desdommages et interets, qui en est la suite.

Sur le pourvoi inscrit au role general sous le numero C.12.0087.F :

Au sens de l'article 33 de la loi du 29 mai 1959, applicable avant le

1er septembre 2001, date d'entree en vigueur du decret de la Communautefranc,aise du 7 juin 2001, les avantages sociaux sont des avantages àcaractere social accordes aux enfants, qui ne s'inscrivent pas dansl'organisation normale de l'enseignement.

Le decret du 7 juin 2001 etablit la liste exhaustive des avantages quiconstituent des avantages sociaux au sens de l'article 33 precite.

Sous l'empire de la loi du 29 mai 1959, l'organisation des classes dedepaysement et d'excursions scolaires ainsi que le transport s'yrapportant etaient consideres comme faisant partie de l'organisationnormale de l'enseignement, ce qui excluait que ces activites fussentqualifiees d'avantage social.

Le decret du 7 juin 2001 n'enumere pas davantage ces activites parmicelles qui constituent des avantages sociaux.

L'arret attaque considere que « constituent des avantages sociaux, en cequ'ils ne s'inscrivent pas dans l'organisation normale de l'enseignement[...], l'intervention dans les classes de depaysement et leurtransport », au motif qu'« il est exact que les classes de depaysementsont organisees durant les periodes scolaires et qu'elles contribuent àla decouverte d'un environnement culturel, geographique et historiquesuppose peu connu de la plupart des enfants qui y participent ; que, cecietant, l'aspect economique et financier du sejour est preponderant pourles familles et est susceptible d'orienter le choix de celles-ci ».

En fondant sa decision sur l'aspect economique et financier des avantagespour justifier sa decision d'interdire à la demanderesse d'intervenirfinancierement dans ceux-ci sous peine d'astreinte, l'arret substitue àla notion d'organisation normale de l'enseignement un critere qui lui estetranger et viole, partant, tant l'article 33 de la loi du 29 mai 1959 queles articles 2, 3 et 8 du decret du 7 juin 2001.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les pourvois inscrits au role general sous les numeros C.11.0782.Fet C.12.0087.F ;

Statuant sur le pourvoi inscrit au role general sous le numeroC.11.0782.F :

Casse l'arret attaque du 12 fevrier 2010 en tant qu'il statue sur laprescription ;

Annule l'arret du 10 janvier 2011 en tant qu'il condamne la defenderesseà payer des dommages et interets aux demanderesses ;

Statuant sur le pourvoi inscrit au role general sous le numeroC.12.0087.F :

Casse l'arret attaque du 10 janvier 2011 en tant qu'il fait interdictionà la demanderesse d'intervenir financierement dans des avantages qui nesont pas repris dans la liste visee à l'article 2 du decret du 7 juin2001 et qu'il statue sur les depens ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge des arretspartiellement casses et annule ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Alain Simon, Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce en audiencepublique du vingt-sept juin deux mille treize par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Thierry Werquin, avec l'assistancedu greffier Patricia

De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M. Lemal |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Simon | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

27 JUIN 2013 C.11.0782.F/27

C.12.0087.F


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.11.0782.F
Date de la décision : 27/06/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-06-27;c.11.0782.f ?
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