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25/06/2013 | BELGIQUE | N°P.13.0535.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 juin 2013, P.13.0535.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.13.0535.N

M. R.,

interne,

demandeur en cassation,

Me Peter Verpoorten, avocat au barreau de Turnhout.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi est dirige contre la decision rendue le 28 fevrier 2013 par lacommission superieure de defense sociale.

Le demandeur fait valoir deux moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

L'avocat general Marc Timperman a conclu.

II. La decision de la Cour>
La recevabilite du pourvoi

1. En vertu de l'article 19ter de la loi du 9 avril 1930 de defensesociale, un pourvoi en ca...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.13.0535.N

M. R.,

interne,

demandeur en cassation,

Me Peter Verpoorten, avocat au barreau de Turnhout.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi est dirige contre la decision rendue le 28 fevrier 2013 par lacommission superieure de defense sociale.

Le demandeur fait valoir deux moyens dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

L'avocat general Marc Timperman a conclu.

II. La decision de la Cour

La recevabilite du pourvoi

1. En vertu de l'article 19ter de la loi du 9 avril 1930 de defensesociale, un pourvoi en cassation peut etre forme contre la decision de lacommission superieure de defense sociale confirmant la decision de rejetde la demande de mise en liberte de l'interne ou declarant fondeel'opposition du procureur du Roi contre la decision de mise en liberte del'interne.

2. Il ressort de cette disposition que la decision de maintien del'internement dans un etablissement determine qui ne constitue qu'unemodalite d'execution de l'internement, n'est pas susceptible de fairel'objet d'un pourvoi en cassation.

Dans la mesure ou il est egalement dirige contre cette decision, lepourvoi est irrecevable.

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

3. Le moyen invoque la violation de l'article 5.4 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et desdroits de la defense : des lors qu'aucun greffier n'etait present àl'audience de la commission superieure mais bien un secretaire designe parle ministre de la Justice qui n'offre pas les memes garanties sur le plande l'independance qu'un greffier aupres des juridictions ordinaires,l'arret viole les droits de la defense du demandeur; en outre, lacommission superieure siege à huis clos de sorte que l'opinion publiquene peut prendre connaissance de ce qui se passe à l'audience.

Le demandeur demande à la Cour, pour autant que de besoin, de poser à laCour constitutionnelle la question prejudicielle suivante : « L'article171 du Code judiciaire et les articles 12 et 13 de la loi du 9 avril 1930de defense sociale violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution,lus en combinaison avec l'article 5.4 de la Convention de sauvegarde dedroits de l'homme et des libertes fondamentales des lors qu'ils fontsurgir une difference de traitement entre les condamnes à une peineprivative de liberte dont la situation est appreciee par les tribunaux del'application des peines et les colloques en vertu de la loi du 26 juin1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux dont lasituation est appreciee par le juge de paix, d'une part, et les maladesmentaux auteurs de delits qui ont ete internes dont la situation estappreciee par les commissions de defense sociale et la commissionsuperieure de defense sociale, d'autre part, dans la mesure ou cesarticles excluent la commission de defense sociale de la liste destribunaux disposant d'un greffe, auxquels appartiennent le tribunal depremiere instance et le juge de paix, et dans la mesure ou ils neprevoient que la presence d'un secretaire et pas d'un greffier devant lescommissions de defense sociale et la commission superieure de defensesociale?".

4. Conformement aux articles 12 et 13 de la loi du 9 avril 1930, lesecretariat des commissions de defense sociale et de la commissionsuperieure est assure par des fonctionnaires designes par le ministre dela Justice.

5. Ces fonctionnaires qui, par leur signature, conferent authenticite auxdecisions des commissions et de la commission superieure et remplissentlors des procedures devant ces instances le meme role qu'un greffierdevant les juridictions ordinaires. La circonstance qu'ils ne portent pasle titre de greffier et qu'ils sont designes par le ministre de la Justiceest sans incidence à cet egard.

Dans la mesure ou le moyen est fonde sur une premisse juridiquedifferente, il manque en droit.

6. L'article 5.4 de la Convention ne requiert pas que l'audience devant lejuge saisi d'un recours en cas de detention illegale afin qu'il statue àcourt terme sur la legalite de la detention et ordonne une liberation,soit publique.

Dans la mesure ou le moyen est fonde sur une premisse juridiquedifferente, il manque en droit.

7. Il n'y a pas lieu de poser la question prejudicielle proposee qui estfondee sur une premisse juridique erronee.

Quant à la seconde branche :

8. Le moyen invoque la violation des articles 5.4 et 6 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et desdroits de la defense : la decision de la commission superieure viole lesdroits de la defense du demandeur des lors qu'il a du se defendre sansavoir la possibilite de presenter ses moyens de defense; le conseil dudemandeur a le droit de recevoir prealablement à l'audience, lacommunication d'une copie des avis et à se faire delivrer la copie despieces du dossier.

Le demandeur demande à la Cour de poser à la Cour constitutionnelle laquestion prejudicielle suivante : « Les chapitres IV et V de la loi du 30avril 1930 de defense sociale reglant l'execution des decisionsd'internement et la mise en liberte à l'essai des internes violent-ilsles articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec lesarticles 5.4 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertes fondamentales, des lors que cette loi ne tient pas compte dela nature particuliere de la privation de liberte des malades mentaux etne prevoit pas que les avis notamment du ministere public, de la directionde l'etablissement dans lequel sejourne l'interne, du servicepsycho-social de la prison et du psychiatre doivent etre donnes par ecrità la commission de defense sociale et communiques prealablement àl'audience au conseil de l'interne et ne prevoit pas que le conseil del'interne peut demander une copie du dossier ? ».

9. L'article 6 de la Convention ne s'applique pas à la procedure devantla commission superieure de defense sociale des lors que celle-ci ne seprononce pas sur les contestations sur des droits et obligations decaractere civil ni sur le bien-fonde d'une accusation en matiere penale.

Dans la mesure ou le moyen invoque la violation de cette disposition, ilmanque en droit.

10. Il ne ressort pas des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard quele demandeur ait demande devant la commission superieure la communicationprealable d'une copie des divers avis et une copie des pieces du dossier.

Il ne peut, des lors, invoquer devant la Cour que cette circonstance violel'article 5.4 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales et ses droits de la defense.

Le moyen, à cet egard, est irrecevable.

11. Des lors que le moyen est rejete, d'une part, parce qu'il est fondesur une premisse juridique erronee, d'autre part, pour un motif qui estetranger aux dispositions qui font l'objet de la question prejudicielleproposee, il n'y a pas lieu de poser cette question.

Sur le second moyen :

Quant à la premiere branche :

12. Le moyen invoque la violation des articles 5.1 et 5.4 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, dudroit au contradictoire et de la jurisprudence constante de la Coureuropeenne des droits de l'homme : la decision attaquee n'offre pas l'aidejuridique effective requise par l'article 5.4 de la Convention ; lorsquele demandeur invoque dans ses conclusions d'appel que sa detention etaitillegale en raison des conditions de detention qui n'etaient pas adapteesà sa maladie mentale et qu'il demandait ainsi sa liberation, lacommission superieure ne pouvait decider que l'etablissement penitentiairedans lequel sejournait le demandeur etait adapte à son etat mental; ledossier ne contient, en effet, aucune piece de laquelle la commissionpouvait deduire cette constatation; les elements qui ont conduit à cesconclusions n'ont pas ete soumis à contradiction; selon la jurisprudenceconstante de la Cour europeenne des droits de l'homme, il est de notorietepublique que l'encadrement therapeutique fait defaut dans lesetablissements penitentiaires en Belgique et il ressort aussi de cettejurisprudence qu'il n'appartient pas au demandeur de prouver que sesconditions de detention sont inadaptees, mais bien à l'Etat et des lorsà la commission superieure qui ne pouvait conclure au caractere non fondede l'exception soulevee par le demandeur, que sur la base de documents depreuve concrets.

13. En vertu de l'article 608 du Code judiciaire, la Cour connait desdecisions rendues en dernier ressort qui lui sont deferees pourcontravention à la loi ou pour violation des formes, soit substantielles,soit prescrites à peine de nullite.

La jurisprudence de la Cour europeenne des droits de l'homme ne constituepas une loi au sens de l'article 608 du Code judiciaire.

Dans la mesure ou le moyen invoque la violation de cette jurisprudence, ilmanque en droit.

14. La commission superieure apprecie souverainement que l'etablissementdans lequel le demandeur est detenu est adapte à son etat mental. Elle neviole ainsi pas l'article 5.4 de la Convention et cette decision estlegalement justifiee.

Dans cette mesure le moyen ne peut etre accueilli.

15. Pour le surplus le moyen invoque formellement la violation du droit aucontradictoire, mais critique, en realite, cette appreciation souveraineet oblige la Cour à un examen des faits pour lequel elle est sanscompetence.

Dans cette mesure le moyen est irrecevable.

Quant à la deuxieme branche :

16. Le moyen invoque la violation de l'article 5.4 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et desdroits de la defense : en refusant d'ordonner une visite des lieux afind'examiner les conditions de detention du demandeur, la commissionsuperieure viole cette disposition et ce droit.

17. De la seule circonstance que la commission superieure decide qu'il n'ya pas lieu d'ordonner une visite des lieux eu egard à sa decision que ledemandeur est detenu dans des conditions adaptees à son etat mental, ilne peut se deduire une violation ni de l'article 5.4 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales ni desdroits de la defense du demandeur.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Quant à la troisieme branche :

18. Le moyen invoque la violation des articles 5 et 6 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et 149 dela Constitution ainsi que du droit au contradictoire et de l'obligation demotivation : la commission superieure n'indique en aucune maniere lesreferences qu'elle utilise pour decider que l'etablissement dans lequel ledemandeur sejourne est adapte à son etat mental.

19. L'article 6 de la Convention ne s'applique pas à la procedure devantla commission superieure. Elle ne se prononce, en effet, pas sur lacontestation de droits et obligations de caractere civil ou sur lebien-fonde d'une accusation en matiere penale.

Dans la mesure ou le moyen invoque la violation de cette disposition, ilmanque en droit.

20. Dans ses conclusions d'appel le demandeur a invoque quel'etablissement dans lequel il est detenu n'est pas adapte à son etatmental. Il s'est certes refere aux considerations generales sur lasituation dans les prisons belges formulees par certains arrets de la Coureuropeenne des droits de l'homme mais il n'a pas precise concretement enquoi c'etait le cas en l'espece. La commission superieure pouvait, deslors, decider legalement que, contrairement à ce qu'invoque le demandeur,l'etablissement est adapte à son etat mental sans devoir preciser cettedecision, à defaut de conclusions en ce sens. Elle ne viole, des lors, nil'article 5 de la Convention ni son obligation de motivation ni le droitau contradictoire.

Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.

Le controle d'office

21. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Maffei, les conseillers Luc Vanhoogenbemt, Filip Van Volsem, Antoine Lievens et Erwin Francis, etprononce en audience publique du vingt-cinq juin deux mille treize par lepresident de section Paul Maffei, en presence de l'avocat general MarcTimperman, avec l'assistance du greffier Frank Adriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,

25 juin 2013 P.13.0535.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.13.0535.N
Date de la décision : 25/06/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-06-25;p.13.0535.n ?
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