Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG P.13.0780.N
B. L.,
personne faisant l'objet d'un mandat d'arret europeen,
* demandeur,
Me Freddy Mols, avocat au barreau de Turnhout.
I. la procedure devant la Cour
II. Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 25 avril 2013 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.
III. Le demandeur fait valoir cinq moyens dans un memoire annexe aupresent arret, en copie certifiee conforme.
IV. L'avocat general suppleant Marc De Swaef a depose des conclusionsrec,ues au greffe le 7 mai 2013.
V. Ensuite de l'ordonnance du 8 mai 2013 du premier president EtienneGoethals, la Cour s'est reunie en chambre pleniere.
VI. A l'audience du 28 mai 2013, le conseiller Antoine Lievens a faitrapport et l'avocat general suppleant Marc De Swaef a conclu.
II. la decision de la Cour
Sur la recevabilite du pourvoi :
1. Confirmant le jugement dont appel, l'arret decide de refuserl'execution du mandat d'arret europeen en ce qui concerne la prevention A.
Dans la mesure ou il est egalement dirige contre cette decision, lepourvoi est irrecevable à defaut d'interet.
Sur le premier moyen :
2. Le moyen invoque la violation des articles 4.3DEG de la loi du 19decembre 2003 relative au mandat d'arret europeen et 57bis de la loi du 8avril 1965 relative à la protection de la jeunesse, à la prise en chargedes mineurs ayant commis un fait qualifie infraction et à la reparationdu dommage cause par ce fait : l'arret n'applique pas la cause de refus del'article 4.3DEG de la loi du 19 decembre 2003, alors que le demandeuretait mineur au moment des faits et qu'il n'y a pas de decision ou dedemande de remise ; la possibilite de remise en vertu du droit belge nefait pas obstacle à la cause de refus fondee sur la minorite de l'auteur.
3. En vertu de l'article 4.3DEG de la loi du 19 decembre 2003, l'executiond'un mandat d'arret europeen est refusee si la personne qui fait l'objetdu mandat d'arret europeen ne peut encore etre, en vertu du droit belge,tenue penalement responsable des faits vises dans la demanded'extradition.
En vertu de l'article 57bis, S: 1er, premiere phrase, de la loi du 8 avril1965, si la personne deferee au tribunal de la jeunesse en raison d'unfait qualifie infraction etait agee de seize ans ou plus au moment de cefait et que le tribunal de la jeunesse estime inadequate une mesure degarde, de preservation ou d'education, il peut, par decision motivee, sedessaisir et renvoyer l'affaire au ministere public aux fins de poursuitedevant soit une chambre specifique au sein du tribunal de la jeunesse quiapplique le droit penal commun et la procedure penale commune, soit unecour d'assises.
En vertu de l'article 57bis, S: 1er, deuxieme phrase, de la loi du 8 avril1965, le tribunal de la jeunesse ne peut toutefois se dessaisir que si, enoutre, il s'agit d'un fait vise aux articles 373, 375, 393 à 397, 400,401, 417ter, 417quater, 471 à 475 du Code penal ou de la tentative decommettre un fait vise aux articles 393 à 397 du Code penal.
4. Le principe de la reconnaissance mutuelle et l'execution de tout mandatd'arret europeen, que prevoit l'article 1.2 de la decision-cadre du 13juin 2002 du Conseil relative au mandat d'arret europeen et aux proceduresde remise entre Etats membres, implique que le juge belge appele à seprononcer sur l'execution d'un mandat d'arret europeen, est sans pouvoirpour se prononcer sur l'action publique.
Outre une appreciation de la responsabilite penale, cela exclut egalementtoute appreciation prealable du caractere adequat d'une mesure de garde,de preservation ou d'education quant à la decision de prendre ou non unedecision de dessaisissement à l'egard du mineur, sur la base de l'article57bis de la loi du 8 avril 1965.
5. Il resulte de ces dispositions, d'une part, que la remise de lapersonne agee de seize ans ou plus au moment de faits qualifies tentativede meurtre, n'est pas subordonnee à une decision de dessaisissement,d'autre part, que cette personne peut etre tenue penalement responsable ausens de l'article 4.3DEG de la loi du 19 decembre 2003.
Le moyen manque en droit.
Sur le deuxieme moyen :
6. Le moyen invoque la violation de l'article 13 de la Constitution, lu encombinaison avec les articles 10, 11 et 12 de la Constitution et avecl'article 40, 2, b (iii) et 4, de la Convention relative au Droits del'Enfant, signee à New-York le 20 novembre 1989, avec l'article 7, S:1er, de la loi du 17 avril 1878 contenant le Titre preliminaire du Code deprocedure penale, et avec l'article 4.3DEG de la loi du 19 decembre 2003relative au mandat d'arret europeen : l'arret admet, à tort, que lesfaits commis par le demandeur ressortissent à la juridictionneerlandaise, alors que la cause de refus obligatoire doit etre apprecieeselon la loi belge, de sorte qu'il y a lieu de constater qu'en vertu del'article 44 de la loi du 8 avril 1965, qui se fonde sur une competenceterritoriale du lieu de residence du mineur et non du lieu des faits, lejuge de la jeunesse belge est competent.
Le moyen demande que soit posee à la Cour constitutionnelle la questionprejudicielle suivante :
« L'article 4.3DEG de la loi belge du 19 decembre 2003 relative au mandatd'arret europeen, interprete en ce sens que les juridictions d'instructionne peuvent refuser d'executer un mandat d'arret europeen emis à l'egardd'un mineur si, selon la loi belge, un dessaisissement etait theoriquementpossible pour les faits, de sorte que meme pour les mineurs belgesl'application du droit belge de protection de la jeunesse materiel etformel est exclu par une decision des juridictions d'instruction penale,sans decision du tribunal de la jeunesse, viole-t-il l'article 13 de laConstitution, lu en combinaison avec les articles 10, 11 et 12 de laConstitution et avec l'article 40, 2, (iii), et 4, de la Conventionrelative au Droits de l'Enfant, signee à New-York le 20 novembre1989 ? »
7. Le moyen est integralement deduit de l'illegalite vainement invoqueedans le premier moyen.
Le moyen est irrecevable.
8. La Cour est tenue de statuer en urgence sur l'execution du mandatd'arret europeen afin de permettre aux autorites judiciaires de l'Etatd'emission de se prononcer en la cause dans un delai raisonnable. Poserune question prejudicielle est incompatible avec cette conditiond'urgence. Le fait que le demandeur a entre-temps ete remis en libertesous conditions n'y fait pas obstacle.
La Cour ne pose pas la question prejudicielle soulevee.
Sur le troisieme moyen :
9. Le moyen invoque la violation des articles 44 de la loi du 8 avril 1965relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge desmineurs ayant commis un fait qualifie infraction et à la reparation dudommage cause par ce fait, 7, S: 1er, de la loi du 17 avril 1878 contenantle Titre preliminaire du Code de procedure penale et 6.1DEG de la loi du19 decembre 2003 relative au mandat d'arret europeen : l'arret decide, àtort, que le juge de la jeunesse belge n'est pas competent et ne tient pascompte de la requete adressee au tribunal de la jeunesse par le ministerepublic en application des articles 36, 4DEG, et 45 de la loi du 8 avril1965.
10. Contrairement à l'allegation du moyen, les juges d'appel ont constatel'absence de poursuites penales engagees jusqu'à present à l'encontre dudemandeur du chef de faits faisant l'objet d'une demande d'extradition, desorte qu'il n'est pas question de cause d'extradition facultative.
Le moyen manque en fait.
Sur le quatrieme moyen :
11. Le moyen invoque la violation de l'article 4.5DEG de la loi du 19decembre 2003 relative au mandat d'arret europeen : l'arret ne refute paslegalement par sa seule negation la defense selon laquelle la magistratureneerlandaise aurait la volonte de rencontrer l'opinion publiqueneerlandaise et prononcerait une peine lourde disproportionnee.
12. En vertu de l'article 4.5DEG de la loi du 19 decembre 2003,l'execution d'un mandat d'arret europeen est refusee s'il y a des raisonsserieuses de croire que son execution aurait pour effet de porter atteinteaux droits fondamentaux de la personne concernee, tels qu'ils sontconsacres par l'article 6 du Traite sur l'Union europeenne.
13. Le juge apprecie en fait, des lors souverainement, s'il existe desraisons serieuses de croire que l'execution du mandat d'arret europeenaurait pour effet de porter atteinte aux droits fondamentaux de lapersonne concernee, tels qu'ils sont consacres par l'article 6 du traitesur l'Union europeenne.
14. Le moyen critique cette appreciation souveraine par l'arret quirejette de maniere motivee l'allegation du demandeur.
Le moyen est irrecevable.
Sur le cinquieme moyen :
15. Le moyen invoque la violation des articles 127, 131, 135, 223, 235bis,606 du Code d'instruction criminelle et 57bis de la loi du 8 avril 1965relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge desmineurs ayant commis un fait qualifie infraction et à la reparation dudommage cause par ce fait, ainsi que la violation des principes generauxdu droit relatif au respect des droits de la defense et ducontradictoire : l'arret ne repond pas à la violation invoquee par ledemandeur des articles 606 du Code d'instruction criminelle et 57bis de laloi du 8 avril 1965.
16. Les articles 127, 131, 135, 223 et 235bis du Code d'instructioncriminelle ne sont pas applicables aux juridictions d'instruction appeleesà se prononcer sur un mandat d'arret europeen.
Dans la mesure ou il invoque la violation de ces dispositions legales, lemoyen manque en droit.
17. L'arret (...) decide : « La privation de liberte est survenue enexecution d'un mandat d'arret europeen sur la base d'un signalementconformement aux articles 9 et 10 de la loi du 19 decembre 2003 et àl'article 2 de la loi du 20 juillet 1990 relative à la detentionpreventive
La loi n'exclut pas l'arrestation d'un mineur dans le cadre de laprocedure susmentionnee, de sorte que la procedure d'extradition n'est, enl'occurrence, nullement fondee sur une infraction.
Le dessaisissement prononce sur la base de l'article 57bis de la loi du 8avril 1965 concerne la poursuite de mineurs par les tribunaux belges etnon la procedure d'extradition.
Ainsi, la procedure est recevable. »
Par ces motifs, l'arret repond à la defense du demandeur enoncee dans lemoyen.
Dans cette mesure, le moyen manque en fait.
Le controle d'office
18. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.
Par ces motifs,
* * La Cour
* * Rejette le pourvoi ;
* Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le premier president Etienne Goethals, le president de sectionchevalier Jean de Codt, le president de section Paul Maffei, lesconseillers Luc Van hoogenbemt, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis, GustaveSteffens et Antoine Lievens, et prononce en audience publique du onze juindeux mille douze par le premier president Etienne Goethals, en presence del'avocat general suppleant Marc De Swaef, avec l'assistance du greffierFrank Adriaensen.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Michel Lemal ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
Le greffier, Le conseiller,
11 juin 2013 P.13.0780.N/1