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27/05/2013 | BELGIQUE | N°S.12.0063.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 mai 2013, S.12.0063.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

817



NDEG S.12.0063.F

A. C.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

1. G. B.,

2. COFIDIS, societe anonyme dont le siege social est etabli à Tournai,rue du Glategnies, 4,

3. BELGACOM, societe anonyme de droit public dont le siege social estetabli à Schaerbeek, boulevard du Roi Albert II, 27,

4. FIDUCIAIRE

DU credit, dont la denomination commerciale est fiducre, societe anonyme dont le siege social est etabli à Evere, avenue ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

817

NDEG S.12.0063.F

A. C.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

1. G. B.,

2. COFIDIS, societe anonyme dont le siege social est etabli à Tournai,rue du Glategnies, 4,

3. BELGACOM, societe anonyme de droit public dont le siege social estetabli à Schaerbeek, boulevard du Roi Albert II, 27,

4. FIDUCIAIRE DU credit, dont la denomination commerciale est fiducre, societe anonyme dont le siege social est etabli à Evere, avenue HenriMatisse, 16,

5. CLINIQUES UNIVERSITAIRES DE MONT-GODINNE reseau extra hospistalier, association sans but lucratif dont le siege est etabli à Yvoir(Mont-Godinne), avenue du Docteur Gaston Therasse, 1,

6. ASSOCIATION INTERCOMMUNALE hospitaliere du sud hainaut et du sudnamurois, dont la denomination commerciale est CENTRE DE SANTe DE FAGNES,societe civile ayant adopte la forme de la societe cooperative àresponsabilite limitee, dont le siege social est etabli à Chimay,boulevard Louise, 18,

7. EURO AUTO DUVAL, societe anonyme dont le siege social est etabli àCouvin (Cul-des-Sarts), rue de la Ramee, 29,

8. VILLE DE CHIMAY, representee par le college communal, dont les bureauxsont etablis à Chimay, en l'hotel de ville, Grand'Place, 13,

defendeurs en cassation,

9. Alain wery, avocat, agissant en qualite de mediateur de dettes, dontle cabinet est etabli à Charleroi, rue emile Tumelaire, 43,

defendeur en cassation ou, à tout le moins, partie appelee en declarationd'arret commun.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 21 fevrier 2012par la cour du travail de Mons.

Le 8 avril 2013, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le president Christian Storck a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 23 et 149 de la Constitution ;

- articles 1675/2, 1675/3, 1675/7, S: 3, 1675/10, S: 4, 1675/12, telqu'il etait en vigueur avant sa modification par la loi du 26 mars 2012,et 1675/13, specialement S:S: 3 et 6, du Code judiciaire.

Decision et motifs critiques

Apres avoir rappele que 1. le premier defendeur, ex-epoux de lademanderesse, « a ete admis au benefice de la procedure en reglementcollectif de dettes par ordonnance du tribunal du travail de Charleroi du12 novembre 2009 » ; 2. le 15 decembre 2009, la demanderesse « introduitune declaration de creance jusqu'à concurrence de 700 euros representantdes pensions alimentaires dues pour la periode du 1er mars au 27 septembre2008 » ; 3. « ensuite d'un arret de la cour d'appel de Mons du 12juillet 2010, cette creance fut portee à 1.400 euros, etant le secoursalimentaire pour la meme periode » ; 4. cette creance a ete incluse dansle plan de reglement judiciaire enterine par le jugement du tribunal dutravail de Charleroi du 20 octobre 2011, et apres avoir constate que,dans le cadre de son appel contre ce jugement, la demanderesse « faitgrief au premier juge d'avoir integre sa creance dans le plan de reglementjudiciaire alors que, selon elle, il s'agit d'une creance prioritaire ausens des articles 1675/10, S: 4, et 1675/12, S: 5, du Code judicaire :l'interpretation de ces articles ne peut se limiter à la seule creancequi mettrait en peril le respect de la dignite humaine du medie et de safamille proche. En tout etat de cause, des lors que le non-paiement d'unedette alimentaire est susceptible de poursuites penales, le non-paiementd'une telle dette met en peril la dignite du medie lui-meme »,

l'arret « declare la requete d'appel recevable [et], avant dire droitquant à son fondement, ordonne d'office une reouverture des debats auxfins de permettre à [la demanderesse] de verser aux debats les decisionsdeterminant le secours alimentaire (premiere instance et appel) et des'expliquer quant au sort de sa creance au regard [notamment du principeselon lequel] ` les pensions alimentaires echues avant la decisiond'admissibilite [peuvent] faire l'objet d'une remise de dettes' ».

L'arret fonde sa decision sur les motifs suivants :

« La question soumise à la cour [du travail] est de determiner si lacreance alimentaire de [la demanderesse] est une creance prioritaire ;

Aux termes de ses ecrits de procedure, [la demanderesse] fonde sa positionsur les articles 1675/10, S: 4, et 1675/12, S: 5, du Code judiciaire ;

L'article 1675/10, S: 4, du Code judiciaire s'inscrit dans le cadre d'unplan amiable, tandis que l'article 1675/12, S: 5, s'inscrit dans le cadred'un plan de reglement judiciaire sans remise de dettes en capital ;

Or, en l'espece, le plan de reglement judiciaire impose par le tribunalest un plan avec remise partielle de dettes en capital ; un tel plan estregi par l'article 1675/13 du Code judiciaire ;

L'article 1675/13, S: 6, du Code judiciaire dispose que, `lorsqu'iletablit le plan, le juge doit veiller au remboursement prioritaire desdettes qui mettent en peril le respect de la dignite humaine du requerantet de sa famille' ;

Ce texte a ete introduit par la loi du 13 decembre 2005 à la faveur d'unamendement tendant `à concretiser la prescription de l'article 23 de laConstitution mais egalement l'esprit de la loi relative au reglementcollectif de dettes dont l'objectif est le retablissement de la situationfinanciere du debiteur' ;

Peut-on en deduire, comme le font certains auteurs, que ce texte introduitune nouvelle cause de preference pour certaines creances, telles que lescreances de loyers, les creances des fournisseurs d'energie, ... et que,par consequent, il accorde un privilege à [la demanderesse] ?

Selon la cour [du travail], la reponse est negative ;

En effet, comme le releve Denis Patart, dans de telles hypotheses, cen'est pas la dette qui, en soi, compromet la dignite du debiteur, maisbien le comportement du creancier impaye ; ainsi, accorder un privilege àces creances en arguant du respect de la dignite du debiteur et de safamille reviendrait finalement à accorder aux creanciers les pluspugnaces ou disposant de moyens de pression (expulsion, coupuresd'energie) une prime, au detriment de ceux qui seraient plus conciliantsou depourvus de moyens de pression ;

Il en est d'autant plus ainsi que plusieurs dispositions relatives aureglement collectif de dettes reglent expressement le sort à reserver auxcreances alimentaires ;

Ainsi, l'article 1675/7, S: 3, du Code judiciaire dispose que la decisiond'admissibilite entraine l'interdiction pour le requerant, saufautorisation du juge, d'accomplir tout acte susceptible de favoriser uncreancier, sauf le paiement d'une dette alimentaire mais à l'exceptiondes arrieres de celle-ci ;

En realite, pour les dettes alimentaires, la loi prive le debiteur et lemediateur de toute possibilite de choix : le legislateur interdit de faireentrer dans la masse les aliments dus pour la periode posterieure àl'ordonnance d'admissibilite ;

L'execution des obligations pour le futur est ici rendue obligatoire auterme d'une balance des interets en presence ou le legislateur fait passerle creancier d'aliments avant la protection du debiteur surendette ;

Il s'en deduit que le creancier alimentaire est un creancier dans la massepour les arrieres echus avant la decision d'admissibilite et un creancierhors masse pour les aliments dus à partir de cette date ;

Cela signifie que les pensions alimentaires echues avant la decisiond'admissibilite ne pourront etre payees que dans le cadre d'un plan dereglement amiable ou judiciaire ; elles ne beneficient d'aucun privilege ;

Par ailleurs, l'article 1675/13, S: 3, du Code judiciaire prevoit que lejuge ne peut accorder de remise pour les dettes alimentaires non echues aujour de la decision arretant le plan de reglement judiciaire ;

Ce texte, lu conjointement avec l'article 1675/7, S: 3, du Codejudiciaire, laisse planer une certaine ambiguite concernant les dettesalimentaires nees durant la periode comprise entre la decisiond'admissibilite et le jour de la decision arretant le plan de reglementjudiciaire. En effet, si, aux termes de l'article 1675/13, S: 3, uneremise de dettes est possible, elle serait contraire au texte de l'article1675/7, S: 3, qui prevoit le paiement des pensions alimentaires venant àecheance à compter de la decision d'admissibilite ;

Dans cette hypothese, la doctrine considere assez generalement que lessommes dues au titre d'aliments doivent etre integrees dans les chargescourantes (les dettes hors masse) et que le plan ne portera que sur lesarrieres impayes à la date du jugement d'admissibilite. La cour [dutravail] se rallie à cette position ;

En conclusion, la cour [du travail] estime que :

- les pensions alimentaires echues avant la decision d'admissibilitepouvaient faire l'objet d'une remise de dettes ;

- les pensions alimentaires echues entre la decision d'admissibilite et ladecision arretant le plan ne peuvent pas faire l'objet d'une remise dedettes et donc etre integrees dans le plan de reglement judiciaire imposepar le premier juge ;

Or, en l'espece, il semblerait qu'au moment de la decisiond'admissibilite, les arrieres de pensions alimentaires n'atteignaient que700 euros (voir declaration de creance) ; ce ne serait qu'à la faveur del'arret de la cour d'appel du 12 juillet 2010 que, pour la meme periode,le secours alimentaire aurait ete majore pour etre porte à 1.400 euros ;

En l'absence de precision à cet egard, une reouverture des debatss'impose pour permettre à la [demanderesse] de verser aux debats lesdecisions determinant le secours alimentaire (premiere instance et appel)et de s'expliquer quant au sort de sa creance au regard des principesci-avant etablis ».

Griefs

L'article 23 de la Constitution dispose :

« Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignite humaine.

à cette fin, la loi, le decret ou la regle vises à l'article 134garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droitseconomiques, sociaux et culturels, et determinent les conditions de leurexercice.

Ces droits comprennent notamment :

1DEG le droit au travail ;

2DEG le droit à la securite sociale, à la protection de la sante et àl'aide sociale, medicale et juridique ;

3DEG le droit à un logement decent ;

4DEG le droit à la protection d'un environnement sain ;

5DEG le droit à l'epanouissement culturel et social ».

Selon l'article 1675/2 du Code judiciaire, toute personne physique qui n'apas la qualite de commerc,ant peut, si elle n'est pas en etat, de manieredurable, de payer ses dettes exigibles ou encore à echoir et dans lamesure ou elle n'a pas manifestement organise son insolvabilite,introduire devant le juge une requete visant à obtenir un reglementcollectif de dettes.

Selon l'article 1675/3 du meme code, « le debiteur propose à sescreanciers de conclure un plan de reglement amiable par la voie d'unreglement collectif de dettes, sous le controle du juge.

Si aucun accord n'est atteint quant à ce plan de reglement amiable, lejuge peut imposer un plan de reglement judiciaire.

Le plan de reglement a pour objet de retablir la situation financiere dudebiteur, en lui permettant notamment dans la mesure du possible de payerses dettes et en lui garantissant simultanement ainsi qu'à sa famillequ'ils pourront mener une vie conforme à la dignite humaine ».

Il appartient au juge saisi de statuer sur l'admissibilite de la demandede reglement collectif de dettes (Code judiciaire, article 1675/6).

En vertu de l'article 1675/7, S: 1er, du Code judiciaire, la decisiond'admissibilite fait naitre une situation de concours entre les creancierset a pour consequence la suspension du cours des interets etl'indisponibilite du patrimoine du requerant.

Selon l'article 1675/7, S: 3, « la decision d'admissibilite entrainel'interdiction pour le requerant, sauf autorisation du juge : -d'accomplir tout acte etranger à la gestion normale du patrimoine ; -d'accomplir tout acte susceptible de favoriser un creancier, sauf lepaiement d'une dette alimentaire mais à l'exception des arrieres decelle-ci ; - d'aggraver son insolvabilite ».

La decision d'admissibilite produit pour le surplus des effets differentsselon que le debiteur et ses creanciers parviennent à un reglementamiable (Code judiciaire, article 1675/10) ou que le juge impose unreglement judiciaire, lequel peut, selon les cas, se limiter à un reportou à un reechelonnement des dettes en principal, à la reduction des tauxd'interet conventionnels et à une remise totale ou partielle des interetsmoratoires, indemnites et frais (Code judiciaire, article 1675/12) ouimpliquer remise partielle de dettes, meme en capital (article 1675/13).

En vertu de l'article 1675/13, S: 1er, le choix du juge entre les deuxcategories de reglement judiciaire (reglement avec ou sans remise dedettes en capital) est determine par la possibilite d'atteindre lesobjectifs prevus par l'article 1675/3, alinea 3, c'est-à-dire notammentl'objectif de garantir au debiteur « ainsi qu'à sa famille qu'ilspourront mener une vie conforme à la dignite humaine ».

Quel que soit le cas de figure, la loi impose, soit au mediateur, soit aujuge, de veiller « au remboursement prioritaire des dettes qui mettent enperil le respect de la dignite humaine du requerant et de sa famille »(Code judiciaire, article 1675/10, S: 4, en cas de reglement amiable,article 1675/12, S: 5, en cas de reglement judiciaire sans remise dedettes en capital, article 1675/13, S: 6, en cas de reglement judiciaireavec remise de dettes en capital).

En cas de reglement judiciaire avec remise de dettes en capital, l'article1675/13, S: 3, du Code judiciaire interdit au juge d'accorder une remisepour les dettes alimentaires non echues au jour de la decision arretant leplan de reglement judiciaire (l'arret assimile à ces dettes d'alimentscelles qui sont echues entre la decision d'admissibilite et la decisionarretant le plan de reglement judiciaire).

Premiere branche

Il resulte de l'ensemble des dispositions precitees du Code judiciaire,lues à la lumiere de l'article 23 de la Constitution, que la loi soumetà un regime specifique, derogatoire à celui des autres dettes dudebiteur, toutes les dettes alimentaires, qu'elles soient echues avant ouapres la decision d'admissibilite, une protection plus absolue etantcependant accordee aux dettes alimentaires non echues au jour de ladecision d'admissibilite :

- les dettes echues apres la decision d'admissibilite peuvent continuer àetre apurees volontairement par le debiteur en vertu de l'article 1675/7, S: 3 ;

- les memes dettes ou, à tout le moins, celles qui sont « non echues aujour de la decision arretant le reglement judiciaire » ne peuvent fairel'objet d'une remise forcee (Code judiciaire, article 1675/13, S: 3) ;

- les arrieres de dettes alimentaires dejà echues au jour de la decisiond'admissibilite ne peuvent etre payees volontairement par le debiteur maisil appartient selon le cas au mediateur (dans le cadre d'un reglementamiable) ou au juge (dans le cadre d'un reglement judiciaire avec ou sansremise de dettes en capital) de veiller à leur « remboursementprioritaire ».

De tels arrieres de dettes alimentaires appartiennent en effetincontestablement à la categorie de dettes qui mettent en peril lerespect de la dignite humaine de la famille du requerant.

Le fait que les arrieres de dettes alimentaires echues au jour du jugementd'admissibilite appartiennent à la categorie des dettes qui mettent enperil le respect de la dignite humaine de la famille du requerant impliqueque de telles dettes ne peuvent faire l'objet d'une remise de dettes encapital ou, à tout le moins, qu'une remise ne peut etre decidee, àl'egard de ces arrieres de pension alimentaire, que si la remise totaledes autres dettes du debiteur ne suffit pas pour atteindre l'objectif visepar l'article 1675/3, alinea 3, du Code judiciaire, c'est-à-dire si laremise totale des autres dettes ne suffit pas à « retablir lasituation financiere du debiteur, [...] en lui garantissant simultanement,ainsi qu'à sa famille, qu'ils pourront mener une vie conforme à ladignite humaine ».

En conclusion, l'arret n'a pu legalement refuser d'ordonner leremboursement prioritaire de celles des dettes alimentaires dues à lademanderesse par son ex-epoux qui etaient dejà echues avant le jugementd'admissibilite du reglement collectif de dettes et n'a pu legalementdecider que de telles dettes peuvent faire l'objet d'une remise de dettesdans le cadre du reglement judiciaire regi par l'article 1675/13 du Codejudiciaire. Par ces decisions, l'arret viole l'article 1675/7, S: 3, duCode judiciaire, qui interdit uniquement au requerant de payervolontairement des arrieres de dette alimentaire mais n'interdit pas aujuge d'ordonner le remboursement prioritaire de tels arrieres. L'arretviole en outre l'article 1675/13, S: 3, du Code judiciaire, lequel, eninterdisant au juge, de fac,on dirimante, d'accorder la remise des dettesalimentaires non echues au jour de la decision arretant le plan dereglement judiciaire, ne lui interdit pas d'ordonner le remboursementprioritaire des dettes alimentaires dejà echues au jour de la decisionarretant le plan de reglement judiciaire ou meme au jour de la decisiond'admissibilite. L'arret viole en outre l'article 1675/13, S: 6, du Codejudiciaire, lequel, compris à la lumiere de l'article 23 de laConstitution et des autres dispositions citees du Code judiciaire, imposeau juge, dans le cadre d'un reglement judiciaire avec remise de dettes encapital, de veiller au reglement prioritaire des dettes qui mettent enperil le respect de la dignite humaine du requerant et de sa famille,categorie qui inclut les dettes alimentaires dejà echues au jour de ladecision d'admissibilite (violation de toutes les dispositions legalesvisees en tete du moyen, à l'exception de l'article 149 de laConstitution).

à tout le moins, les motifs de l'arret ne permettent pas de determinersi la remise totale des dettes du debiteur autres que les arrieres depensions alimentaires dues à la demanderesse pour la periode anterieureà la decision d'admissibilite aurait suffi à realiser les objectifsvises par l'article 1675/3, alinea 3, du Code judiciaire, sans qu'il soitnecessaire d'ordonner en outre la remise de ces arrieres de pensionsalimentaires. En fondant sa decision sur les motifs precites, l'arret nepermet pas à la Cour de controler si les conditions auxquelles la loisubordonne la remise de dettes alimentaires echues etaient remplies enl'espece. En consequence, l'arret n'est pas regulierement motive et violel'article 149 de la Constitution.

Seconde branche (subsidiaire)

L'article 1675/13, S: 6, du Code judiciaire dispose que, lorsqu'il etablitle plan judiciaire de reglement collectif (impliquant remise de dettes encapital), « le juge doit veiller au remboursement prioritaire des dettesqui mettent en peril le respect de la dignite humaine du requerant et desa famille ».

Cette disposition, lue à la lumiere de l'article 23 de la Constitution etcombinee avec les autres dispositions dejà citees du Code judiciairerelatives à la procedure de reglement collectif de dettes, implique quele juge doit examiner au cas par cas, en se fondant sur les circonstancespropres à l'espece, s'il y a lieu d'ordonner le remboursement prioritairede certains arrieres de dettes alimentaires echues avant la decisiond'admissibilite.

Il ressort du motif que « les pensions alimentaires echues avant ladecision d'admissibilite [...] ne beneficient d'aucun privilege » que lesjuges du fond ne se sont pas livres à une appreciation concrete des faitsde l'espece mais ont decide de maniere abstraite, en droit, que lecreancier d'aliments dont la dette est echue avant la decisiond'admissibilite est un creancier ordinaire dont la creance ne peut jamaisbeneficier d'un traitement privilegie par rapport aux autres creances dansla masse. Par cette decision, l'arret viole l'ensemble des dispositionsvisees en tete du moyen (à l'exception de l'article 149 de laConstitution) et, en particulier, l'article 1675/13, S: 6, du Codejudiciaire, qui dispose en termes explicites que, « lorsqu'il etablit leplan, le juge doit veiller au remboursement prioritaire des dettes quimettent en peril le respect de la dignite humaine du requerant et de safamille », et l'article 1675/13, S: 3, du meme code, lequel, eninterdisant au juge, de fac,on dirimante, d'accorder la remise des dettesalimentaires non echues au jour de la decision arretant le plan dereglement judiciaire, ne lui interdit pas d'ordonner le remboursementprioritaire de dettes alimentaires dejà echues au jour de la decisionarretant le plan de reglement judiciaire ou meme au jour de la decisiond'admissibilite, lorsque ce remboursement prioritaire se justifie enraison des particularites de la cause.

III. La decision de la Cour

Quant aux deux branches reunies :

L'arret constate que le premier juge a, par application de l'article1675/13 du Code judiciaire, impose un plan de reglement judiciairecomportant une remise partielle en capital des dettes du premier defendeuret que la demanderesse, epouse divorcee de celui-ci, fait devant la courdu travail grief au jugement entrepris d'avoir inclus dans ce plan lacreance alimentaire qu'elle avait declaree dans le cadre de la procedureen reglement collectif de dettes.

En vertu de l'article 1675/2, S: 3, du Code judiciaire, le plan dereglement auquel tend la demande en reglement collectif de dettes a pourobjet de retablir la situation financiere du debiteur en lui permettantnotamment dans la mesure du possible de payer ses dettes et en luigarantissant simultanement, ainsi qu'à sa famille, qu'ils pourront menerune vie conforme à la dignite humaine.

L'article 1675/7, S: 3, dispose que la decision d'admissibilite de lademande en reglement collectif de dettes entraine l'interdictiond'accomplir tout acte susceptible de favoriser un creancier, sauf lepaiement d'une dette alimentaire mais à l'exception des arrieres decelle-ci.

Aux termes de l'article 1675/13, S: 3, le juge ne peut accorder de remisepour les dettes alimentaires non echues au jour de la decision arretant leplan de reglement judiciaire.

Il suit de ces dispositions que le plan de reglement judiciaire peutinclure la remise en capital de dettes alimentaires echues avant ladecision arretant ce plan.

L'article 1675/13, S: 6, du Code judiciaire, qui prevoit que, lorsqu'iletablit le plan, le juge doit veiller au remboursement prioritaire desdettes qui mettent en peril le respect de la dignite humaine du debiteuret de sa famille, ne vise pas parmi ces derniers les creanciersalimentaires du debiteur qui ne vivent pas sous son toit.

Il ne ressort pour le surplus pas des pieces auxquelles la Cour peut avoiregard que la demanderesse ait fait valoir devant la cour du travail que lebut auquel tend le plan de reglement eut pu etre atteint sans inclure sacreance dans celles dont le juge a accorde la remise partielle en capital.

En considerant « que les pensions alimentaires echues avant la decisiond'admissibilite pouvaient faire l'objet d'une remise de dette », l'arretne viole aucune des dispositions legales visees au moyen.

Celui-ci, en aucune de ses branches, ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de mille deux cent nonante-huit eurosvingt-huit centimes en debet envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Martine Regout,Alain Simon, Mireille Delange et Marie-Claire Ernotte et prononce enaudience publique du vingt-sept mai deux mille treize par le presidentChristian Storck, en presence de l'avocat general Jean Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-----------------------------------------+
| L. Body | M.-Cl. Ernotte | M. Delange |
|----------+----------------+-------------|
| A. Simon | M. Regout | Chr. Storck |
+-----------------------------------------+

27 MAI 2013 S.12.0063.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.12.0063.F
Date de la décision : 27/05/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-05-27;s.12.0063.f ?
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