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18/04/2013 | BELGIQUE | N°F.11.0142.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 avril 2013, F.11.0142.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

4861



NDEG F.11.0142.F

N. D.,

demanderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Marc Levaux, avocat au barreau de Liege, dont lecabinet est etabli à Liege, rue Louvrex, 55-57,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de do

micile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er juin 2011par ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

4861

NDEG F.11.0142.F

N. D.,

demanderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Marc Levaux, avocat au barreau de Liege, dont lecabinet est etabli à Liege, rue Louvrex, 55-57,

contre

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er juin 2011par la cour d'appel de Liege.

Le 29 mars 2013, l'avocat general Andre Henkes a depose des conclusions augreffe.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport et l'avocat general AndreHenkes a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente deux moyens.

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

L'arret du 18 avril 2007 ordonnant la reouverture des debats decide que« l'administration (qui constate la mauvaise foi du redevable) n'a pas depouvoir de recourir au bareme de reduction des amendes proportionnelles etdoit des lors appliquer une amende correspondant à 200 p.c. des droitseludes ».

L'arret attaque n'etait pas tenu de repondre aux conclusions deposeesapres reouverture des debats par le demandeur qui soutenait quel'administration pouvait remettre les amendes fiscales legalement dues, lecas echeant sur le fondement de considerations subjectives ou de pureopportunite, cette question ayant ete definitivement tranchee.

L'arret attaque considere que « l'amende de 200 p.c. n'apparait pas ensoi disproportionnee à la gravite des infractions et à l'impot elude ».Le moyen ne precise pas en quoi cette motivation ne repondrait pas à« la demonstration que l'amende litigieuse de 200 p.c. est manifestementdisproportionnee et deraisonnable ».

En enonc,ant que « le pouvoir du juge ne peut se confondre avec celui duministre dans le cadre de l'arrete du Regent nDEG 78 du 18 mars 1831(article 9), pouvoir confere au ministre sur reclamation du redevable etnon proprio motu dans le cadre d'une procedure gracieuse et noncontentieuse », l'arret attaque repond aux conclusions du demandeur quisoutenait que le fait que le ministre des Finances n'avait pas ete saisid'une quelconque requete de la demanderesse ne changeait rien àl'appreciation du dossier.

Enfin, l'arret attaque n'etait pas tenu de repondre expressement à lademande subsidiaire de poser une question prejudicielle à la Courconstitutionnelle des lors que cette question etait devenue sanspertinence en raison de sa decision sur la portee de l'article 9 del'arrete du Regent precite.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le second moyen :

1. En vertu de l'article 70, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeurajoutee, pour toute infraction à l'obligation d'acquitter la taxe, ilest encouru une amende egale à deux fois la taxe eludee ou payeetardivement.

En vertu de l'article 84 de ce code, dans les limites prevues par la loi,le montant des amendes fiscales proportionnelles est reduit selon uneechelle dont les graduations sont determinees par le Roi.

En vertu de l'article 1er, dernier alinea, de l'arrete royal nDEG 41 du

30 janvier 1987 fixant le montant des amendes fiscales proportionnelles enmatiere de taxe sur la valeur ajoutee, l'echelle de reduction des amendesfiscales proportionnelles n'est pas applicable en cas d'infractionscommises dans l'intention d'eluder ou de permettre d'eluder la taxe.

2. Le juge auquel il est demande de controler une sanction administrativequi a un caractere repressif au sens de l'article 6 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales doitexaminer la legalite de cette sanction et peut examiner plusparticulierement si cette sanction est conciliable avec les exigencesimperatives des traites internationaux et du droit interne, y comprisles principes generaux du droit.

Ce droit de controle permet en particulier au juge d'examiner, en prenanten consideration l'ensemble des circonstances de la cause, si la peinen'est pas disproportionnee par rapport à l'infraction, de sorte qu'ilpeut examiner si l'administration pouvait raisonnablement infliger uneamende administrative de cette ampleur.

Le juge peut, à cet egard, tenir compte specialement de la gravite del'infraction, du taux des sanctions dejà infligees et de la maniere dontil a ete statue dans des causes similaires, mais doit tenir compte de lamesure dans laquelle l'administration etait elle-meme liee par cettesanction.

Ce droit de controle n'implique pas que le juge peut remettre ou reduiredes amendes pour de simples motifs d'opportunite et à l'encontre desregles legales.

3. Aux termes de l'article 9 de l'arrete du Regent nDEG 78 du 18 mars1831 organique de l'administration des finances, le ministre desFinances statue sur les reclamations ayant pour objet la remised'amendes et d'augmentations de droits à titre d'amendes, autres quecelles prononcees par le juge.

Contrairement à ce que le moyen soutient, il ne resulte pas de cettedisposition que, lorsque le ministre des Finances ou son delegue n'a pasete saisi d'un recours, le juge peut exercer les prerogatives de celui-cien statuant en pure opportunite.

4. L'arret du 18 avril 2007 enonce que :

- trois types d'irregularites commises par la demanderesse en matiere detaxe sur la valeur ajoutee ont ete constates pour les annees 1995 à1999 ;

- l'administration, considerant que la demanderesse avait l'intentiond'eluder l'impot, lui a applique une amende egale à deux fois les droitseludes ;

- l'administration n'a fait ainsi qu'appliquer les regles legales d'ordrepublic qui s'imposent à elle en qualifiant les faits de la maniere quilui paraissait appropriee et en en tirant les consequences legales auniveau de la sanction applicable, sans violer les principes de bonneadministration en general et de fair play ou de securite juridique enparticulier ;

- l'intention d'eluder la taxe est evidente et bien presente dans le chefde la demanderesse qui n'a pas pu, sans savoir ce qu'elle faisait ousignait, commettre systematiquement des irregularites fondamentales parrapport à la logique elementaire du systeme T.V.A. et beneficier pendantdes annees de remboursements indus.

L'arret attaque constate que la fraude commise par la demanderesse lui apermis de mener un train de vie largement superieur aux revenus de 600.000francs par an qu'elle declarait : achat de quatre vehicules, chacun d'unevaleur comprise entre 1.300.000 francs et 1.500.000 francs, organisationde son insolvabilite par la donation de ses biens immobiliers aux enfantsdu couple et disparition de plusieurs millions de francs inscrits encompte bancaire.

Il constate egalement que la demanderesse n'a pas depose de requete entreles mains du ministre des Finances sur la base de l'article 9 de l'arretedu Regent du 18 mars 1831.

Il considere que l'amende administrative est legalement due en raison dela fraude etablie, conformement aux articles 70, S:S: 1er et 1erbis, duCode de la taxe sur la valeur ajoutee et que la cour d'appel etant lieepar les memes dispositions que celles qui lient l'administration, lebareme de reduction des amendes proportionnelles n'est pas applicable àla demanderesse.

Il considere egalement que l'amende de 200 p.c. n'apparait pasdisproportionnee à la gravite des infractions et à l'impot elude(149.396,88 euros) et qu'il n'y a pas de motif legal de proceder à unereduction du montant de l'amende, sans empieter sur le principe general dudroit de la separation des pouvoirs.

L'arret attaque justifie ainsi legalement son refus de reduire le montantde l'amende administrative de 298.793,75 euros infligee à lademanderesse.

5. Il n'y a pas lieu de poser à la Cour constitutionnelle la questionproposee par la demanderesse qui ne precise pas entre quellescategories de personnes il y aurait une discrimination.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de cent quarante-trois euros trente et uncentimes envers la partie demanderesse et à la somme de cent quinze eurosvingt-cinq centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers BenoitDejemeppe, Martine Regout, Alain Simon et Sabine Geubel, et prononce enaudience publique du dix-huit avril deux mille treize par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general Andre Henkes,avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+----------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | A. Simon |
|-----------------+--------------+-------------|
| M. Regout | B. Dejemeppe | A. Fettweis |
+----------------------------------------------+

18 AVRIL 2013 F.11.0142.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.11.0142.F
Date de la décision : 18/04/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-04-18;f.11.0142.f ?
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