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04/03/2013 | BELGIQUE | N°C.12.0056.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 mars 2013, C.12.0056.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

3



NDEG C.12.0056.F

1. B. B.,

2. C. V.,

3. Ch. V.,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ouil est fait election de domicile,

contre

AG INSURANCE BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,

dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Co...

Cour de cassation de Belgique

Arret

3

NDEG C.12.0056.F

1. B. B.,

2. C. V.,

3. Ch. V.,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ouil est fait election de domicile,

contre

AG INSURANCE BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 5 janvier 2011par la cour d'appel de Bruxelles.

Par ordonnance du 18 fevrier 2013, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme chambre.

Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demanderesses presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* principe general du droit relatif au respect des droits de ladefense ;

* principe general du droit jura novit curia ;

* articles 2, 6, 1131, 1133, 1134, 1319, 1320 et 1322 du Code civil ;

* articles 19 (tant dans sa version originaire que dans sa versionmodifiee par l'arrete royal du 22 fevrier 1991 et dans sa versionresultant de la loi du 19 juillet 1991) et 19bis (insere par la loi du19 juillet 1991) de la loi du 9 juillet 1975 relative au controle desentreprises d'assurances ;

* articles 31 et 33 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques ducommerce et sur l'information et la protection du consommateur (avantson abrogation par la loi du 6 avril 2010) ;

* articles 2, 28DEG, 73 et 75 de la loi du 6 avril 2010 relative auxpratiques du marche et à la protection du consommateur ;

* article 14 de l'arrete royal du 22 fevrier 1991 portant reglementgeneral relatif au controle des entreprises d'assurances ;

* article 21 de l'arrete royal du 12 mars 1976 portant reglement generalrelatif au controle des entreprises d'assurances (avant son abrogationpar l'arrete royal du 22 fevrier 1991).

Decisions et motifs critiques :

L'arret attaque :

« Dit l'appel recevable et fonde dans la mesure ci-apres precisee ;

En consequence, met à neant la decision du premier juge, sauf en tantqu'elle a rec,u les demandes originaires, a declare non fondee la demandereconventionnelle en tant qu'elle portait sur la nullite du contratd'assurance et a liquide les depens ;

Statuant à nouveau, declare non fondees les demandes originaire etnouvelles des [demanderesses] ; les en deboute ;

Declare la demande reconventionnelle originaire en tant qu'elle portaitsur la repetition de l'indu recevable et fondee dans la mesure ci-apresprecisee ;

En consequence, condamne [les demanderesses] à payer à la [defenderesse]la somme principale de 357,81 euros, majoree des interets moratoires autaux legal depuis le 6 juin 1994 jusqu'au parfait paiement ; deboute la[defenderesse] du surplus de sa demande ;

Condamne [les demanderesses] à 75 p.c. des depens des deux instances dela [defenderesse], liquides à 304,90 euros pour la premiere instance(indemnite de procedure) et à 2.686 euros pour l'instance d'appel (186euros (requete d'appel) + 2.500 euros (indemnite de procedure)) ;delaisse à la [defenderesse] les 25 p.c. restants ;

Delaisse [aux demanderesses] 75 p.c. des frais d'expertise s'elevant à4.219,51 euros, et condamne la [defenderesse] à payer les 25 p.c.restants aux [demanderesses] ;

Delaisse [aux demanderesses] leurs propres depens afferents aux deuxinstances, liquides à 201,54 euros (citation) + 304,90 euros (indemnitede procedure) + 17,10 euros (expedition) + 161,33 euros (signification)pour la premiere instance, et à 2.500 euros (indemnite de procedure) pourl'instance d'appel ».

Ces decisions sont en particulier fondees sur les motifs suivants :

L'arret attaque constate que l'auteur des demanderesses avait souscritaupres de la defenderesse une police d'assurance « revenus garantis » endate du 23 septembre 1980.

L'arret constate egalement que, le 11 fevrier 1992, l'auteur desdemanderesses a adresse une declaration de sinistre à la defenderesse.Apres avoir, dans un premier temps, couvert l'incapacite de son assure, ladefenderesse a ensuite, par courrier du 20 juillet 1992, decline sonintervention en se fondant sur l'article 8B des conditions generales de lapolice selon lequel la garantie n'est pas due lorsque l'etat de santedeficient existait dejà lors de la prise de cours de la police.

L'arret attaque rappelle par ailleurs que, dans son arret interlocutoiredu 19 mai 2003, la cour d'appel a considere qu'il ressort du courrierprecite du 20 juillet 1992 que le contrat avait ete maintenu moyennantcertaines modifications.

Saisi de la question de la validite de l'article 8B des conditions de lapolice du 23 septembre 1980, l'arret attaque decide que :

« La circonstance que la clause trouve à s'appliquer meme dansl'hypothese d'une affection evolutive qui serait nee avant la prise decours du contrat, et alors meme que l'assure n'en connaissait pas lediagnostic, n'est pas de nature à porter atteinte à la validite de laclause d'exclusion prevue en

l'espece.

Il n'est pas conteste que seule la loi ancienne du 11 juin 1874 trouve enl'espece à s'appliquer, la conclusion du contrat d'assurance etantanterieure à l'entree en vigueur tant de l'arrete royal du 22 fevrier1991 portant reglement general de controle des entreprises d'assurancesque de la loi du 14 juillet 1991 relative aux pratiques du commerce et àl'information et à la protection du consommateur et de la loi du 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre;

Il ne peut des lors etre fait application en l'espece des notions declause de nature à porter atteinte à l'equivalence entre les engagementsde l'assureur et ceux du preneur d'assurance (article 14 de l'arrete royaldu

22 fevrier 1991) ni de clauses abusives (articles 31 et suivants de la

loi du 14 juillet 1991) ;

Au contraire, sous l'empire de la loi du 11 juin 1874, ce type de clauseetait generalement considere comme valable, nonobstant l'etendue de sonchamp d'application ».

Griefs

Aux pages 21-23 de leurs « ultimes conclusions additionnelles et desynthese d'appel apres expertise et reprise d'instance », lesdemanderesses contestaient la validite de l'article 8B de la police du 23septembre 1980 en faisant valoir que, « si les termes de la clause vanteedevaient etre, comme le soutient la [defenderesse], interpretes commeexcluant les suites de toutes maladies evolutives, meme tout à faitsilencieuses au jour de la souscription du contrat, comme de toutesanormalites ou predispositions genetiques dont l'assure n'avait meme pasidee à cette date, elle devrait incontestablement etre consideree commeabusive, en ce qu'elle creerait un desequilibre manifeste et intolerableentre les obligations de l'assure et de l'assureur ; qu'elle devrait,partant, etre consideree comme nulle et non avenue ». Ellesreproduisaient egalement un passage de doctrine considerant qu'une clausede ce type mettrait en cause l'equivalence des engagements de l'assureuret de l'assure au sens de l'article 14 de l'arrete royal du 22 fevrier1991 portant reglement general de controle des entreprises d'assurances.

Dans ses conclusions de synthese d'appel, la defenderesse ne concluait surl'applicabilite ni des dispositions relatives à la validite des clausesabusives, ni de l'article 14 de l'arrete royal du 22 fevrier 1991, sebornant à soutenir que l'article 8B de la police etait conforme à la loidu 11 juin 1874, ni d'aucune autre disposition legale relative aux clausesabusives.

Premiere branche

S'il doit etre interprete comme decidant qu'il n'etait pas conteste queseule la loi du 11 juin 1874 etait applicable en l'espece, à l'exclusiontant de la reglementation relative aux clauses abusives que de l'arreteroyal du

22 fevrier 1991 portant reglement general relatif au controle desentreprises d'assurances, l'arret attaque refuse de lire dans le passagedes « ultimes conclusions additionnelles et de synthese d'appel apresexpertise et reprise d'instance » des demanderesses reproduit ci-avantune contestation qui s'y trouve, donne de ces conclusions uneinterpretation inconciliable avec leurs termes et viole, partant, la foiqui leur est due (violation des articles 1319, 1320 et 1322 du Codecivil).

Deuxieme branche

En soulevant d'office la question de l'applicabilite dans le temps del'arrete royal du 22 fevrier 1991 portant reglement general relatif aucontrole des entreprises d'assurances et de la loi du 14 juillet 1991relative aux pratiques du commerce et à l'information et à la protectiondu consommateur et en rejetant pour ce motif le moyen invoque par lesdemanderesses mettant en cause la validite de l'article 8B de la police du23 septembre 1980 sans permettre au prealable aux demanderesses de fairevaloir leurs observations à ce propos, l'arret attaque viole le principegeneral du droit relatif au respect des droits de la defense.

Troisieme branche

En vertu du principe general du droit jura novit curia, le juge est tenude trancher le litige conformement à la regle de droit qui lui estapplicable. Il a ainsi l'obligation, en respectant les droits de ladefense, de relever d'office les moyens de droit dont l'application estcommandee par les faits specialement invoques par les parties au soutiende leurs pretentions.

Par les motifs reproduits en tete du moyen, l'arret attaque decide quel'arrete royal du 22 fevrier 1991 portant reglement general relatif aucontrole des entreprises d'assurances ne trouve pas à s'appliquer enl'espece, la conclusion du contrat d'assurance etant anterieure àl'entree en vigueur de cette norme.

En rejetant pour ce motif le moyen par lequel les demanderessescritiquaient la validite de l'article 8B de la police du 23 septembre 1980sans rechercher si, en supposant l'arrete royal du 22 fevrier 1991inapplicable, l'application d'une autre norme, et en particulier l'article21 de l'arrete royal du 12 mars 1976 portant reglement general relatif aucontrole des entreprises d'assurances, en liaison avec l'article 19 de laloi du 9 juillet 1975 dans sa version originaire, n'etait pas commandeepar les faits specialement invoques par les demanderesses au soutien deleurs pretentions, l'arret attaque viole le principe general du droit juranovit curia.

Quatrieme branche

1. En vertu de l'article 2 du Code civil, la loi ne dispose que pourl'avenir et n'a point d'effet retroactif.

Il decoule de cette disposition qu'en regle, la loi nouvelle estapplicable non seulement aux situations nees posterieurement à son entreeen vigueur mais aussi aux effets futurs de situations nees sous l'empirede l'ancienne loi se produisant ou perdurant sous l'empire de la nouvelleloi pour autant qu'il ne soit pas ainsi porte atteinte à des droits dejàirrevocablement fixes. En matiere de conventions, l'ancienne loi resteapplicable, sauf si la nouvelle loi est d'ordre public ou imperative ou sielle prescrit expressement son application aux conventions en cours(articles 2, 6, 1131, 1133 et 1134 du Code civil).

2. Il ressort des articles 31 et 34, S: 1er, de la loi du 14 juillet 1991sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection duconsommateur, entree en vigueur le 29 fevrier 1992, que les clausesabusives sont frappees de nullite dans les contrats de vente de produitset de services aux consommateurs, ceux-ci ne pouvant renoncer aux droitsqui leur sont conferes par ces dispositions. Celles-ci sont doncimperatives en faveur du consommateur.

Depuis le 12 mai 2010, date d'entree en vigueur de la loi du 6 avril 2010,une solution identique decoule des articles 2, 28DEG, 73 et 75, S: 1er,de cette loi qui constituent pareillement des dispositions imperatives enfaveur du consommateur.

Ces dispositions imperatives sont donc d'application immediate auxcontrats en cours au moment de leur entree en vigueur.

3. Il ressort de l'article 19 de la loi du 9 juillet 1975 (tant dans saversion originaire que dans sa version modifiee par l'arrete royal du 22fevrier 1991 et dans sa version resultant de la loi du 19 juillet 1991)que, pour l'etablissement et l'application de leurs tarifs et conditionsainsi que de tous documents relatifs à la conclusion et à l'executiondes contrats d'assurances, les entreprises sont tenues de se conformer auxregles fixees par le Roi.

La sanction de cette obligation a evolue dans le temps.

Jusqu'à la loi du 19 juillet 1991, entree en vigueur le 9 aout 1991,l'article 19, S: 2, de la loi precitee du 9 juillet 1991(lire 1975) (tantdans sa version originaire que dans sa version modifiee par l'arrete royaldu

22 fevrier 1991) prevoyait que les clauses contraires à de telles reglesetaient frappees de nullite.

Depuis lors, l'article 19bis, alinea 1er, de la loi precitee du

9 juillet 1975, insere par la loi du 19 juillet 1991, dispose que toutesclauses et tous accords qui ne sont pas conformes aux dispositions deladite loi ou des arretes et reglements pris pour son execution sontcenses avoir ete etablis des la conclusion du contrat en conformite avecces dispositions. L'alinea 2 de cette disposition precise qu'elle nes'applique pas aux contrats conclus avant l'entree en vigueur de laditeloi mais qu'elle s'y applique cependant à partir de leur reconduction oude leur modification par les parties.

L'article 14, 2e phrase, de l'arrete royal du 22 fevrier 1991 portantreglement general relatif au controle des entreprises d'assurances, entreen vigueur le 11 avril 1991, dispose que les conditions des contrats nepeuvent contenir aucune clause de nature à porter atteinte àl'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux du preneur.Cette disposition est imperative en faveur du preneur d'assurance.

Il decoule de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'une clause denature à porter atteinte à l'equivalence entre les engagements del'assureur et ceux du preneur figure dans un contrat d'assurance :

a) cette clause est nulle depuis le 11 avril 1991, cette interdictionimperative etant d'application immediate aux contrats en cours ;

b) à tout le moins, les contrats d'assurance comportant une telle clausequi ont ete modifies par les parties apres le 9 aout 1991 sont censesavoir ete etablis des la conclusion du contrat sans cette clause.

4. Par les motifs reproduits en tete du moyen, l'arret attaque constate :

- que l'auteur des demanderesses a conclu avec la defenderesse une policed'assurance « revenus garantis » en date du 23 septembre 1980 ;

- que l'auteur des demanderesses a adresse à la defenderesse unedeclaration de sinistre le 11 fevrier 1992 en sollicitant le paiement dela garantie jusqu'à la fin de l'invalidite ;

- que le contrat a fait l'objet de modifications par les parties le

20 juillet 1992.

L'arret attaque rejette cependant le moyen par lequel les demanderessesreprochaient à l'article 8B de la police du 23 septembre 1980 deconstituer une clause abusive portant en outre atteinte à l'equivalenceentre les engagements de l'assureur et ceux du preneur, aux motifs que nil'arrete royal du 22 fevrier 1991 ni la loi du 14 juillet 1991 n'etaienten vigueur au moment de la conclusion de la police.

5. Ce faisant, l'arret attaque :

1DEG meconnait les principes du droit transitoire qui commandentl'application immediate aux contrats en cours des dispositions imperativesainsi que de celles prescrivant expressement leur application immediate(violation de l'article 2 du Code civil) ;

2DEG meconnait les dispositions imperatives relatives à l'interdictiondes clauses abusives, qui sont d'application immediate aux contratsconclus avant leur entree en vigueur (violation des articles 31 et 34, S: 1er, de la loi du

14 juillet 1991 pour la periode courant du 29 fevrier 1992 jusqu'au

12 mai 2010 et des articles 2, 28DEG, 73 et 75, S: 1er, de la loi du 6avril 2010 pour la periode courant du 12 mai 2010 jusqu'à la date del'arret) ;

3DEG meconnait les dispositions imperatives, d'application immediate auxcontrats en cours, prescrivant la nullite des clauses des contratsd'assurance portant atteinte à l'equivalence entre les engagements del'assureur et ceux du preneur (violation des articles 19 de la loi du 19juillet 1975, modifie par l'arrete royal du 22 fevrier 1991, mais avantson remplacement par la loi du 19 juillet 1991, et 14 de l'arrete royal du22 fevrier 1991) ;

4DEG à tout le moins, meconnait les dispositions prescrivant la mise enconformite de plein droit de tels contrats modifies par les parties depuisle

9 aout 1991 (violation des articles 19, tel que remplace par la loi du

19 juillet 1991, 19bis de la loi du 9 juillet 1975 et 14 de l'arrete royaldu

22 fevrier 1991 pour la periode courant à partir du 20 juillet 1992, datede la modification du contrat d'assurance par les parties, jusqu'à ladate de l'arret).

Cinquieme branche

1. L'article 19, S: 1er, de la loi du 9 juillet 1975 relative au controledes entreprises d'assurances (dans sa redaction originaire) prevoit que,pour l'etablissement et l'application de leurs tarifs, ainsi que pour laredaction de tous documents relatifs à la conclusion et à l'executiondes contrats d'assurance, les entreprises sont tenues de se conformer auxregles fixees par le Roi en vertu de ladite loi. Le paragraphe 2 de cettedisposition precise que sont nuls toutes clauses et tous accords relatifsà la conclusion et à l'execution de contrats d'assurance souscrits enBelgique ou presumes tels conformement à l'article 3, qui ne sont pasconformes aux dispositions de ladite loi ou des reglements pris pour sonexecution.

L'article 21 de l'arrete royal du 12 mars 1976 portant reglement generalrelatif au controle des entreprises d'assurances (avant son abrogation parl'arrete royal du 22 fevrier 1991) dispose que les conditions des contratsne peuvent contenir aucune clause de nature à porter atteinte àl'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux du preneur.

2. Par les motifs reproduits en tete du moyen, l'arret attaque constate :

- que l'auteur des demanderesses a conclu avec la defenderesse une policed'assurance « revenus garantis » en date du 23 septembre 1980 ;

- que l'auteur des demanderesses a adresse à la defenderesse unedeclaration de sinistre le 11 fevrier 1992 en sollicitant le paiement dela garantie jusqu'à la fin de l'invalidite.

L'arret attaque rejette cependant le moyen par lequel les demanderessesreprochaient à l'article 8B de la police du 23 septembre 1980 de porteratteinte à l'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux dupreneur aux motifs que l'arrete royal du 22 fevrier 1991 n'etait pas envigueur au moment de la conclusion de la police.

3. Ce faisant, à supposer meme que l'arrete royal du

22 fevrier 1991 ne soit pas applicable en l'espece, l'arret attaquemeconnait en tout cas le fait qu'à la date de conclusion de la police du23 septembre 1980, les clauses de ce contrat d'assurance portant atteinteà l'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux du preneuretaient dejà, des leur conclusion, frappees de nullite par l'article 19de la loi du 9 juillet 1975 (dans sa redaction originaire) et l'article 21de l'arrete royal du 12 mars 1976 (violation de ces dispositions).

III. La decision de la Cour

Quant à la troisieme branche :

En vertu du principe general du droit suivant lequel le juge est tenu detrancher le litige conformement à la regle de droit qui lui estapplicable, il a l'obligation, en respectant les droits de la defense, derelever d'office les moyens de droit dont l'application est commandee parles faits specialement invoques par les parties au soutien de leurspretentions.

Dans leurs conclusions d'appel, les demanderesses soutenaient que, si lestermes de l'article 8B de la police d'assurance « revenus garantis »souscrite par leur auteur aupres de la defenderesse le 23 septembre 1980« devaient etre interpretes comme excluant les suites de toutes maladiesevolutives, meme tout à fait silencieuses au jour de la souscription ducontrat, comme de toutes anormalites ou predispositions genetiques dontl'assure n'avait meme pas idee à cette date, elle devraitincontestablement etre consideree comme abusive, en ce qu'elle creerait undesequilibre manifeste et intolerable entre les obligations de l'assure etde l'assureur » et rappelaient que « l'article 14 de l'arrete royal du22 fevrier 1991 portant reglement general de controle des entreprisesd'assurances prevoit que `les conditions des contrats doivent etreredigees en des termes clairs et precis ; elles ne peuvent contenir aucuneclause de nature à porter atteinte à l'equivalence entre les engagementsde l'assureur et ceux du preneur d'assurance' ».

L'arret attaque considere qu' « il ne peut [...] etre fait application enl'espece des notions de clause de nature à porter atteinte àl'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux du preneur » aumotif que « la conclusion du contrat d'assurance [est] anterieure àl'entree en vigueur [...] de l'arrete royal du 22 fevrier 1991 portantreglement general [relatif au] controle des entreprises d'assurances »,sans examiner d'office la possibilite d'appliquer l'article 21 de l'arreteroyal du 12 mars 1976 portant reglement general relatif au controle desentreprises d'assurances, abroge par l'arrete royal precite du 22 fevrier1991, qui dispose que « les conditions generales et particulieres descontrats doivent etre redigees en termes clairs et precis ; elles nepeuvent contenir aucune clause de nature à porter atteinte àl'equivalence entre les engagements de l'assureur et ceux du preneur ».

En s'abstenant à proceder à cet examen, l'arret meconnait le principegeneral du droit precite.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur les autres griefs

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres branches du moyen, qui nesauraient entrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il donne acte aux demanderesses deleur reprise d'instance et rec,oit l'appel ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge du

fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Liege.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Alain Simon, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononceen audience publique du quatre mars deux mille treize par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general delegue MichelPalumbo, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+------------------------------------+
| L. Body | M. Lemal | M. Delange |
|----------+-----------+-------------|
| A. Simon | M. Regout | A. Fettweis |
+------------------------------------+

4 MARS 2013 C.12.0056.F/14


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.12.0056.F
Date de la décision : 04/03/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-03-04;c.12.0056.f ?
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