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04/02/2013 | BELGIQUE | N°S.11.0051.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 février 2013, S.11.0051.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

4014



NDEG S.11.0051.F

CEBIODI, association sans but lucratif dont le siege est etabli àBruxelles, boulevard du Jardin botanique, 32,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Drie Koningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile,

contre

J. S.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, av

enue Louise, 149, ou il estfait election de domicile.

NDEG S.11.0154.F

J. S.,

demandeur en cassation,

represente p...

Cour de cassation de Belgique

Arret

4014

NDEG S.11.0051.F

CEBIODI, association sans but lucratif dont le siege est etabli àBruxelles, boulevard du Jardin botanique, 32,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Drie Koningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile,

contre

J. S.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile.

NDEG S.11.0154.F

J. S.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

CEBIODI, association sans but lucratif dont le siege est etabli àBruxelles, boulevard du Jardin botanique, 32,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Drie Koningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation inscrit au role general sous le numero S.11.0051.Fest dirige contre l'arret rendu le 20 octobre 2010 par la cour du travailde Bruxelles.

Le pourvoi en cassation inscrit au role general sous le numero S.11.0154.Fest dirige contre l'arret rendu le 1er juin 2011 par la cour du travail deBruxelles.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. Les moyens de cassation

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero S.11.0051.F,la demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 1134, alinea 1er, du Code civil ;

- articles 1er et 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque du 20 octobre 2010 rec,oit l'appel et le declarepartiellement fonde, dit pour droit que le contrat dans le cadre duquel ledefendeur a preste comme technologue de laboratoire entre le 2 novembre1998 et le 18 novembre 2003 doit etre qualifie de contrat de travail ausens de la loi du 3 juillet 1978, dit pour droit que la nullite du contratde travail en raison du fait que le defendeur ne remplissait pas lesconditions legales pour exercer cette profession ne peut lui etre opposeepar la demanderesse, condamne par consequent la demanderesse à payer audefendeur la somme de 38.369,65 euros à titre d'indemnite compensatoirede preavis, la somme provisionnelle brute d'un euro à valoir sur lesarrieres de remuneration que reclame le defendeur et la sommeprovisionnelle d'un euro à titre de pecule de vacances, double pecule etprime de fin d'annee, le tout majore des interets legaux et judiciaires.Il prend cette decision sur la base de tous ses motifs consideres icicomme integralement reproduits et plus particulierement sur la base desmotifs suivants :

« 4.3. [Le defendeur] a, pendant cinq annees, exerce [la profession detechnologue de laboratoire medical], dont on rappellera infra que sonacces est strictement reglemente par l'arrete royal nDEG 78 du 10 novembre1967 et par l'arrete royal du 2 juin 1993 relatif à la profession detechnologue de laboratoire medical, sans disposer du titre legal requis.

4.4. Ses prestations ont ete effectuees sous la responsabilite et lecontrole du medecin-chef de service du laboratoire, le docteur F.,controle dont la nature et l'etendue sont au centre des presents debats.

Sa formation de medecin, quand bien meme elle n'etait pas sanctionnee parun titre legalement reconnu en Belgique, a eu pour effet qu'il a joui dansl'exercice de ses fonctions de technologue de laboratoire d'une relativeautonomie, le medecin-chef de service du laboratoire et la directrice de[la demanderesse] declarant que, pour ce motif, ils lui faisaient, de memequ'aux deux autres medecins se trouvant dans la meme situation,intellectuellement confiance sur le resultat de ses analyses, davantagequ'aux laborantins non medecins.

Cette autonomie etait cependant loin d'etre complete :

- dans la mesure, d'une part, ou la directrice de [la demanderesse]souligne que les responsables du laboratoire se montraient plus vigilantssur l'aspect technique des prestations des independants,

- et ou, d'autre part, [le defendeur] affirme, sans etre contredit sur cepoint, qu'un controle etait toujours possible, soit sous la forme de lavisite inopinee d'un superviseur verifiant leur travail, soit parl'intermediaire du systeme interne d'analyse generant un rapport reprenantles anomalies detectees et imputables au personnel, sur la base duquel ilpouvait etre convoque et rendre des comptes et le cas echeant avec ordrede refaire les analyses, ce qui lui serait arrive une fois ou l'autre.

4.5. La nature du travail confie aux laborantins independants et salariesetait identique, sous la seule reserve que les gardes de nuit et deweek-end, exclusivement confiees aux independants, impliquaient desanalyses urgentes alors que le biologiste responsable n'etait pas present,en sorte que l'autonomie de ces laborantins independants etait alors plusgrande, sous reserve de devoir en referer au biologiste de garde en cas deprobleme.

4.6. La relative autonomie dont disposait [le defendeur] pourl'organisation de son temps de travail s'inscrit dans les limites strictesd'un cadre preetabli, à savoir celui de l'horaire des services de gardeque les laboratoires de biologie clinique des hopitaux concernes ontl'obligation legale d'assurer, sous la responsabilite des medecins lies enl'espece à [la demanderesse] par la convention commentee supra.

[Le defendeur] avait, dans cette limite, la faculte de se faire remplacerpar un autre technologue de laboratoire du service. Il n'est pas fait etatde ce que les laborantins independants auraient eu le libre choix de leurremplac,ant, y compris en se faisant substituer par un laborantinetranger au service, la directrice du laboratoire precisant que desimperatifs techniques et de securite s'y opposent.

Si [le defendeur] n'etait pas soumis à une obligation de pointage, uncontrole indirect du respect des horaires etait effectue par le biais del'identification du laborantin par son poste de travail.

[Le defendeur] a ete requis de remplacer les laborantins en retard ouabsents. Il a ete charge de la formation d'un collaborateur.

Les conges, non payes, sont pris en fonction des disponibilites duplanning de garde une fois que les autres laborantins ont fait choix deleurs dates de conges.

4.7. La remuneration a ete fixee et adaptee unilateralement par le docteurV. d. A. et ensuite par [la demanderesse].

Elle est payee sur presentation d'un listing mensuel de prestations.

Elle ne couvre pas les frais de deplacements ou autres occasionnes parl'accomplissement du travail, hormis les formations payees comme desheures de travail.

4.8. [Le defendeur] travaille exclusivement avec le materiel mis à sadisposition par le laboratoire qui en assume les frais de reparation etd'entretien.

4.9. Il a du souscrire une assurance en responsabilite civileprofessionnelle dont il regle lui-meme les primes.

4.10. Il s'est affilie à une caisse d'assurances sociales pourtravailleurs independants et supporte le paiement des primes.

Il n'etait plus, pendant la periode litigieuse, inscrit à l'Ordre desmedecins. [...]

6. Il se deduit des dispositions [de l'arrete royal du 2 juin 1993relatif à la profession de technologue de laboratoire medical, prisen execution de l'arrete royal nDEG 78 du 10 novembre 1967 relatif àl'exercice de l'art de guerir et de l'arrete royal du 12 novembre1993 relatif à l'exercice de l'agrement des laboratoires de biologieclinique par le ministre qui a la sante publique dans sesattributions modifie par un arrete royal du 3 novembre 1999] que laprofession de technologue de laboratoire s'exerce au sein d'unestructure fortement hierarchisee et doit respecter un ensemble dedispositions strictes destinees à assurer la qualite et lacontinuite des soins consignees dans un `systeme de qualite' dont ledirecteur du laboratoire a la responsabilite et est charge de lasurveillance.

Les actes que pose le technologue de laboratoire le sont sous laresponsabilite et la direction du prestataire.

Il est soumis à la surveillance du directeur du laboratoire, est tenu derespecter les instructions du specialiste en biologie clinique adjoint aulaboratoire, qui a pour mission d'introduire des controles de qualiteinterne et d'analyser de fac,on reguliere la qualite du travail desauxiliaires.

Il s'ensuit que si, à la difference du personnel qui n'effectue pas deprestations de biologie clinique, il ne doit pas etre obligatoirementplace dans les liens de subordination caracteristiques du contrat detravail, son autonomie est, du fait meme du contexte reglementaire danslequel s'insere son activite, des plus reduites. [...]

4. Les conditions d'execution de la collaboration [du defendeur] au seindu laboratoire de biologie clinique exploite par [la demanderesse]

4.1. La volonte des parties

4.1.1. Il doit tout d'abord etre observe que la convention decollaboration independante initialement conclue avec le docteur V. d. A.avait [...] perdu son objet et excluait de surcroit la tacite reconductionalors qu'elle avait une duree de validite d'un an.

Cette convention a donc pris fin, le 1er novembre 1999, à la fois par ladisparition de son objet et par l'echeance du terme.

Il reste que de facto les parties à cette convention et ensuite lesparties au present litige ont poursuivi leur collaboration professionnellecomme si elles se trouvaient encore, de jure, dans les liens de laconvention de travail independant initialement conclue.

Ceci s'est traduit, d'une part, par l'affiliation [du defendeur] à unecaisse d'assurances sociales pour travailleurs independants et, d'autrepart, par la delivrance par [la demanderesse] de fiches 281.50 en vue dela declaration fiscale de la remuneration perc,ue par [le defendeur].

Cette croyance commune et les elements precites qui l'ont concretisee surle plan administratif ne suffisent pas, en tant que tels, à retenir laqualification independante qu'entend retenir [la demanderesse], pasdavantage que le fait que [le defendeur] ait attendu jusqu'au 27 novembre2003 pour remettre en question, par l'entremise de son conseil, lecaractere independant de ses prestations.

4.1.2. En effet, `la qualification de la relation de travail qui determinele regime de securite sociale applicable appartient [...] à l'ordrepublic'. Il a ete juge que `l'existence d'un contrat d'execution d'untravail independant ne peut etre presumee sur la base du fait que lesparties à un contrat qualifient leur relation d'un travail independanteffectue par l'une des parties sur ordre de l'autre'. La Cour de cassationrappelle [...] que `le juge est tenu d'apprecier la situation reelle à lalumiere des elements dont la preuve est etablie' et `qu'il lui appartientd'apprecier si les elements invoques en justification de l'existence d'unlien de subordination constituent la manifestation ou la possibilite de lamanifestation d'un exercice d'autorite sur l'execution d'un travail ausens des contrats de travail, qui est incompatible avec l'exercice d'unsimple controle et avec la simple communication dans le cadre d'un contratde travail independant'.

4.1.3. Une illustration particuliere de ce caractere d'ordre public dansle present litige doit etre trouvee dans l'article 49 de l'arrete royalnDEG 78 qui dispose que `sont reputees non ecrites les clauses desconventions qui sont en opposition avec les dispositions des arretesroyaux vises à [...] l'article 5 [...] et à l'article

23, S: 1er'.

Serait donc nulle, pour violation de l'article 5, S: 1er, dudit arreteroyal, toute clause du contrat conclu entre un laboratoire et untechnologue de laboratoire qui stipulerait que les prestations dutechnicien prestant dans le cadre d'une relation independante ne seraientpas soumises au controle du medecin specialiste en biologie clinique eteffectuees sous sa responsabilite.

Il est toutefois exact, comme le souligne le conseil de [la demanderesse],que ni cet article 5, S: 1er, de l'arrete royal nDEG 78 ni l'arrete royaldu 3 novembre 1999 relatif à l'agrement des laboratoires de biologieclinique ne creent une presomption legale au sujet de la nature de larelation de travail entre le medecin et le technologue de laboratoire.

Ces dispositions reglementaires ont, comme rappele supra, pour objet, dansla poursuite d'un objectif de sante publique et de continuite des soins,de creer un cadre hierarchise dans les laboratoires qui permette d'assurerla surveillance et le controle, sous la direction et la responsabilite duspecialiste en biologie clinique et du directeur du laboratoire, dusysteme de qualite place sous l'autorite du directeur.

L'existence de cette reglementation specifique constitue neanmoins unfacteur d'appreciation important de l'existence ou non d'un liend'autorite caracteristique du contrat de travail s'il se trouve confortepar l'execution concrete des relations de travail.

4.1.4. Il a ete egalement dit supra qu'aucune convention ecrite n'estvenue prendre le relais de cette convention, apres son expiration et ladisparition de son objet essentiel qui consistait à assurer [audefendeur] une formation comme medecin assistant collaborateur.

Il s'ensuit que, hormis l'affirmation du caractere independant de larelation professionnelle des parties à l'epoque, il ne peut etre puisedans ladite convention aucun element permettant de determiner commentcelles-ci ont entendu preciser les modalites de leur collaboration.

4.1.5. La cour [du travail] se doit donc d'analyser les elements resultantde l'execution concrete de la relation de travail qui s'est poursuiviependant cinq ans dans ce cadre mal defini mais dans lequel les parties ontconsidere de facto qu'il etait celui d'une relation independante.

4.2. Les modalites d'organisation et de controle du travail

4.2.1. Le conseil de [la demanderesse] soutient que la reglementationspecifique de l'activite des laboratoires et la profession de technologuede laboratoire, de meme que les dispositions legales quant à l'exercicede l'art de guerir, ne sont pas de nature à creer un lien desubordination entre les laborantins et les laboratoires qui les occupent.

Est invoque à l'appui de cette these un arret du 19 fevrier 2009 de lapresente cour [du travail] opposant l'Institut medical Edith Cavell àl'Office national de securite sociale.

Cet arret, amene à apprecier une situation presentant de tres nombreuxpoints de similitude avec la presente espece, a confirme le caractereindependant de la relation de travail liant les techniciens aulaboratoire.

Il a considere que `les techniciens de nuit sont soumis exclusivement àun controle technique de leurs prestations, necessaire pour assurer laqualite en vertu des obligations qui s'imposent à [cette institutionhospitaliere]. Les seuls controles, observations et instructionsconcernent la technique d'analyse, notamment l'identification de sonauteur, l'heure exacte de l'analyse (necessite de la `trac,abilite'), lacontinuite du service, l'organisation pour reduire preventivement lerisque d'erreur, la verification de certaines analyses au hasard, lecontrole preventif des techniciens. Il ne s'agit pas du controle del'employeur, relatif au contenu ou à l'execution meme des prestations'.

4.2.2. La presente espece presente des differences notables avec celle quivient d'etre evoquee en ce qui concerne la maniere dont les responsablesdu laboratoire et les laborantins concevaient leurs roles respectifs etcelle dont ils s'en sont acquittes.

4.2.2.1. Tout d'abord, comme l'indique le conseil [du defendeur] enconclusions, il etait place sous l'autorite directe d'un chef de poste,outre celle du medecin specialiste en biologie clinique et celle dudirecteur du laboratoire.

Il decrit les lieux de travail comme etant amenages sous forme de`paysager' cloisonne d'environ 150 m^2 divises en differents postes(chimie, hematologie, toxicologie, serologie) auxquels sont affectes leslaborantins travaillant sous la surveillance du chef de poste, leuraffectation etant decidee par le chef de service, en l'espece le docteurF.

4.2.2.2. Il soutient avoir fait, dans ce cadre, l'objet d'instructions etd'un controle assez precis sur la maniere d'executer son travail, dont ilproduit un certain nombre d'exemples à son dossier : en aout 2001 : unprotocole d'examen lui est retourne avec une serie de pointsd'interrogation au regard des resultats enregistres ; en septembre 2002 :`J., le disque dur a ete change. Le contenu des kits ne correspond plus,tu dois voir toi-meme quand elle est vide. Mets aussi l'alarme surl'appareil. Executer le back up lundi. Il y a encore une serie deresultats à envoyer et valider' ; en mars 2003, une note intituleeàctions correctives effectuees sur LX20 apres passage de CQI' lui intimel'ordre de `ne pas toucher à `LDH' et `CHE', LDH est notre meilleurequalite pour les exterieurs' ; en octobre 2003 : `les erythrocytes foetauxsont negatifs. Peux-tu introduire ceci, J. ?'.

Il s'agit là d'instructions qui vont au-delà de la simple validation desanalyses de biologie clinique effectuees par [le defendeur], des lorsqu'elles lui indiquent comment il doit proceder, y compris pour desdetails de l'execution de ses prestations.

4.2.2.3. Ces quelques exemples doivent etre mis en relation avec ladeclaration de la directrice du laboratoire dans le cadre de l'enquetemenee par l'Office national de securite sociale, selon laquelle lesresponsables faisaient davantage confiance aux independants du point devue medical mais se montraient plus vigilants au point de vue technique.

Ceci indique que si ces derniers, du fait de leur competences medicalesdecoulant du diplome qu'ils detenaient de facto, jouissaient d'uneautonomie plus grande que les laborantins salaries dans le travaild'analyse, ils etaient en revanche plus controles sur les aspectsstrictement techniques de leurs prestations.

Le seul fait de cette marge d'autonomie, plus ou moins etendue selonl'aspect de leur prestation, ne peut exclure l'existence de l'exercice del'autorite sur l'accomplissement de la prestation.

[Le defendeur] relate, dans ses declarations, l'existence de controlesinopines d'un superviseur et d'un controle exerce en permanence par lebiais du poste de travail permettant de detecter les anomalies imputablesau personnel, pouvant donner lieu à une convocation pour rendre descomptes, avec ordre de refaire les analyses.

4.2.2.4. Ces exemples tires de l'enquete de l'Office national de securitesociale et du dossier [du defendeur] fournissent l'illustration de ce que,dans la realite de l'execution des relations de travail, les responsablesdu laboratoire avaient à tout le moins la possibilite d'exercer leurautorite et leur controle sur la maniere dont [le defendeur] s'acquittaitde ses prestations de technologue de laboratoire.

Il s'agit là, ni plus ni moins, de l'expression du devoir de controle etde surveillance que le medecin specialise en biologie clinique est tenud'exercer, en vertu de la reglementation precise et contraignante àlaquelle est soumise cette activite medicale, pour d'evidentes etimperieuses raisons de sante publique et, partant, d'ordre public.

Le seul fait que cette autorite ne soit pas exercee en permanence, ou sesoit exercee avec moins de rigueur sur les actes [du defendeur], en raisonde ses competences medicales, mais s'exprimant par un controle plus etroitsur le plan strictement technique, ne suffit pas à considerer commeinexistant le lien de subordination.

Il a ete dit supra qu'il faut mais qu'il suffit que l'employeur ait ledroit de donner des ordres au travailleur à propos de l'organisation etde l'execution du travail convenu.

Or, non seulement, les responsables du laboratoire exploite par [lademanderesse], en la personne du docteur M., du docteur F. et du chef deposte [du defendeur], tirent ce droit de l'obligation qui leur est faitepar la reglementation precitee d'assurer un controle etroit desprestations de biologie clinique effectuees sous leur direction, maisencore les quelques exemples qui viennent d'etre commentes indiquentqu'ils en ont fait usage dans le cadre de leurs relations avec [ledefendeur].

Il s'agit là d'un element d'execution de la relation de travail qui estincompatible avec une qualification de relation independante.

4.3. L'organisation du temps de travail

4.3.1. Les contraintes organisationnelles decoulant des obligationslegales et reglementaires strictes que sont tenus de respecter leslaboratoires medicaux, dont celle d'assurer la continuite du service parl'instauration d'un systeme de garde sous la responsabilite du medecinspecialise en biologie clinique, ont d'importantes consequences surl'organisation du temps de travail et la repartition des horaires detravail entre les membres du personnel de ces laboratoires.

4.3.2. Sur ce point, la cour [du travail] ne partage pas l'avis despremiers juges selon lesquels les laborantins consideres commeindependants etablissaient eux-memes leurs horaires, du fait que leplanning etait elabore par ou avec l'accord des membres de l'equipecomportant plusieurs travailleurs independants.

Les obligations legales et reglementaires pesant sur l'activite dulaboratoire ont pour consequence que chaque medecin responsable d'unegarde selon la repartition convenue entre les signataires de la conventionde collaboration du service de biologie clinique et d'anatomopathologiedes cliniques Sainte-Anne, Saint-Remi et Saint-Etienne et de la cliniquegenerale Saint-Jean est tenu d'arreter l'horaire du personnel afin degarantir la continuite du service.

4.3.2.1. Le docteur F., qui assume la gestion technique, medicale etjournaliere du laboratoire, declare d'ailleurs expressement qu'il secharge aussi du planning des gardes de nuit et de week-end.

C'est donc bien exclusivement à l'interieur de ce cadre preetabli que leslaborantins consideres comme independants disposaient d'une certainelatitude.

4.3.2.2. On a vu supra que celle-ci se limitait à echanger des gardesentre eux ou à se remplacer mutuellement en cas de retard ou d'absence.

Le docteur M. exclut quant à elle formellement toute faculte deremplacement par un tiers au service, pour des raisons à la foistechniques et de securite.

[La demanderesse] entend revenir aujourd'hui sur la portee de ces proposdenues de toute equivoque en soutenant que [le defendeur], comme lesmembres de l'equipe de garde, pouvait regulierement faire appel auxservices des docteurs S. et B. effectuant leurs gardes principales pourles cliniques Paul Brien et Saint-Luc.

Elle en deduit que le remplacement par un tiers librement choisi par lelaborantin prestataire independant etait parfaitement possible etsoutient, à l'encontre des declarations de la directrice du laboratoiredans le cadre de l'enquete de l'Office national de securite sociale, que`la seule chose qui etait exigee etait qu'il y ait une garde qui soitassuree, peu importe l'identite des independants qui l'assuraient'.

Cette affirmation d'une faculte de remplacement par un laborantinexterieur au service est contredite par les conclusions de synthesedeposees en instance, dans lesquelles [la demanderesse] indique [...] quele docteur B. faisait partie de l'equipe de nuit des sa creation et que ledocteur S. y avait ete integre à plusieurs reprises.

4.3.2.3. Cette absence de liberte de choix de remplacement en dehors deslaborantins faisant partie de l'equipe de garde confirme le caractereintuitu personae de la relation de travail, l'absence de faculte deremplacement par un tiers au service decoulant, une fois encore, de lanecessite imperieuse de pouvoir identifier le prestataire, imposee par lesconditions d'agreation des laboratoires qui ont ete amplement decrites etcommentees plus haut.

Il s'agit là, à l'estime de la cour [du travail], d'un second elementincompatible avec la qualification de relation independante, laquellerequiert qu'un travailleur independant puisse se faire assister ouremplacer par une personne de son choix, sous sa responsabilite.

4.3.3. Il doit encore etre observe qu'à la difference de ce qui paraitavoir ete pratique au sein de l'Institut Edith Cavell, dont l'organisationrepose sur une nette distinction entre les techniciens de jour (salaries)et les techniciens de nuit et de week-end (independants), [le defendeur] aete occupe aussi bien de jour que de nuit, en sorte que les horaires deses prestations de jour ont ete calques sur ceux des laborantins salariessans que lui ait ete reservee une possibilite de moduler l'horaire de sesprestations de jour.

4.3.3.1. En temoigne un document intitule `heures de presences aulaboratoire' reprenant l'ensemble du personnel du laboratoire, documentqui mentionne, dans le departement `chimie speciale' du laboratoire, sonnom, son heure d'arrivee (8 heures à 20 heures), ses jours de presence(`tous les jours') et indique en remarque : '20 heures si de garde.'

4.3.3.2. Ce meme document indique sous le departement `hematologie' dontle service est assure par madame R., tous les jours de 8 heures 15 à 14 heures, que le remplacement est assure par `C., [le defendeur], W. ...selon disponibilite'.

Il en ressort, d'une part, que [le defendeur] etait entierement integredans le planning tant des horaires de jour que de nuit et, d'autre part,qu'il pouvait etre amene à devoir remplacer un autre travailleur,independant ou salarie, en cas de retard ou d'absence.

4.3.4. Si cette integration [du defendeur] dans l'organigramme et leshoraires du laboratoire ne constitue pas en soi un indice de l'existenced'un lien de subordination, en revanche l'obligation d'etre amene àremplacer un travailleur du cadre est un element incompatible avec laqualification de relation independante.

4.3.5. Le conseil de [la demanderesse] invoque encore la jurisprudence dela cour du travail d'Anvers pour souligner que les accords concernantl'organisation du travail et la prise de conges sont compatibles avec unerepartition du travail egalement necessaire entre independants.

4.3.5.1. Ce constat, que partage la cour [du travail] en son principe, netrouve pas à s'appliquer adequatement en l'espece, pour le motif suivant.

La situation des medecins specialistes en biologie clinique lies entre euxpar la convention de collaboration visee supra destinee à repartir entreeux les gardes n'est pas comparable à celle des laborantins.

4.3.5.2. En effet, ce sont les premiers qui, en vertu de leurs obligationslegales (assurer la continuite du service) et contractuelles (decoulant deleur convention de collaboration), arretent le planning de repartition desgardes, que les seconds se voient des lors imposer, meme si, dans ce cadrepreetabli, une certaine souplesse etait possible du fait quel'elaboration, par le docteur F. et monsieur C., des horaires deslaborantins, laissait une place à la concertation.

Le docteur F. admet cependant qu'il devenait le `dernier recours' en casde probleme, puisqu'il fallait que la garde soit assuree.

4.3.6. Il se deduit de cette declaration qu'il se reservait, une foisencore tres logiquement en fonction des obligations de direction, decontrole et de surveillance qu'il assume legalement sur l'activite dulaboratoire dans le respect des imperatifs de sante publique, le droitd'ordonner à l'un des laborantins qualifies d'independants d'effectuerune garde afin que le service soit assure.

La cour [du travail] ne partage des lors pas la conclusion posee par lejugement entrepris sur ce point des lors que l'enquete de l'Officenational de securite sociale (dont les premiers juges n'avaient pasconnaissance) revele que la direction du laboratoire pouvait faire usage,en dernier recours, d'un pouvoir de requisition, dont il suffit deconstater qu'il pouvait etre exerce, et qui constitue par consequent unimportant element incompatible avec la qualification de relation detravail independante.

4.4. La possibilite de l'exercice d'un controle hierarchique

4.4.1. Les trois elements qui viennent d'etre analyses (possibilite d'uncontrole de l'execution et du contenu de la prestation de travail,impossibilite de se faire remplacer par un tiers de son choix et sous saresponsabilite, et pouvoir de requisition de la direction) constituentautant de facteurs inconciliables avec une qualification de relationindependante, l'execution qu'en ont donnee les parties demontrant que,dans la realite des faits, la direction du laboratoire etait à memed'exercer et exerc,ait en fait, fut-ce avec moins de rigueur sur lapersonne des medecins d'origine etrangere affectes à son service degarde, les prerogatives de direction, de surveillance et de controle quelui impose la reglementation specifique de l'activite des laboratoires.

4.4.2. Il convient encore d'examiner une serie d'elements tires del'execution des relations de travail pour verifier si ceux-ci ne sont pasde nature à exclure l'existence du lien de subordination que revele cetexercice possible de l'autorite.

4.5. Les absences pour maladie et les conges

4.5.1. Les parties sont contraires en fait sur la question de savoir si[le defendeur] etait tenu de justifier ses absences pour maladie.

Le docteur F. declare que c'etait lui que le personnel devait prevenir encas d'absence.

[Le defendeur] produit à son dossier un document portant la date du moisde janvier 2003, sous la forme d'un tableau Excell reprenant l'ensembledes membres du personnel, salarie et independant, sur lequel son nom estrepris et qui est destine à signaler les jours de conge, de maladie et derecuperation.

[La demanderesse] conteste que ce document ait jamais ete utilise en sonsein.

[Le defendeur] depose egalement un certificat medical, relatif à uneincapacite de travail de cinq jours en decembre 2000, dont [lademanderesse] soutient que le docteur F. n'a jamais eu connaissance, [ledefendeur] ne demontrant pas l'envoi effectif de ce certificat medical.

Dans la mesure ou, d'une part, il n'est pas fait etat d'absences pourmaladie [du defendeur] au cours des cinq annees de prestations effectueespar [lui] au laboratoire de biologie clinique de Saint-Etienne et ou,d'autre part, les pieces produites aux debats livrent peu d'indicationssur le regime des absences pour maladie, aucun element pertinent ne peutetre retenu en faveur de l'une ou de l'autre des theses developpees à cesujet par les parties.

4.5.2. En ce qui concerne les vacances, les parties livrent egalement peud'elements permettant à la cour [du travail] de se faire une conviction.

Le fait que [le defendeur] etait tenu de prevenir le docteur F. lorsqu'ilvoulait prendre des vacances n'est pas en soi incompatible avecl'existence d'une relation independante, des lors qu'il repond à unecontrainte organisationnelle s'imposant tant aux salaries qu'auxindependants.

L'on observera cependant que le refus [du defendeur] de prester durant lemois de decembre 2003, durant lequel il avait demande à prendre sesvacances de Noel, constitue l'un des facteurs qui a contribue à larupture des relations contractuelles, ce qui contredit la these selonlaquelle il jouissait d'une totale liberte pour fixer ses conges.

4.6. La fixation de la remuneration

Il ne ressort d'aucun element du dossier produit aux debats par [lademanderesse] qu'à un quelconque moment au cours des cinq annees queperdurerent les relations contractuelles, [le defendeur] aurait, commeelle le soutient, fixe lui-meme le prix de ses interventions ou demande àce que celui-ci soit reevalue.

Le docteur F. a fait etat, lors de son audition, que certains deslaborantins facturaient leurs honoraires à la prestation lorsque c'etaitplus interessant.

Aucune piece des dossiers produits aux debats ne vient demontrer que [ledefendeur] aurait recouru à ce type de facturation, les relevesd'honoraires etablis sur des listings preetablis etant calcules sur lenombre d'heures prestees.

Lors de l'enquete de l'Office national de securite sociale, [le defendeur]n'a pas ete contredit lorsqu'il affirme que les hausses qu'a connues lemontant de sa remuneration ont toujours ete le fruit d'une decisionunilaterale de [la demanderesse].

Il ressort en effet de la declaration du docteur M. que le montant horairede la remuneration des laborantins consideres comme independants etaitcalque sur la charge brute que representait celle des salaries, en sorteque la charge financiere supportee par le laboratoire etait comparablepour les deux statuts.

Cet element demontre que sa remuneration etait fixee de maniereunilaterale par [la demanderesse].

Il peut egalement etre deduit de cette declaration que l'equivalence descharges de remuneration du personnel du laboratoire entre les salaries etceux qui etaient, sur le plan fiscal, declares comme independants faisaiten sorte que la remuneration brute payee aux seconds incluait laremuneration de vacances payee aux premiers sous la forme d'un pecule devacances.

La circonstance que l'interesse ne recevait pas de pecule de vacances nepeut des lors pas etre consideree en soi comme une preuve du caractereindependant de la relation de travail, puisqu'elle n'est qu'uneconsequence qu'en depit du lien de subordination dont l'existence estdemontree par la possibilite qu'avait la direction du laboratoired'exercer son controle sur le contenu meme de la prestation de ceslaborantins, [la demanderesse] a considere qu'elle n'etait pas tenue àl'application des lois sur les vacances annuelles en faveur de cestravailleurs.

4.7. Les formations

La circonstance que [le defendeur] ait ete invite à suivre certainesformations concernant le maniement du materiel de laboratoire n'est pas ensoi un indice de subordination.

En revanche, le fait qu'il soit remunere par [la demanderesse] pendant cetemps de formation alors qu'il ne fournissait pas de prestations pour lecompte du laboratoire est un element incompatible avec l'exercice d'uneactivite independante, qui suppose que le travailleur independant assumelui-meme ses charges, parmi lesquelles les frais de formation, et ne soitremunere que pour les prestations effectivement accomplies.

4.8. La fourniture du materiel

Cet element, de nature à reveler une subordination de nature economique,est sans incidence sur la determination du lien de subordinationjuridique.

4.9. L'exercice simultane d'une activite pour un autre laboratoire

La circonstance que [le defendeur] ait poursuivi l'exercice d'une activitepour un autre laboratoire ne serait determinante pour exclure le lien desubordination que si les travailleurs salaries de [la demanderesse]etaient lies par une clause de non-concurrence que les laborantinsindependants ne seraient, eux, pas tenus de respecter.

L'exercice de ces deux activites professionnelles en parallele neconstitue pas un facteur determinant du caractere independant ou salariede la relation de travail.

Il est en effet frequent qu'un travailleur salarie developpe parallelementune activite independante.

Hormis l'existence de pareille interdiction, l'on n'aperc,oit pas en quoile fait d'exercer, à cote de son travail au sein du laboratoire exploitepar [la demanderesse], une activite, qu'elle soit salariee ouindependante, au service d'un autre laboratoire serait incompatible avecl'existence d'un lien de subordination.

4.10. Les elements peripheriques

Doivent egalement etre consideres comme neutres, les formesadministratives par lesquelles les parties ont exprime leur relation,qu'il s'agisse des formulaires sur la base desquels etaient etablis lesmontants de la remuneration due ensuite des prestations [du defendeur], deleur declaration fiscale et de l'affiliation à une assurance sociale pourtravailleurs independants. La cour [du travail] rappelle ici que laqualification de la relation de travail qui determine le regime desecurite sociale applicable releve de l'ordre public.

5. En synthese

1. Le fait qu'en vertu de l'arrete royal du 3 novembre 1999 relatif àl'agrement des laboratoires de biologie clinique par le ministre qui a lasante publique dans ses attributions, le directeur et le medecinspecialiste en biologie clinique soient investis d'un devoir de direction,de surveillance et de controle des actes qu'ils confient sous leurresponsabilite à des laborantins, qui doivent, quant à eux, satisfaireaux conditions de titres requis par l'arrete royal du 2 juin 1993 pourexercer cette profession, a pour consequence que cette possibilited'exercer un lien d'autorite sur le contenu meme de la prestation de ceslaborantins, controle qu'etablit en l'espece [le defendeur] par les piecesqu'il verse au dossier, est incompatible avec la qualification de relationde travail independante, incompatibilite egalement demontree par lacirconstance que ces laborantins ne disposent pas, pour les memes motifsde securite, de la faculte de se faire remplacer par un tiers de leurchoix mais peuvent se voir en revanche imposer de pourvoir au remplacementd'un collegue de travail afin que leur commettant soit en mesure derespecter son obligation legale d'assurer la continuite des gardes.

Ces circonstances, toutes trois presentes en l'espece, auxquelless'ajoutent le fait, d'une part, que [le defendeur] n'a pas pu negocier saremuneration, dont le montant brut est aligne sur celui de la chargepatronale totale de ses collegues salaries et, d'autre part, que cetteremuneration lui est garantie, en l'absence meme de toute prestation detravail, pour des heures de formation professionnelle dispensees àl'exterieur du laboratoire, conduisent la cour [du travail] à ecarter laqualification de relation independante que soutient [la demanderesse]alors qu'aucune convention ecrite n'est, en dehors de l'affirmation ducaractere independant de la collaboration des parties, venue decrire lesmodalites d'execution de celle-ci et les obligations en decoulant pourchacune des parties.

Dans un arret prononce le 22 mai 2006 par la Cour de cassation dans un casd'espece presentant de nombreux points d'analogie avec la presente cause,celle-ci rappelle que, `lorsque les elements soumis à son appreciationpermettent d'exclure la qualification donnee par les parties à laconvention qu'elles ont conclue, le juge du fond peut y substituer unequalification differente'.

Tel est le cas en l'espece ou, à cote d'indices revelateurs d'unesubordination economique sans incidence sur la qualification de larelation de travail, sont etablis des elements en nombre suffisantdemontrant l'existence du lien de subordination decoulant de l'autoritehierarchique qu'exerce la direction du laboratoire sur les laborantins oude la simple possibilite de cet exercice.

2. La requalification en contrat de travail qui s'ensuit a pourconsequence qu'en vertu de l'application conjointe des articles 14 de laloi du 3 juillet 1978 et 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, lanullite du contrat conclu en violation des dispositions d'ordre publicrelative à l'exercice de la profession de technologue de laboratoire nepeut etre opposee par [la demanderesse au defendeur] ».

Griefs

Premiere branche

1. Aux termes de l'article 1er de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail, cette loi regle les contrats de travail d'ouvrier,d'employe, de representant de commerce et de domestique.

Aux termes de l'article 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail, le contrat de travail d'employe est le contrat parlequel un travailleur, l'employe, s'engage contre remuneration à fournirun travail principalement d'ordre intellectuel sous l'autorite d'unemployeur.

Aux termes de l'article 1134, alinea 1er, du Code civil, les conventionslegalement formees tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Il resulte du rapprochement de ces dispositions legales que le juge dufond ne peut modifier la qualification que les parties ont donnee aucontrat qu'elles ont conclu que s'il constate que les elements de fait quilui sont presentes sont incompatibles avec la qualification donnee par lesparties.

Les contraintes qui sont inherentes à l'exercice d'une profession et quisont imposees par ou en vertu d'une loi ne peuvent pas etre prises enconsideration pour apprecier la nature d'une relation du travail.

Le mode de fixation, le montant et la garantie d'une remuneration à lapartie qui exerce le travail pour le temps qu'il consacre à desformations ne sont pas incompatibles avec la qualification de la relationde travail comme une collaboration à caractere independant, puisqu'ilsn'impliquent pas necessairement l'existence d'un lien de subordination.

2. L'arret constate que l'arrete royal du 3 decembre 1999 relatif àl'agrement des laboratoires de biologie clinique par le ministre qui a lasante publique dans ses attributions impose plusieurs contraintes auxlaboratoires qui souhaitent etre agrees. La cour du travail aconsidere que ces contraintes sont destinees à assurer la qualite et lacontinuite des soins consignees dans un systeme de qualite dont ledirecteur du laboratoire a la responsabilite et est charge de lasurveillance.

Apres une analyse tres approfondie des differentes dispositions de cetarrete royal du 3 decembre 1999, l'arret arrive à la conclusion quel'autonomie du laborantin, meme si celui-ci ne doit pas necessairementetre place dans un lien de subordination, est, du fait meme du contextereglementaire dans lequel s'inscrit son activite, des plus reduites.

Ensuite, l'arret analyse la maniere dont le travail est organise au seindu laboratoire de la demanderesse. Il arrive à la conclusion qu'en raisondu cadre reglementaire precite :

- le directeur et le medecin specialiste en biologie clinique sontinvestis d'un devoir de direction, de surveillance et de controle desactes qu'ils confient sous leur responsabilite à des laborantins,

- la demanderesse pouvait exercer un controle sur le contenu meme de laprestation de travail,

- le defendeur ne disposait pas de la faculte de se faire remplacer par untiers de son choix mais pouvait se voir en revanche imposer de pourvoir auremplacement d'un collegue de travail, afin que son commettant soit enmesure de respecter son obligation legale d'assurer la continuite desgardes.

Ces trois elements, auxquels s'ajoutent le fait que, d'une part, ledefendeur n'a pas pu negocier sa remuneration, dont le montant brut estaligne sur celui de la charge patronale de ses collegues salaries, d'autrepart, cette remuneration lui est garantie, en l'absence meme de touteprestation de travail, pour les heures de formation professionnelledispensees à l'exterieur du laboratoire, conduisent l'arret à ecarter laqualification de relation independante et à decider que la relationprofessionnelle entre le defendeur et la demanderesse doit etre qualifieede contrat de travail.

En se basant sur des contraintes qui sont imposees par des dispositionslegales et qui sont inherentes à l'exercice de la profession delaborantin au sein d'un laboratoire de biologie clinique et en y ajoutantdes constatations relatives à la fixation, le montant et la garantie dela remuneration, pour decider que la relation professionnelle entre ledefendeur et la demanderesse doit etre qualifiee de contrat de travail,l'arret viole les articles 1er et 3 de la loi du 3 juillet 1978 relativeaux contrats de travail et l'article 1134, alinea 1er, du Code civil.

L'arret n'a pu, en se basant sur des contraintes imposees par desdispositions legales et inherentes à l'exercice de la profession delaborantin au sein d'un laboratoire de biologie clinique et en y ajoutantdes constatations relatives à la fixation, le montant et la garantie dela remuneration, legalement decider que la relation professionnelle entrele defendeur et la demanderesse doit etre qualifiee de contrat de travail.

Seconde branche

1. Aux termes de l'article 1er de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail, cette loi regle les contrats de travail d'ouvrier,d'employe, de representant de commerce et de domestique.

Aux termes de l'article 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail, le contrat de travail d'employe est le contrat parlequel un travailleur, l'employe, s'engage contre remuneration à fournirun travail principalement d'ordre intellectuel sous l'autorite d'unemployeur.

Aux termes de l'article 1134, alinea 1er, du Code civil, les conventionslegalement formees tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Il resulte du rapprochement de ces dispositions legales que le juge dufond ne peut modifier la qualification que les parties ont donnee aucontrat qu'elles ont conclu que s'il constate que les elements de fait quilui sont presentes sont incompatibles avec la qualification donnee par lesparties.

Le juge du fond est en outre tenu de preciser comment et dans quellemesure chaque element pris en consideration individuellement ou avecd'autres est inconciliable avec l'execution d'un contrat d'independant.

La circonstance que la demanderesse impose des modalites de vacances n'estpas incompatible avec l'existence d'une collaboration independantepuisqu'elle ne demontre pas en soi l'existence d'un rapport d'autorite,d'autant plus que, comme l'a releve la cour du travail en l'espece, cetteregle de conduite repond à une contrainte organisationnelle imposee pardes dispositions legales.

2. Dans la mesure ou l'arret, pour decider que la relation professionnelleentre le defendeur et la demanderesse doit etre qualifiee de contrat detravail, se base sur la circonstance, non reprise en synthese à la page37, que le refus de prester durant les vacances de Noel constitue l'un desfacteurs qui ont contribue à la fin des relations de travail, ce quicontredit la these suivant laquelle le defendeur jouissait d'une totaleliberte pour fixer ses conges, cette decision viole aussi les dispositionslegales indiquees en tete du moyen.

En decidant, sur la base de la circonstance que la demanderesse impose desmodalites de vacances, que la relation professionnelle entre le defendeuret la demanderesse doit etre qualifiee de contrat de travail, l'arretviole les articles 1er et 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail et l'article 1134, alinea 1er, du Code civil.

L'arret n'a pu, sur la base des elements qu'il constate, legalementdecider que la relation professionnelle entre le defendeur et lademanderesse doit etre qualifiee de contrat de travail.

Second moyen

Dispositions legales violees

- articles 6, 1108, 1131 et 1133 du Code civil ;

- articles 14 et 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail ;

- article 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit l'appel et le declare partiellement fonde, dit pour droitque le contrat dans le cadre duquel le defendeur a preste commetechnologue de laboratoire entre le 2 novembre 1998 et le 18 novembre 2003doit etre qualifie de contrat de travail au sens de la loi du 3 juillet1978, dit pour droit que la nullite du contrat de travail en raison dufait que le defendeur ne remplissait pas les conditions legales pourexercer cette profession ne peut lui etre opposee par la demanderesse,condamne la demanderesse à payer au defendeur la somme de 38.369,65 eurosà titre d'indemnite compensatoire de preavis, la somme provisionnellebrute d'un euro à valoir sur les arrieres de remuneration que reclame ledefendeur et la somme provisionnelle d'un euro à titre de pecule devacances, double pecule et prime de fin d'annee, le tout majore desinterets legaux et judiciaires. Il prend cette decision sur la base detous ses motifs consideres ici comme integralement reproduits et plusparticulierement sur la base des motifs suivants :

« [Le defendeur] a, pendant cinq annees, exerce [la profession detechnologue de laboratoire medical], dont on rappellera que son acces eststrictement reglemente par l'arrete royal nDEG 78 du 10 novembre 1967 etpar l'arrete royal du 2 juin 1993 relatif à la profession de technologuede laboratoire medical, sans disposer du titre legal requis. [...]

Il est aujourd'hui acquis aux debats que le contrat de collaboration doitetre considere comme nul, parce que [le defendeur] ne possedait pas lestitres legaux requis pour exercer la profession de technologue delaboratoire.

Ce contrat ne peut donc, en regle, sortir aucun effet, sauf si, à lesupposer valablement conclu du fait que [le defendeur] eut detenu lestitres requis, il avait pu, en raison de l'execution qui lui a ete donneepar les parties, etre qualifie de contrat de travail. Dans ce cas, eneffet, l'article 14 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail et l'article 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail s'opposentà ce que l'employeur se soustraie aux obligations decoulant du contrat enen invoquant la nullite. [...]

La requalification en contrat de travail qui s'ensuit a pour consequencequ'en vertu de l'application conjointe des articles 14 de la loi du 3juillet 1978 et 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, la nullite ducontrat conclu en violation des dispositions d'ordre public relative àl'exercice de la profession de technologue de laboratoire ne peut etreopposee par [la demanderesse au defendeur] ».

Griefs

1. Aux termes de l'article 6 du Code civil, on ne peut deroger, par desconventions particulieres, aux lois qui interessent l'ordre public et lesbonnes moeurs.

Aux termes de l'article 1108 du Code civil, quatre conditions sontessentielles pour la validite d'une convention : le consentement de lapartie qui s'oblige, sa capacite de contracter, un objet certain qui formela matiere de l'engagement et une cause licite dans l'obligation.

Aux termes de l'article 1131 du Code civil, l'obligation sans cause, ousur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucuneffet.

Aux termes de l'article 1133 du Code civil, la cause est illicite quandelle est prohibee par la loi, quand elle est contraire aux bonnes moeursou à l'ordre public.

Aux termes de l'article 14 de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail, la nullite du contrat ne peut etre opposee aux droitsdu travailleur qui decoulent de l'application de la loi, lorsque desprestations de travail sont fournies, soit en vertu d'un contrat frappe denullite du chef d'infraction aux dispositions ayant pour objet lareglementation des relations du travail, soit dans les salles de jeu.

Aux termes de l'article 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, lanullite de l'engagement ne peut etre opposee, soit aux jeunestravailleurs, soit aux travailleurs autres que les jeunes travailleurs,lorsque le travail est effectue en vertu d'un engagement frappe de nullitedu chef d'infraction aux dispositions ayant pour objet la reglementationdes relations du travail ou dans les salles de jeu.

Il resulte du rapprochement de ces dispositions legales que, sauf dans lestrois hypotheses qui sont prevues par la loi (notamment l'hypothese ou ils'agit de jeunes travailleurs, l'hypothese ou les prestations de travailsont fournies en vertu d'un contrat frappe de nullite du chef d'infractionaux dispositions ayant pour objet la reglementation des relations dutravail ou l'hypothese ou les prestations sont fournies dans les salles dejeu), le contrat de travail qui est frappe de nullite ne peut legalementproduire aucun effet.

Lorsque le contrat de travail est nul et ne peut legalement produire aucuneffet, aucun droit à une indemnite compensatoire de preavis prevue àl'article 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travailne peut etre reconnu à l'une ou l'autre des parties.

2. L'arret, apres avoir constate que le contrat de collaboration concluentre les parties doit etre considere comme nul parce que le defendeur nepossedait pas les titres legaux requis pour exercer la profession detechnologue de laboratoire, decide que ce contrat ne peut, en regle,sortir aucun effet, sauf s'il peut, en raison de l'execution qui lui a etedonnee par les parties, etre qualifie de contrat de travail. L'arretdecide ensuite que le contrat qui a ete conclu entre les parties doit etrequalifie de contrat de travail et qu'en vertu de l'article 14 de la loi du3 juillet 1978 et de l'article 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail,la nullite de ce contrat ne peut etre opposee par la demanderesse audefendeur. Sur la base de ce qui precede, l'arret decide de reconnaitre audefendeur le droit à une indemnite de preavis jusqu'à concurrence de38.369,65 euros.

En reconnaissant, apres avoir constate que le contrat conclu entre lesparties est nul et de nul effet en raison du non-respect des dispositionslegales qui reglent l'acces à la profession de technologue delaboratoire, au defendeur le droit à une indemnite compensatoire depreavis de 38.369,65 euros, l'arret viole les articles 6, 1108, 1131, 1133du Code civil, 14, 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail et 5 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail.

Apres avoir constate que le contrat conclu entre les parties est nul et denul effet, l'arret n'a pu legalement decider de reconnaitre au defendeurune indemnite compensatoire de preavis de 38.369,65 euros.

Dans la requete en cassation inscrite au role general sous le numeroS.11.0154.F, jointe au present arret en copie certifiee conforme, ledemandeur presente trois moyens.

III. La decision de la Cour

Les pourvois etant diriges contre deux arrets rendus dans la meme cause,il y a lieu de les joindre.

Sur le pourvoi inscrit au role general sous le numero S.11.0051.F :

Sur le premier moyen :

Quant aux deux branches reunies :

Le lien de subordination, qui est la caracteristique du contrat detravail, existe des qu'une personne peut, en fait, exercer son autoritesur les actes d'une autre personne.

Pour constater l'existence d'un lien de subordination entre lademanderesse et le defendeur, la cour du travail a pu tenir compte, parmiles considerations reproduites dans le moyen, de l'autonomie reduitelaissee au technologue de laboratoire medical par la reglementation quiregit son activite et de la circonstance que le defendeur ne jouissait pasd'une liberte totale pour fixer ses conges.

Le moyen, en aucune de ses branches, ne peut etre accueilli.

Sur le second moyen :

Sur la fin de non-recevoir opposee au moyen par le defendeur et deduite desa nouveaute :

Le defendeur soutient que le moyen est nouveau parce que la demanderessen'a pas conteste devant la cour du travail qu'elle devrait payer uneindemnite de preavis si cette juridiction admettait que le contrat ayantlie les parties etait un contrat de travail frappe de nullite.

Le moyen est dirige contre un motif que l'arret attaque du 20 octobre 2010donne pour justifier sa decision de condamner la demanderesse à payer uneindemnite de preavis malgre la nullite du contrat de travail.

Il n'est, des lors, pas nouveau.

La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.

Sur le fondement du moyen :

1. L'article 5, 2DEG, de la loi du 16 mars 1971 sur le travail dispose quela nullite de l'engagement ne peut etre opposee aux travailleurs autresque les jeunes travailleurs, lorsque le travail est effectue a) en vertud'un engagement frappe de nullite du chef d'infraction aux dispositionsayant pour objet la reglementation des relations du travail et b) dans lessalles de jeu.

Les jeunes travailleurs sont, conformement à la definition qu'en donnel'article 2 de cette loi, des travailleurs mineurs ou ages de moins de 21ans.

En vertu de l'article 14 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contratsde travail, la nullite du contrat de travail ne peut etre opposee auxdroits du travailleur qui decoulent de l'application de cette loi lorsquedes prestations de travail sont fournies en vertu d'un contrat frappe denullite du chef d'infraction aux dispositions ayant pour objet lareglementation des relations du travail ou dans les salles de jeu.

Ces dispositions n'interdisent pas d'opposer aux travailleurs, autres queles jeunes travailleurs, la nullite de l'engagement ou du contrat detravail lorsque des prestations de travail sont fournies, en dehors dessalles de jeux, en vertu d'un engagement ou d'un contrat frappe de nullitepour d'autres motifs.

2. Les articles 2, S: 1er, et 5, S: 1er, de l'arrete royal nDEG 78 du

10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santeet l'arrete royal du 2 juin 1993 relatif à la profession de technologuede laboratoire medical, pris en execution de l'article 5, S: 1er, del'arrete royal nDEG 78, imposent des conditions pour l'exercice de l'artmedical et en particulier des professions paramedicales.

Ils n'ont pas pour objet la reglementation des relations du travail.

3. L'arret attaque du 20 octobre 2010 considere, d'une part, que lecontrat ayant existe entre les parties est un contrat de travail, d'autrepart, que ce contrat est nul parce que le defendeur ne possedait pas lestitres requis par l'article 3 de l'arrete royal du 2 juin 1993 pourexercer la profession de technologue de laboratoire medical et que cesdispositions sont d'ordre public. Il constate que le defendeur est ne en1957 et a collabore avec la demanderesse de 1998 à 2003, d'ou il suitqu'il n'etait pas un jeune travailleur au sens des articles 2 et 5 de laloi du 16 mars 1971.

Pour condamner la demanderesse à payer une indemnite de preavis audefendeur, il decide « qu'en vertu de l'application conjointe desarticles 14 de la loi du 3 juillet 1978 et 5 de la loi du 16 mars 1971 surle travail, la nullite du contrat conclu en violation des dispositionsd'ordre public relatives à l'exercice de la profession de technologue delaboratoire ne peut etre opposee » par la demanderesse au defendeur.

En statuant de la sorte, alors que la nullite du contrat de travail neresulte pas d'une infraction aux dispositions ayant pour objet lareglementation des relations du travail, l'arret viole les articles 5,2DEG, de la loi du 16 mars 1971 et 14 de la loi du 3 juillet 1978.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

La cassation partielle de l'arret attaque du 20 octobre 2010 entrainel'annulation de l'arret du 1er juin 2011, dans la mesure ou, en tant qu'ilstatue sur l'indemnite de preavis et sur les depens, il en est la suite.

Sur le pourvoi inscrit au role general sous le numero S.11.0154.F :

Sur le premier moyen :

Dans la mesure ou il invoque la violation des articles 23 et 24 du Codejudiciaire, le moyen, qui reproche à la cour du travail d'avoir statuesur une question litigieuse dont elle n'etait plus saisie parce qu'elleavait dejà rendu une decision sur celle-ci dans la meme cause et entreles memes parties, est irrecevable.

Pour le surplus, l'arret du 20 octobre 2010 considere qu'« au vu desseuls elements dont dispose la cour [du travail], il y a lieu de fixerprovisoirement les arrieres de remuneration à la somme provisionnelled'un euro, outre un euro provisionnel du chef des pecules de vacances,doubles pecules de vacances et primes de fin d'annee ». Pour ce motif, ilcondamne la defenderesse à payer au demandeur des sommes provisionnellesbrutes d'un euro à valoir sur les arrieres de remuneration et d'un euroà titre de pecule de vacances, declarant ainsi recevable la demande dudemandeur en paiement de ces remunerations et pecules ; il ordonne lareouverture des debats afin de permettre aux parties d'etablir le decomptedes sommes restant dues par la defenderesse au demandeur en fonction dunombre d'heures fournies par ce dernier du 2 novembre 1998 au 18 novembre2003, de la remuneration correspondante et des sommes effectivementperc,ues.

En statuant de la sorte, l'arret du 20 octobre 2010 n'exclut pas quel'action du demandeur en paiement des arrieres de remuneration soitpartiellement prescrite.

L'arret attaque du 1er juin 2011 a des lors pu, sans violer l'article 19du Code judiciaire, decider que « les arrieres de remuneration pour laperiode anterieure au 24 fevrier 1999 etaient prescrits à la date de lacitation introductive d'instance ».

Dans la mesure ou il est recevable, le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le deuxieme moyen :

L'arret du 20 octobre 2010 ordonne la reouverture des debats sur lesarrieres de remuneration dus par la defenderesse au demandeur et inviteles parties à s'expliquer sur les heures de travail effectivementfournies par le demandeur qui pouvaient etre considerees comme des heuressupplementaires.

Pour etablir le montant des arrieres de remuneration, la defenderesseproposait un nombre d'heures de travail ; elle enonc,ait avoir tenucompte, d'une part, des supplements de salaire pour les heures effectueesla nuit et le week-end, qu'elle soutenait avoir determinees sur la basedes donnees disponibles et, pour les periodes pour lesquelles il n'enexistait pas, par extrapolation ; elle exposait avoir etabli, d'autrepart, les heures effectuees « suivant l'horaire de base », qu'ellefixait à 164,66 heures par mois, et au-delà de cet horaire ; ellesoulignait que le travail fourni au-delà de l'horaire de base ne l'avaitpas necessairement ete la nuit ou le week-end et, inversement, que touteheure de nuit et de week-end ne constituait pas, en application de lareglementation sur la duree du travail qu'elle detaillait, du travailsupplementaire.

Dans ses conclusions, le demandeur proposait un nombre d'heures de travaildifferent ; il enonc,ait que « toutes les heures qui depassent le volumed'employe normal peuvent etre considerees comme supplementaires et enoutre de nuit, de recuperation apres le travail de nuit, de week-end etjours feries, etc. » et demandait, pour ces motifs, de designer unexpert charge de determiner les supplements de remuneration dus au « fait que la tres grande majorite de ces heures supplementaires doiventetre considerees comme ayant ete prestees la nuit, les week-ends et lesjours de conge ».

Quant à la premiere branche :

En considerant que le demandeur ne prouvait pas « l'etendue de son droità des arrieres de remuneration » et que, s'il n'etait « pas en mesurede produire les elements relatifs aux heures qu'il a[vait] prestees,aucune expertise ne pourrait permettre de determiner les montants exactsdus au fait que certaines prestations ont ete effectuees la nuit, lessamedis et dimanches et les jours feries », l'arret attaque du 1er juin2011 repond aux conclusions precitees du demandeur.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la seconde branche :

En retenant, apres les considerations citees en reponse à la premierebranche du moyen, le montant des arrieres de remuneration calcule par ladefenderesse, l'arret attaque du 1er juin 2011 admet le nombre d'heures detravail que cette partie proposait ainsi que leur repartition en heures detravail ordinaires, supplementaires, de nuit, de week-end ou de joursferies, et la remuneration correspondante ; il rejette, par consequent,l'affirmation du demandeur suivant laquelle « toutes les heures quidepassent le volume d'employe normal peuvent etre considerees commesupplementaires et en outre de nuit, de recuperation apres le travail denuit, de week-end et jours feries, etc. ».

Sans renverser la charge de la preuve, il determine de la sorte les reglesde droit applicables et tranche le litige conformement aux regles ainsideterminees.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Sur le troisieme moyen :

Le moyen, que l'annulation partielle de l'arret attaque du 1er juin 2011prive d'objet, est irrecevable.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les pourvois inscrits au role general sous les numeros S.11.0051.Fet S.11.0154.F ;

Casse l'arret attaque du 20 octobre 2010 en tant qu'il condamnel'association sans but lucratif Cebiodi à payer à J. S. une indemnite depreavis augmentee des interets legaux et judiciaires ;

Annule l'arret du 1er juin 2011 en tant qu'il dit pour droit qu'il n'y apas lieu de revoir le montant de l'indemnite compensatoire de preavisalloue à titre provisionnel par l'arret du 20 octobre 2010, que lesinterets sont dus sur le montant net de cette indemnite et qu'il statuesur les depens ;

Rejette les pourvois pour le surplus ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse et de l'arret partiellement annule ;

Condamne J. S. aux depens du pourvoi S.11.0154.F ;

Reserve les autres depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le jugedu fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail de Mons.

Les depens taxes, dans la cause S.11.0154.F, à la somme de deux centseptante euros nonante-cinq centimes envers la partie demanderesse et àla somme de deux cent nonante-cinq euros huit centimes envers la partiedefenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Alain Simon,Mireille Delange, Michel Lemal et Sabine Geubel et prononce en audiencepublique du quatre fevrier deux mille treize par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general delegue Michel Palumbo, avecl'assistance du greffier Lutgarde Body.

+--------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M. Lemal |
|------------+-----------+-------------|
| M. Delange | A. Simon | Chr. Storck |
+--------------------------------------+

4 fevrier 2013 S.11.0051.F/1

S.11.0154.F


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.11.0051.F
Date de la décision : 04/02/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 28/02/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2013-02-04;s.11.0051.f ?
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