Cour de cassation de Belgique
Arret
7820
NDEG P.13.0087.F
N. J.
personne faisant l'objet d'un mandat d'arret europeen,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maitres Robert De Baerdemaeker, Olivier Klees etPierre Monville, avocats au barreau de Bruxelles.
I. la procedure devant la cour
Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 20 decembre 2012 par lacour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un memoire annexe au present arret, encopie certifiee conforme.
Le conseiller Franc,oise Roggen a fait rapport.
L'avocat general Damien Vandermeersch a conclu.
II. la decision de la cour
Sur le moyen :
Le moyen est pris de la violation de l'article 149 de la Constitution etdes articles 4, 5DEG, et 16, S: 1er, de la loi du 19 decembre 2003relative au mandat d'arret europeen.
Le moyen reproche à l'arret attaque de refuser l'execution du mandatd'arret europeen sans proceder au controle prevu audit article 4, 5DEG, etsans repondre aux conclusions du demandeur à cet egard.
L'article 149 de la Constitution n'est pas applicable aux decisions desjuridictions d'instruction statuant sur l'execution du mandat d'arreteuropeen. Mais, des lors que l'article 16 de la loi du 19 decembre 2003organise un debat contradictoire devant les juridictions d'instruction etoblige celles-ci à motiver leurs decisions, elles sont tenues de repondreaux conclusions dans la mesure ou la contestation porte sur les conditionsauxquelles la loi subordonne dans le cas d'espece l'execution du mandatd'arret europeen.
En vertu de l'article 4, 5DEG, precite, l'execution du mandat d'arreteuropeen doit etre refusee s'il y a des raisons de croire que celle-ciaura pour effet de porter atteinte aux droits fondamentaux de la personneconcernee, tels qu'ils sont consacres par l'article 6 du Traite surl'Union europeenne, soit ceux qui sont garantis par la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et ceux quiresultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres del'Union europeenne, en tant que principes generaux communautaires.
Compte tenu du principe de confiance mutuelle entre les Etats membres, lerefus de remise doit etre justifie par des elements circonstanciesindiquant un danger manifeste pour les droits de la personne et aptes àrenverser la presomption de respect de ces droits dont l'Etat d'emissionbeneficie.
Avant d'ordonner l'execution d'un mandat d'arret europeen emanant d'unautre Etat membre, il incombe à la juridiction d'instruction, non pasd'exercer un controle complet de la procedure etrangere et de laregularite dudit mandat, mais de verifier le respect des articles 4 à 8de la loi du 19 decembre 2003.
Le demandeur a soutenu devant les juges d'appel que le mandat d'arretaffirmait sa culpabilite en des termes violant la presomption d'innocence.
L'execution du mandat d'arret europeen doit etre refusee s'il existe desraisons serieuses de croire qu'elle aurait pour effet de violer lapresomption susdite.
Par adoption du requisitoire complementaire du ministere public, l'arretconstate que, contrairement à ce que la traduction libre du mandatd'arret pouvait laisser entendre, les autorites de l'Etat d'emissionutilisent le mode conditionnel pour decrire les faits reproches audemandeur.
La chambre des mises en accusation a pu, des lors, legalement considererqu'il n'existait pas de raisons serieuses de croire que l'execution dumandat compromettra le respect de la presomption d'innocence par letribunal appele à statuer sur le bien-fonde des poursuites.
Le demandeur a egalement conclu au manque de loyaute de l'autoritejudiciaire espagnole, lui reprochant d'avoir refuse l'intervention« precoce » de son avocat et de ne pas l'avoir entendu lors d'unecommission rogatoire menee en Suisse. De plus, il invoquait l'annulationd'un precedent mandat d'arret europeen delivre contre lui, la motivationirreguliere du maintien en detention de son frere et l'existence d'unelettre envoyee par recommande que les autorites espagnoles declaraient nepas avoir rec,ue.
Par adoption des motifs du requisitoire complementaire, l'arret constatequ'aucune disposition legale n'impose d'entendre la personne concerneelors d'une commission rogatoire internationale ou avant la delivrance d'unmandat d'arret europeen. Il enonce egalement qu'aucune illegalite ne peutse deduire de l'annulation d'une precedente demande d'extradition dudemandeur adressee aux autorites suisses. Il considere encore qu'iln'existe aucune raison de croire que l'execution du mandat d'arreteuropeen meconnaitrait ses droits fondamentaux au motif que l'avocat dudemandeur n'a pu, en son absence, se constituer partie à la cause àl'effet de le representer en Espagne, le juge d'instruction espagnol ayantadmis cette possibilite lorsque le demandeur lui sera defere.
Par ces considerations, les juges d'appel ont pu legalement justifier leurdecision qu'il n'y avait pas lieu d'appliquer la cause de refusd'execution du mandat d'arret europeen prevue à l'article 4, 5DEG, de laloi. Ils n'avaient pas à repondre aux autres elements qui ne concernaientpas les conditions auxquelles la loi subordonne dans le cas d'especel'execution du mandat.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Enfin, le moyen soutient que le fait de renvoyer aux ecrits de proceduredu ministere public ne suffit pas à rencontrer le devoir de motivationqui s'impose à la juridiction d'instruction.
Le juge peut motiver sa decision par reference à un acte de la procedure,pourvu qu'il ait ete soumis à la contradiction des parties et que cesmotifs soient pertinents.
En tant qu'il soutient le contraire, le moyen manque en droit.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxes à la somme de soixante-quatre euros quarante centimesdus.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, president de section, BenoitDejemeppe, Pierre Cornelis, Gustave Steffens et Franc,oise Roggen,conseillers, et prononce en audience publique du vingt-trois janvier deuxmille treize par le chevalier Jean de Codt, president de section, enpresence de Damien Vandermeersch, avocat general, avec l'assistance deTatiana Fenaux, greffier.
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| T. Fenaux | F. Roggen | G. Steffens |
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| P. Cornelis | B. Dejemeppe | J. de Codt |
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23 JANVIER 2013 P.13.0087.F/5