Cour de cassation de Belgique
Arret
1593
NDEG C.11.0363.F
M. O.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,
contre
C. A.,
defendeur en cassation,
represente par Maitre Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 480, ou il est faitelection de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 20 decembre2010 par la cour d'appel de Mons, statuant comme juridiction de renvoiensuite de l'arret de la Cour du 24 novembre 2008.
Le 23 novembre 2012, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.
Le president de section Albert Fettweis a fait rapport et l'avocat generalJean Marie Genicot a ete entendu en ses conclusions.
II. Les moyens de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, le demandeur presente deux moyens.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
Il resulte de l'article 3, alinea 3, du Code civil, avant son abrogationpar la loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privebelge, que les lois belges concernant l'etat et la capacite des personnesregissent les Belges, meme residant en pays etranger, et qu'en principeles etrangers sont en Belgique, quant à l'etat et à la capacite despersonnes, regis par leur loi nationale.
Les articles 1475 à 1479 du Code civil, tels qu'ils ont ete modifies parla loi du 23 novembre 1998 instaurant la cohabitation legale et avant lamodification de l'article 1476 par la loi du 3 decembre 2005, de l'article1477 par la loi du 28 mars 2007 et de l'article 1479 par la loi du 28janvier 2003, ont essentiellement pour objet d'assurer une protectionpatrimoniale limitee aux cohabitants, quels que soient leur sexe et laparente eventuelle qui les unit.
La cohabitation legale organisee par ces dispositions ne releve des lorspas de l'etat des personnes.
Le moyen, en cette branche, manque en droit.
Quant à la seconde branche :
Les incapacites propres à un rapport juridique sont regies par la loiapplicable à ce rapport.
Il suit de la reponse à la premiere branche que la capacite de faire unedeclaration de cohabitation legale conformement aux articles 1475 à 1479precites et de conclure un contrat organisant cette cohabitation n'est pasregie par l'article 3, alinea 3, du Code civil.
Le moyen, en cette branche, manque en droit.
Sur le second moyen :
Quant à la deuxieme branche :
L'arret attaque considere que « le contrat du 8 octobre 1999, concluavant l'entree en vigueur de la loi du 23 novembre 1998, etait un contratautonome destine à sortir immediatement ses effets sans que cetteefficacite ait ete subordonnee à une declaration de cohabitation legalequi, comme le releve [le defendeur], n'etait de toute fac,on pas possiblepuisque la loi n'etait pas encore en vigueur et que l'arrete royal quidevait decider de la date de son entree en vigueur n'avait pas encore eteadopte, [que], de plus, la convention litigieuse signee par les partiesmentionnait expressement qu'elle etait conclue `dans le prolongement decelle conclue anterieurement' et devait etre consideree `comme ayant priscours au jour ou leur cohabitation a(vait) commence', en maniere telle quel'on doit admettre que la validite du contrat conclu le 8 octobre 1999 estde toute maniere independante de la question de la validite, au regard dudroit international prive, de la declaration de cohabitation legaleeffectuee en mars 2000 par les parties ».
L'arret attaque releve que, « contrairement à ce que soutient [ledemandeur], il ne resulte nullement de la lecture de la conventionlitigieuse que les parties ont voulu, contractuellement, subordonner lavalidite de celle-ci à l'existence ou à la persistance de leur viecommune » et qu' « il n'est pas inutile de rappeler que meme avantl'entree en vigueur de la loi du 23 novembre 1998, il etait permis auxcohabitants de conclure des contrats patrimoniaux independants d'un statutde cohabitation legale qui n'existait pas encore ».
Sur la base de cette interpretation de la volonte commune des parties,l'arret attaque a pu, sans violer les dispositions legales visees par lemoyen, en cette branche, considerer que la convention du 8 octobre 1999etait un contrat autonome, independant de la declaration de cohabitationlegale.
L'arret attaque confere, pour le surplus, à cette convention les effetsque, dans l'interpretation qu'il en donne, elle a legalement entre lesparties et ne meconnait pas, des lors, sa force obligatoire.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Quant à la premiere branche :
Les motifs reproduits dans la reponse à la deuxieme branche du moyensuffisent à justifier la decision attaquee.
Le moyen, en cette branche, qui ne saurait entrainer la cassation, estdenue d'interet, partant, irrecevable.
Quant à la troisieme branche :
Le moyen, en cette branche, soutient que la convention du 8 octobre 1999avait un objet partiellement illicite en ce qu'elle prevoyait, en sonarticle 6, que la part indivise du demandeur reviendrait au defendeur encas de deces avant la fin de la cohabitation et contenait ainsi un pactesur succession future prohibe par la loi. Il reproche à l'arret attaquede decider, en depit de cette stipulation, que ladite convention a etevalablement conclue.
Le litige opposant les parties a pour objet le reglement de leur situationpatrimoniale à la suite de la declaration de cessation de leurcohabitation legale, faite par le demandeur le 13 septembre 2009, soit deleur vivant.
L'examen de la validite de l'article 6 de la convention ne presente deslors d'interet que si sa nullite emporte celle de la convention entiere.
Il appartient au juge du fond d'apprecier en fait si la nullite d'uneclause d'une convention affecte la validite de l'ensemble de celle-ci.
Le moyen, en cette branche, requiert des lors, pour son examen, uneverification d'elements de fait, pour laquelle la Cour est sans pouvoir etest, partant, irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux depens.
Les depens taxes à la somme de six cent soixante-neuf euros soixante-neufcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de centseptante-cinq euros vingt-sept centimes en debet envers la partiedefenderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers DidierBatsele, Martine Regout, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononce enaudience publique du dix-sept janvier deux mille treize par le presidentde section Albert Fettweis, en presence de l'avocat general Jean MarieGenicot, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
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| M. Regout | D. Batsele | A. Fettweis |
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17 JANVIER 2013 C.11.0363.F /6