Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG C.11.0387.F
AG INSURANCE, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,
demanderesse en cassation,
representee par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee, 67, ou il estfait election de domicile,
contre
1. M.P. et
2. L. R.,
defendeurs en cassation,
representes par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 22 novembre2010 par la cour d'appel de Mons.
Par ordonnance du 18 decembre 2012, le premier president a renvoye lacause devant la troisieme chambre.
Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.
L'avocat general Jean Marie Genicot a conclu.
II. Les moyens de cassation
La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :
Premier moyen :
Dispositions legales violees
- articles 1134, notamment alinea 1er, 1135, 1153, 1319, 1320 et 1322 duCode civil ;
- article 67, specialement S: 2bis, 2DEG et 3DEG, de la loi du 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre, tant avant qu'apres samodification par les lois des 21 mai 2003 et 17 septembre 2005 ;
- article 67, S: 2bis, 5DEG, b), de la loi du 25 juin 1992 sur le contratd'assurance terrestre, avant sa modification par la loi du 21 mai 2003 ;
- article 4 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre preliminaire duCode de procedure penale ;
- articles 28ter et 63 du Code d'instruction criminelle.
Decisions et motifs critiques
L'arret condamne la demanderesse à payer aux defendeurs les interets autaux legal sur le montant de la condamnation (76.033,35 euros) prononceepar l'arret interlocutoire rendu en la cause le 9 fevrier 2010, depuis le6 decembre 2001, date du depot du rapport de l'expert fixant le montantdes dommages dus au sinistre litigieux, jusqu'au 31 mars 2010, outre lesdepens d'appel des defendeurs, aux motifs suivants :
« L'article 18 des conditions generales de la police d'assurance liantles parties prevoit que :
- l'indemnite d'assurance doit etre payee dans les 30 jours qui suivent ladate de cloture de l'expertise ou, à defaut, la date de fixation dudommage, les taxes etant payees sur production des pieces justificatives,
- s'il existe des presomptions que le sinistre peut etre du à un faitintentionnel de l'assure ou du beneficiaire de l'indemnite, l'assureur ale droit de prendre prealablement connaissance du dossier repressif etdoit toutefois en faire la demande dans les 30 jours de la cloture del'expertise. En ce cas, l'assureur doit payer l'indemnite dans les 30jours ou il a eu connaissance des conclusions de l'information repressive,pour autant que l'assure ou le beneficiaire de l'indemnite ne soit paspoursuivi penalement,
- en outre, si la fixation de l'indemnite ou celle des responsabilitesassurees sont contestees, l'assureur doit effectuer le paiement del'indemnite eventuelle dans les 30 jours de la cloture desditescontestations.
En l'espece, aucune information repressive n'a ete ouverte par leministere public ensuite de l'incendie litigieux. La demanderesse n'a pasdepose plainte et ne s'est pas non plus constituee partie civile et ce,malgre le caractere apparemment volontaire de l'incendie. Ni ses assures,les defendeurs, ni leur niece S. R. n'ont, a fortiori, ete poursuivispenalement en relation avec cet incendie.
Les dispositions de l'article 67 de la loi du 25 juin 1992 reglementant lepaiement de l'indemnite d'assurance et les dispositions contractuellesprecitees impliquent que l'assureur est tenu de payer l'indemnited'assurance dans les trente jours de la fixation du prejudice par voied'expertise, comme ce fut le cas en l'espece.
La [demanderesse] considere que le paiement de l'indemnite est demeurelitigieux jusqu'à l'arret prononce en la cause le 9 fevrier 2010, lequela mis fin au conflit decoulant du caractere intentionnel de l'incendielitigieux et de son imputation par l'assureur au fait de son assure ou desa niece, S. R., laquelle se trouvait dans l'immeuble au moment dudeclenchement de l'incendie.
Elle estime qu'ayant regle le 31 mars 2010 un montant de 78.854 euros aux[defendeurs], representant le principal, franchise deduite, et uneindemnite de procedure de 3.000 euros, elle ne serait redevable d'interetsque pour la periode ecoulee entre le 9 mars 2010, soit trente jours apresl'arret mettant fin aux contestations sur le paiement de l'indemnite, etle 31 mars 2010 et, subsidiairement, admet que les interets pourraientcourir depuis la citation du 30 avril 2002.
La [demanderesse] ne peut etre suivie : [...]
- force est de constater que l'article 67, S: 2bis, 2DEG, [de la loi du 25juin 1992] subordonne implicitement mais de maniere certaine la suspensionde l'obligation d'indemniser l'assure non seulement à l'existence depresomptions quant au caractere intentionnel du sinistre mais en outre àl'ouverture d'une information ou d'une instruction repressive ensuite dece sinistre, quod non en l'espece ;
- la [demanderesse] a des lors pris deliberement le risque de ne pasindemniser son assure et elle doit supporter les consequences de sonchoix.
En realite, le dernier alinea de l'article 18 des conditions generales dela police d'assurance meconnait la nature des effets declaratifs et nonconstitutifs de droit de l'arret qui a fixe le montant du prejudicerevenant en l'espece aux [defendeurs] ».
Griefs
Premiere branche
A tort l'arret soutient-il que l'article 67, 2bis, 2DEG, de la loi du 25juin 1992 et l'article 18 des conditions generales de la policed'assurance liant les parties « impliquent que l'assureur est tenu depayer l'indemnite d'assurance dans les trente jours de la fixation duprejudice par voie d'expertise », soit en l'espece dans les trente jourssuivant le depot du rapport, le 6 novembre 2001.
L'article 67, S: 2bis, de la loi du 25 juin 1992, avant comme apres samodification par les lois du 21 mai 2003 et du 19 septembre 2005, prevoit2DEG que les delais dans lesquels l'assureur doit payer l'indemnite sontsuspendus dans le cas ou « il existe des presomptions que le sinistrepeut etre du à un fait intentionnel dans le chef de l'assure [...].L'assureur peut se reserver le droit de lever prealablement la copie dudossier repressif [...]. L'eventuel paiement doit intervenir dans lestrente jours ou l'assureur a eu connaissance des conclusions duditdossier, pour autant que l'assureur ou le beneficiaire qui reclamel'indemnite ne soit pas poursuivi penalement » ; 3DEG ou 5DEG, b) (avantsa modification par la loi du 21 mai 2003) que, « dans le cas [...] oules responsabilites sont contestees, le paiement de la partie contestee del'eventuelle indemnite doit intervenir dans les trente jours qui suiventla cloture des contestations ».
De son cote, l'article 18, alinea 3, des conditions generales de la policed'assurance liant les parties precisait : « en outre, si la fixation del'indemnite ou celle des responsabilites assurees sont contestees,l'assureur doit effectuer le paiement de l'indemnite eventuelle dans lestrente jours de la cloture
desdites contestations ».
Il ressort de ces dispositions de l'article 67, 2bis, 2DEG plusparticulierement, que, contrairement à ce qu'affirme l'arret, lasuspension de l'obligation d'indemniser l'assure n'est pas subordonnee àl'ouverture d'une information ou d'une instruction repressive etl'assureur n'est nullement tenu, à peine de manquer à la bonne foi, dedeposer plainte ou de se constituer partie civile lorsqu'il existe, commeen l'espece, des presomptions de l'existence d'un fait intentionnel.
Ni l'article 67, 2bis, 2DEG ou 3DEG (ou 5DEG, b), de la loi du 25 juin1992, ni l'article 18 des conditions generales de la police d'assurancequi prevoient le paiement de l'indemnite dans les trente jours de lacloture des contestations n'imposent à l'assureur de porter devant lajuridiction penale la contestation concernant le caractere intentionnel dusinistre.
L'article 4 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre preliminaire duCode de procedure penale dispose que l'action civile peut etre poursuivieen meme temps et devant les memes juges que l'action publique tandis quel'article 28ter du Code d'instruction criminelle donne au procureur du Roi« un droit et un devoir general d'information ». à la personne qui sepretend lesee par un crime ou un delit est seulement reservee la faculted'en rendre plainte (article 63 du Code d'instruction criminelle).
La demanderesse conservait des lors le droit de faire trancher par le jugecivil la contestation portant sur la question si l'incendie litigieux estdu à un fait intentionnel des defendeurs. On ne peut poser en regle,comme l'a fait l'arret, que des poursuites repressives permettaient deresoudre plus rapidement cette contestation et que le recours à un procescivil serait dilatoire.
Meme si l'arret prononce en la cause le 9 fevrier 2010 avait seulement uneffet declaratif et non constitutif de droits, il n'en reste pas moins quela contestation concernant le caractere intentionnel du sinistre a ete« cloturee », au sens des articles 67, 2bis, de la loi du 25 juin 1992et 18 des conditions generales de la police, le 9 fevrier seulement.
Il s'ensuit que la condamnation de la demanderesse à payer des interets(moratoires) sur l'indemnite revenant aux defendeurs, non à partir du 9fevrier 2010, date de l'arret qui « a mis fin au conflit decoulant ducaractere intentionnel de l'incendie » et à laquelle, par consequent, lacreance des defendeurs est devenue exigible, mais depuis le 6 decembre2001, « trentieme jour suivant le depot du rapport d'expertise », aumotif que l'article 67, S: 2bis, 2DEG, de la loi du 25 juin 1992subordonnerait le report du paiement de l'indemnite à l'ouverture d'uneinformation ou d'une instruction repressive tandis que l'article 18,alinea 3, des conditions generales de la police d'assurance meconnaitraitla nature de l'effet seulement declaratif de droits de l'arret du 9fevrier 2010, n'est pas legalement justifiee (violation des dispositionslegales citees ci-dessus, plus specialement de l'article 67, S: 2bis,2DEG, et 5DEG, b) (ancien), de la loi du 25 juin 1992 et des articles 1134et 1135 du Code civil, qui consacrent la force obligatoire de l'article 18des conditions generales du contrat d'assurance liant les parties).
Deuxieme branche
En decidant que les dispositions de l'article 18 des conditions generalesde la police signifient que l'assureur est tenu de payer l'indemnite dansles trente jours de la fixation du prejudice par l'expert et qu'il ne peutdifferer le paiement jusqu'à l'expiration d'un delai de trente jours àcompter de la cloture de la contestation portant sur l'existence d'un faitintentionnel si, comme en l'espece, il n'a pas active une information ouune instruction penale, l'arret donne de l'article 18 precite uneinterpretation inconciliable avec ses termes et partant viole la foi quilui est due (violation des articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil) ; enoutre, il subordonne l'application dudit article 18, de son dernier alineaplus precisement, à une condition que cette disposition ne mentionne paset, partant, il viole sa force obligatoire (violation des articles 1134 et1135 du Code civil, de l'article 1134, alinea 1er, plus specialement).
Troisieme branche
Des lors qu'en se fondant sur l'article 67 de la loi du 25 juin 1992 etsur l'interpretation de l'article 18 des conditions generales de la policelitigieuse, il estime illegalement que ces dispositions obligeaient lademanderesse à privilegier une procedure penale en cas de presomption del'existence d'un fait intentionnel, l'arret n'a pu legalement decider que« l'interpretation (par la demanderesse) des conditions generales de lapolice d'assurance heurte le principe d'execution de bonne foi desconventions ».
En le decidant, l'arret viole la notion legale de bonne foi et l'article1134, alinea 3, du Code civil en vertu duquel « les conventions doiventetre executees de bonne foi ».
Quatrieme branche
Le paiement d'interets moratoires suppose non seulement que la dette soitcertaine et liquide mais aussi et surtout qu'elle soit exigible. Autrementdit, le debiteur ne peut etre condamne au paiement d'interets moratoiresque s'il est en defaut de payer une dette exigible. Tant qu'une creancen'est pas exigible, il ne peut y avoir de retard dans le paiement.
Lorsque, comme en l'espece, la contestation sur le caractere intentionneldu sinistre est portee devant le juge, seule une decision definitive surcette contestation rend la creance d'indemnite de l'assure exigible.
L'application de l'article 1153, alinea 1er, du Code civil, qui prevoit lepaiement d'interets legaux en cas de retard dans l'execution d'uneobligation de payer une somme d'argent, est subordonnee à l'existenced'une creance exigible.
En constatant que la contestation portant sur le caractere intentionnel del'incendie litigieux et, par voie de consequence, sur la question si lademanderesse etait debitrice d'indemnites à l'egard des defendeurs a« pris fin » le 9 fevrier 2010, l'arret signifie que la creance desdefendeurs n'est devenue exigible qu'à cette date et n'a partant pu, sansvioler ledit article 1153, alinea 1er, du Code civil, condamner lademanderesse au paiement d'interets à compter d'une date anterieure au 9fevrier 2010.
Second moyen
Dispositions legales violees
- article 149 de la Constitution ;
* articles 1146 et 1153, principalement alinea 3, du Code civil.
Decisions et motifs critiques
L'arret condamne la demanderesse à payer aux defendeurs les interets autaux legal sur le montant de la condamnation (76.033,35 euros) prononceepar l'arret interlocutoire rendu en la cause le 9 fevrier 2010, depuis le6 decembre 2001, date du depot du rapport de l'expert fixant le montantdes dommages dus au sinistre litigieux, jusqu'au 31 mars 2010, outre lesdepens d'appel des defendeurs.
Griefs
Premiere branche
Dans ses « conclusions d'appel apres reouverture des debats », lademanderesse a soutenu « que l'article 1153, alineas 1er et 2, du Codecivil subordonne la production d'interets à une sommation portant sur unecreance qui est certaine, liquide et exigible ».
Par aucun de ses motifs, l'arret attaque ne repond à cette defense sur lanecessite d'une sommation pour faire courir les interets (moratoires) etne constate que la demanderesse aurait ete sommee de payer l'indemnitequ'elle a reglee le 31 mars 2010.
Des lors, l'arret n'est pas regulierement motive en ce qu'il condamne lademanderesse à payer des interets sur le montant de la condamnationportee contre elle par le (premier) arret du 9 fevrier 2010, depuis le 6decembre 2001.
Seconde branche
L'article 1146 du Code civil dispose que « les dommages et interets nesont dus que lorsque le debiteur est en demeure de les payer ».
Selon l'article 1153, alinea 3, du Code civil, « les interets [resultantdu retard dans l'execution de l'obligation de payer] sont dus à partir dujour de la sommation de payer, excepte dans le cas ou la loi les faitcourir de plein droit ».
Devrait-on meme admettre - quod non -, comme semble le decider l'arret,qu'en vertu de l'article 67 de la loi du 25 juin 1992 et de l'article 18des conditions generales de la police d'assurance, la creance d'indemnitedes defendeurs etait devenue exigible des la cloture de l'expertise et lafixation du dommage, il demeure que ces dispositions definissent le momentà partir duquel l'indemnite est exigible, mais ne dispensent pas lepreneur d'assurance de l'obligation d'une mise en demeure pour fairecourir les interets moratoires.
Il s'ensuit que la decision qui condamne la demanderesse à payer desinterets (moratoires) depuis le 6 decembre 2001 sur l'indemnite dejàpayee aux defendeurs, sans constater que la demanderesse aurait ete sommeede la payer, viole les articles 1146 et 1153, alinea 3, du Code civil.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
En vertu de l'article 67, S: 2, 3DEG, de la loi du 25 juin 1992 sur lecontrat d'assurance terrestre, dans sa version applicable au litige avantsa modification par les lois des 21 mai 2003 et 17 septembre 2005,l'indemnite d'assurance contre l'incendie est, en regle, payable dans lestrente jours qui suivent la date de cloture de l'expertise ou à defaut ladate de la fixation du montant du dommage.
Par derogation à cette disposition, l'article 67, S: 2, 5DEG, applicableau litige, dispose que :
a) si des presomptions existent que le sinistre peut etre du à un faitintentionnel dans le chef de l'assure ou du beneficiaire d'assurance,ainsi qu'en cas de vol, l'assureur peut se reserver le droit de leverprealablement copie du dossier repressif ; la demande d'autorisation d'enprendre connaissance doit etre formulee au plus tard dans les trente joursde la cloture de l'expertise ordonnee par lui et l'eventuel paiement doitintervenir dans les trente jours ou l'assureur a eu connaissance desconclusions dudit dossier, pour autant que l'assure ou le beneficiaire,qui reclame l'indemnite, ne soit pas poursuivi penalement ;
b) de plus, si la fixation de l'indemnite ou les responsabilites assureessont contestees, le paiement de l'eventuelle indemnite doit intervenirdans les trente jours qui suivent la cloture desdites contestations.
L'article 18 des conditions generales de la police d'assurance litigieuse,que l'arret reproduit, stipule en ses alineas 3 et 4 les deux memesderogations.
Lorsque l'assureur refuse de couvrir un sinistre incendie en invoquant quecelui-ci peut etre du à un fait intentionnel de l'assure ou dubeneficiaire d'assurance, c'est la derogation prevue sous a) de l'article67, S: 2, 5DEG, precite qui est seule applicable, à l'exclusion de celleprevue sous b).
Dans la mesure ou il repose sur le soutenement contraire, le moyen, encette branche, manque en droit.
Il ressort des constatations de l'arret que, si la demanderesse a soutenuque l'incendie litigieux etait du à un fait intentionnel dans le chef desdefendeurs, ses assures, ou de leur niece, occupante des lieux lors de lasurvenance du sinistre, aucune information repressive n'a ete ouverte parle ministere public ensuite de cet incendie, la demanderesse n'a pasdepose plainte et ne s'est pas non plus constituee partie civileconcernant cet incendie et ni les defendeurs ni leur niece n'ont etepoursuivis penalement à raison de cet incendie.
En considerant sur la base de ces constatations que la demanderesse nepeut invoquer le benefice de la suspension de l'obligation d'indemniserprevue à l'article 67, S: 2bis, 2DEG, correspondant à l'article 67, S:2, 5DEG, a), precite, avant les modifications apportees à cettedisposition par les lois precitees, et à l'article 18, alinea 3, desconditions generales, au motif que cette disposition subordonne cettesuspension « non seulement à l'existence de presomptions quant aucaractere intentionnel du sinistre mais en outre à l'ouverture d'uneinformation ou d'une instruction repressive ensuite de ce sinistre »,l'arret justifie legalement sa decision de ne pas faire application aulitige de cette derogation.
Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.
Quant à la deuxieme branche :
Le moyen, en cette branche, ne reproche pas à la cour d'appel d'avoirconsidere que l'article 18 des conditions generales de la policed'assurance contenait une affirmation qui ne s'y trouvait pas ou qu'ellene contenait pas une affirmation qui y figurait, mais bien de donner decette disposition contractuelle une interpretation differente de celle quela demanderesse proposait. Un tel grief ne constitue pas une violation dela foi due aux actes.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
Pour le surplus, en reconnaissant à l'article 18 precite l'effet que,dans l'interpretation qu'il en donne, elle a legalement entre les parties,l'arret ne meconnait pas la force obligatoire de cette dispositioncontractuelle.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Quant à la troisieme branche :
Le reproche fait, en cette branche, à l'arret attaque de violer la notionlegale de bonne foi contenue dans l'article 1134, alinea 3, du Code civilest entierement deduit des griefs vainement invoques par les deuxpremieres branches du moyen.
En cette branche, le moyen est irrecevable.
Quant à la quatrieme branche :
L'arret attaque enonce que « la [demanderesse] considere que le payementde l'indemnite est demeure litigieux jusqu'à l'arret prononce en la causele 9 fevrier 2010, lequel a mis fin au conflit decoulant du caractereintentionnel de l'incendie litigieux et de son imputation par l'assureurau fait de son assure ou de sa niece [...]. Elle estime qu'ayant regle le31 mars 2010 un montant de 78.854 euros aux [defendeurs], representant leprincipal, franchise deduite et une indemnite de procedure de 3.000 euros,elle ne serait redevable d'interets que pour la periode ecoulee entre le 9mars 2010, soit 30 jours apres l'arret mettant fin aux contestations surle payement de l'indemnite, et le 31 mars 2010 ».
L'arret se limite ainsi à exposer la position de la demanderesse sansconsiderer lui-meme que la contestation portant sur le caractereintentionnel de l'incendie litigieux a pris fin le 9 fevrier 2010.
Le moyen, en cette branche, qui suppose le contraire, repose sur uneinterpretation inexacte de l'arret attaque et, partant, manque en fait.
Sur le second moyen :
Quant à la premiere branche :
L'arret attaque considere, d'une part, que « les dispositions del'article 67 de la loi du 25 juin 1992 reglementant le payement del'indemnite d'assurance et les dispositions contractuelles [de l'article18 des conditions generales de la police d'assurance litigieuse]impliquent que l'assureur est tenu de payer l'indemnite d'assurance dansles trente jours de la fixation du prejudice par voie d'expertise, commece fut le cas en l'espece » et, d'autre part, que « la positionsoutenue par [la demanderesse] se heurte [...] aussi à la volonte dulegislateur de sanctionner plus severement les retards de l'assureur àindemniser son assure, volonte qui s'illustre le plus clairement dans lesdispositions de l'article 67, S: 6 nouveau, de la loi du 25 juin 1992,lequel prevoit qu'en cas de non-respect des dispositions des delais visesau S: 2, la partie de l'indemnite qui n'est pas versee à temps porte deplein droit et sans mise en demeure interet au double du taux d'interetlegal depuis le jour de l'expiration du delai jusqu'au jour du payementeffectif, à moins que l'assureur ne prouve que le retard n'est pasimputable à lui-meme ou à l'un de ses mandataires ».
Ainsi l'arret repond, en les contredisant, aux conclusions de lademanderesse faisant valoir que « l'article 1153, alineas 1er et 2, duCode civil subordonne la production d'interets à une sommation portantsur une creance qui est certaine, liquide et exigible ».
En cette branche, le moyen manque en fait.
Quant à la seconde branche :
Il ressort de l'article 67 de la loi du 25 juin 1992, tant dans sa versionapplicable au litige que dans celle resultant de sa modification par laloi du 21 mai 2003, que cette disposition deroge au droit commun desarticles 1146 et 1153 du Code civil.
Le moyen, qui en cette branche, repose sur le soutenement contraire,manque en droit.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux depens.
Les depens taxes à la somme de cinq cent septante-quatre euros vingt-septcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de centseptante-cinq euros vingt-sept centimes envers les parties defenderesses.
Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Alain Simon, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononceen audience publique du sept janvier deux mille treize par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general general JeanMarie Genicot, avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
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| F. Gobert | M. Lemal | M. Delange |
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| A. Simon | M. Regout | A. Fettweis |
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7 JANVIER 2013 C.11.0387.F/15