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20/12/2012 | BELGIQUE | N°C.10.0667.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 20 décembre 2012, C.10.0667.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

5412



NDEG C.10.0667.F

1. F. T.,

2. J. L.-P.,

3. C. K.,

4. A. V.,

5. R. R.,

6. C. B.,

7. D. A.,

8. J. F.,

9. J.-M. S.,

10. D. S., avocat, agissant en qualite d'administrateur provisoire desbiens d'A. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

1. Communaute franc,a

ise, representee par son gouvernement, en la personnedu ministre charge de l'Enseignement superieur, dont le cabinet est etablià Namur, rue Kefer, 2,

defend...

Cour de cassation de Belgique

Arret

5412

NDEG C.10.0667.F

1. F. T.,

2. J. L.-P.,

3. C. K.,

4. A. V.,

5. R. R.,

6. C. B.,

7. D. A.,

8. J. F.,

9. J.-M. S.,

10. D. S., avocat, agissant en qualite d'administrateur provisoire desbiens d'A. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

1. Communaute franc,aise, representee par son gouvernement, en la personnedu ministre charge de l'Enseignement superieur, dont le cabinet est etablià Namur, rue Kefer, 2,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

2. SERVICE FEDERAL DES PENSIONS DU SECTEUR PUBLIC, organisme public dontle siege est etabli à Saint-Gilles, place Victor Horta, 40,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee, 67, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 19 mars 2003par la cour d'appel de Bruxelles.

Le 26 novembre 2012, l'avocat general Andre Henkes a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Didier Batsele a fait rapport et l'avocat general AndreHenkes a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

Les demandeurs presentent deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 77, S: 1er, de la loi du 24 decembre 1976 relative auxpropositions budgetaires 1976-1977 ;

- article 1er de l'arrete royal du 15 decembre 1978 portant execution dela loi du 24 decembre 1976 relative aux propositions budgetaires1976-1977, tel qu'il etait applicable avant son abrogation par l'article 2de l'arrete royal du 8 aout 1984 portant execution de la loi du 24decembre 1976 relative aux propositions budgetaires 1976-1977 ;

- article 1er de l'arrete royal du 8 aout 1984 portant execution de la loidu 24 decembre 1976 relative aux propositions budgetaires 1976-1977 ;

- article 2, specialement chapitre III, 2, de l'arrete royal du 9 novembre1978 fixant au 1er avril 1972 les echelles de traitements des membres dupersonnel directeur et enseignant et du personnel auxiliaire d'educationdes etablissements d'enseignement artistique de plein exercice de l'Etat,relevant du ministre de la Culture neerlandaise et du ministre de laCulture franc,aise, ainsi que des membres du personnel du serviced'inspection charge de la surveillance des etablissements d'enseignementartistique ;

- article 13, modifie par l'article 3 de l'arrete royal du 30 mars 1976,de l'arrete royal du 25 juin 1973 fixant les conditions d'admission deseleves et la duree des cours dans les conservatoires royaux de musique ;

- articles 108 et 159 de la Constitution ;

- article 3, S: 1er, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnees parl'arrete royal du 12 janvier 1973, tel qu'il etait en vigueur avant samodification par la loi du 9 aout 1980.

Decisions et motifs critiques

L'arret, confirmant le jugement entrepris, declare non fondee la demandedes demandeurs tendant à faire dire pour droit qu'ils doivent obtenir untraitement à l'echelle baremique au taux de 100 p.c. pour chacune desheures constituant l'horaire dont ils ont ou ont eu la charge depuis queleur horaire comporte douze heures et en deboute les demandeurs.

L'arret decide que, par l'effet des arretes royaux du 25 juin 1973 et du 9novembre 1978, l'horaire complet des demandeurs au Conservatoires'etablissait à six heures par semaine remunerees à 100 p.c. et que lesheures en surplus etaient des heures complementaires pour lesquelles 50p.c. de la remuneration de base etait due.

L'arret fonde sa decision sur les motifs qu'il indique sub 1 et plusparticulierement sur les considerations que :

« 1.3. Deux simples constatations s'imposent :

Les [demandeurs] soutiennent à la fois qu'il faudrait faire le calcul deleurs douze heures de cours comprenant `en dedans' six heures`complementaires' mais à calculer à 100 p.c. - alors que cette deuxiemetranche de six heures a ete remuneree à 50 p.c. - et que la base de leurrevendication se trouverait en meme temps dans la notion de ` prestationscompletes' de douze heures, definitivement fixee par l'arrete royal du 9novembre 1978 qui abrogerait ou rendrait sans objet la distinction entreles six premieres heures, completees par six heures `complementaires', ausens de l'arrete royal du 25 juin 1973 ;

Certaines des pieces produites par les [demandeurs] sont les actesofficiels, non contestes à l'epoque, par lesquels leur sont attribueesdes heures complementaires, c'est-à-dire, pratiquement - avec quelqueslegeres variantes d'un [demandeur] à l'autre -, six heures s'ajoutant auxsix heures de cours, au sens de l'article 13 de l'arrete royal du 25 juin1973 (maximum de six heures complementaires) ; ces actes - qui ne peuventprevaloir sur l'application correcte de la loi et n'empechent certes pasla revendication actuelle des (demandeurs) - n'ont jamais ete contestes,alors que plusieurs de ces actes sont posterieurs à l'arrete royal du 15decembre 1978 fixant dans ce secteur de l'enseignement ce qu'il fautentendre par `prestations completes', ce qui - dans le second volet del'argumentation des (demandeurs) - justifierait leur revendication.

1.4. Aucune des dispositions rappelees ci-dessus ne permet de conclure àl'abrogation, meme implicite, de l'arrete royal du 25 juin 1973 instaurantle regime des `heures complementaires' et de leur remuneration à 1/12 dela remuneration annuelle brute, soit à 50 p.c. du traitement baremiquefixe, pour six heures, par l'arrete royal du 15 decembre 1978, qui avaiteffet au 1er avril 1972.

L'arrete royal du 25 juin 1973 :

- prevoit en son article 13 que, pour certains cours, les professeurspouvaient etre tenus, sauf empechement motive, de donner des heurescomplementaires, conformement à l'article 12 - qui fixe la duree de coursque chaque eleve doit recevoir individuellement pour certaines matieres -et dispose que le nombre de ces heures complementaires ne peut etresuperieur à six par semaine ;

- dispose que ces heures sont fixees par le ministre au premier novembrede chaque annee, sur proposition du directeur de l'etablissement (article23) ;

- prevoit, par mesure transitoire, que le professeur ainsi tenu en vertudes articles 12 et 13 de donner ces heures complementaires rec,oit uneremuneration de un douzieme de son traitement annuel brut par heurecomplementaire.

On ne voit pas comment il aurait ete remplace par l'arrete royal du 9novembre 1978 qui, selon les (demandeurs), fixerait retroactivement au 1eravril 1972 le bareme applicable à partir (...) de six heures de coursdans l'enseignement de la musique et par l'arrete royal du 15 decembre1978 portant execution de la loi du 24 decembre 1976 relative auxpropositions budgetaires, qui determine les `prestations completes' (douzeheures) à prendre en consideration pour la categorie d'enseignants danslaquelle se trouvent les (demandeurs).

1.5. Les arretes royaux du 15 decembre 1978 et ensuite du 8 aout 1984determinent sans doute les `prestations completes', ici desormais douzeheures, mais `en vue de l'application de l'article 77, S: 1er, de la loidu 24 decembre 1976' relative aux dispositions budgetaires qui, `sansprejudice de l'application d'autres dispositions legales plusrestrictives', erige en principe que, pour les personnes qui exercent uneprofession principale en dehors de l'enseignement ou des prestations dansl'enseignement egales à un emploi à prestations completes, il n'y aurapas de remuneration ou de subvention-traitement pour l'ensemble desprestations fournies dans l'enseignement organise ou subventionne parl'Etat, y compris l'enseignement de promotion sociale ou à horairereduit, qui depasse un tiers du minimum d'heures requis pour un emploi àprestations completes.

1.6. Il ne peut pas etre deduit de la loi du 24 decembre 1976 et desarretes royaux du 15 decembre 1978 et du 8 aout 1984 que cette notiond'emploi à prestations completes sert à determiner le nombre d'heures decours pour lequel un enseignant est paye à 100 p.c.

Ces textes determinent si un enseignant, en cas de cumul, peut ou non etreretribue pour les taches qu'il accomplirait au-delà du maximum determinepar cette notion d'emploi à prestations completes et ce, dans tout lereseau de l'enseignement organise ou subventionne par l'Etat, y comprisl'enseignement de promotion sociale ou à horaire reduit et donc passeulement dans les conservatoires royaux de musique, seuls vises parl'arrete royal du 25 juin 1973.

C'est le seuil absolu de la remuneration - ou plutot de l'arret deremuneration ou de subvention - qui parait fixe par rapport au nombred'heures correspondant, pour la determination de cette limite, à unemploi à prestations completes.

Ces dispositions ne sont donc pas incompatibles avec la structure deprestations et de traitement des [demandeurs], conforme aux arretes royauxdu 25 juin 1973 et du 9 novembre 1978, comportant six heures, remunereesselon le bareme 610, completees par un maximum de six heures, remunereesà 50 p.c. (un douzieme du traitement annuel brut), toujours selon lebareme 610 et l'arrete royal du 25 juin 1973 dont rien n'indique qu'ilsles abrogent, les modifient ou les rendent sans objet.

1.7. La reference baremique applicable aux [demandeurs] - dont il fautrappeler qu'elle forme un tout et qu'elle concerne de nombreuses autresfonctions que celles des [demandeurs] - demeure l'arrete royal du 9novembre 1978 fixant au 1er avril 1972 l'echelle 610, `enseignement de lamusique six heures par semaine', en fonction non exclusive.

Des lors que l'arrete royal du 25 juin 1973 n'est pas abroge, il reste leseul amenagement legal de cette echelle baremique, applicable et appliqueaux [demandeurs].

1.8. L'arret (42.628) du 21 avril 1993 et l'arret (25.362) du 19 janvier1984 du Conseil d'Etat invoques par les (demandeurs) (...), la circulairedu 19 octobre 1973 relative à l'enseignement musical subventionne, lacirculaire du 10 mai 1977 relative à l'execution de l'article 77 de laloi du 24 decembre 1976 ou les dispositions relatives à l'Institut demusique d'eglise et de pedagogie musicale ne sont pas de nature àmodifier cette lecture.

1.9. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le jugement entrepris adeboute les (demandeurs) de leur demande tendant à faire rectifier leurstraitement et, partant, pour certains d'entre eux, encore à la cause endegre d'appel, la base de calcul de leur pension ».

Griefs

Premiere branche

1. Aux termes de l'article 77, S: 1er, de la loi du 24 decembre 1976relative aux propositions budgetaires 1976-1977 :

« Sans prejudice de l'application d'autres dispositions legales plusrestrictives, il ne peut etre attribue ni remuneration nisubvention-traitement pour les prestations fournies dans l'enseignementorganise ou subventionne par l'Etat par une personne qui exerce dejà uneprofession principale en dehors de l'enseignement ou des prestations dansl'enseignement egales à un emploi à prestations completes au moins, pourl'ensemble des prestations complementaires dans l'enseignement qui depasseun tiers du nombre minimum d'heures requis, pour un emploi à prestationscompletes dans la ou les fonctions correspondant à ces prestations.

Si la notion d'emploi à prestations completes dans l'enseignement n'estpas definie, elle est determinee par le Roi par comparaison avec unenseignement de plein exercice correspondant ».

Si cette disposition a effectivement pour objet de limiter l'attributionde remunerations et de subventions-traitements aux personnes qui cumulentune fonction principale avec des prestations complementaires dansl'enseignement, encore est-il qu'elle fait explicitement reference à lanotion « d'emploi à prestations completes » dans l'enseignement etcharge, en son second alinea, le Roi de definir cette notion.

En ce qui concerne l'enseignement artistique superieur, la notion« d'emploi à prestations completes » a ete definie par un premierarrete royal du 15 decembre 1978 portant execution de la loi du 24decembre 1976 relative aux propositions budgetaires 1976-1977, qui a eteabroge et remplace par l'arrete royal du 8 aout 1984 portant execution dela loi du 24 decembre 1976 relative aux propositions budgetaires1976-1977.

Aux termes de l'article 1er de l'arrete royal du 15 decembre 1978, « envue de l'application de l'article 77, S: 1er, de la loi du 24 decembre1976, les prestations completes pour les emplois et mandats del'enseignement artistique cites ci-apres sont fixees à : A. enseignementartistique de plein exercice : b) Musique : professeur [...] : 12 heurespar semaine ». Cette disposition a ete remplacee par l'article 1er duditarrete royal du 8 aout 1984 qui dispose qu' « en vue de l'application del'article 77, S: 1er, de la loi du 24 decembre 1976, les prestationscompletes pour les emplois et mandats de l'enseignement artistique citesci-apres sont fixees à : enseignement artistique superieur (artsplastiques et musique) : professeur fonction non exclusive : 12 heures parsemaine ».

Ces textes, qui n'ont nullement pour finalite de determiner l'echelle detraitement attachee à un emploi de six heures comme l'affirme erronementl'arret, definissent ainsi « le nombre minimum d'heures requises » pourun emploi à prestations completes dans l'enseignement superieurartistique et fixent ce nombre à douze par semaine.

L'article 2, chapitre III, 2, de l'arrete royal du 9 novembre 1978, quietablit une echelle baremique applicable à une fonction non exclusive deprofesseur de cours artistique pour l'enseignement de la musique à raisonde six heures par semaine, a un objectif essentiellement salarial et n'apas pour objet de definir la notion d'horaire complet dans l'enseignementmusical superieur.

Il se deduit ainsi de ces dispositions qu'un horaire complet dansl'enseignement artistique superieur compte douze heures de cours parsemaine.

2. En vertu de l'article 13 de l'arrete royal du 25 juin 1973 fixant lesconditions d'admission des eleves et la duree des cours dans lesconservatoires royaux de musique (telle que cette disposition a etemodifiee par l'arrete royal du 30 mars 1976), les professeurs decomposition, fugue, contrepoint, analyse musicale, harmonie ecrite etpratique, direction d'orchestre, instruments, musique de chambre, chant,art lyrique, declamation, art dramatique, diction pour chanteurs,methodologie speciale, lecture musicale et transposition, specialisationen solfege, solfege pour eleves chanteurs, formation vocale peuvent etretenus, sauf empechement motive, de donner des heures complementaires, dontle nombre ne peut etre superieur à six par semaine et qui sont remunereesà 50 p.c. Les heures complementaires au sens de cette disposition sontcelles qui s'ajoutent à la charge normale des professeurs et sont donccelles qui sont prestees au-delà d'un horaire complet. Peuvent des lorsseulement etre qualifiees d'« heures complementaires » les heuresprestees au-delà des douze heures composant l'horaire de base completd'un professeur exerc,ant dans l'enseignement artistique superieur. Seulesces six heures complementaires sont payees à 50 p.c. de la valeur desheures de base.

3. Il s'ensuit que l'arret n'a pu legalement debouter les demandeurs deleur demande tendant au paiement d'arrieres pour les heures prestees etqualifiees erronement d'heures « complementaires », alors que les heuresprestees l'avaient ete dans le cadre de leur horaire complet de douzeheures et ne constituaient des lors pas des heures « complementaires »devant etre retribuees à 50 p.c. de la valeur des heures de base(violation des articles 77,

S: 1er, de la loi du 24 decembre 1976 relative aux propositionsbudgetaires 1976-1977, 1er de l'arrete royal du 15 decembre 1978 portantexecution de la loi du 24 decembre 1976 relative aux propositionsbudgetaires 1976-1977, tel qu'il etait applicable avant son abrogation parl'article 2 de l'arrete royal du 8 aout 1984, 1er de l'arrete royal du 8aout 1984 portant execution de la loi du 24 decembre 1976 relative auxpropositions budgetaires 1976-1977, 2, chapitre III, 2, de l'arrete royaldu 9 novembre 1978 fixant au 1er avril 1972 les echelles de traitementsdes membres du personnel directeur et enseignant et du personnelauxiliaire d'education des etablissements d'enseignement artistique deplein exercice de l'Etat, relevant du ministre de la Culture neerlandaiseet du ministre de la Culture franc,aise, ainsi que des membres dupersonnel du service d'inspection charge de la surveillance desetablissements d'enseignement artistique, et 13 de l'arrete royal du 25juin 1973 fixant les conditions d'admission des eleves et la duree descours dans les conservatoires royaux de musique).

Seconde branche

1. Dut-on meme admettre - quod non - que l'arrete royal du 9 novembre 1978fixe à six le nombre d'heures prestees dans un horaire complet pour lesprofesseurs de musique, auxquelles s'ajoutent, le cas echeant, les heurescomplementaires visees par l'article 13 de l'arrete royal du 25 juin 1973(modifie par l'arrete royal du 30 mars 1976), l'arret n'est en toutehypothese pas legalement justifie.

2. L'article 108 de la Constitution dispose que le Roi fait les reglementset arretes necessaires pour l'execution des lois, sans pouvoir jamais nisuspendre les lois elles-memes ni dispenser de leur execution.

L'article 159 de la Constitution dispose que les cours et tribunauxn'appliquent les arretes et reglements generaux, provinciaux et locauxqu'autant qu'ils sont conformes aux lois.

En vertu de l'article 3, S: 1er, des lois sur le Conseil d'Etatcoordonnees le 12 janvier 1973, hors les cas d'urgence specialementmotives, les projets d'arretes reglementaires sont soumis à l'avis motivede la section de legislation du Conseil d'Etat.

3. Tant l'arrete royal du 9 novembre 1978 que l'arrete royal du 25 juin1973 sont entaches d'illegalite en ce qu'ils ont ete adoptes sansconsultation prealable de la section de legislation du Conseil d'Etat.

L'arret constate que l'arrete royal du 9 novembre 1978 determineeffectivement la notion d'horaire complet dans l'enseignement musicalsuperieur et que pareil horaire est de six heures par semaine et en deduitque les six premieres heures de cours donnees par un professeur de musiquedans l'enseignement superieur doivent etre payees au tarif plein, soit à100 p.c., et que les heures complementaires excedant cet horaire completdoivent etre payees à 50 p.c., en vertu de l'article 13 de l'arrete royaldu 25 juin 1973 (modifie par l'arrete royal du 30 mars 1976).

L'arrete royal du 9 novembre 1978 ne mentionne pas qu'il aurait eteprecede d'un avis motive donne par la section de legislation du Conseild'Etat et n'invoque aucun motif d'urgence pour justifier l'eventuelledispense de soumettre l'avant-projet de reglement à cet avis motive. Lanon-observation de la formalite substantielle que constitue la demanded'avis au Conseil d'Etat sans que soit alleguee ni justifiee l'urgenceentraine l'illegalite de l'arrete royal du 9 novembre 1978.

En ce qui concerne l'arrete royal du 25 juin 1973, un delai de plus detrois mois s'est ecoule entre son adoption et sa publication au Moniteurbelge. Le fait de laisser s'ecouler un tel delai avant de proceder à lapublication de l'arrete royal indique de maniere manifeste que l'urgenceinvoquee qui permettait de ne pas soumettre l'arrete à l'avis de lasection de legislation du Conseil d'Etat n'existait pas ; l'arrete royalprecite est ainsi illegal.

4. En faisant application de ces arretes royaux nonobstant leurillegalite, l'arret meconnait les articles 108 et 159 de la Constitutionainsi que l'article 3, S: 1er, des lois coordonnees sur le Conseil d'Etattel qu'il etait en vigueur à la date de l'adoption des arretes royaux.

Second moyen

Dispositions legales violees

- article 8 de la loi du 21 juillet 1844 sur les pensions civiles etecclesiastiques, tel qu'il etait applicable tant avant qu'apres samodification par la loi du 25 janvier 1999, en vigueur le 1er janvier1999 ;

- article 2 du Code civil ;

- article 149 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

L'arret, confirmant le jugement entrepris, declare non fondee la demandedes demandeurs tendant à faire prendre en compte pour le calcul de leurpension le traitement qui leur a ete alloue pour les heures« complementaires » et les en deboute.

L'arret fonde sa decision sur les motifs qu'il indique sub 2 et plusparticulierement sur les considerations en substance que :

« 2. La demande des demandeurs retraites de faire prendre en compte pourle calcul de leur pension le traitement qui leur a ete alloue pour lesheures `complementaires'

Les [cinquieme et neuvieme demandeurs], qui sont pensionnes, font valoirque c'est à tort qu'il n'est tenu compte pour le calcul de leur pensionque de leur traitement pour les six premieres heures de cours pourlesquelles ils etaient nommes, alors qu'il faudrait egalement tenir comptedu traitement qu'ils ont rec,u pour les heures complementaires.

Il a ete decide ci-dessus que la remuneration de ces demandeurs, comme desautres demandeurs, a ete correctement payee, à savoir jusqu'àconcurrence de 50 p.c. pour les heures `complementaires', au sens rappeleci-dessus, qui leur ont ete attribuees.

[Le defendeur] fait valoir avec pertinence qu'aucune pension ne peut etreaccordee qu'en vertu d'une loi et que l'article 8 de la loi du 21 juillet1844 sur les pensions civiles et ecclesiastiques, modifiee par la loi du25 janvier 1999, applicable aux demandeurs pensionnes, ne permettrait deprendre en compte, comme traitement de reference, que le traitementbaremique des demandeurs pour six heures et que les heures complementairesqui leur ont ete payees ne font pas partie des supplements limitativementenumeres par l'article 231 de la loi du 25 janvier 1999 pour leuractivite, dont la nature n'est pas modifiee, ce supplement de traitementn'etant pas `inherent à la fonction', au sens des articles 241 et 249 decette loi.

C'est donc à bon droit, et pour des raisons que la cour [d'appel] adopte,que le premier juge a deboute (les cinquieme et neuvieme demandeurs) decette partie de leur demande ».

Griefs

1. Aux termes de l'article 2 du Code civil, la loi ne dispose que pourl'avenir et elle n'a point d'effet retroactif.

En vertu de l'article 8 de la loi du 21 juillet 1844, tel qu'il etaitapplicable avant sa modification par la loi du 25 janvier 1999, il y avaitlieu de prendre en compte pour le calcul de la pension de retraite letraitement attache à la fonction ainsi que, le cas echeant, toutsupplement de traitement inherent à cette fonction. Cette dispositionn'enonc,ait pas de maniere limitative les prestations complementaires quipouvaient etre prises en consideration pour le calcul de la pension. Leparagraphe 2 de l'article 8 avait en effet un autre contenu. Le paragraphe1er, pour sa part, exigeait uniquement que le supplement de traitement futinherent à la fonction.

Apres sa modification par la loi du 25 janvier 1999, l'article 8 de la loidu 21 juillet 1844 enumere de maniere exhaustive les supplements detraitement qui peuvent etre pris en compte pour la determination dutraitement de reference utilise pour le calcul de la pension. La loi du 25janvier 1999 est entree en vigueur le 1er janvier 1999.

2. Les demandeurs exposaient en conclusions que, sous l'empire del'article 8 de la loi du 21 juillet 1844 sur les pensions civiles etecclesiastiques, applicable au moment du calcul de la pension des(cinquieme et neuvieme demandeurs), il y avait lieu de prendre en comptepour le calcul le traitement attache à la fonction ainsi que toutsupplement de traitement inherent à cette fonction.

Ils rappelaient à cet egard que leur horaire complet se composant dedouze heures, le calcul de la pension devait necessairement tenir comptede ce nombre d'heures, motif pour lequel d'ailleurs ces six heurescomplementaires prestees par les professeurs de conservatoire n'etaientpas visees par l'article 8, S: 2, de la loi precitee du 21 juillet 1844apres sa modification par la loi du 25 janvier 1999.

Subsidiairement, ils estimaient que les six heures complementairesprecitees etaient inherentes à leur fonction dans la mesure ou ellesconcernaient un enseignement identique, paye suivant la meme echellebaremique que les six premieres heures et ou elles pouvaient etre imposeesd'office au professeur sans que celui-ci puisse les refuser.

Leurs conclusions soulignaient par ailleurs que le legislateur n'a entendulimiter les heures supplementaires à prendre en consideration que pourl'avenir, la liste figurant à l'article 8, S: 2, de la loi du 21 juillet1844 n'etant limitative qu'à compter de l'entree en vigueur de la loi du25 juin 1999.

3. L'arret renvoie tout d'abord à la decision precitee, critiquee dans lepremier moyen, relative à l'horaire des demandeurs et au traitement àallouer pour leurs heures complementaires.

Il considere ensuite que leur demande ne peut etre accueillie au motifque :

« [Le second defendeur] fait valoir avec pertinence qu'aucune pension nepeut etre accordee qu'en vertu d'une loi et que l'article 8 de la loi du21 juillet 1844 sur les pensions civiles et ecclesiastiques, modifiee parla loi du 25 janvier 1999, applicable aux demandeurs pensionnes, nepermettrait de prendre en compte, comme traitement de reference, que letraitement baremique des demandeurs pour six heures et que les heurescomplementaires qui leur ont ete payees ne font pas partie des supplementslimitativement enumeres par l'article 231 de la loi du 25 janvier 1999pour leur activite, dont la nature n'est pas modifiee, ce supplement detraitement n'etant pas `inherent à la fonction', au sens des articles 241et 249 de cette loi ».

4. L'arret applique ainsi au litige l'article 8 de la loi du 21 juillet1844 dans sa version modifiee par la loi du 25 janvier 1999.

Or, il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que lesdemandeurs retraites ont ete pensionnes respectivement en 1993 et 1994 etque c'etait des lors l'article 8 de la loi du 21 juillet 1844 dans saversion anterieure à la modification de 1999 qui leur etait applicable.

5. En ce qu'il fait application de l'article 8 de la loi du 21 juillet1844, tel qu'il etait applicable apres sa modification par la loi du 25janvier 1999, en vigueur le 1er janvier 1999, l'arret confere à cettedisposition un effet retroactif qu'elle n'a pas et, des lors, ne justifiepas legalement sa decision (violation de l'ensemble des dispositionslegales citees en tete du moyen, à l'exception de l'article 149 de laConstitution).

A tout le moins, l'arret, en se bornant, en se referant à la loi du 25janvier 1999, à enoncer sans autre precision que les supplementslitigieux n'etaient pas inherents à la fonction, ne repond pas auxconclusions detaillees des demandeurs sur la notion de supplements detraitement inherents à la fonction et sur l'interpretation à donner àla loi du 25 janvier 1999 et son impact sur le calcul des pensionsanterieures. L'arret n'est, partant, pas regulierement motive (violationde l'article 149 de la Constitution).

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la seconde branche :

Sur la fin de non-recevoir opposee par la defenderesse au moyen, en cettebranche, et deduite de sa nouveaute :

L'obligation de consultation de la section de legislation du Conseild'Etat sur le texte des projets d'arretes royaux ayant une porteereglementaire est une formalite substantielle d'ordre public.

La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.

Sur le fondement du moyen, en cette branche :

L'arret rejette la demande des demandeurs relative à l'obtention d'untraitement à l'echelle baremique au taux de 100 p.c. pour chacune desheures comprises dans l'horaire de douze heures en se fondant sur lesarretes royaux du 25 juin 1973 fixant les conditions d'admission deseleves et la duree des cours dans les conservatoires royaux de musique etdu 9 novembre 1978 fixant au 1er avril 1972 les echelles de traitements decertaines categories du personnel de l'enseignement, dont il deduit quel'horaire complet des demandeurs au conservatoire s'elevait à six heurespar semaine et que seules ces six heures devaient etre remunerees à 100p.c.

S'agissant de l'arrete royal du 9 novembre 1978, l'arret considere qu'ildetermine la notion d'horaire complet dans l'enseignement superieurmusical, cet horaire complet etant fixe à six heures par semaine payeesà 100 p.c.

Cet arrete royal, qui a un caractere reglementaire en ce qu'il determinele nombre d'heures justifiant l'application d'une echelle de traitement,n'a pas ete soumis à l'avis de la section de legislation du Conseild'Etat.

S'agissant de l'arrete royal du 25 juin 1973, il ne ressort pas de sonpreambule qu'il aurait ete soumis à l'avis de la section de legislationdu Conseil d'Etat. Il n'invoque pas davantage l'urgence permettant dejustifier la dispense de consultation.

L'arret, qui fait application de ces arretes royaux, viole l'article 3, S:1er, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnees le 12 janvier 1973, ainsique les articles 108 et 159 de la Constitution.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur le second moyen :

L'article 8 de la loi du 21 juillet 1844 sur les pensions civiles etecclesiastiques, tel qu'il s'appliquait avant sa modification par la loidu 25 janvier 1999, enonc,ait qu'il y avait lieu de prendre en compte pourle calcul de la pension de retraite le traitement attache à la fonctionainsi que, le cas echeant, tout supplement de traitement inherent à cettefonction.

Depuis sa modification par la loi du 25 janvier 1999, entree en vigueur le1er janvier 1999, l'article 8 de la loi du 21 juillet 1844 enumerelimitativement les supplements de traitements qui peuvent etre pris encompte pour la determination du traitement de reference utilise pour lecalcul de la pension.

Alors que les cinquieme et neuvieme demandeurs demandaient que l'article 8de la loi du 21 juillet 1844 leur soit applique dans sa version anterieureà sa modification du 25 janvier 1999, l'arret applique ladite loi dans saversion modifiee.

Ce faisant, l'arret confere à l'article 8, tel qu'il a ete modifie, uneffet retroactif qu'il n'a pas et ne justifie pas legalement sa decisionde dire non fondee la demande des cinquieme et neuvieme demandeurs tendantà faire prendre en compte pour le calcul de leur pension le traitementqui leur avait ete verse pour les heures de cours complementaires.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, le conseiller Didier Batsele, lepresident de section Albert Fettweis, les conseillers Martine Regout etMireille Delange, et prononce en audience publique du vingt decembre deuxmille douze par le president Christian Storck, en presence de l'avocatgeneral Andre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Delange | M. Regout |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

20 DECEMBRE 2012 C.10.0667.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.10.0667.F
Date de la décision : 20/12/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-12-20;c.10.0667.f ?
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