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03/12/2012 | BELGIQUE | N°C.10.0040.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 décembre 2012, C.10.0040.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

1461



NDEG C.10.0040.F

COMMUNAUTE FRANC,AISE, representee par son gouvernement, en la personne duministre de l'Enseignement obligatoire, dont le cabinet est etabli àBruxelles, place Surlet de Chokier, 15-17,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Watermael-Boisfort, boulevard du Souverain, 36 ouil est fait election de domicile,

contre

1. W. , domicilie à Nivelles, chemin Saint-Pierre, 15,

2. AXA BELGIU

M, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boisfort, boulevard du Souverain, 25,

defendeurs...

Cour de cassation de Belgique

Arret

1461

NDEG C.10.0040.F

COMMUNAUTE FRANC,AISE, representee par son gouvernement, en la personne duministre de l'Enseignement obligatoire, dont le cabinet est etabli àBruxelles, place Surlet de Chokier, 15-17,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Watermael-Boisfort, boulevard du Souverain, 36 ouil est fait election de domicile,

contre

1. W. , domicilie à Nivelles, chemin Saint-Pierre, 15,

2. AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boisfort, boulevard du Souverain, 25,

defendeurs en cassation,

representes par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee, 67, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 4 mars 2009par le tribunal de premiere instance de Mons, statuant en degre d'appel.

Par ordonnance du 13 novembre 2012, le premier president a renvoye lacause devant la troisieme chambre.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse presente trois moyens dont le premier est libelle dans lestermes suivants :

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- article 14, S: 3, de la loi du 3 juillet 1967 sur la reparation desdommages resultant des accidents du travail, des accidents survenus sur lechemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public.

Decision et motifs critiques

Le jugement attaque decide que « c'est à juste titre que le [jugementdont appel] a limite le recours subrogatoire de (la demanderesse) jusqu'àconcurrence du montant que F. D. aurait du percevoir dans le cadre d'uneindemnisation de son dommage materiel temporaire professionnel en droitcommun ».

Il justifie cette decision par tous ses motifs, reputes ici integralementreproduits, et notamment par les motifs suivants :

« L'article 14, S: 3 , de la loi du 3 juillet 1967 [...] prevoit unesubrogation automatique en faveur de l'employeur qui supporte, notamment,la charge de la remuneration, jusqu'à concurrence de la remunerationpayee pendant la periode d'incapacite temporaire ; (...)

L'article 32 de 1'arrete royal du 24 janvier 1969 prevoit que les agentsdes services publics conservent, pendant la periode de l'incapacitetemporaire, la remuneration due en raison de leur contrat de travail ou deleur statut legal ou reglementaire ; (...)

En vertu du principe rappele ci-dessus, au terme duquel la partie subrogeen'a pas plus de droit que le [subrogeant] lui-meme, il echet de rechercherl'etendue des droits de F. D. en droit

commun ;

Ces droits ont ete circonscrits à l'issue d'une expertise medicaleamiable organisee entre elle-meme et (les defendeurs) ;

F. D. a marque son accord, et a ete indemnisee en droit commun, sur labase d'un rapport d'expertise medicale amiable qui a limite la perioded'incapacite temporaire totale du 9 au 31 mai 2000 ;

A compter du 1er juin 2000, les experts se sont accordes pour dire que F.D. n'etait plus atteinte que d'une invalidite temporaire partielle, ce quiexclut toute repercussion sur les activites economiques de la victime,notamment sur ses activites professionnelles ;

Si F. D. n'avait pas ete employee au service de la demanderesse au jour del'accident et n'avait, en consequence, beneficie d'aucune remunerationdurant les incapacites temporaires, elle n'aurait pu reclamer à l'auteurresponsable de son dommage une indemnisation de son dommage materielprofessionnel temporaire que pour cette periode courant du 9 au 31 mai2000 ;

La demanderesse est subrogee aux droits de F. D. et dans les limites deceux-ci uniquement ;

L'auteur responsable de l'accident ne pourrait etre en effet tenu à uneindemnisation differente suivant que la victime a pu ou non beneficier desa remuneration, totale ou partielle, par rapport à la nature de sesactivites professionnelles, au-delà de la date à laquelle cette victimeest consideree comme apte à reprendre ses activites et ce, en applicationde dispositions, legales, reglementaires ou contractuelles auxquelles ilreste etranger ».

Griefs

L'article 14, S: 3, de la loi du 3 juillet 1967, applicable aux faits,dispose que :

« L'application des dispositions de la presente loi implique, de pleindroit, subrogation au profit des personnes morales ou des etablissementssusvises qui supportent la charge de la rente dans tous les droits,actions et moyens generalement quelconques que la victime ou ses ayantsdroit seraient en droit de faire valoir conformement au paragraphe 1ercontre la personne responsable de l'accident du travail ou de la maladieprofessionnelle et ce, jusqu'à concurrence du montant des rentes et desindemnites prevues par la presente loi et du montant egal au capitalrepresentatif de ces rentes.

En outre, les personnes morales ou les etablissements susvises quisupportent la charge de la remuneration sont subroges de plein droit danstous les droits, actions et moyens generalement quelconques que la victimeserait en droit de faire valoir conformement au paragraphe 1er contre lapersonne responsable de l'accident du travail ou de la maladieprofessionnelle jusqu'à concurrence de la remuneration payee pendant laperiode d'incapacite temporaire ».

En vertu de cette disposition, à compter du paiement de la remunerationqui realise le transfert de la creance, le droit de creance etant acquisau subroge, aucun acte auquel participe le subrogeant n'est susceptibled'affecter ce droit.

En outre, la subrogation donne à la personne subrogee le droit desoumettre à la juridiction saisie de l'action subrogatoire, sur la basede tous les moyens de preuve autorises par la loi et dans le respect duprincipe du contradictoire, tous les elements, y compris medicaux, denature à permettre l'estimation du dommage subi.

L'article 14, S: 3, precite fait obstacle à ce que les droits de lapersonne subrogee puissent etre determines en fonction de ceux qui sontreconnus à la victime, en droit commun, sur la base du rapport d'unexpert designe amiablement par une convention passee entre la victimesubrogeante et l'assureur du tiers responsable, et ce, posterieurement autransfert de la creance à la partie subrogee.

Le jugement attaque constate que la demanderesse a paye à son agent,victime de l'accident du travail litigieux, la totalite de son traitementpendant toute la periode de l'incapacite temporaire, etant du 10 mai 2000au 1er mars 2002. Le paiement de la remuneration realisant le transfert dela creance, le droit de creance etait acquis au subroge au plus tard le1er mars 2002. à partir de cette date, aucun acte auquel participe lesubrogeant n'etait plus susceptible d'affecter ce droit.

Le jugement attaque constate encore que « (les droits de F.D. en droitcommun) ont ete circonscrits à l'issue d'une expertise medicale amiableet organisee entre elle-meme et les [defendeurs] ; (...) F. D. a marqueson accord et a ete indemnisee en droit commun, sur la base d'un rapportd'expertise medicale amiable qui a limite la periode d'incapacitetemporaire totale du 9 au 31 mai 2000 ». Il resulte de l'annexe aucourrier du 15 mai 2003, etant la piece 14 du dossier de la demanderesseet la piece 8 du dossier de la defenderesse, que l'expertise medicaleamiable a ete « terminee à Mons le 27 mars 2003 ».

Il se deduit de ces deux motifs que le rapport d'expertise amiable sur labase duquel une convention d'expertise amiable a ete conclue entre lavictime et l'assureur du tiers responsable est posterieur à la naissancedu droit de subrogation de la demanderesse.

A tout le moins, le jugement attaque ne constate pas explicitement que laconvention d'expertise amiable conclue entre la victime et l'assureur dutiers responsable de l'accident serait anterieure à la naissance du droitde subrogation de la demanderesse.

En fixant les droits de la demanderesse sur la base du seul rapportmedical d'expertise amiable etabli à la suite d'une convention passeeentre la victime et l'assureur du tiers responsable, posterieurement autransfert de la creance de la victime à la demanderesse, sans avoir egardaux autres elements d'appreciation du dommage invoques par lademanderesse, le jugement attaque viole l'article 14, S: 3, de la loi du 3juillet 1967.

A tout le moins, en ne constatant pas que la convention d'expertiseamiable conclue entre la victime et l'assureur du tiers responsable del'accident etait anterieure à la naissance du droit de subrogation de lademanderesse, cette anteriorite etant par ailleurs une conditionnecessaire de l'opposabilite de cette convention à la demanderesse, lejugement attaque ne contient pas les constatations permettant à la Courde verifier la legalite de la decision attaquee, selon laquelle les droitsde la demanderesse sont limites par le contenu de cette convention.

Ce faisant, le jugement attaque viole l'article 149 de la Constitution.

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

En vertu de l'article 14, S: 3, de la loi du 3 juillet 1967 sur laprevention ou la reparation des dommages resultant des accidents dutravail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladiesprofessionnelles dans le secteur public, les personnes morales ou lesetablissements auxquels la loi s'applique, qui supportent la charge de laremuneration, sont, de plein droit, subroges dans tous les droits, actionset moyens que la victime serait en droit de faire valoir contre lapersonne responsable de l'accident du travail, jusqu'à concurrence de laremuneration payee pendant la periode d'incapacite temporaire.

Le transfert des droits et actions du subrogeant au subroge s'effectuantpar le paiement de la remuneration, et donc au moment de celui-ci, laconvention sur l'etendue du dommage conclue par la victime apres cepaiement n'affecte pas les droits et actions transferes.

Le jugement attaque constate que la demanderesse a paye à son agent,victime d'un accident sur le chemin du travail, la remuneration pendanttoute la periode d'incapacite temporaire de travail reconnue par leservice de sante administratif, c'est-à-dire jusqu'au 1er mars 2002 ; quela victime a, avec le defendeur, responsable de l'accident, et ladefenderesse, assureur de ce dernier, fait proceder à une expertiseamiable sur les consequences de l'accident ; que l'expertise etaittoujours en cours le 22 octobre 2002 ; que les experts ont conclu que laperiode d'incapacite temporaire de travail avait pris fin des le 31 mai2000 ; que la victime a marque son accord sur ces conclusions et qu'elle aete indemnisee en droit commun sur cette base.

Il resulte de ces constatations que la victime a conclu la convention surl'etendue du dommage apres le paiement des remunerations par lademanderesse.

En retenant, pour determiner le montant de la condamnation des defendeursau profit de la demanderesse, la periode d'incapacite temporaire detravail prenant fin le 31 mai 2000 convenue par la victime apres cepaiement, le jugement attaque ne justifie pas legalement sa decision.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant le tribunal de premiere instance de Tournai,siegeant en degre d'appel.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Alain Simon, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononceen audience publique du trois decembre deux mille douze par le presidentde section Albert Fettweis, en presence de l'avocat general delegue MichelPalumbo, avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

+-------------------------------------+
| F. Gobert | M. Lemal | M. Delange |
|-----------+-----------+-------------|
| A. Simon | M. Regout | A. Fettweis |
+-------------------------------------+

3 decembre 2012 C.10.0040.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.10.0040.F
Date de la décision : 03/12/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-12-03;c.10.0040.f ?
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