Cour de cassation de Belgique
Arret
2202
NDEG P.12.1557.F
E.F., partie civile,
demanderesse en cassation,
ayant pour conseils Maitres Karl Steinier et Stephanie Roels, avocats aubarreau de Namur,
contre
T. M., G., accuse, detenu,
defendeur en cassation,
ayant pour conseils Maitres Thierry Moreau et Marko Obradovic, avocats aubarreau de Nivelles.
I. la procedure devant la cour
Le pourvoi est dirige contre trois arrets rendus les 13 et 14 juin 2012,sous les numeros 1, 2 et 3 du greffe, par la cour d'assises de la provincedu Brabant wallon.
La demanderesse invoque un moyen dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le president de section chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.
II. la decision de la cour
A. En tant que le pourvoi est dirige contre l'arret rendu le 14 juin 2012sous le numero 2 :
En vertu de l'article 359, alinea 3, du Code d'instruction criminelle, lapartie civile ne peut se pourvoir que quant aux dispositions relatives àses interets civils.
L'arret attaque statue uniquement sur les peines infligees au defendeur.Il ne condamne pas la demanderesse à des frais de l'action publique.
Forme par une partie sans qualite, le pourvoi est irrecevable.
B. En tant que le pourvoi est dirige contre les arrets rendus les 13 et14 juin 2012 sous les numeros 1 et 3 :
Le moyen est pris de la violation de l'article 411 du Code penal. Il estreproche à la cour d'assises d'avoir, au benefice du defendeur, admis lacause d'excuse deduite de la provocation sur la base de faits qui ne lajustifient pas. Selon la demanderesse, les jures ne se sont referes qu'àla subjectivite de l'agent provoque et ont meconnu le rapport deproportionnalite que la disposition legale susdite etablit entre lagravite du crime provoque et celle de la violence qui l'a cause.
Les violences requises par l'article 411 du Code penal sont celles quipeuvent, par elles-memes, amoindrir le libre-arbitre d'une personnenormale et raisonnable et non celles qui n'ont eu cet effet qu'en raisonde l'emotivite particuliere de l'agent provoque.
La loi ne mesure pas la gravite des violences generatrices de l'excuse,qu'elles soient physiques ou morales, uniquement sur l'intensite de lareaction qu'elles ont entrainee mais egalement sur leur intensitematerielle comparee à la gravite de l'infraction provoquee.
Le juge du fond apprecie en fait si les violences presentent le caracterede gravite requis mais il appartient à la Cour de verifier s'il a pu, deses constatations souveraines, legalement deduire l'existence de l'excuse.
Pour motiver l'admission de la cause d'excuse, l'arret du 13 juin 2012releve notamment que la victime, apres avoir menace le defendeur, l'aempoigne, l'a violemment extrait de la voiture ou il s'etait assis, endechirant son vetement, demontrant par là son intention d'en venir auxmains.
Il ne saurait des lors etre soutenu que la cour d'assises et le jury sesoient referes exclusivement à l'intensite de la reaction que lecomportement de la victime a induite chez l'auteur de l'homicide en raisonde sa subjectivite propre.
L'arret releve par ailleurs que la victime s'etait dejà montree violenteà l'egard de l'accuse lors d'une altercation survenue deux jours avantles faits, et qu'au moment ou il a porte les coups mortels, l'auteur,ejecte brutalement de l'automobile ou il avait pris place, a pu etre animepar un sentiment de crainte à l'egard de son adversaire en raison de sastature physique plus importante et de sa reputation de bagarreur.
L'empoignade realisee dans les circonstances que l'arret decrit a pu etreconsideree par les juges du fond comme etant constitutive d'une violencesuffisamment grave par rapport au meurtre qu'elle a immediatementprovoque, pour se voir attribuer la portee d'une excuse attenuante au sensdes articles 411 et 414 du Code penal.
Apres avoir decide que la volonte de l'auteur de l'homicide s'est trouveealteree par un fait suffisamment grave pour produire cet effet, la courd'assises a egalement pu, sans verser dans la contradiction denoncee parle moyen, n'imputer à cette faute de la victime qu'une proportion de dixpour cent dans le partage de responsabilite entre le defunt et sonmeurtrier.
Les arrets sont, partant, regulierement motives et legalement justifies.
Le moyen ne peut etre accueilli.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux frais.
Lesdits frais taxes à la somme de cent trente et un euros quarante-troiscentimes dus dont cent et un euros quarante-trois centimes dus et trenteeuros payes par cette demanderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, president de section, president,Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis etGustave Steffens, conseillers, et prononce en audience publique du vingtet un novembre deux mille douze par le chevalier Jean de Codt, presidentde section, en presence de Michel Palumbo, avocat general delegue, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | G. Steffens | P. Cornelis |
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| B. Dejemeppe | F. Close | J. de Codt |
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21 NOVEMBRE 2012 P.12.1557.F/1