La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2012 | BELGIQUE | N°P.12.0318.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 octobre 2012, P.12.0318.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.0318.N

I.

1. VILLE D'ANVERS,

partie civile,

2. COLLEGE DES BOURGMESTRE ET ECHEVINS DE LA VILLE D'ANVERS,

demandeur d'action en reparation,

demandeurs,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,

II et III.

INSPECTEUR DU LOGEMENT EN CHARGE DE LA PROVINCE D'ANVERS,

demandeur d'action en reparation,

demandeur,

Me Veerle Tollenaere, avocat au barreau de Gand,

tous les pourvois contre

A. M.,

prevenu,

defendeur.

I. La p

rocedure devant la Cour

Les pourvois en cassation sont diriges contre l'arret rendu le 18 janvier2012 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.

La ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.0318.N

I.

1. VILLE D'ANVERS,

partie civile,

2. COLLEGE DES BOURGMESTRE ET ECHEVINS DE LA VILLE D'ANVERS,

demandeur d'action en reparation,

demandeurs,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,

II et III.

INSPECTEUR DU LOGEMENT EN CHARGE DE LA PROVINCE D'ANVERS,

demandeur d'action en reparation,

demandeur,

Me Veerle Tollenaere, avocat au barreau de Gand,

tous les pourvois contre

A. M.,

prevenu,

defendeur.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation sont diriges contre l'arret rendu le 18 janvier2012 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.

La demanderesse I.1 fait valoir deux moyens dans un memoire annexe aupresent arret, en copie certifiee conforme.

Le demandeur I.2 fait valoir un moyen dans memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.

Le demandeur II-III declare se desister, sans acquiescement, de sonpourvoi II, en tant que l'arret rendu par defaut à l'egard du defendeurn'a pas encore ete signifie à ce dernier, que le delai ordinaired'opposition n'a pas encore expire et que l'arret ne comporte pas dedecision definitive au sens de l'article 416 du Code d'instructioncriminelle.

Le demandeur II-III fait valoir respectivement un moyen dans deux memoiresannexes au present arret, en copie certifiee conforme.

L'avocat general Patrick Duinslaeger a depose des conclusions rec,ues augreffe le 25 septembre 2012.

A l'audience publique du 16 octobre 2012, le conseiller Filip Van Volsem afait rapport et l'avocat general Patrick Duinslaeger a conclu.

II. La decision de la Cour

Sur la recevabilite du pourvoi III :

1. En vertu de l'article 416, alinea 1er, du Code d'instructioncriminelle, hormis les exceptions prevues à l'alinea 2, le recours encassation contre les arrets preparatoires et d'instruction, ou lesjugements en dernier ressort de cette qualite, ne sera ouvert qu'apresl'arret ou le jugement definitif.

Selon l'article 359 du Code d'instruction criminelle, les parties ontquinze jours francs apres celui ou l'arret a ete prononce en leur presencepour declarer au greffe qu'elles se pourvoient en cassation.

2. Il resulte de ces dispositions qu'un pourvoi en cassation forme contreune decision rendue par defaut susceptible d'opposition est irrecevabletant que la voie de l'opposition est ouverte, cette regle etant egalementapplicable à la partie adverse de la partie defaillante. La possibilitede se pourvoir en cassation nait à l'expiration du delai ordinaired'opposition, ce qui suppose une signification reguliere de la decisionrendue par defaut. Il est par ailleurs sans interet de savoir si ledemandeur a fait signifier la decision rendue par defaut à une autrepartie adverse.

3. Pour apprecier la recevabilite du pourvoi, il faut que la Cour disposedes pieces demontrant la regularite de la signification de la decisionrendue par defaut à la partie defaillante.

4. Si l'ordre de signification de cette decision rendue par defaut emaned'une autre partie, il incombe au demandeur de veiller à ce que lespieces revelant la regularite de la signification de cette decision soientjointes au dossier ou deposees en temps utile au greffe de la Cour.

La seule circonstance que cette partie ait omis de joindre ces pieces audossier ou de les deposer au greffe en temps utile, ne constitue pas, pourle demandeur, un cas de force majeure.

Le demandeur, qui aurait lui-meme pu prendre l'initiative de lasignification, ne fait pas valoir ne pas avoir eu la possibilite deverifier si les pieces revelant une signification reguliere de la decisionrendue par defaut à la demande d'une autre partie, ont ete jointes audossier ou deposees au greffe en temps utile.

5. Des lors qu'il ne ressort pas des pieces auxquelles la Cour peut avoiregard que l'arret rendu par defaut à l'egard du defendeur lui a etesignifie, le pourvoi en cassation III introduit pendant le delai ordinaired'opposition est irrecevable.

Sur les moyens de la demanderesse I.1 :

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

6. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 1382 et1383 du Code civil : la demanderesse a invoque devant les juges d'appelque le dommage qu'elle a subi, consistant en frais de remuneration et detransport des travailleurs sociaux lors de l'evacuation de l'immeuble, aete cause par la faute du defendeur ; l'arret repond à cette allegationen constatant que ces frais ne constituent pas un dommage en raison del'absence de lien causal avec les infractions declarees etablies dans lechef du defendeur ; l'arret ne constate cependant pas que le dommage, telqu'il est survenu in concreto se serait egalement produit sans la fauteimputee au defendeur ; ainsi, l'arret viole la notion legale de lien decausalite.

7. Le juge constate souverainement les faits dont il deduit l'existence ounon d'un lien causal entre la faute et le dommage. La Cour verifieneanmoins si le juge a pu legalement fonder l'existence ou non du liencausal sur ces constatations.

8. L'arret decide que les frais de remuneration et de transport destravailleurs sociaux lors de l'evacuation de l'immeuble ne constituent pasun dommage ensuite des faits declares etablis dans le chef du defendeur,de sorte qu'il y a lieu de rejeter cette demande en raison de l'absence delien de causalite.

Par cette motivation, l'arret ne constate pas que le dommage, tel qu'ilest ne, se serait egalement produit sans la faute du defendeur.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Quant à la seconde branche :

9. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 149 de laConstitution, 1382 et 1383 du Code civil, 5, alinea 1er, 14 et 15 de laloi du 5 aout 1992 sur la fonction de police, 15, S: 1er, alineas 1er et5, du Code flamand du logement, 135, S: 2, 5DEG, de la nouvelle loicommunale et 42, alinea 1er, de la loi du 7 decembre 1998 organisant unservice de police integre, structure à deux niveaux : l'arret decide, àtort, que la demanderesse I.1 ne peut reclamer les frais que les servicesde police anversois ont debourses dans le cadre de l'evacuation del'immeuble du defendeur, parce que cette intervention releve, outre de lamission judiciaire, du devoir general de securite qui incombe à lafonction publique ; l'arret n'est pas legalement justifie, dans la mesureou il decide que l'intervention des services de police s'inscrit dans unemission judiciaire des lors que l'assistance que pretent les services depolice lors d'une action d'evacuation represente, conformement auxarticles 5, 14 et 15 de la loi du 5 aout 1992, un acte de policeadministrative ; l'arret n'est pas davantage legalement justifie dans lamesure ou il decide que cette assistance releve d'un devoir general desecurite qui incombe à la fonction publique, sans constater de l'economiede quelle loi ou convention ou de quel reglement il apparait que les fraisde police exposes doivent rester definitivement à charge de lademanderesse I.1 ; les articles 15, S: 1er, alineas 1er et 5, du Codeflamand du logement, l'article 135, S: 2, 5DEG, de la nouvelle loicommunale, l'article 5, alinea 1er, et 14 de la loi du 5 aout 1992 etl'article 42 de la loi du 7 decembre 1998 ne prescrivent pas que les fraisengendres par les services de police dans le cadre d'une evacuation d'unimmeuble inadapte ou inhabitable doivent rester definitivement à chargedes autorites.

10. L'article 14, alinea 1er, de la loi du 5 aout 1992 dispose que, dansl'exercice de leurs missions de police administrative, les services depolice veillent au maintien de l'ordre public en ce compris le respect deslois et reglements de police, la prevention des infractions et laprotection des personnes et des biens.

Selon l'article 14, alinea 2, ils portent egalement assistance à toutepersonne en danger.

L'article 15 de ladite loi dispose que, dans l'exercice de leurs missionsde police judiciaire, les services de police ont pour tache :

1DEG de rechercher les crimes, les delits et les contraventions, d'enrassembler les preuves, d'en donner connaissance aux autoritescompetentes, d'en saisir, arreter et mettre à la disposition del'autorite competente les auteurs, de la maniere et dans les formesdeterminees par la loi ;

2DEG de rechercher les personnes dont l'arrestation est prevue par la loi,de s'en saisir, de les arreter et de les mettre à la disposition desautorites competentes ;

3DEG de rechercher, de saisir et de mettre à la disposition de l'autoritecompetente les objets dont la saisie est prescrite ;

4DEG de transmettre aux autorites competentes le compte rendu de leursmissions ainsi que les renseignements recueillis à cette occasion.

L'article 15, S: 1er, du Code flamand du logement dispose que lebourgmestre prend toutes les mesures qu'il estime necessaires en vued'executer son arrete visant à declarer une habitation inadequate ouinhabitable. Selon l'article 15, S: 1er, alinea 5, du Code flamand dulogement, le bourgmestre prend egalement toutes les mesures utileslorsqu'il convient de proceder au relogement des habitants.

L'article 42, alinea 1er, de la loi du 7 decembre 1998 dispose que, pourl'accomplissement de ses missions de police administrative, la policelocale est placee sous l'autorite du bourgmestre qui peut lui donner, pource qui concerne l'accomplissement de ces missions sur le territoire de sacommune, les ordres, instructions et directives necessaires à cet effet.

11. Sur la base de ces dispositions, le bourgmestre peut faire appel àl'assistance des services de police en vue de l'evacuation d'un logementdeclare inadapte ou inhabitable.

Pareille assistance releve des missions de police administrative desservices de police et non des missions de police judiciaire.

Dans la mesure ou il decide que l'intervention des services de policeconsistant en l'assistance pretee lors de l'action d'evacuation du 19 mai2009, releve de la mission de police judiciaire, l'arret n'est paslegalement justifie.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fonde.

12. En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, celui qui cause àautrui un dommage est obliger de le reparer integralement, ce qui impliqueque le prejudicie soit remis dans la situation dans laquelle il se seraittrouve sans la survenance de l'acte dont il s'est plaint.

13. L'existence d'une obligation contractuelle, legale ou reglementairen'exclut pas la survenance d'un dommage au sens des articles 1382 et 1383du Code civil, à moins que le contenu ou la portee du contrat, de la loiou du reglement revelent que la depense ou la prestation à supporterdoivent rester definitivement à charge de celui qui s'y est engage ou quiy est oblige par la loi ou le reglement.

14. Il appartient au juge d'apprecier, à la lumiere de l'interpretationdu contrat, de la loi ou du reglement si, selon leur teneur ou leurportee, les depenses effectuees doivent ou non rester definitivement àcharge de celui qui a du les effectuer.

15. L'arret (...) decide que les frais engendres pour l'assistancepoliciere lors de l'action d'evacuation du 19 mai 2009 ne peuvent etreadmis parce qu'il s'agit d'un devoir general de securite à charge de lafonction publique, sans toutefois constater de la portee de quelle loi,convention ou de quel reglement il apparait que les frais d'assistancepoliciere doivent rester definitivement à charge de la demanderesse I.1 .

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur le second moyen :

16. Le moyen invoque la violation de l'article 15, S: 1er, alinea 6, duCode flamand du logement : en vertu de cette disposition, les fraisqu'elle enonce peuvent etre recuperes à charge du proprietaire dans lescas ou le bourgmestre procede au relogement ; il n'est, en outre, pasrequis que ce relogement s'acheve avec succes ; l'arret constate que lesfrais reclames par la demanderesse concernent des frais que le personnelcommunal et le personnel de police ont supportes dans le cadre del'evacuation de l'immeuble le 19 mai 2009, qu'un locataire se trouvaitdans l'immeuble au moment de l'evacuation et qu'un accueil a ete proposeà ce locataire ; l'arret deduit, à tort, de la circonstance que lelocataire a refuse l'accueil et est parti vers une destination inconnueque les frais reclames ne constituent pas des frais au sens de l'article15, S: 1er, alinea 6, 1DEG; en exigeant le succes du relogement, l'arretajoute à l'article 15, S: 1er, alinea 6, 1DEG, une condition qu'il necontient pas et ne justifie pas legalement sa decision.

17. L'article 15, S: 1er, alinea 6, 1DEG, dispose que, dans les cas ou lebourgmestre procede au relogement, les frais d'evacuation de l'habitationdeclaree inadaptee ou inhabitable peuvent etre recuperes à charge duproprietaire.

L'application de cette disposition ne requiert pas qu'il soiteffectivement procede au relogement des habitants d'une habitationdeclaree inadaptee ou inhabitable. Il suffit qu'il y ait eu evacuation deladite habitation et que soit offerte à l'habitant la possibilite derelogement.

18. L'arret (...) decide que :

- selon le proces-verbal du 19 mai 2009, un locataire se trouvait encoredans l'immeuble à cette date ;

- le rapport du « service interne de logement » revele que ce locatairea refuse de se rendre à l'accueil propose et qu'il est parti par sespropres moyens vers une destination inconnue ;

- il n'y a donc pas eu de relogement ;

- cette note interne ne demontre pas que les biens du locataire ont duetre transportes ou entreposes.

La decision fondee sur ces motifs que les frais d'engagement detravailleurs sociaux, leurs frais de transport et leur remunerationhoraire ne constituent pas des frais au sens de l'article 15, S: 1er,alinea 6, 1DEG, du Code flamand du logement, n'est pas legalementjustifiee.

Le moyen est fonde.

(...)

Par ces motifs,

La Cour

Decrete le desistement du pourvoi II ;

Casse l'arret attaque en tant qu'il :

* rejette comme etant non fondee la demande de la demanderesse I.1 ;

* ne se prononce pas sur la demande du demandeur I.2 visant à etrehabilite, en application de l'article 20bis, S: 8, du Code flamand dulogement, à recuperer à charge du defendeur les frais engendres dansle cadre de l'action d'evacuation du 19 mari 2009 ;

Rejette les pourvois pour le surplus ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Condamne le defendeur aux frais du pourvoi de la demanderesse I.1 ;

Condamne le demandeur I.2 aux deux tiers des frais de son pourvoi et ledefendeur au dernier tiers ;

Condamne la Region flamande aux frais des pourvois II et III ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, à la cour d'appel de Gand.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Maffei, les conseillers LucVan hoogenbemt, Filip Van Volsem, Antoine Lievens et Erwin Francis, etprononce en audience publique du vingt-trois octobre deux mille douze parle president de section Paul Maffei, en presence du premier avocat generalMarc De Swaef, avec l'assistance du greffier delegue Kristel VandenBossche.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,

23 octobre 2012 P.12.0318.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.12.0318.N
Date de la décision : 23/10/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-10-23;p.12.0318.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award