La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2012 | BELGIQUE | N°P.12.1584.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 octobre 2012, P.12.1584.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.1584.N

J. E.,

demandeur,

Me Siegfried De Mulder, avocat au barreau de Bruxelles,

en presence de

1. B. E.,

2. F. D.,

I. la procedure devant la Cour

II. Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 4 septembre 2012 parla cour d'appel de Bruxelles, chambre de la jeunesse.

III. Le demandeur fait valoir trois griefs dans un memoire annexe aupresent arret.

IV. Le conseiller Luc Van hoogenbemt a fait rapport.

V. L'avocat general Patrick Duinslaeger a conclu.
<

br>II. La decision de la Cour

Sur le premier grief :

1. Le grief invoque la violation de la Constitution et de la Conventioninter...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.12.1584.N

J. E.,

demandeur,

Me Siegfried De Mulder, avocat au barreau de Bruxelles,

en presence de

1. B. E.,

2. F. D.,

I. la procedure devant la Cour

II. Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 4 septembre 2012 parla cour d'appel de Bruxelles, chambre de la jeunesse.

III. Le demandeur fait valoir trois griefs dans un memoire annexe aupresent arret.

IV. Le conseiller Luc Van hoogenbemt a fait rapport.

V. L'avocat general Patrick Duinslaeger a conclu.

II. La decision de la Cour

Sur le premier grief :

1. Le grief invoque la violation de la Constitution et de la Conventioninternationale des droits de l'Enfant, ainsi que de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales et du Pacteinternational relatif aux droits civils et politiques : prendre desdecisions à l'egard de la personne mineure doit toujours se faire dansl'interet de l'enfant ; de plus, quiconque est presume innocent jusqu'àpreuve du contraire ; pour qu'une mesure provisoire de placement d'unmineur en section fermee d'une institution communautaire soit possible, ilfaut, selon la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de lajeunesse, qu'il soit constate en fait qu'un attentat serieux à unepersonne aurait ete commis par un mineur ou que ce comportement du mineurest particulierement dangereux ; par ailleurs, une telle mesure requiertune motivation particuliere ; c'est à tort que la cour d'appel decide,d'une part, qu'ensuite de l'annulation partielle de l'article 52quater,alinea 2, 1DEG, de la loi du 8 avril 1965 par la Cour constitutionnelle,il n'y a pas lieu de verifier s'il existe ou non des indices deculpabilite suffisants dans le chef du demandeur mineur et, d'autre part,que les brimades qu'il a proferees et le fait qu'une fille mineure estdecedee revelent l'atteinte portee à une personne ou à sa sante ; unetelle decision constitue une discrimination intolerable par rapport à unmajeur en detention preventive ; par ailleurs, il n'existe, en l'espece,aucun indice pareil de culpabilite ; de meme, le harcelement moral nejustifie pas à suffisance une telle mesure de placement ; la cour d'appelomet egalement de motiver la mesure de placement de maniere particuliere.

2. Dans la mesure ou il invoque sans autre precision la violation de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques, de la Convention internationale des droits de l'Enfant et dela Constitution, le grief est imprecis et, partant, irrecevable.

3. L'article 52, alinea 1er, de la loi du 8 avril 1965 dispose que,pendant la duree d'une procedure tendant à l'application d'une desmesures de protection des mineurs, le tribunal de la jeunesse prendprovisoirement à l'egard du mineur concerne les mesures de gardenecessaires.

Les mesures de garde provisoires sont prises dans l'interet de l'enfant,conformement au Titre preliminaire de la loi du 8 avril 1965. Ellespermettent egalement au juge de la jeunesse de connaitre en profondeur lapersonnalite, le degre de maturite du mineur et son cadre de vie, desuivre son developpement et de prendre ou modifier les mesures de lamaniere la plus appropriee en vue de sa protection et de son education.

Les mesures de garde provisoires sont prises au moment ou le fait qualifieinfraction n'est pas encore etabli. Le juge de la jeunesse ne peut encore,à ce moment, se prononcer sur les elements constitutifs de l'infraction,ni sur la culpabilite du mineur. Par consequent, il n'est pas tenu deconstater que le mineur age de douze à quatorze ans aurait gravementporte atteinte à une personne, tel qu'il est requis pour une mesure degarde, de preservation et d'education lorsque le juge de la jeunesse seprononce sur le fond, ou qu'il existe des indices serieux de culpabilitedans le chef du mineur.

Dans la mesure ou il est deduit d'une autre premisse juridique, le griefmanque en droit.

4. Meme si une telle mesure provisoire de placement en section fermeed'une institution communautaire constitue une privation de liberte avantjugement, il ne s'agit pas d'une privation de liberte ou d'une detentionau sens de la loi du 20 juillet 1990 relative à la detention preventive.

Ainsi, le mineur peut etre confie à une institution fermee en raisond'une infraction punie d'un emprisonnement de moins d'un an.

Dans cette mesure, le moyen manque egalement en droit.

5. En tant qu'il critique l'appreciation souveraine en fait du juge quidecide que le demandeur semble avoir un comportement dangereux, qu'ilexiste des raisons serieuses de craindre que l'interesse, s'il etait remisen liberte, commette de nouveaux crimes ou delits, se soustraie àl'action de la justice, tente de faire disparaitre des preuves ou entre encollusion avec des tiers, et que la mesure de placement ordonnee estprivilegiee à toute autre mesure provisoire, le grief est irrecevable.

6. La Cour verifie uniquement si le juge ne tire pas des faits etcirconstances qu'il a constates des consequences sans lien avec ceux-ci ouqu'ils ne pourraient justifier.

7. Le juge d'appel a constate souverainement et a decide que :

- l'instruction est toujours en cours ;

- le demandeur reconnait qu'avant le deces de la victime, il a participeaux brimades qui ont ete trop loin et notamment aux coups portes ;

- le demandeur a declare lui-meme etre tout à fait capable de harcelementmoral, meme intensivement, à l'encontre d'autres personnes, ce quiindique que son comportement n'etait pas un acte isole ;

- un tel comportement pose serieusement question sur la personnalite dudemandeur, ses normes et ses valeurs, son cercle d'amis et le cadre danslequel il evolue ;

- il existe de serieuses raisons de craindre que le demandeur, s'il etaitremis en liberte, commette de nouveaux faits, se soustraie à l'action dela justice, tente de faire disparaitre des preuves ou entre en collusionavec des tiers ;

- infliger une mesure provisoire de placement est dans l'interet meme dudemandeur mineur ;

- une autre mesure est momentanement insuffisante pour la protection de lasecurite publique et du demandeur lui-meme.

Ainsi, par une motivation suffisante et sans violer la presomptiond'innocence, le juge d'appel a legalement justifie la mesure de gardeprovisoire en institution communautaire fermee qu'il considere etre dansl'interet du demandeur.

Dans cette mesure, le grief ne peut etre accueilli.

Sur le deuxieme grief :

8. Le grief invoque la violation de l'article 37, S: 2quater, dernieralinea, de la loi du 8 avril 1965 : la cour qui decide que l'instructionsur les circonstances precises et la participation de chacun est toujoursen cours, ne constate pas que l'atteinte à la vie ou à la sante d'unepersonne est etablie ni que le demandeur a un comportementexceptionnellement grave ; le harcelement moral ne constitue pas une telleatteinte ; ainsi, la cour d'appel ne justifie pas legalement sa decision.

9. L'article 37, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 8 avril 1965 dispose quele tribunal de la jeunesse peut ordonner à l'egard des personnes qui luisont deferees, des mesures de garde, de preservation et d'education.

L'article 37, S: 2quater, dernier alinea, de cette meme loi, dispose quela mesure de placement en institution communautaire publique ne peut etreprise qu'à l'egard d'une personne agee de douze à quatorze ans qui agravement porte atteinte à la vie ou à la sante d'une personne et dontle comportement est particulierement dangereux. Il resulte des termes decette disposition qu'il doit etre satisfait à ces conditions lorsque,statuant sur le fond au terme de l'instruction, le juge de la jeunessesouhaite infliger une telle mesure de placement.

L'article 52, alinea 1er, de la loi du 8 avril 1965 dispose que, pendantla duree d'une procedure tendant à l'application d'une des mesures deprotection des mineurs, le tribunal de la jeunesse prend provisoirement àl'egard du mineur concerne les mesures de garde necessaires.

L'article 52quater de ladite loi dispose qu'en ce qui concerne lespersonnes poursuivies du chef d'un fait qualifie infraction commis avantl'age de dix-huit ans accomplis, le juge ou le tribunal de la jeunesse,selon le cas, peut, dans les cas vises aux articles 52, 52bis et 52ter, àsavoir egalement à l'egard d'un jeune ayant atteint l'age de douze ans,ordonner une mesure de garde provisoire pour une periode de trois mois auplus, en regime educatif ferme, organise par les instances competentes.Cette decision ne peut etre prise que s'il existe des indices serieux deculpabilite, si l'interesse a un comportement dangereux pour lui-meme oupour autrui et s'il existe de serieuses raisons de craindre quel'interesse, s'il etait remis en liberte, commette de nouveaux crimes oudelits, se soustraie à l'action de la justice, tente de faire disparaitredes preuves ou entre en collusion avec des tiers.

Dans la mesure ou il soutient que meme une mesure provisoire de garde nepeut etre prise qu'à l'egard d'une personne agee de douze à quatorze ansqui a gravement porte atteinte à la vie ou à la sante d'une personne etdont le comportement est particulierement dangereux, ainsi que le prevoitl'article 37, S:2quater, dernier alinea, de la loi du 8 avril 1965 pour lamesure pouvant etre prise apres examen sur le fond, le grief manque endroit.

10. Par les motifs enonces en reponse au premier grief, le juge d'appeljustifie legalement sa decision de prendre une mesure provisoire deplacement en section fermee d'une institution communautaire.

Dans cette mesure, le grief ne peut etre accueilli.

11. Dans la mesure ou il critique, pour le surplus, l'appreciationsouveraine en fait du juge d'appel, le grief est irrecevable.

(...)

Par ces motifs,

* * La Cour

* * Rejette le pourvoi ;

* Condamne le demandeur aux frais.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Maffei, les conseillers LucVan hoogenbemt, Filip Van Volsem, Antoine Lievens et Erwin Francis, etprononce en audience publique du seize octobre deux mille douze par lepresident de section Paul Maffei, en presence de l'avocat general PatrickDuinslaeger, avec l'assistance du greffier delegue Veronique Kosynsky.

Traduction etablie sous le controle du president de section Frederic Closeet transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le president de section,

16 octobre 2012 P.12.1584.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.12.1584.N
Date de la décision : 16/10/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 10/02/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-10-16;p.12.1584.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award