Cour de cassation de Belgique
Arret
1339
NDEG C.11.0159.F
M. D.,
demanderesse en cassation,
representee par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, rue de Loxum, 25, ou il est fait electionde domicile,
contre
G. B.,
defendeur en cassation,
represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 novembre 2010par la cour d'appel de Liege.
Le 3 septembre 2012, l'avocat general Andre Henkes a depose desconclusions au greffe.
Le conseiller Sylviane Velu a fait rapport et l'avocat general AndreHenkes a ete entendu en ses conclusions.
II. Les moyens de cassation
Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente trois moyens.
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Pour considerer comme etabli que le defendeur a fait à la demanderesseune avance de 150.000 francs, l'arret ne se borne pas à constaterl'existence d'un commencement de preuve par ecrit, consistant dans un« protocole d'accord signe par les parties le 3 fevrier 1998, aux termesduquel le prix de vente de la part indivise dans l'immeuble de H. [etait]ramene à 3.200.000 francs au lieu des 3.500.000 francs convenus audepart », et à relater le contenu du proces-verbal etabli le 8 mars 1999par le notaire D. B.
L'arret releve en outre, par adoption des motifs du premier juge, d'unepart, que la demanderesse « n'a pas reagi in tempore non suspecto » àce proces-verbal, qui relatait l'accord des parties sur ladite diminutionde prix, en precisant qu'elle etait justifiee par le fait que lademanderesse « avait besoin d'une avance de 150.000 francs que [ledefendeur] a accepte de lui consentir », et, d'autre part, quel'explication differente de cette reduction de prix, presentee par lademanderesse, n'etait « guere plausible ».
L'arret, qui constate ainsi l'existence de presomptions completant lecommencement de preuve par ecrit produit par le defendeur, justifielegalement sa decision.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le deuxieme moyen :
Sans etre critique, l'arret admet que le defendeur detient une creancecontre la demanderesse en raison des travaux d'agrandissement qu'il arealises de ses seuls deniers dans l'immeuble de H. qui appartenait enindivision aux parties, dans le cadre de la liquidation du regime deseparation de biens pure et simple qui les liait.
Le moyen ne soutient pas que l'arret violerait le principe general dudroit suivant lequel nul ne peut s'enrichir sans cause aux depens d'autruien fondant sur ce principe la reconnaissance d'une creance du defendeur.
Il fait grief à l'arret de considerer que, des lors que la demanderesse« s'est enrichie du montant de ces travaux [...], il y a lieud'actualiser la creance [du defendeur] compte tenu du prix de venteobtenu ».
Le moyen ne precise pas en quoi l'arret violerait ainsi les articles 1466à 1469 du Code civil.
Pour le surplus, la creance nee de l'enrichissement sans cause est unecreance de valeur et non une creance de somme, à laquelle seules'applique l'article 1895 du Code civil.
En procedant à la reevaluation de la creance du defendeur, l'arret neviole pas cette disposition et ne meconnait pas le principe general dudroit precite.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le troisieme moyen :
Dans ses conclusions de synthese d'appel, le defendeur a fait valoir quesi, compte tenu des elements qu'il exposait, « non seulement unereduction de l'indemnite de procedure ne se justifi[ait] pas mais [il]serait meme en droit de postuler l'application de l'indemnite maximaleprevue », il a, « pour faire bref proces, [maintenu] sa demande decondamnation à une indemnite de procedure de 5.000 euros, tant en[premiere] instance qu'en appel ».
En condamnant la demanderesse à des depens d'appel liquides à 9.000euros, l'arret adjuge au defendeur plus qu'il n'a demande et viole, deslors, l'article 1138, 2DEG, du Code judiciaire.
Le moyen est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arret attaque en tant qu'il liquide les depens d'appel ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;
Condamne la demanderesse aux deux tiers des depens et en reserve lesurplus pour qu'il soit statue sur celui-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Mons.
Les depens taxes à la somme de cinq cent dix euros quatre-vingt-deuxcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de centseptante-cinq euros vingt-sept centimes envers la partie defenderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Sylviane Velu, Alain Simon et Gustave Steffens, et prononce en audiencepublique du vingt-sept septembre deux mille douze par le presidentChristian Storck, en presence de l'avocat general Andre Henkes, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | G. Steffens | A. Simon |
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| S. Velu | D. Batsele | Chr. Storck |
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27 SEPTEMBRE 2012 C.11.0159.F/4