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15/06/2012 | BELGIQUE | N°C.11.0682.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 15 juin 2012, C.11.0682.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

400



NDEG C.11.0682.F

1. G. C. et

2. J. W.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

L. S.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er mars 2011par la cour d'appel de Liege.

Le 22 mai 2012, l'avocat general Andre Henkes a d

epose des conclusions augreffe.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport et l'avocat generalAndre Henkes a ete entendu...

Cour de cassation de Belgique

Arret

400

NDEG C.11.0682.F

1. G. C. et

2. J. W.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

L. S.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 1er mars 2011par la cour d'appel de Liege.

Le 22 mai 2012, l'avocat general Andre Henkes a depose des conclusions augreffe.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport et l'avocat generalAndre Henkes a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

Les demandeurs presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 1315 du Code civil ;

- articles 870, 875bis et 962 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret dit non fonde l'appel des demandeurs et les deboute de leurdemande de designation d'un expert charge de determiner les causes etl'etendue du prejudice cause à leur immeuble par l'humidite provenant del'immeuble du defendeur pour tous ses motifs reputes ici integralementreproduits et, specialement, que :

« (Les demandeurs), sur la base de l'article 544 du Code civil,sollicitent de la cour d'appel d'ordonner une expertise afin de rechercherles causes des degradations à leur immeuble et de dire si cesdegradations sont à mettre en relation avec l'etat de l'immeuble (dudefendeur).

Ils deposent devant la cour d'appel un second rapport de leur architectedu 18 aout 2009.

En ce qui concerne les degradations qui ont ete causees par des rats, (lesdemandeurs) incriminent l'etat de l'immeuble (du defendeur) : sacs posesà meme le sol, absence de fenetres, un jour de 20 cm sous les portes ...

La cour d'appel fait siens les judicieux motifs du premier juge enoncesdans la decision dont appel par lesquels il considere qu'il n'est paspossible de constater que l'etat des biens (du defendeur) se trouve àl'origine de la presence de rats.

Le second rapport de l'architecte (des demandeurs) n'apporte aucun elementnouveau quant à ce ; il ne fait d'ailleurs etat dans ce second rapportd'aucune constatation quant à la presence de rats ou de degradations duesà des rats dans l'immeuble (des demandeurs).

Quant à d'autres degradations dont l'immeuble des (demandeurs) seraitl'objet, les constatations de cet architecte concernent un problemed'humidite puisqu'elles ont trait au reseau de collecte des eaux de pluiedes batiments qui jouxtent le pignon de la maison des (demandeurs)(absence de finition, solins en zinc manquants, tuiles tombees, gouttieresinachevees ...), à l'etat de la gouttiere incomplete du cote gauche de lacour et presentant une pente d'ecoulement vers la mac,onnerie du pignonsans presence d'un quelconque tuyau de descente, l'incurvation de lagouttiere en bas de la toiture en tuiles du cote droit de la cour avecaccumulation d'eau contre la mac,onnerie du pignon de la maison des(demandeurs), tuiles manquantes en toiture generant des infiltrationsprovoquant de l'humidite dans la mac,onnerie separative des deux fonds.

S'il est indeniable au vu des photographies deposees que l'immeuble (dudefendeur) n'est pas en bon etat, il n'en demeure pas moins que les(demandeurs) ne deposent aucune photographie, aucun devis de reparationsqui attesteraient d'un dommage subi par leur immeuble de ce chef (autresque les degats dus aux rats dont question ci-dessus).

Le devis dont ils font grand cas date de 2002 et concerne les reparationsdes degats causes à leur immeuble par les rats et non par l'etat devetuste de l'immeuble (du defendeur).

Les constatations de leur architecte ne suffisent pas à justifier que lamesure d'instruction demandee, laquelle va retarder l'issue du litigedejà ancien et augmenter les frais de la procedure, soit ordonnee.

Il y a lieu de debouter les (demandeurs) de leur demande dont le bien-fonde n'est pas demontre ».

Griefs

Les demandeurs soutenaient, sur la base des constatations de leurarchitecte figurant dans son rapport du 17 aout 2009, qu'ils subissaientun dommage decoulant d'infiltrations d'eau « provoqu(ant) (...) del'humidite dans la mac,onnerie separative des deux fonds » et exposaientque ces infiltrations resultaient du delabrement du reseau de collecte deseaux de pluie du batiment du defendeur, en faisant valoir « que lagouttiere est toujours incomplete et presente une pente d'ecoulementdescendant vers la mac,onnerie du pignon sans presence d'un quelconquetuyau de descente relie aux egouts », que « l'incurvation de lagouttiere en bas des tuiles » provoquait egalement une accumulation d'eaucontre la mac,onnerie du pignon de leur immeuble et qu'un versant de latoiture etait recouvert de tuiles « dont un grand nombre sont casseeset/ou manquantes, generant des infiltrations à l'interieur de laconstruction ».

Ils sollicitaient, avant dire droit, la designation d'un expert charge« de rechercher les causes des degradations causees à (leur) immeuble(...), de dire si ces degradations (etaient) à mettre en relation avecl'etat de l'immeuble de leur voisin, d'evaluer (...) le cout des remisesen etat necessaires (...) et tous prejudices generalement quelconquessubis ou à subir par eux (...) ».

L'arret deboute les demandeurs de leur demande d'expertise relative audommage qu'ils alleguent aux motifs que ceux-ci « ne deposent aucunephotographie, aucun devis de reparations qui attesteraient d'un dommagesubi par leur immeuble de ce chef (...), que le devis dont ils font grandcas date de 2002 et concerne les reparations des degats causes à leurimmeuble par les rats et non par l'etat de vetuste de l'immeuble (dudefendeur) (et que) les constatations de leur architecte ne suffisent pasà justifier que la mesure d'instruction demandee, laquelle va retarderl'issue du litige dejà ancien et augmenter les frais de la procedure,soit ordonnee ».

S'il est constant que le juge du fond, en vertu des articles 875bis et 962du Code judiciaire, apprecie souverainement s'il y a lieu d'ordonner ounon une mesure d'expertise et qu'il peut refuser cette mesure s'il estimeque la preuve contraire du fait allegue est rapportee ou s'il considereque la preuve de ce fait n'est pas utile à la manifestation de la verite,encore ne peut-il meconnaitre le droit de principe du demandeur d'apporterla preuve de ce qu'il allegue au moyen de la mesure d'instruction qu'ilsollicite.

Premiere branche

Meconnait ce droit le juge qui deboute le demandeur de sa demande auxmotifs que le fait que le demandeur offre de prouver n'est pas dejàatteste par ailleurs.

L'arret, qui deboute les demandeurs de leur demande d'expertise relativeau dommage en considerant que les demandeurs n'etablissent pas l'existencede ce dommage aux motifs qu'ils « ne deposent aucune photographie, aucundevis de reparations qui attesteraient d'un dommage subi par leur immeublede ce chef (...), que le devis dont ils font grand cas date de 2002 etconcerne les reparations des degats causes à leur immeuble par les ratset non par l'etat de vetuste de l'immeuble (du defendeur) (et que) lesconstatations de leur architecte ne suffisent pas à justifier que lamesure d'instruction demandee (...) soit ordonnee », n'est, partant, paslegalement justifie (violation de l'article 1315 du Code civil et desarticles 870, 875bis et 962 du Code judiciaire).

Deuxieme branche

Meconnait ce droit le juge qui, sans constater que la mesure solliciteeest inutile à la manifestation de la verite, deboute le demandeur de sademande pour des motifs lies à l'anciennete du litige ou au cout de laprocedure d'expertise.

L'arret, qui deboute les demandeurs de leur demande d'expertise aux motifsque cette mesure « va retarder l'issue du litige dejà ancien etaugmenter les frais de la procedure », n'est, partant, pas legalementjustifie (violation de l'article 1315 du Code civil et des articles 870,875bis et 962 du Code judiciaire).

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 962, alinea 1er, du Code judiciaire, le juge peut,en vue de la solution d'un litige porte devant lui ou en cas de menaceobjective et actuelle d'un litige, charger des experts de proceder à desconstatations ou de donner un avis d'ordre technique.

Si, en vertu de cette disposition, le juge peut refuser d'ordonner uneexpertise lorsque le demandeur ne fonde sa demande d'expertise sur aucunelement rendant vraisemblables les faits avances à l'appui de sa demande,il ne peut cependant refuser toute expertise ou mesure d'instructionalternative en presence de pareil element, sous peine de meconnaitre ledroit du demandeur d'apporter la preuve des faits qu'il allegue.

L'arret releve que les constatations du second rapport de l'architecte desdemandeurs « concernent un probleme d'humidite puisqu'elles ont trait aureseau de collecte des eaux de pluie des batiments qui jouxtent le pignonde la maison des [demandeurs] (absence de finition, solins en zincmanquants, tuiles tombees, gouttieres inachevees ...), à l'etat de lagouttiere incomplete du cote gauche de la cour et presentant une pented'ecoulement vers la mac,onnerie du pignon sans presence d'un quelconquetuyau de descente, l'incurvation de la gouttiere en bas de la toiture entuiles du cote droit de la cour avec accumulation en toiture generant desinfiltrations provoquant de l'humidite dans la mac,onnerie separative desdeux fonds ». Il refuse ensuite d'ordonner une expertise judiciaire,comme toute autre mesure d'instruction alternative, aux motifs que lesdemandeurs « ne deposent aucune photographie, aucun devis de reparationsqui attesteraient d'un dommage subi à leur immeuble [du chefd'infiltrations] » et que « les constatations de leur architecte nesuffisent pas à justifier que la mesure d'instruction demandee, laquelleva retarder l'issue du litige dejà ancien et augmenter les frais de laprocedure, soit ordonnee ».

L'arret qui, sur la base de ces considerations, decide « de debouter [lesdemandeurs] de leur demande dont le bien-fonde n'est pas demontre »,meconnait le droit de ceux-ci d'apporter la preuve des faits qu'ilsalleguent à l'appui de leur demande en reparation d'infiltrationsaffectant leur immeuble en provenance de l'immeuble voisin du defendeur.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers DidierBatsele, Martine Regout, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononce enaudience publique du quinze juin deux mille douze par le president desection Albert Fettweis, en presence de l'avocat general Andre Henkes,avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
|-----------------+------------+-------------|
| M. Regout | D. Batsele | A. Fettweis |
+--------------------------------------------+

15 JUIN 2012 C.11.0682.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.11.0682.F
Date de la décision : 15/06/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-06-15;c.11.0682.f ?
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