Cour de cassation de Belgique
Arret
1492
NDEG C.09.0271.F
J. K.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,
contre
1. VILLE DE HUY, representee par son college communal, dont les bureauxsont etablis à Huy, en l'hotel de ville, Grand'Place, 1,
defenderesse en cassation,
representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 36,ou il est fait election de domicile,
2. J. M.,
defendeur en cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 8 octobre2008 par le tribunal de premiere instance de Huy, statuant en degred'appel.
Par ordonnance du 19 avril 2012, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme chambre.
Le president Christian Storck a fait rapport.
L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.
II. Les moyens de cassation
Le demandeur presente trois moyens libelles dans les termes suivants :
Premier moyen
Dispositions legales violees
- articles 1349, 1353, 1382 et 1383 du Code civil ;
- article 149 de la Constitution.
Decisions et motifs critiques
Le jugement attaque, statuant sur l'action introduite par le demandeurcontre la defenderesse aux fins de la voir condamner à lui payer la sommede 18.690,46 euros majoree des interets et des depens, decide, parreformation du jugement entrepris du 8 septembre 2005, que laresponsabilite de l'accident incombe à la fois au sieur N., chauffeur auservice du demandeur, et à la premiere defenderesse, par tous ses motifsconsideres ici comme integralement reproduits et plus particulierement parles motifs, repris sous l'intitule « Objet de la cause et antecedents »,que :
« Le 25 septembre 2001 vers 10 heures 30, un des chauffeurs employes par(le demandeur) circulait à Huy, rue ..., au volant d'un camion tractantune remorque sur laquelle se trouvait une excavatrice ;
Ce chauffeur declare que, lorsqu'il est arrive à hauteur du nDEG 46, ils'est deporte legerement vers la droite pour eviter un vehicule stationneà gauche, qu'il a alors entendu un bruit et, apres s'etre arrete, aconstate que la cabine de l'excavatrice qu'il transportait avait etearrachee par une branche d'arbre qui surplombait la chaussee ;
Il resulte des constatations effectuees par les verbalisateurs depechessur place dans le cadre de l'information penale ouverte à la suite desfaits, des elements produits aux debats et des mesures d'instructioneffectuees par le tribunal de police, saisi de la demande d'indemnisation(du demandeur), que :
- la souche de l'arbre dont une branche a heurte l'excavatrice (dudemandeur) avait ete plantee depuis des decennies dans la haie del'immeuble dont est proprietaire (le defendeur) à l'endroit de l'accidenten bordure de la chaussee ;
- la partie de l'arbre surplombant la chaussee atteignait une hauteur de3,92 metres ;
- le vehicule tracte par le chauffeur employe par (le demandeur)atteignait, en raison de la presence de l'excavatrice, une hauteur de 4metres ;
- des le 25 mars 2001, (le defendeur) avait signale au service des travauxpublics de la (defenderesse) que l'arbre litigieux commenc,ait à gener lacirculation et qu'apres l'abattage par ces services (parce qu'il n'osaitpas l'entreprendre seul), il etait dispose à ce que tout soit abandonnedans son pre et à se charger du nettoyage ;
- le chauffeur du camion a declare qu'au moment des faits, il circulait àune vitesse de l'ordre de 10 à 15 kilometres à l'heure et que lapresence de l'arbre n'avait pas attire son attention lorsqu'il est arriveà l'endroit de l'accident », et sous l'intitule « Discussion », que :
« C'est (...) à bon droit et par de justes motifs que le premier juge aconsidere que la responsabilite de l'accident incombait à la fois auchauffeur du camion et à la (defenderesse) ;
Toutefois, il y a lieu de considerer que la plus grande part de cetteresponsabilite incombe au chauffeur du camion, etant observe :
- que les faits se sont produits en plein jour et que l'obstacle constituepar la branche d'arbre surplombant l'accotement etait parfaitementvisible ;
- que, si le chauffeur avait circule à pas d'homme en deviant sur ladroite, il aurait frole le feuillage et evite ainsi que la branche d'arbrearrache la cabine de l'excavatrice qu'il transportait ;
Eu egard à la gravite des fautes respectives commises, le tribunal estimedevoir mettre à charge [du demandeur] deux tiers de la responsabilite, letiers restant etant delaisse à la (defenderesse) »,
et, s'il s'approprie les motifs du premier juge, que :
« L'examen de la photographie prise par les verbalisateurs revele que lepoint d'impact de la cabine de l'excavatrice avec la branche d'arbre setrouve à peu pres à la limite de la chaussee et de l'accotement ;
Lorsqu'il a ete entendu par les verbalisants, monsieur N. a declare :`Arrive à hauteur du nDEG 46 de la rue ..., j'ai vu une camionnette enstationnement sur ma gauche ; pour l'eviter, je me suis legerement deportesur ma droite. J'ai alors entendu un bruit. Je me suis directement arreteet j'ai constate que la cabine de l'excavatrice etait arrachee. J'ai alorsremarque que j'avais touche une branche d'arbre' ;
Lorsqu'il est entendu sous la foi du serment, monsieur N., qui est leprepose du demandeur, ne fait plus allusion à un quelconque deport maisfait etat d'une vitesse de 10 à 15 kilometres à l'heure ;
Il precise : `La presence de cet arbre n'avait pas attire mon attention. Il y a des arbres un peu partout mais ils sont generalement elagues demaniere à ne pas gener la circulation' ;
Discussion
Quant à la responsabilite du sieur N.
Monsieur N. circule pour compte de son employeur au volant d'un camiontractant une excavatrice posee sur un plateau ;
L'excavatrice se trouve à une hauteur de 4 metres, cette valeurcorrespondant à l'addition des hauteurs de l'excavatrice et du plateausur lequel elle est fixee ;
Ainsi que le revele la photographie prise par les verbalisateurs, monsieurN., qui circule à l'extreme droite de la chaussee et empiete peut-etrequelque peu sur l'accotement pour croiser un vehicule en stationnement, setrouve confronte à une vegetation abondante provenant de frenes bordantla chaussee ;
Etant confronte à cet obstacle, monsieur N. devait faire preuve de laplus extreme prudence, soit en s'ecartant autant que possible du borddroit de la chaussee, soit en circulant à pas d'homme et en s'assurantque la cabine de l'excavatrice ne touche pas les nombreuses branchesd'arbre qui empietent sur la chaussee ;
Il est manifeste que monsieur N. circulait au moment des faits à unevitesse inappropriee en fonction de ces circonstances et qu'il s'estàventure' dans cette vegetation sans prendre de precaution particuliere ;
S'il avait circule à pas d'homme, à une vitesse n'excedant pas 4 ou 5kilometres par heure, il aurait ete en mesure d'immobiliser son engin surplace et d'eviter en tout cas que la cabine fut arrachee sous l'effet duchoc ».
Griefs
Premiere branche
Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a soutenu qu'aucune relationcausale n'existait entre la faute - contestee - de son chauffeurconsistant à avoir roule à une vitesse inappropriee et l'accident, etentre cette faute et le dommage, en soutenant :
« Que le choc n'aurait pu etre evite meme si le prepose du [demandeur]avait circule à la vitesse suggeree par le tribunal de police de cinqkilometres à l'heure au lieu de dix kilometres à l'heure ;
Que, pour rappel, le choc est survenu entre la cabine de la grue tracteepar le prepose du (demandeur) et une branche situee à 3,92 metresau-dessus de la chaussee, soit en infraction avec le reglement communalprescrivant d'elaguer toutes branches à moins de 4,5 metres au-dessus dela chaussee, branches au demeurant masquees par un epais feuillage ;
Que le prepose du (demandeur) n'a donc pu enregistrer le choc qu'apres quecelui-ci fut survenu (à) son arriere, de sorte que le choc ne pouvait,quelle que soit la vitesse à laquelle circulait le vehicule, etre evite ;
(...) (Qu')on ne peut considerer que la faute, quod non, du prepose du(demandeur) ait pu avoir une influence, quelle qu'elle soit, sur lemontant du dommage ;
Qu'un calcul demontre (...) qu'à une vitesse de dix kilometres àl'heure, la vitesse d'arret est de 6,36 metres, tandis qu'à la vitesse decinq kilometres à l'heure preconisee par le tribunal de police, ladistance d'arret est de 3,16 metres ; que cette distance de 3,16 metresest largement superieure à la largeur de la cabine qui, stoppee net sursa partie haute par la branche d'arbre, alors que le reste du train duvehicule (tracteur, remorque, excavatrice soigneusement attachee à laremorque) et le bas de la cabine continuaient d'avancer de 3,16 metres,devait inevitablement se trouver arrachee de son support ».
Le jugement attaque, qui decide que le chauffeur du demandeur a commis unefaute ayant contribue au dommage en circulant à une vitesse inappropriee,ce qui explique qu'il n'ait pu immobiliser son engin sur place et eviterl'arrachage de la cabine sous l'effet du choc, ne rencontre pas ce moyendu demandeur fonde sur la distance d'arret et les specificites du train duvehicule, dont il deduisait l'absence de toute influence de la vitesseretenue sur l'accident et sur le dommage.
Il n'est, partant, pas regulierement motive (violation de l'article 149 dela Constitution) et ne permet pas à la Cour d'exercer son controle sur lalegalite de la decision au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil,qui n'autorisent le juge à mettre une part de responsabilite à charge del'auteur d'une faute et de son commettant que lorsque cette faute est enlien causal avec le dommage dont la reparation est demandee (violation del'article 149 de la Constitution et, par voie de consequence, des articles1382 et 1383 du Code civil).
Deuxieme branche
Le jugement attaque constate que l'obstacle qui a heurte l'excavatriceetait une branche d'arbre et que la partie de l'arbre surplombant lachaussee atteignait une hauteur de 3,92 metres tandis que le vehiculeatteignait une hauteur de 4 metres. En decidant que, si le chauffeur avaitcircule à pas d'homme, il aurait frole le feuillage et evite l'arrachagede la cabine, le jugement attaque deduit des faits constates par lui desconsequences qui ne sont susceptibles, sur leur fondement, d'aucunejustification des lors que la vitesse du camion n'est pas de nature àmodifier la hauteur de la branche. Il viole, partant, la notion legale depresomption de l'homme (articles 1349 et 1353 du Code civil) et, par voiede consequence, la notion de faute (articles 1382 et 1383 du meme code).
Troisieme branche
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il ne s'approprie pas les motifsdu premier juge et que le motif critique par la deuxieme branche du moyenne concerne pas la faute mais le partage de responsabilite, le jugementattaque ne contient aucun motif justifiant sa decision de confirmer lejugement entrepris en ce qu'il avait decide que la responsabilite del'accident incombait à la fois au chauffeur du demandeur et à ladefenderesse.
Il ne rencontre des lors pas la defense du demandeur qui, dans sesconclusions d'appel, contestait que le sieur N. eut commis une faute. Iln'est, partant, pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution) et ne permet pas à la Cour d'exercer son controle sur lanotion legale de faute (violation de l'article 149 de la Constitution et,par voie de consequence, des articles 1382 et 1383 du Code civil).
Deuxieme moyen
Dispositions legales violees
Articles 1349, 1353, 1382 et 1383 du Code civil
Decisions et motifs critiques
Le jugement attaque, statuant sur l'action introduite par le demandeurcontre la defenderesse aux fins de la voir condamner à lui payer la sommede 18.690,46 euros majoree des interets et des depens, decide, parreformation du jugement entrepris du 8 septembre 2005, que laresponsabilite de l'accident incombe à la fois au sieur N., chauffeur auservice du demandeur, et à la premiere defenderesse, par tous ses motifsconsideres ici comme integralement reproduits et plus particulierement auxmotifs que :
« La plus grande part de cette responsabilite incombe au chauffeur ducamion, etant observe :
- que les faits se sont produits en plein jour et que l'obstacle constituepar la branche d'arbre surplombant l'accotement etait parfaitementvisible ;
- que, si le chauffeur avait circule à pas d'homme en deviant sur ladroite, il aurait frole le feuillage et evite ainsi que la branche d'arbrearrache la cabine de l'excavatrice qu'il transportait ;
Eu egard à la gravite des fautes respectives commises, le tribunal estimedevoir mettre à charge du demandeur (...) deux tiers de laresponsabilite, le tiers restant etant delaisse à la (defenderesse) ».
Griefs
Le jugement attaque constate que l'obstacle qui a heurte l'excavatriceetait une branche d'arbre et que la partie de l'arbre surplombant lachaussee atteignait une hauteur de 3,92 metres tandis que le vehiculeatteignait une hauteur de 4 metres. En decidant que, si le chauffeur avaitcircule à pas d'homme, il aurait frole le feuillage et evite l'arrachagede la cabine, le jugement deduit des faits constates par lui desconsequences qui ne sont susceptibles, sur leur fondement, d'aucunejustification des lors que la vitesse du camion n'est pas de nature àmodifier la hauteur de la branche. Il viole, partant, la notion legale depresomption de l'homme (articles 1349 et 1353 du Code civil) et, par voiede consequence, la notion de faute (articles 1382 et 1383 du meme code).
Troisieme moyen
Dispositions legales violees
- article 1384, alinea 1er, du Code civil ;
- article 1138, 2DEG, du Code judiciaire et principe dispositif qu'ilconsacre ;
- article 149 de la Constitution ;
- principe general du droit relatif au respect des droits de la defense.
Decisions et motifs critiques
Le jugement attaque confirme le jugement entrepris du 22 mars 2007 qui amis le defendeur hors de cause et partage en consequence la responsabilitede l'accident entre le demandeur et la defenderesse, delaissant audemandeur les deux tiers de son dommage et le condamnant à payer lesdepens d'appel du defendeur, par tous ses motifs consideres ici commeintegralement reproduits et plus particulierement aux motifs que :
« En vertu du reglement general de police, une autorisation etait requisepour permettre aux particuliers d'effectuer des travaux au niveau d'unevoie publique ; (le defendeur) avait sollicite in tempore non suspectoaupres de la [defenderesse], mais sans succes, l'abattage de l'arbre dontune branche surplombait le domaine public »
et, s'il s'approprie les motifs du premier juge, que :
« Il resulte des constatations de l'expert G. que le tronc de l'arbrelitigieux empiete sur le domaine public depuis plusieurs decennies ;
La (defenderesse) ne revendique pas la propriete de l'arbre mais en amanifestement pris possession ;
Considerant qu'en raison des amenagements successifs de la voirie,l'assiette meme de cet arbre s'est retrouvee sur le domaine public, ilappartenait à la (defenderesse), sur la base des obligations quis'imposent à elle en application de l'article 135 de la loi communale eten sa qualite de gardienne d'une chose complexe affectee d'un vice, deprendre les mesures appropriees pour faire elaguer ou abattre cet arbre(...) ;
La responsabilite (du defendeur) n'est par contre pas etablie àsuffisance de droit ;
Le (defendeur) soutient avoir le 25 mars 2001 et donc in tempore nonsuspecto sollicite de (la defenderesse) l'abattage de l'arbre litigieux ;
(...) Le (defendeur), dont la bonne foi est presumee, peut etre crulorsqu'il soutient avoir effectivement sollicite cet abattage ;
En tout etat de cause, une eventuelle infraction de sa part au reglementcommunal serait en l'espece sans relation avec la survenance de l'accidentdans la mesure ou, compte tenu de la localisation de l'arbre, il nepouvait proceder de sa propre autorite à l'abattage mais devaitsolliciter l'autorisation de la (defenderesse) ; independamment del'existence de la lettre de 2001, la (defenderesse) ne peutraisonnablement soutenir qu'elle etait dans l'ignorance de l'existence decet arbre susceptible de causer par son developpement sur le domainepublic un danger pour les usagers de la voie publique ;
Le reglement communal impose en tout etat de cause à l'autoritecommunale, `en cas d'infraction à ce reglement ou aux arretes pris enexecution de celui-ci, lorsque le moindre retard pourrait occasionner undanger, [de proceder d'office], aux frais du contrevenant, à l'executiondes mesures que celui-ci reste en defaut d'executer' (article 290 dureglement communal de la [defenderesse] en vigueur à la date del'accident) ;
Il appartenait donc en toute hypothese à la (defenderesse), à laquellela loi impose d'assurer la securite de passage en n'ouvrant à lacirculation que des voies suffisamment sures, de prendre les mesuresnecessaires pour eviter l'accident ».
Griefs
Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a conclu que :
« La responsabilite du (defendeur) est recherchee sur pied de l'article1384, alinea 1er, du Code Civil, soit en qualite de gardien de l'arbrelitigieux ;
(...) Cette base legale ne necessite pas que la faute soit etablie àcharge du gardien ; ainsi que l'avait rappele tres justement le tribunalde police dans sa decision du 8 septembre 2005, `cette disposition(article 1384, alinea 1er) demeure applicable nonobstant la cause du viceet partant le fait qu'il soit ne d'une cause etrangere ou par le fait d'untiers' ».
Premiere branche
En vertu de l'article 1384, alinea 1er, du Code civil, lorsqu'il estetabli que le dommage trouve sa cause dans le vice de la chose, celui quien a la garde est presume irrefragablement responsable dudit dommage. Legardien ne peut se liberer en prouvant qu'il n'a pas commis de faute ouque le vice de la chose a pour origine le fait d'un tiers ou de lavictime. La bonne foi du gardien est un element indifferent. Le gardien nepeut se liberer qu'en prouvant que, non pas le vice de la chose, mais ledommage est du exclusivement à une cause etrangere.
Il s'en deduit que le juge ne peut decharger le gardien d'une chosevicieuse en liaison avec un accident de la responsabilite qui pese sur luipour des motifs qui tiennent à la faute de la victime lorsqu'il neconstate pas que cette faute est la cause exclusive du dommage ou desmotifs qui tiennent à la faute d'un tiers lorsqu'elle n'est pas distinctedu vice de la chose et seule cause du dommage.
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il admet que le defendeur etait legardien d'une chose atteinte d'un vice, à savoir l'arbre dont il est leproprietaire et dont la partie surplombant la chaussee atteignait 3,92metres et constituait un obstacle pour la circulation, et que ce vice estau moins en partie à l'origine de l'accident et du dommage, le jugementattaque, qui decharge le defendeur de sa responsabilite fondee surl'article 1384, alinea 1er, du Code civil par les motifs repris au moyen,n'est pas legalement justifie (violation de l'article 1384, alinea 1er, duCode civil).
Deuxieme branche
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il ne statue pas sur laresponsabilite du defendeur en tant qu'elle etait recherchee sur la basede l'article 1384, alinea 1er, du Code civil, en s'abstenant d'examiner sile defendeur etait le gardien de l'arbre et si cet arbre etait atteintd'un vice en relation causale avec l'accident, le jugement attaque omet destatuer sur chose demandee et viole, partant, l'article 1138, 3DEG, duCode judiciaire.
Troisieme branche
S'il doit etre lu en ce sens qu'il deboute le demandeur de son actioncontre le defendeur en tant qu'elle etait fondee sur l'article 1384,alinea 1er, du Code civil, le jugement attaque, qui ne rencontre paraucune consideration les conclusions du demandeur selon lesquelles laresponsabilite du defendeur etait engagee sur la base de l'article 1384,alinea 1er, du Code civil, n'est pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution) et ne permet pas à la Cour d'exercerson controle sur les conditions d'application de l'article 1384, alinea1er, du Code civil (violation de l'article 149 de la Constitution et, parvoie de consequence, de l'article 1384, alinea 1er, du Code civil).
Quatrieme branche
Dans ses conclusions d'appel, le defendeur n'a pas conteste etre legardien de l'arbre au sens de l'article 1384, alinea 1er, du Code civil.
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il decide que seule ladefenderesse etait gardienne de l'arbre à l'exclusion du defendeur, lejugement attaque eleve une contestation dont les conclusions des partiesavaient exclu l'existence en violation de l'article 1138, 2DEG, du Codecivil et du principe dispositif qu'il consacre, et meconnait les droits dedefense du demandeur, qui n'a pas ete amene à conclure sur toutes lescirconstances de fait dont pouvait se deduire la qualite de gardien dudefendeur et sur la possibilite, pour plusieurs sujets de droit, d'etrecogardiens d'une meme chose (violation du principe general du droit viseau moyen).
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la troisieme branche :
En enonc,ant « que c'est [...] à bon droit et par de justes motifs quele premier juge a considere que la responsabilite de l'accident incombaità la fois au chauffeur [du demandeur] et à la [defenderesse] », lejugement attaque s'approprie les motifs par lesquels le jugement entreprisdu 8 septembre 2005 avait decide que ce chauffeur avait commis une fauteen « circulant au moment des faits à une vitesse inappropriee ».
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la premiere branche :
En considerant que, « si le chauffeur [du demandeur] avait circule au pasd'homme en deviant sur la droite, il aurait frole le feuillage et eviteainsi que la branche d'arbre arrache la cabine de l'excavatrice qu'iltransportait », le jugement attaque repond aux conclusions du demandeurcontestant qu'il existat un lien causal entre la vitesse inappropriee àlaquelle circulait ce chauffeur et le dommage, et permet à la Courd'exercer son controle.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la deuxieme branche :
Les presomptions constituent un mode de preuve d'un fait inconnu.
Les articles 1349 et 1353 du Code civil, qui reglent ce mode de preuve,sont etrangers à l'appreciation que le juge porte sur l'existence d'unefaute.
La violation pretendue des articles 1382 et 1383 du Code civil est pour lesurplus tout entiere deduite de celle, vainement alleguee, des autresdispositions legales visees au moyen, en cette branche.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Sur le deuxieme moyen :
Comme il a ete dit en reponse à la deuxieme branche du premier moyen, lespresomptions constituent un mode de preuve d'un fait inconnu et lesarticles 1349 et 1353 du Code civil sont etrangers à l'appreciation quele juge porte sur l'existence d'une faute.
La violation pretendue des articles 1382 et 1383 du Code civil est pour lesurplus tout entiere deduite de celle, vainement alleguee, des autresdispositions legales visees au moyen.
Celui-ci ne peut etre accueilli.
Sur le troisieme moyen :
Quant aux trois premieres branches reunies :
S'appropriant les motifs du jugement entrepris du 22 mars 2007, lejugement attaque considere, d'une part, « qu'en raison des amenagementssuccessifs de la voirie, l'assiette meme de [l']arbre [litigieux] s'estretrouvee sur le domaine public », de sorte qu'« il appartenait à la[defenderesse], sur la base des obligations qui s'imposent à elle [...]en sa qualite de gardienne d'une chose complexe affectee d'un vice, deprendre les mesures appropriees pour faire elaguer ou abattre cetarbre ».
Le jugement attaque considere, d'autre part, qu'« en vertu du reglementde police, une autorisation etait requise pour permettre aux particuliersd'effectuer des travaux au niveau d'une voirie publique » et que « [ledefendeur] avait sollicite in tempore non suspecto aupres de [ladefenderesse], mais sans succes, l'abattage de l'arbre dont une branchesurplombait le domaine public ».
Il suit de ces motifs qu'aux yeux des juges d'appel, seule ladefenderesse, à l'exclusion du defendeur, avait, au sens de l'article1384, alinea 1er, du Code civil, la garde de l'arbre litigieux.
Le jugement attaque, qui procede à l'examen auquel l'invitaient lesconclusions du demandeur et repond à celles-ci soutenant que le defendeuretait le gardien de l'arbre, motive regulierement et justifie legalementsa decision de mettre le defendeur hors de cause.
Le moyen, en ces branches, ne peut etre accueilli.
Quant à la quatrieme branche :
Dans ses conclusions d'appel, le defendeur soutenait, d'une part, qu'aumoment des faits, il n'y avait pas moyen de determiner qui, de lui ou dela defenderesse, etait proprietaire de l'arbre et, d'autre part, en toutetat de cause, qu'en vertu de son reglement general de police, ladefenderesse devait autoriser l'abattage de l'arbre.
En considerant qu'au moment des faits, le defendeur n'avait pas la qualitede gardien de l'arbre litigieux, le jugement attaque n'eleve pas unecontestation dont les conclusions des parties excluaient l'existence.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux depens.
Les depens taxes à la somme de cinq cent quatre-vingt-neuf eurossoixante-quatre centimes envers la partie demanderesse et à la somme decent vingt-deux euros quarante-six centimes envers la premiere partiedefenderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Sylviane Velu, Alain Simon et Mireille Delange, et prononce en audiencepublique du quatorze mai deux mille douze par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general delegue Michel Palumbo, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
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| P. De Wadripont | M. Delange | A. Simon |
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| S. Velu | D. Batsele | Chr. Storck |
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14 MAI 2012 C.09.0271.F/1