La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/03/2012 | BELGIQUE | N°C.09.0634.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 mars 2012, C.09.0634.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0634.N

Organisation Benelux de la propriete intellectuelle,

Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,

contre

F. V.,

Me Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 septembre2009 par la cour d'appel de Bruxelles.

Par arret du 5 novembre 2010, la Cour a repondu au moyen en ses premiereet deuxieme branches et a pose trois questions prejudicielles à la Courde justice Benelux.


Par arret du 6 octobre 2011 (affaire A/2010/8), la Cour de justice Beneluxa repondu à ces questions.

Le conseil...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0634.N

Organisation Benelux de la propriete intellectuelle,

Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,

contre

F. V.,

Me Paul Lefebvre, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 septembre2009 par la cour d'appel de Bruxelles.

Par arret du 5 novembre 2010, la Cour a repondu au moyen en ses premiereet deuxieme branches et a pose trois questions prejudicielles à la Courde justice Benelux.

Par arret du 6 octobre 2011 (affaire A/2010/8), la Cour de justice Beneluxa repondu à ces questions.

Le conseiller Geert Jocque a fait rapport.

L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

II. Le moyen de cassation

Dans la requete en cassation, la demanderesse presente un moyen libelledans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* article 149 de la Constitution ;

* articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil ;

* article 1138, 2DEG, du Code judiciaire ;

* articles 2.11.1, b et c, et 2.11.3 de la Convention Benelux en matierede propriete intellectuelle (ci-apres C.B.P.I.), approuvee par la loidu 22 mars 2006 (Moniteur belge du 26 avril 2006, p. 21866) ;

* principe dispositif - autonomie des parties au proces (principegeneral du droit) ;

* principe general du droit relatif au respect des droits de la defense.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque :

* rec,oit la demande et la declare fondee ;

* annule la decision entreprise refusant l'enregistrement de la marquedeposee par la demanderesse au registre des marques Benelux ;

* ordonne à l'Office Benelux de la propriete intellectuelle (ci-apres :l'Office) d'enregistrer au registre des marques Benelux la marquedeposee sous le numero 1147562 pour les biens et services indiquesdans le depot des classes 16, 41 et 44 ;

* condamne l'Office à payer les depens (fixes à 1.386 euros pour [ladefenderesse] et à zero euro pour [la demanderesse]).

L'arret (...) rejette la fin de non-recevoir opposee par la demanderesseau recours, aux motifs suivants :

« 27. Sur la fin de non-recevoir opposee au recours, deduite de ce que ladefenderesse n'a pas fait usage de la possibilite qui lui etait offerte des'opposer à la decision de refus provisoire, il y a lieu de considerer cequi suit.

28. Dans sa decision de refus provisoire, l'Office a invoque deux motifsde refus absolus, à savoir le caractere descriptif du signe depose et,`en outre', son defaut de caractere distinctif. Il est ajoute que larepresentation graphique choisie ne supprime pas le defaut de caracteredistinctif.

29. Il y a lieu de deduire de l'article 2.11.3 de la C.B.P.I. que laprocedure en deux etapes, consistant en la communication prealable d'unrefus provisoire avant la prise d'une decision definitive, vise àfavoriser l'echange d'arguments dans le delai fixe.

Cela suppose, toutefois, que `l'indication des motifs' mentionne àl'article 2.11.3 ne se limite pas à un renvoi aux articles conventionnelset à la reproduction succincte de leur contenu mais, au contraire, qu'unraisonnement soit developpe qui mene à la conclusion de l'existence d'undes motifs de refus.

Si l'Office affirme qu'un signe est descriptif et/ou est depourvu decaractere distinctif, le deposant peut, ainsi, s'attendre à lacommunication des elements de fait et des circonstances justifiant cetteconclusion. Ce n'est qu'à cette condition que des arguments peuvent etreechanges sur ce point. Par ailleurs, ce n'est qu'à cette condition qu'ilpeut en ressortir que l'autorite des marques a realise l'examen qui luiincombe au regard de tout motif de refus qu'elle invoque.

Le passage de l'article 2.11.3 qui fait etat de `l'indication des motifs'ne peut donc etre compris qu'en ce sens que la decision de refusprovisoire doit etre motivee.

30. En l'espece, l'Office a communique la decision, mais les motifs qu'ila indiques laissent incertains les elements qui l'ont amene à affirmerque le signe depose est descriptif, qu'il est depourvu de caracteredistinctif et que sa representation graphique ne change rien à cetteconclusion.

Ainsi, à defaut de motivation, la defenderesse ne pouvait pas presenterd'arguments refutant un raisonnement.

31. Des lors, meme si la demanderesse etait suivie dans son point de vuequ'un recours contre une decision definitive ne peut etre admis si ladecision provisoire n'a pas ete critiquee, il ne peut qu'etre constate enl'espece qu'à defaut de motivation, la defenderesse n'a pas eu la faculted'en critiquer le contenu.

La fin de non-recevoir est rejetee ».

Griefs

(...)

Troisieme branche

Violation des articles 2.11.1, b et c, et 2.11.3 de la C.B.P.I.

3.1. En vertu de l'article 2.11.1 de la C.B.P.I. :

« L'Office refuse d'enregistrer une marque lorsqu'il considere que :

a. (...)

b. la marque est depourvue de caractere distinctif ;

c. la marque est composee exclusivement de signes ou d'indicationspouvant servir, dans le commerce, pour designer l'espece, la qualite,la quantite, la destination, la valeur, la provenance geographique oul'epoque de la production du produit ou de la prestation du service,ou d'autres caracteristiques de ceux-ci ;

d. (...)

e. (...) ».

La C.B.P.I. enumere, ainsi, cinq motifs pouvant amener l'Office à refuserl'enregistrement d'une marque.

3.2. En vertu de l'article 2.11.3 de la C.B.P.I., l'Office informe ledeposant sans delai et par ecrit de son intention de refuserl'enregistrement (...), lui en indique les motifs et lui donne la faculted'y repondre dans un delai à fixer par reglement d'execution.

3.3. Les « motifs », qui doivent ainsi, conformement à l'article 2.11.3de la C.B.P.I., etre indiques dans la decision de refus provisoire, sontles motifs qui fondent le refus conformement à l'article 2.11.1 de laC.B.P.I..

3.4. En l'espece, la decision de refus provisoire du 20 decembre 2007mentionne clairement sur quels motifs specifiques l'Office fonde le refus,à savoir les motifs mentionnes à l'article 2.11.1, b et c, de laC.B.P.I. Ces motifs sont precises dans la decision de la manieresuivante :

« (1) Le signe bodystyling est descriptif. Il peut, en effet, servir àdesigner les produits et services cites dans les classes 16, 41 et 44.

(2) Le signe est, en outre, depourvu de tout caractere distinctif. Cedefaut de caractere distinctif du signe n'est pas supprime par larepresentation graphique choisie ».

3.5 En indiquant, ainsi, les motifs de refus et en les precisant parrapport au cas concret, la decision de refus (provisoire) a satisfait àla condition conventionnelle « d'indication des motifs » (article 2.11.3de la C.B.P.I.) auxquels la defenderesse pouvait repondre, si cela luisemblait utile ou souhaitable. En ce qui concerne le second motif indique- le defaut de caractere distinctif - il y a, par ailleurs, lieu desouligner que ce motif de refus decoule necessairement du premier motifindique et precise, soit le caractere descriptif de la marque (Cour deJustice, 12 fevrier 2004, affaire C-363/99, KPN/BMB, considerants 67 et85, et affaire C-265/00, Campina/BMB, considerant 18 ; Cass., 22 octobre2009, C.08.0411.N, OBPI/Janssen Pharmaceutica).

3.6 En considerant que l'Office etait tenu d'indiquer dans la decision derefus provisoire encore plus d'elements (de fait) et de circonstances queceux qu'il mentionnait (voir supra, nDEG 3.5) et de developper davantageun « raisonnement », (...), l'arret ajoute à tort une condition à lanotion conventionnelle d'« indication des motifs » exiges par l'article2.11.3 de la C.B.P.I. et il viole, ainsi, cette notion et cettedisposition, ainsi que l'article 2.11.1, b et c, de la C.B.P.I.

III. La decision de la Cour

Quant à la troisieme branche :

1. L'article 2.11, alinea 3, de la Convention Benelux en matiere depropriete intellectuelle (ci-apres C.B.P.I.) dispose que l'Office informele deposant sans delai et par ecrit de son intention de refuserl'enregistrement en tout ou en partie, lui en indique les motifs et luidonne la faculte d'y repondre dans un delai à fixer par reglementd'execution.

L'article 2.11, alinea 4, de la C.B.P.I. dispose que si les objections del'Office contre l'enregistrement n'ont pas ete levees dans le delaiimparti, l'enregistrement de la marque est refuse en tout ou en partie.L'Office informe le deposant sans delai et par ecrit en indiquant lesmotifs du refus et en mentionnant la voie de recours contre cettedecision, visee à l'article 2.12.

En vertu de l'article 2.12, alinea 1er, de la C.B.P.I., le deposant peut,dans les deux mois qui suivent la communication visee à l'article 2.11,alinea 4, introduire devant la Cour d'appel de Bruxelles, le Gerechtshofde La Haye ou la Cour d'appel de Luxembourg une requete tendant à obtenirun ordre d'enregistrement de la marque.

2. Dans son arret rendu le 6 octobre 2011 dans l'affaire A/2010/8, la Courde justice Benelux a dit pour droit que l'article 2.11, alinea 3, de laC.B.P.I. doit etre interprete en ce sens que le deposant ne perd pas ledroit de recours contre la decision de refus du fait qu'il n'a pas formuled'objections à l'intention de refuser l'enregistrement ou tout ou enpartie.

Selon la Cour de justice Benelux, il ressort de l'article 2.12, alinea1er, de la C.B.P.I. que le deposant possede inconditionnellement le droit,apres la communication de la decision definitive de refus de l'Office,d'introduire devant la cour d'appel de Bruxelles, le Gerechtshof de LaHaye ou la cour d'appel de Luxembourg une requete tendant à obtenir unordre d'enregistrement de la marque, de sorte que le droit de recours dudeposant n'est pas conditionne par l'attitude adoptee apres lacommunication de la decision de refus provisoire.

3. L'arret attaque considere que les motifs indiques par l'Office dans lacommunication de son intention de refuser l'enregistrement, en tout ou enpartie, laissent incertains les elements qui l'ont amene à affirmer quele signe depose est descriptif, qu'il est depourvu de caractere distinctifet que sa representation graphique ne change rien à cette conclusion, desorte qu'à defaut de motivation, la defenderesse n'a pas eu lapossibilite d'en critiquer le contenu.

Sur cette base, il rejette la fin de non-recevoir opposee par lademanderesse à l'action de la defenderesse et deduite de ce qu'elle n'apas fait usage de la possibilite offerte par les articles 2.11, alinea 3,de la C.B.P.I. et 1.15, alinea 1er, du reglement d'execution, de repondreà la decision de refus provisoire.

4. Sur la base des motifs substitues au considerant 2, cette decision estlegalement justifiee.

Fut-il fonde, le moyen, en cette branche, ne saurait entrainer lacassation et, à defaut d'interet, est irrecevable.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, president, lesconseillers Alain Smetryns, Koen Mestdagh, Geert Jocque et Filip VanVolsem, et prononce en audience publique du huit mars deux mille douze parle president de section Albert Fettweis, en presence de l'avocat generalGuy Dubrulle, avec l'assistance du greffier Frank Adriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Sylviane Velu ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le conseiller,

8 mars 2012 C.09.0634.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.09.0634.N
Date de la décision : 08/03/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-03-08;c.09.0634.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award