Cour de cassation de Belgique
Arret
* NDEG P.10.1850.N
1. W.G.,
2. VAN DEN B.,
* demandeurs,
* Me Frederik Vanden Bogaerde, avocat au barreau de Furnes.
* contre
1. V.G.,
2. S.J.,
defendeurs,
Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation et Me Stefan DeVleeschouwer, avocat au barreau de Bruxelles.
I. la procedure devant la Cour
V. Les pourvois sont diriges contre l'arret rendu le 27 octobre 2010 parla cour d'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
VI. Les demandeur presentent cinq moyens dans un memoire annexe aupresent arret, en copie certifiee conforme.
VII. Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
VIII. L'avocat general Marc Timperman a conclu.
II. la decision de la Cour
(...)
Sur le troisieme moyen
6. Le moyen invoque la violation des articles 195 du Code d'instructioncriminelle, 337 et 463 du Code des impots sur les revenus 1992, ainsi quela violation des droits de la defense : l'arret refuse, à tort, d'ecarterdu dossier repressif les documents soumis au secret professionnel enmatiere fiscale utilises par les defendeurs pour justifier leurdeclaration; en refusant d'ecarter ces documents produits de maniereselective par les defendeurs, l'arret viole, en outre, les droits dedefense des demandeurs.
7. Il ne ressort pas des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard queles demandeurs ont invoque devant les juges d'appel que les defendeurs ontfait une selection des pieces les plus incriminantes selon eux issues desdossiers fiscaux des demandeurs et ont, ainsi, viole leurs droits dedefense.
Dans cette mesure, le moyen est nouveau et, des lors, irrecevable.
8. L'article 337, alinea 1er, du Code des impots sur les revenus 1992dispose que celui qui intervient, à quelque titre que ce soit, dansl'application des lois fiscales ou qui a acces dans les bureaux del'administration des contributions directes, est tenu de garder, en dehorsde l'exercice de ses fonctions, le secret le plus absolu au sujet de toutce dont il a eu connaissance par suite de l'execution de sa mission.
9. Les fonctionnaires de l'administration fiscale qui deposent une plainteaupres des autorites judiciaires ou de police ou se constituent partiecivile devant le juge du chef d'infractions qui ne sont pas d'ordre fiscaldont ils auraient ete victimes dans l'exercice de leurs fonctions,n'interviennent pas en dehors de l'exercice de leurs fonctions au sens del'article 337, alinea 1er, du Code des impots sur les revenus 1992. Ilspeuvent ainsi, sans violer le secret professionnel en matiere fiscale,fournir aux autorites judiciaires ou de police ou au juge tous lesrenseignements et documents pertinents qui concernent ces infractions.
Fonde sur un soutenement juridique different, le moyen manque en droit.
10. L'arret (...) considere notamment que :
- ni l'article 337 du Code des impots sur les revenus 1992 ni l'article458 du Code penal n'empechent les fonctionnaires de l'administrationfiscale de declarer des delits ou crimes qui ne sont pas d'ordre fiscaldont ils ont eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions, memes'ils ont ete eux-memes victimes de ces infractions;
- le secret professionnel impose aux fonctionnaires de l'administrationfiscale n'empeche pas qu'au cours de l'instruction judiciaire ou devant lejuge du fond, ils fassent usage de documents faisant l'objet del'infraction incriminee, qui ont servi ou ont ete utilises pour commettrel'infraction ou qui peuvent eclairer des circonstances de fait danslesquelles l'infraction a ete commise.
Ainsi, l'arret justifie legalement sa decision.
Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le quatrieme moyen
11. Le moyen invoque la violation de l'article 442bis du Code penal :l'arret declare, à tort, les demandeurs coupables du chef de harcelement;les actes poses et les documents transmis dans le cadre de pratiques dedefense dans une procedure fiscale ne visent pas une personne enparticulier mais l'autorite administrative en tant que telle et nepeuvent, des lors, affecter la tranquillite d'une personne et, partant,constituer un harcelement.
12. L'article 442bis, alinea 1er, du Code penal punit quiconque auraharcele une personne alors qu'il savait ou aurait du savoir qu'ilaffecterait gravement par ce comportement la tranquillite de la personnevisee.
Cette disposition punit ainsi quiconque porte gravement atteinte par desagissements incessants ou repetitifs à l'environnement personnel d'autruien l'importunant de maniere irritante, alors qu'il connaissait ou auraitdu connaitre les consequences de son comportement.
13. La circonstance qu'un citoyen est en conflit avec une autoriten'exclut pas qu'il puisse affecter gravement, par son comportement, latranquillite des membres du personnel de cette autorite.
Fonde sur un soutenement juridique different, le moyen manque en droit.
14. Le juge decide en fait si la tranquillite d'une personne determineeest gravement affectee par le comportement de l'auteur. La Cour examineuniquement si le juge ne deduit pas des faits qu'il a constates desconsequences qui leur sont etrangeres ou qu'ils ne sauraient justifier.
15. L'arret (p.6) constate souverainement que les demandeurs ont, demaniere continue et incessante, adresse et envoye des reproches et desaccusations imagines et sans pertinence au defendeurs, meme à leuradresse privee, tant au moyen de courriels que de lettres ordinaires ourecommandees à la poste et tant dans le cadre de procedures de controle,d'imposition ou de reclamation fiscales qu'en dehors de celles-ci. Estainsi legalement justifiee la decision selon laquelle les actes poses dansle contexte d'une defense assuree dans une procedure fiscale constituentun harcelement lorsque la tranquillite des fonctionnaires concernes estgravement affectee par des attaques personnelles depassant largement leslimites des pratiques de defense dans une procedure fiscale et que laprevention A est etablie à charge des demandeurs pour la periode allantdu 7 fevrier 2003 au 24 decembre 2007 inclus.
Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.
(...)
Le controle d'office
19. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.
Par ces motifs,
* * La Cour
* * Rejette les pourvois ;
* Condamne les demandeurs aux frais de leur pourvoi.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Etienne Goethals, les conseillers PaulMaffei, Koen Mestdagh, Filip Van Volsem et Peter Hoet, et prononce enaudience publique du sept juin deux mille onze par le president de sectionEtienne Goethals, en presence de l'avocat general Marc Timperman, avecl'assistance du greffier delegue Veronique Kosynsky.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.
Le greffier, Le conseiller,
* 07 JUIN 2011 P.10.1850.N/1