La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2011 | BELGIQUE | N°S.10.0043.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 14 mars 2011, S.10.0043.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.10.0043.F

AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Driekoningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile,

contre

A. A.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 18 avril 2008par la cour du travail de

Liege.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport.

Le procureur general Jean-Franc,ois Leclercq a conclu....

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.10.0043.F

AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Gand, Driekoningenstraat, 3, ouil est fait election de domicile,

contre

A. A.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 18 avril 2008par la cour du travail de Liege.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport.

Le procureur general Jean-Franc,ois Leclercq a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 24, en particulier alinea 2, 72, en particulier alineas 1er et3, et, pour autant que de besoin, 25 de la loi du 10 avril 1971 sur lesaccidents du travail ;

- articles 12, en particulier alinea 1er, 13, 14, 807, 809 et, pour autantque de besoin, 17 et 18 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret declare l'appel de la demanderesse non fonde et confirme parconsequent le jugement dont appel. Il decide qu'il appartenait à lademanderesse de prendre toute mesure pour introduire dans le delai legalsa demande en revision, l'introduction d'une telle demande par voiereconventionnelle etant en l'espece irrecevable. Cette decision de la courdu travail est fondee sur les considerations qui suivent :

« Fondement

Par citation du 23 septembre 2005, [le defendeur] a expose etre enincapacite temporaire de travail du 24 fevrier 2005 au 1er octobre 2005,et avoir subi une intervention neurochirurgicale lombaire en date du 23mai 2005, que son medecin conseil estimait etre les consequences del'accident du travail subi le 27 octobre 2000. Il a demande lacondamnation de [la demanderesse] à prendre en charge la perioded'incapacite temporaire de travail du 24 fevrier 2005 au 1er octobre 2005et les frais de l'intervention neurochirurgicale lombaire subie en date du23 mai 2005.

L'objet de la demande principale vise donc bien exclusivementl'application de l'article 25 de la loi du 10 avril 1971 et nonl'application de l'article 72 de ladite loi, et le complexe de faits à labase de la citation concerne bien exclusivement un etat d'incapacitetemporaire de travail du 24 fevrier 2005 au 1er octobre 2005 et uneintervention neurochirurgicale lombaire subie en date du 23 mai 2005 etnon une quelconque modification de l'etat d'incapacite permanentepartielle de travail [du defendeur].

Il ne s'agit manifestement pas d'une demande principale en revision.

[La demanderesse] elle-meme n'en est pas dupe, quoiqu'elle pretende,puisqu'elle situe elle-meme le debat, dans le cadre de l'evocation, sur leplan de l'application exclusive de l'article 25 de la loi du 10 avril1971.

Il appartenait des lors à [la demanderesse] de prendre toute mesure pourintroduire dans le delai legal sa demande en revision, l'introductiond'une telle demande par voie reconventionnelle etant en l'especeirrecevable.

L'appel n'est pas fonde.

Le jugement dont appel est confirme ».

Griefs

1.1. Aux termes de l'article 12, alinea 1er, du Code judiciaire, lademande en justice est introductive d'instance ou incidente.

En vertu de l'article 13 du Code judiciaire, la demande incidente consistedans toute demande formee au cours du proces et qui a pour objet, soit demodifier la demande originaire ou d'introduire des demandes nouvellesentre les parties, soit de faire entrer dans la cause des personnes quin'y avaient point ete appelees.

En vertu de l'article 14 du Code judiciaire, la demande reconventionnelleest la demande incidente formee par le defendeur et qui tend à faireprononcer une condamnation à charge du demandeur.

Conformement à l'article 809 du Code judiciaire, entre parties en cause,les demandes incidentes, comme une demande reconventionnelle, sont formeespar conclusions deposees au greffe et communiquees aux autres partiesainsi qu'il est dit aux articles 742 à 746 de ce code.

La disposition de l'article 807 du Code judiciaire, aux termes duquel unedemande dont le juge est saisi peut etre etendue ou modifiee si lesconclusions nouvelles, contradictoirement prises, sont fondees sur un faitou un acte invoque dans la citation (meme si leur qualification juridiqueest differente), n'est pas applicable à la demande incidente(reconventionnelle) introduite par le defendeur en premiere instance.

La demande reconventionnelle introduite en premiere instance estindependante de la demande principale et donc de la citation introductived'instance, de sorte que la recevabilite de cette demandereconventionnelle ne requiert pas qu'elle soit fondee sur un fait ou surun acte invoque dans la citation. La recevabilite de cette demandereconventionnelle n'est pas conditionnee par l'existence d'un lien entrel'objet de la demande principale et l'objet de la demandereconventionnelle introduite en premiere instance.

1.2. L'article 24, alinea 2, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidentsdu travail, dispose que, si l'incapacite est ou devient permanente, uneallocation annuelle de 100 p.c., calculee d'apres la remuneration de baseet le degre d'incapacite, remplace l'indemnite journaliere à dater dujour ou l'incapacite presente le caractere de la permanence. En vertu decet article, ce point de depart est constate par voie d'accord entreparties ou par une decision passee en force de chose jugee.

En vertu de l'article 72, alinea 1er, de la loi du 10 avril 1971, lademande en revision des indemnites, fondee sur une modification de laperte de capacite de travail de la victime ou de la necessite de l'aidereguliere d'une autre personne ou sur le deces de la victime du auxconsequences de l'accident, peut etre introduite dans les trois ans quisuivent la date de l'homologation ou de l'enterinement de l'accord entreles parties ou de la decision ou de la notification visee à l'article 24ou de la date de l'accident si l'incapacite temporaire de travail nedepasse pas sept jours et si l'entreprise d'assurances declare la victimeguerie sans incapacite permanente de travail.

L'article 72, alinea 3, de la loi du 10 avril 1971 dispose que l'action enrevision peut etre introduite par demande reconventionnelle jusqu'à lacloture des debats, par voie de conclusions deposees au greffe etcommuniquees aux autres parties. Selon cette disposition, à conditiond'etre introduite avant la cloture des debats, l'action en revision peutle cas echeant etre introduite par une demande reconventionnelle formuleeapres l'expiration du delai de revision fixe à l'article 72, alineas 1er,de cette loi. Le troisieme alinea de l'article 72 de la loi du 10 avril1971 n'exige pas que la demande principale soit une demande en revision ausens du premier alinea de cet article, pour que l'action en revisionpuisse etre introduite par demande reconventionnelle.

1. Il resulte des termes et du rapprochement des articles 12, 13, 14,807 et 809 du Code judiciaire et 72, alineas 1er et 3, de la loi du10 avril 1971 precites, qu'une demande reconventionnelle en revisionpeut etre introduite en premiere instance de maniere recevable apresl'expiration du delai de revision, à savoir jusqu'à la cloture desdebats, meme si la demande principale ne constitue pas une demande enrevision au sens de l'article 72 de la loi du 10 avril 1971.

2. Des constatations de [l'arret] et des pieces auxquelles [la] Cour peutavoir egard, il ressort que :

* le defendeur a ete la victime d'un accident du travail en date du 27octobre 2000 ;

* par accord-indemnite enterine par le Fonds des accidents du travail endate du 25 septembre 2002, il a ete reconnu un etat d'incapacitepermanente de travail au taux de 5 p.c. à partir du 1er janvier2002 ;

* par citation du 23 septembre 2005 devant le tribunal du travail deLiege, le defendeur a expose etre en incapacite temporaire de travaildu 24 fevrier 2005 au 1er octobre 2005, et avoir subi une interventionneurochirurgicale lombaire en date du 23 mai 2005, que son medecinconseil estimait etre les consequences de l'accident du travail subile 27 octobre 2000, et a demande la condamnation de la demanderesse àprendre en charge la periode d'incapacite temporaire de travail du 24fevrier 2005 au 1er octobre 2005, ainsi que les frais del'intervention neurochirurgicale lombaire subie le 23 mai 2005 ;

* au cours de l'expertise ordonnee par le tribunal du travail de Liegedans un jugement du 11 octobre 2005, le defendeur, invite à formulerses plaintes par ordre degressif d'importance, a signale qu'il ne seplaignait plus de rien et, sur interpellation de l'expert, a confirmeque cela constituait l'effet benefique de l'intervention chirurgicalelombaire du 23 mai 2005 ;

* par conclusions deposees au greffe du tribunal du travail de Liege le22 novembre 2006, la demanderesse a des lors introduit une demandereconventionnelle en revision devant ce tribunal.

[L'arret] considere qu'il appartenait à la demanderesse de prendre toutemesure pour introduire dans le delai legal sa demande en revision etdeclare l'introduction d'une telle demande par voie reconventionnelleirrecevable.

Il resulte du rapprochement des articles 12, 13, 14, 807 et 809 du Codejudiciaire que la demande reconventionnelle introduite en premiereinstance est independante de la demande principale (de sorte qu'elle nedoit pas concerner l'objet de la demande principale et ne doit pas etrefondee sur un fait ou un acte invoque dans la citation) et des termes del'article 72, alinea 3, de la loi du 10 avril 1971 qu'une demandereconventionnelle en revision peut etre introduite de maniere recevableapres l'expiration du delai de revision, à savoir jusqu'à la cloture desdebats, meme si la demande principale ne constitue pas une demande enrevision au sens de l'article 72 de la loi du 10 avril 1971. La decisionde [l'arret] qui juge irrecevable la demande reconventionnelle en revisionde la demanderesse, pour autant qu'elle repose sur le motif que, l'objetde la demande principale visant bien exclusivement l'application del'article 25 de la loi du 10 avril 1971 et non l'application de l'article72 de ladite loi, et le complexe de faits à la base de la citationconcernant bien exclusivement un etat d'incapacite temporaire de travaildu 24 fevrier 2005 au 1er octobre 2005, ainsi qu'une interventionneurochirurgicale lombaire subie le 23 mai 2005, et non une quelconquemodification de l'etat d'incapacite permanente partielle de travail dudefendeur, « il ne s'agit manifestement pas d'une demande principale enrevision », viole les articles precites.

Le fait que la demanderesse situe elle-meme le debat, dans le cadre del'evocation, c'est-à-dire dans le cadre de la demande principale dudefendeur, sur le plan de l'application exclusive de l'article 25 de laloi du 10 avril 1971 n'empeche pas qu'en vertu de l'article 72, alinea 3,de la loi du 10 avril 1971, elle peut introduire en premiere instance unedemande reconventionnelle en revision du degre d'incapacite permanentefixe en application de l'article 24 de cette loi, meme si le delai derevision a dejà expire et si la demande principale ne constitue pas unedemande en revision. La decision de [l'arret] selon laquelle la demandereconventionnelle en revision de la demanderesse est irrecevable viole lesarticles precites pour autant qu'elle repose sur le motif que « [lademanderesse] elle-meme n'en est pas dupe, quoi qu'elle pretende,puisqu'elle situe elle-meme le debat, dans le cadre de l'evocation, sur leplan de l'application exclusive de l'article 25 de la loi du 10 avril1971 ».

III. La decision de la Cour

L'article 72, alinea 3, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents dutravail dispose que l'action en revision peut etre introduite par demandereconventionnelle jusqu'à la cloture des debats, par voie de conclusionsdeposees au greffe et communiquees aux autres parties.

Il resulte des travaux preparatoires de cette loi qu'une demandereconventionnelle en revision ne peut etre introduite au-delà du delaifixe par l'article 72, alinea 1er, que contre une partie qui a, elleaussi, introduit une demande en revision.

Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens ;

Les depens taxes à la somme de cent dix-huit euros deux centimes enversla partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Mathieu, les conseillers ChristineMatray, Martine Regout, Gustave Steffens et Mireille Delange, et prononceen audience publique du quatorze mars deux mille onze par le president desection Paul Mathieu, en presence du procureur general Jean-Franc,oisLeclercq, avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

+------------------------------------------+
| M-J. Massart | M. Delange | G. Steffens |
|--------------+-------------+-------------|
| M. Regout | Chr. Matray | P. Mathieu |
+------------------------------------------+

14 MARS 2011 S.10.0043.F/9


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.10.0043.F
Date de la décision : 14/03/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2011-03-14;s.10.0043.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award