Cour de cassation de Belgique
Arret
* NDEG P.10.0814.N
L'INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL,
* demandeur en retablissement,
* demandeur,
* Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,
contre
E. S.,
prevenue,
defenderesse.
I. la procedure devant la Cour
V. Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 31 mars 2010 par lacour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
VI. Le demandeur presente un moyen dans un memoire annexe au presentarret, en copie certifiee conforme.
VII. Le president de section Etienne Goethals a fait rapport.
VIII. L'avocat general delegue Paul Kenis a conclu.
II. la decision de la Cour
Sur le moyen :
(...)
Quant à la seconde branche :
3. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 149, 159de la Constitution, 4.2.24, S: 1er, 4.3.1, S: 1er, alinea 1er, 1DEG,4.4.10, S: 1er, alinea 1er, 4.4.11, 4.4.13, 4.4.20, 4.4.21, 6.1.41, S:1er, alinea 1er, 7.1.1 du Code flamand de l'amenagement du territoire,149, S: 1er, alinea 1er, 167 du Decret du Conseil flamand du 18 mai 1999portant organisation de l'amenagement du territoire, 112 du decret du 27mars 2009 adaptant et completant la politique d'amenagement du territoire,des autorisations et du maintien et 11, sub 4.1, de l'arrete royal relatifà la presentation et à la mise en oeuvre des projets de plans et desplans de secteur : en cas de violation des prescriptions relatives auxaffectations sans possibilite de regularisation de la constructionetrangere à la zone, l'administration est legalement tenue, enintroduisant l'action en reparation, de requerir la remise des lieux enleur etat initial, alors que l'execution de travaux de construction oud'adaptation suffisent clairement pour retablir l'amenagement local ; parconsequent, le controle de la legalite que le juge peut exercer sur lareparation envisagee, en application de l'article 159 de la Constitution,se limite à l'observation des conditions emises par l'article 6.1.41, S:1er, alinea 1er, du Code flamand de l'amenagement du territoire ;lorsqu'il apparait que les prescriptions relatives aux affectations ontete violees sans possibilite de regularisation de la constructionetrangere à la zone, le juge est tenu d'acceder à la demande dereparation, sauf s'il decide que l'administration a decide de manieremanifestement deraisonnable que l'execution de travaux de construction oud'adaptation ne suffit clairement pas pour retablir l'amenagement local ;les conclusions ont demontre qu'eriger un chalet en nouvelle constructionen zone agricole n'etait pas susceptible de beneficier d'une autorisationde regularisation et que la remise des lieux en leur etat initial par lademolition du chalet nouvellement construit etait la seule mesure dereparation possible dans les limites legales ; l'arret attaque omet derepondre aux conclusions selon lesquelles le demandeur avait uniquementune competence liee ; l'arret attaque ne pouvait legalement rejeter ladefense du demandeur selon laquelle, en raison de l'impossibilited'obtenir une autorisation pour la construction erigee illegalement enzone etrangere, il peut uniquement requerir la remise des lieux en leuretat initial, face à la totale inutilite de travaux d'adaptation, etqu'en raison de cette competence liee, il ne pouvait etre procede à uneappreciation judiciaire du caractere raisonnable de la mesure dereparation requise.
4. Aux termes de l'article 149, S: 1er, alinea 1er, du decret du Conseilflamand du 18 mai 1999 portant organisation de l'amenagement duterritoire, coordonne par l'article 6.1.41, S: 1er, alinea 1er, du Codeflamand de l'amenagement du territoire, l'action en reparation est engageedevant le juge penal dans le respect des modalites suivantes :
« 1DEG pour les delits constitues, ou constitues entre autres, d'actescontraires à un ordre de cessation ou contraires aux prescriptionsurbanistiques relatives aux affectations autorisees pour la zone, pourautant qu'il n'en ait pas ete deroge de maniere valable, les actionssuivantes sont requises :
a) soit la restauration de l'endroit dans son etat initial ou la cessationde l'utilisation contraire,
b) soit l'execution de travaux de construction ou d'adaptation, s'il a eteclairement etabli que cela suffit pour retablir l'amenagement local ;
2DEG pour les autres delits que ceux mentionnes au point 1DEG, le paiementd'une plus-value est requis, sauf si l'autorite instituant cette action enreparation demontre que cela porterait manifestement et de fac,ondisproportionnee prejudice à l'amenagement local, auquel casl'application d'une des mesures visees au point 1DEG est requise ».
5. Ces dispositions ne contiennent aucune presomption irrefragable suivantlaquelle, hormis la possibilite de travaux de construction oud'adaptation, il y a toujours atteinte à l'amenagement du territoire deslors que l'infraction consiste à avoir agi contrairement à desprescriptions d'affectation non sujettes à derogation. La disposition« pour autant qu'il n'en ait pas ete deroge de maniere valable » prevueà l'article 6.1.41, S: 1er, alinea 1er, 1DEG, du Code flamand del'amenagement du territoire n'implique pas que, meme lorsque laconstruction peut etre admise du point de vue du bon amenagement duterritoire, en cas d'impossibilite legale de regularisation, la remise deslieux en leur etat initial, à savoir la demolition, doive etre ordonnee.
Ordonner une mesure de reparation implique que l'infraction a porte àl'amenagement local une atteinte que la mesure vise à retablir.
Dans la mesure ou il se fonde sur l'hypothese que la demolition doitsystematiquement etre ordonnee en cas d'infraction non regularisable auxprescriptions d'affectation, nonobstant l'impact de la construction surl'amenagement du territoire, le moyen, en cette branche, manque en droit.
6. Conformement à l'article 1er du Premier Protocole additionnel à laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, le juge est tenu de verifier si la demande de l'inspecteururbaniste visant une certaine mesure de reparation, est exclusivementformulee dans le but d'un bon amenagement du territoire. Il ne peut donnersuite à la demande fondee sur des motifs etrangers à l'amenagement duterritoire ou sur une conception d'un amenagement du territoiremanifestement deraisonnable.
7. En accordant à l'epoque un permis de batir afin de transformer unlogement existant en zone etrangere sous certaines conditions et limites,l'administration a, de ce fait, laisse entendre par cette autorisationqu'il n'y avait en cet endroit aucune atteinte portee au bon amenagementdu territoire et que les affectations urbanistiques y etaient reunies.
Par consequent, pour apprecier le caractere manifestement raisonnable dela demande de reparation formulee par l'administration, le juge est tenu,avant de conclure raisonnablement à la reparation par la demolition, decomparer egalement l'impact sur l'amenagement du territoire et lesnuisances environnementales entre la situation illegale existante et lasituation autorisee par l'administration.
8. Les juges d'appel ont decide que :
- l'infraction se situe en zone agricole, à savoir dans une zone quin'est pas vulnerable du point de vue spatial ;
- la defenderesse a procede à la demolition de l'habitation existante età sa reconstruction d'une nouvelle habitation en bois en conservant leprofil et l'apparence d'un point de vue architectural, de sorte quel'habitation realisee correspond aux mesures et materiaux de finition dupermis d'urbanisme ;
- le permis auquel il est fait reference, a ete delivre par la deputationpermanente le 22 mai 2003 en vue de la transformation et del'agrandissement de l'habitation existante, à savoir un chalet en bois,situee en bordure de zone agricole. La motivation de la deputationpermanente etait que la demande pouvait etre accordee dans le sens d'unbon amenagement du territoire des lors que l'immeuble etait situe enbordure de zone agricole et s'integrait de maniere acceptable dans lepaysage ;
- lorsque les travaux de transformation ont debute, il a ete notammentconstate que l'ancien chalet contenait de l'amiante, l'architecte et lemaitre d'ouvrage ayant alors decide de le demolir et de le reconstruire,certes sans permis. La nouvelle construction a ete realisee sur lesfondations existantes ;
- l'ancien chalet etait bien dote d'un permis. Le permis delivre le 11juin 1981 par la deputation permanente n'avait jamais ete conteste et ledemandeur pretend, à tort, qu'il faut considerer que le chalet n'avaitpas de permis ;
- le Conseil superieur de la Politique de Reparation a delivre un avis nonconforme, fonde sur le fait que le demandeur n'avait pas apprecie l'impactenvironnemental et que, comme l'admet le demandeur, une solutionplanologique ne pouvait etre envisagee pour la parcelle litigieuse par un`GRSP' et `RVP' ;
- le demandeur ne tient pas compte de l'actuelle situation autorisee etn'apprecie pas l'impact environnemental entre la construction initialeautorisee et la reconstruction actuelle en infraction, alors qu'il est desurcroit constate que la reconstruction a garde les volumes existants ;
- la motivation du demandeur selon laquelle la construction ne sauraits'accorder au bon amenagement du territoire, purement et simplement parcequ'il ne s'agit pas d'un batiment necessaire à l'industrie agricole oupara-agricole, ni de l'habitation de l'exploitant, est contradictoire avecle permis du 22 mars 2003 qui enonce explicitement que, l'immeuble etantsitue en bordure de zone agricole et s'integrant de maniere acceptabledans le paysage, la construction peut etre acceptee du point de vue d'unbon amenagement du territoire ;
- la demande de reparation non modifiee du 14 septembre 2004 estmanifestement deraisonnable. En effet, elle est insuffisamment motiveed'un point de vue urbanistique des lors qu'elle omet de tenir compte del'impact environnemental de la situation preexistante autorisee et netient pas davantage compte de cette situation preexistante autorisee,partant meme de conceptions juridiques erronees, de sorte que la mesure dereparation demandee ne peut se fonder sur le dossier ou sur les motifsinvoques.
Les juges d'appel qui ont ainsi constate que la demande de reparation sefonde sur des motifs etrangers au bon amenagement du territoire ou sur uneconception d'un bon amenagement du territoire manifestement deraisonnable,ont repondu aux conclusions du demandeur et ont legalement justifie leurdecision.
Pour le surplus, le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
9. Pour le surplus, le moyen, en cette branche, critique des moyenssuperflus qui ne sauraient entrainer la cassation.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
Le controle d'office
10. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.
Par ces motifs,
* * La Cour
* * Rejette le pourvoi ;
* Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Etienne Goethals, les conseillers PaulMaffei, Luc Van hoogenbemt, Koen Mestdagh et Filip Van Volsem, et prononceen audience publique du onze janvier deux mille onze par le president desection Etienne Goethals, en presence de l'avocat general delegue PaulKenis, avec l'assistance du greffier Frank Adriaensen.
Traduction etablie sous le controle du president de section chevalier Jeande Codt et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
Le greffier, Le president de section,
* 11 JANVIER 2011 P.10.0814.N/1
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